Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilabteilung 4P.51/2001
Zurück zum Index I. Zivilabteilung 2001
Retour à l'indice I. Zivilabteilung 2001


4P.51/2001

                 Ie   C O U R   C I V I L E
                ****************************

                        25 avril 2001

Composition de la Cour: MM. Walter, président, Leu et Corboz,
juges.  Greffier: M. Carruzzo.

                        ____________

           Statuant sur le recours de droit public
                          formé par

M.________,

                           contre

la décision prise le 31 janvier 2001 par la 2ème Chambre du
Tribunal des baux et loyers du canton de Genève dans la cause
qui oppose la recourante à P.________, représenté par Me
Jean-Marc Siegrist, avocat à Genève;

   (art. 6 par. 1 CEDH; art. 9, 29 et 30 Cst.; récusation)

          Vu les pièces du dossier d'où ressortent
                   les  f a i t s  suivants:

    A.- Par jugement du 27 avril 1998, la 4ème Chambre
du Tribunal des baux et loyers, présidée par C.________, a
constaté la validité du congé donné à dame M.________ par
P.________ pour le 30 avril 1997 et accordé à la locataire
une unique prolongation de son bail jusqu'au 30 avril 1998.

    Le 25 mai 1998, dame M.________ a saisi le Tribunal
des baux et loyers d'une "demande de révision" du jugement
précité, en formulant, dans ce cadre-là, une requête de récu-
sation dirigée contre C.________. Statuant le 18 juin 1998,
la 3ème Chambre du Tribunal des baux et loyers a rejeté cette
requête.

    Saisi d'un recours de droit public formé par dame
M.________, le Tribunal fédéral l'a admis, par arrêt du 18
novembre 1998, et il a annulé la décision du 18 juin 1998.

    Le 21 janvier 1999, la Chambre d'appel en matière
de baux et loyers du canton de Genève a constaté que l'appel
interjeté par dame M.________ contre le jugement du 27 avril
1998 était devenu sans objet à la suite de l'arrêt du Tribu-
nal fédéral et elle a renvoyé la cause au Tribunal des baux
et loyers "pour instruire et juger à nouveau".

    Statuant le 20 novembre 2000, sous la présidence du
juge A.________, sans avoir refait ni complété l'instruction
de la cause au fond, le Tribunal des baux et loyers a rendu
un jugement qui reprend quasiment mot pour mot les constata-
tions de fait, les motifs juridiques et le dispositif de ce-
lui du 27 avril 1998.

    B.- Le 21 décembre 2000, dame M.________ a saisi le
Tribunal des baux et loyers d'une "demande de révision" du
jugement rendu le 20 novembre 2000, en formulant, dans ce ca-
dre-là, une requête de récusation dirigée contre A.________.
Elle reprochait au magistrat incriminé d'avoir refusé d'ins-
truire la cause, contrairement aux injonctions de la Chambre
d'appel; d'avoir violé les garanties de procédure prévues par
la loi, en particulier le droit à la preuve; d'avoir fondé
son jugement sur des actes d'instruction nuls, parce qu'ayant
été exécutés par un magistrat récusé; d'avoir, selon toute
apparence, favorisé les intérêts d'un tiers intéressé au sort
du procès (le dénommé K.________) et représenté par un ami de
la famille A.________; d'avoir repris textuellement, à deux
ans et demi d'intervalle, le jugement rendu par C.________;
enfin, d'avoir rendu un jugement qualifié d'"inconstant" par
la Chambre d'appel.

    A.________ a conclu au rejet de la requête en ré-
cusation. Le Procureur général du canton de Genève en a fait
de même.

    Par décision du 31 janvier 2001, la 2ème Chambre du
Tribunal des baux et loyers, présidée par le juge B.________,
a rejeté ladite requête. Elle a qualifié de spécieux l'argu-
ment tiré du fait que le fils de Me Y.________, conseil de la
partie adverse (recte: du tiers intéressé au sort du procès),
effectue son stage d'avocat dans la plus importante étude de
Genève, dont Me X.________, père du magistrat incriminé, est
l'un des nombreux associés. Aussi, "en l'absence d'autre mo-
tif", la requête en récusation, qui apparaissait comme "pu-
rement dilatoire", ne pouvait-elle qu'être rejetée de l'avis
du Tribunal des baux et loyers.

    C.- Dame M.________, agissant par la voie du reco-
urs de droit public, demande au Tribunal fédéral d'annuler la
décision du 31 janvier 2001. Elle invoque la violation de

l'art. 6 par. 1 CEDH, des art. 9, 29 et 30 Cst., ainsi que
des dispositions du droit de procédure genevois relatives à
la récusation des juges et à la révision des jugements. Selon
la recourante, le Tribunal des baux et loyers serait tombé
dans l'arbitraire pour avoir examiné, comme unique motif de
récusation, une circonstance qu'elle-même ne jugeait pas
suffisante pour justifier la récusation du magistrat visé et
pour n'avoir pas statué sur les motifs susmentionnés, énoncés
à l'appui de la requête en récusation, lesquels auraient dû
le conduire à admettre cette requête.

