Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Kassationshof in Strafsachen 6P.121/2001
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6P.121/2001/ROD

     C O U R   D E   C A S S A T I O N   P E N A L E
    *************************************************

                    21 septembre 2001

Composition de la Cour: M. Schubarth, Président,
M. Wiprächtiger et M. Kolly, Juges.  Greffier: M. Denys.
                     ______________

      Statuant sur le recours de droit public
                        formé par

X.________, représenté par Me André Gossin, avocat à
Moutier,

                         contre

l'arrêt rendu le 27 juin 2001 par la Cour pénale du Tri-
bunal cantonal jurassien dans la cause qui oppose le
recourant au Procureur général du canton du   J u r a;

  (procédure pénale; droit d'être entendu; arbitraire)

        Vu les pièces du dossier d'où ressortent
               les   f a i t s   suivants:

      A.-  Par jugement du 14 décembre 2000, le Tribunal
correctionnel du district de Delémont a reconnu
X.________ coupable de vols, respectivement tentative de
vol, dommages à la propriété, recel, faux dans les cer-
tificats, lésions corporelles simples et infraction à
la loi sur la circulation routière. Il l'a condamné à
vingt-quatre mois d'emprisonnement, peine complémentaire
à celle de deux mois d'emprisonnement avec sursis durant
trois ans prononcée par le Président I du Tribunal du
district de Delémont le 20 janvier 1998 et à celle de
quarante jours d'emprisonnement avec sursis durant deux
ans prononcée par le Tribunal correctionnel du district
de Delémont le 9 juin 1999. Il a en outre ordonné son
expulsion du territoire suisse pour huit ans.

      En bref, il en ressort que X.________ est impliqué
avec des compagnons dans plus d'une vingtaine de cam-
briolages.

      B.-  Par arrêt du 27 juin 2001, la Cour pénale du
Tribunal cantonal jurassien a écarté l'un des chefs
d'accusation de vol ainsi qu'un autre de dommages à la
propriété et a confirmé pour le surplus les infractions
retenues à l'encontre de X.________ en première instance.
Elle l'a condamné à vingt-quatre mois d'emprisonnement,
peine complémentaire à celles mentionnées plus haut.

      C.-  X.________ forme un recours de droit public au
Tribunal fédéral contre cet arrêt. Il conclut à son

annulation et sollicite par ailleurs l'assistance
judiciaire.

        C o n s i d é r a n t   e n   d r o i t :

      1.- a) Le recours de droit public au Tribunal
fédéral est ouvert contre une décision cantonale pour
violation des droits constitutionnels des citoyens (art.
84 al. 1 let. a OJ). Il n'est en revanche pas ouvert pour
se plaindre d'une violation du droit fédéral, qui peut
donner lieu à un pourvoi en nullité (art. 269 al. 1 PPF);
un tel grief ne peut donc pas être invoqué dans le cadre
d'un recours de droit public, qui est subsidiaire (art.
84 al. 2 OJ; art. 269 al. 2 PPF).

      b) En vertu de l'art. 90 al. 1 let. b OJ, l'acte de
recours doit, à peine d'irrecevabilité, contenir un expo-
sé succinct des droits constitutionnels ou des principes
juridiques violés et préciser en quoi consiste la viola-
tion. Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal
fédéral n'a donc pas à vérifier de lui-même si la déci-
sion attaquée est en tous points conforme au droit ou à
l'équité; il est lié par les moyens invoqués dans le
recours et peut se prononcer uniquement sur les griefs de
nature constitutionnelle que le recourant a non seulement
invoqués, mais suffisamment motivés (ATF 127 I 38 consid.
3c p. 43; 126 III 534 consid. 1b p. 536; 125 I 71 consid.
1c p. 76). Le Tribunal fédéral n'entre pas non plus en
matière sur les critiques de nature appellatoire (ATF 125
I 492 consid. 1b p. 495).

      2.-  Invoquant l'art. 29 al. 2 Cst., le recourant
se plaint d'une violation de son droit d'être entendu en
raison de l'insuffisance de la motivation de la décision
attaquée. Selon lui, la Cour pénale n'aurait pas justifié
pourquoi elle retenait la qualification de vol (art. 139
CP) et non de recel (art. 160 CP) pour la plupart des
actes reprochés et n'aurait ainsi pas répondu aux cri-
tiques contenues dans le recours cantonal.