    L'intimé et le Tribunal des baux et loyers n'ont
pas été invités à déposer une réponse.

         C o n s i d é r a n t   e n   d r o i t  :

    1.- La décision entreprise, rendue en dernière ins-
tance cantonale (art. 99 al. 4 de la loi genevoise sur l'or-
ganisation judiciaire; LOJ gen.), peut faire l'objet d'un re-
cours de droit public (art. 86 al. 1 OJ), bien qu'elle ne
mette pas fin au procès, puisque la cause au fond est pendan-
te en appel. En effet, cette décision incidente, qui a trait
à une demande de récusation, pouvait et devait être attaquée
directement en vertu de l'art. 87 OJ. Elle l'a été en temps
utile (art. 89 al. 1 OJ) et dans la forme requise (art. 90
al. 1 OJ) par une personne qui met en cause l'impartialité du
président de la juridiction qui a tranché le litige la divi-
sant d'avec l'intimé et qui a donc un intérêt juridiquement
protégé à ce que ladite décision n'ait pas été prise en vio-
lation de ses droits constitutionnels (art. 88 OJ). Il y a
lieu, partant, d'entrer en matière.

    2.- La recourante soutient que le Tribunal des baux
et loyers a retenu arbitrairement, comme unique motif de ré-

cusation, celui tiré des liens pouvant exister entre les fa-
milles A.________ et Y.________, alors qu'elle aurait "expli-
citement écarté" un tel motif. Elle lui reproche, toujours
sous l'angle de l'arbitraire, d'avoir écrit "en l'absence de
tout autre motif", étant donné qu'elle en avait énoncé huit
dans sa "demande de révision".

    a) S'il invoque une violation de l'art. 9 Cst., le
recourant ne peut se contenter de prétendre que la décision
entreprise est arbitraire. Il lui faut démontrer que cette
décision est manifestement insoutenable, qu'elle est en con-
tradiction flagrante avec la situation de fait ou viole gra-
vement un principe de droit incontesté ou encore contredit de
manière choquante le sentiment de la justice (ATF 116 II 21
consid. 5, 114 Ia 25 consid. 3b, 216 consid. 2a, 111 Ia 17
consid. 2 et les arrêts cités). Au demeurant, sauf exceptions
non réalisées en l'espèce, la présentation de nouveaux moyens
de fait, de preuve ou de droit est irrecevable dans un re-
cours de droit public (ATF 124 I 208 consid. 4b p. 212, 121 I
367 consid. 1b p. 370, 113 Ia 225 consid. 1b/bb p. 229 et les
arrêts cités).

    b) Dans sa demande de révision du 21 décembre 2000,
la recourante a allégué, sous chiffre 10, l'existence de
liens apparemment étroits entre les familles A.________ et
Y.________. A son avis, cette circonstance, prise isolément,
ne justifierait certes pas une demande de récusation du
magistrat incriminé; cependant, ajoutée aux autres motifs
mentionnés dans la même écriture, elle donnerait à l'affaire
"un éclairage édifiant". Dans la partie juridique de ce mé-
moire, la recourante reprochait au juge A.________, entre
autres griefs, "d'avoir, selon toute apparence, favorisé les
intérêts particuliers d'un tiers ayant un intérêt à l'issue
de cette procédure, tiers par ailleurs représenté par un ami
de la famille A.________". Il ressort, en outre, du procès-
verbal de comparution personnelle du 15 janvier 2001 que la

recourante s'est adressée en ces termes, lors de cette au-
dience, au Tribunal des baux et loyers présidé par le juge
A.________: "Le seul et unique motif dans la demande de ré-
vision du 22 [recte 21] décembre 2000 consiste dans la cause
de récusation que je forme à votre encontre. Par voie de
conséquence, le Tribunal ne peut pas connaître de cette af-
faire dans sa composition actuelle". La recourante allègue,
dans son recours de droit public, que le magistrat en cause
lui aurait alors posé la question suivante: "vous demandez ma
récusation parce que mon père a engagé en qualité de stagiai-
re le fils de Me Y.________, conseil de M. K.________?",
question à laquelle elle aurait répondu par la négative en
précisant que sa demande de récusation était principalement
motivée par le fait que le juge A.________ avait refusé
d'instruire à nouveau la cause et s'était contenté de repro-
duire mot pour mot le texte du jugement rendu le 27 avril
1998 par le magistrat récusé.