      Sous l'angle constitutionnel, le droit d'être
entendu impose l'obligation pour le juge de motiver ses
décisions, afin que le justiciable puisse les comprendre
et exercer ses droits de recours à bon escient. Il suffit
cependant que le juge mentionne, au moins brièvement, les
motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa dé-
cision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre
compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connais-
sance de cause (ATF 126 I 97 consid. 2b p. 102/103; 125
II 369 consid. 2c p. 372; 124 V 180 consid. 1a p. 181;
121 I 54 consid. 2c p. 57).

      Après avoir confirmé les faits établis en première
instance, la Cour pénale a noté qu'il convenait d'exami-
ner quelle qualification juridique du vol ou du recel
entrait en ligne de compte. Elle a exposé les éléments
constitutifs du vol et a conclu que tant objectivement
que subjectivement, les actes qualifiés de vol en bande
par l'autorité de première instance l'avaient été à juste
titre, ce qui excluait pour ceux-ci le recel (cf. arrêt
attaqué, p. 13 et 14). Les différents actes tombant sous
le coup de la qualification de vol sont en outre énumérés
(cf. arrêt attaqué, p. 30-33) et ainsi clairement distin-
gués des deux actes pour lesquels la qualification de
recel a été retenue (cf. arrêt attaqué, p. 34). Quoique
succincte, la motivation est suffisante pour que l'on
puisse comprendre la décision rendue et les considéra-

tions essentielles qui ont guidé le choix des juges. Le
grief est donc infondé. Au surplus, savoir comme le
laisse entendre le recourant si c'est à juste titre que
la qualification de vol plutôt que celle de recel a été
retenue compte tenu des faits constatés est une question
qui relève de l'application du droit pénal, donc du droit
fédéral et non du droit constitutionnel et qui est irre-
cevable dans un recours de droit public (cf. supra,
consid. 1a).

      3.-  Le recourant invoque une violation de la pré-
somption d'innocence. Outre que l'argumentation qu'il
développe à ce propos sur plusieurs pages est appella-
toire, elle revient uniquement à contester la qualifi-
cation juridique de vol retenue pour la plupart des faits
reprochés à la place de celle de recel. Comme indiqué au
considérant précédent, une telle argumentation est irre-
cevable dans un recours de droit public.

      4.-  Le recourant se plaint d'une application arbi-
traire de l'art. 338 du Code de procédure pénale juras-
sien (CPP/JU), qui dispose que "lorsqu'une partie a seule
interjeté appel du jugement de première instance, soit au
pénal, soit au civil, ce jugement ne saurait être réformé
à son détriment, réserve faite des dispositions spéciales
relatives à l'appel du ministère public (art. 320) et aux
frais" (al. 1). "Sont considérés comme modification du
jugement au pénal en défaveur de l'inculpé non seulement
une peine plus sévère, mais aussi le prononcé d'une me-
sure de sûreté non retenue en première instance" (al. 2).

      Ce n'est que sous l'angle restreint de l'interdic-
tion de l'arbitraire que le Tribunal fédéral revoit
l'interprétation et l'application du droit cantonal de

procédure (ATF 121 I 1 consid. 2 p. 3). Il n'y a pas
arbitraire du seul fait qu'une autre interprétation de la
loi est possible, voire préférable (124 I 247 consid. 5
p. 250; 120 Ia 369 consid. 3a p. 373; 118 Ia 497 consid.
2a p. 499; 116 Ia 325 consid. 3a p. 326/327).

      A l'appui de son argumentation, le recourant se
prévaut de l'interdiction de la reformatio in pejus que
garantit la disposition cantonale invoquée et soutient
qu'en abandonnant deux infractions par rapport à l'auto-
rité de première instance, la Cour pénale devait néces-
sairement réduire la peine initialement infligée.

      L'interdiction de la reformatio in pejus n'est pas
une garantie de rang constitutionnel et ce sont les
règles cantonales de procédure qui peuvent l'admettre ou
la rejeter (cf. Piquerez, Procédure pénale suisse, Zurich
2000, no 3344, p. 720). Il ne ressort nullement de l'art.
338 CPP/JU que la Cour pénale aurait, en cas d'admission
partielle du recours, l'obligation de réduire la peine
fixée en première instance. Selon sa lettre, la règle
qu'il instaure interdit uniquement de prononcer "une
peine plus sévère" en cas de recours de l'accusé. La Cour
pénale n'a pas fait une application insoutenable de cette
norme en libérant le recourant de certaines accusations
tout en maintenant la peine prononcée initialement. Le
grief est infondé. Dans la mesure où le recourant invoque
simultanément une violation de l'art. 68 CP, soit une
violation du droit fédéral, sa critique est irrecevable
(cf. supra, consid. 1a).

      5.-  Le recourant se plaint d'arbitraire dans l'ap-
préciation des preuves et la constatation des faits.

      Saisi d'un recours de droit public mettant en cause
l'appréciation des preuves, le Tribunal fédéral examine
uniquement si le juge cantonal a outrepassé son pouvoir
d'appréciation et établi les faits de manière arbitraire
(ATF 127 I 38 consid. 2a p. 41; 124 I 208 consid. 4
p. 211; 120 Ia 31 consid. 2d p. 37/38).

      Selon la jurisprudence, est arbitraire une décision
qui méconnaît gravement une norme ou un principe juri-
dique clair et indiscuté ou qui heurte de manière cho-
quante le sentiment de la justice ou de l'équité. En
d'autres termes, il ne se justifie de l'annuler que si
elle est insoutenable, en contradiction manifeste avec
la situation effective, si elle a été adoptée sans motif
objectif ou en violation d'un droit certain. Il ne suffit
pas que la motivation de la décision soit insoutenable;
encore faut-il qu'elle soit arbitraire dans son résultat
(ATF 125 I 166 consid. 2a p. 168; 125 II 10 consid. 3a
p. 15, 129 consid. 5b p. 134; 124 V 137 consid. 2b p.
139; 124 IV 86 consid. 2a p. 88 et les arrêts cités).

      Le recourant se réfère aux déclarations de son
coaccusé Y.________. Ce dernier a exclu la présence du
recourant dans deux cambriolages de villa. Le recourant
en déduit qu'il est arbitraire de l'avoir condamné pour
vol dans tous les cas où Y.________ a été reconnu cou-
pable de cette infraction, sous réserve du cas no 17.

      La Cour pénale ne s'est pas fondée sur les seules
déclarations du dénommé Y.________ pour les faits mis à
la charge du recourant mais sur plusieurs autres éléments
que le recourant ne discute pas. La critique émise est
donc inapte à démontrer l'arbitraire. Par ailleurs, la
Cour pénale s'est référée à la motivation adoptée en
première instance (cf. arrêt attaqué, p. 13 al. 3). Dans
la partie du jugement de première instance intitulée

"Considérant", il est exposé en pages 22/23 à l'égard des
cas no 18, 19 et 21 imputés à Y.________ et au recourant
qu'il importait peu de savoir si ce dernier était ou non
présent lors de ces cambriolages dans la mesure où il
était d'accord avec leur commission. Le recourant ne
critique pas l'accord ainsi constaté. Il n'établit donc
aucun arbitraire.

      6.-  Le recours doit être rejeté dans la mesure où
il est recevable. Comme il était d'emblée dépourvu de
chances de succès, l'assistance judiciaire est refusée
(art. 152 al. 1 OJ) et le recourant, qui succombe, sup-
portera un émolument judiciaire (art. 156 al. 1 OJ).

                     Par ces motifs,

         l e   T r i b u n a l   f é d é r a l ,

      1. Rejette le recours de droit public dans la
mesure où il est recevable.

      2. Rejette la requête d'assistance judiciaire.

      3. Met un émolument judiciaire de 800 francs à la
charge du recourant.

      4. Communique le présent arrêt en copie au manda-
taire du recourant, au Procureur général du canton du
Jura et à la Cour pénale du Tribunal cantonal jurassien.
                       __________

Lausanne, le 21 septembre 2001

          Au nom de la Cour de cassation pénale
               du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
                      Le Président,

                      Le Greffier,