    La question que le juge A.________ aurait posée à
la recourante et la réponse qu'aurait faite cette dernière
n'ont été mentionnées ni au procès-verbal de l'audience du 15
janvier 2001 ni dans la décision présentement attaquée. Par
conséquent, l'allégation y relative, qui figure dans le re-
cours de droit public, constitue un novum irrecevable. Or,
sur le vu des seuls éléments de fait entrant en ligne de
compte, il n'y avait rien d'insoutenable à admettre que
l'existence supposée de liens étroits entre les familles
A.________ et Y.________ était une circonstance que la re-
courante n'avait pas explicitement écartée en tant que motif
de récusation. Reste à savoir si l'autorité intimée pouvait
retenir, sans arbitraire, que cette circonstance était
l'unique motif de récusation dont la recourante entendait se
prévaloir et qu'il y avait eu abandon implicite des autres
motifs énumérés dans la demande de révision. La réponse à
cette question est plus délicate. Cependant, à considérer de
plus près les termes utilisés par la recourante, tels qu'ils

ont été portés au procès-verbal de la séance du 15 janvier
2001, force est d'admettre que l'interprétation qu'en a faite
l'autorité intimée - elle n'a pas participé à cette séance,
il sied de le souligner - n'est pas en contradiction flagran-
te avec les termes utilisés par la recourante et résiste donc
au grief d'arbitraire, quand bien même elle serait erronée.
En effet, il paraît ressortir des propos de la recourante que
celle-ci n'avait plus qu'un seul et unique motif à invoquer
parmi les différents motifs énoncés dans sa demande de révi-
sion ("la cause de récusation") et que ce motif tenait à la
personne même du magistrat incriminé ("à votre encontre") et
non pas à la manière dont celui-ci avait conduit la procédure
au fond. Il semble du reste que ce magistrat ait lui-même at-
tribué une telle signification à ces propos à en juger par la
question susmentionnée - objet du novum irrecevable - qu'il
aurait alors posée à la recourante.

    Le moyen soulevé par la recourante tombe dès lors à
faux. Pour le surplus, l'autorité intimée ne saurait se voir
reprocher d'avoir écarté à tort les autres motifs de récusa-
tions indiqués dans la demande de révision, une fois admis
qu'elle a restreint sans arbitraire son examen au seul motif
maintenu en dernier ressort par la recourante. Quant au motif
examiné par le Tribunal des baux et loyers, il ne constituait
pas une cause de récusation, de l'aveu même de la recourante,
laquelle ne critique d'ailleurs pas les considérations émises
sur ce point dans la décision attaquée.

    Quoi qu'il en soit, à supposer que l'autorité inti-
mée ait limité arbitrairement l'objet de son examen, contrai-
rement à ce qui a été retenu plus haut, sa décision n'en de-
vrait pas forcément être annulée pour autant. En effet, le
Tribunal fédéral peut procéder à la substitution des motifs
de la décision attaquée (ATF 124 I 208 consid. 4a et les ar-
rêts cités), même lorsqu'il statue avec plein pouvoir de co-
gnition (ATF 106 Ia 310 consid. 1b p. 315 et les arrêts ci-

tés), comme c'est le cas lorsqu'il examine si l'application
non arbitraire des règles du droit cantonal relatives à la
récusation des juges est conforme aux exigences fixées à
l'art. 30 al. 1 Cst. en ce qui concerne l'indépendance et
l'impartialité des juges (cf. ATF 117 Ia 170 consid. 1 p.
172/173 et les arrêts cités). Or, comme on le démontrera ci-
après, l'autorité intimée, si elle avait examiné les autres
motifs de récusation invoqués par la recourante, aurait pu
les rejeter sans violer cette garantie constitutionnelle, de
sorte qu'il n'y aurait de toute façon pas de raison d'annuler
sa décision.

    3.- a) La jurisprudence a déduit des art. 58 al. 1
aCst. et 6 par. 1 CEDH - qui ont sur ce point la même portée
- le droit pour le justiciable d'être jugé par un tribunal
indépendant et impartial (ATF 125 I 119 consid. 3a p. 122).
Cette garantie a été codifiée à l'art. 30 al. 1 Cst., si bien
que les principes jurisprudentiels développés à propos de
l'art. 58 aCst. restent pleinement valables sous l'empire de
la nouvelle Constitution (ATF 126 I 235 consid. 2a p. 236).

    La garantie d'un tribunal indépendant et impartial
permet d'exiger la récusation d'un juge dont la situation ou
le comportement est de nature à faire naître un doute sur son
impartialité. Elle tend notamment à éviter que des circons-
tances extérieures à la cause ne puissent influencer le juge-
ment en faveur ou au détriment d'une partie. Elle n'impose
pas la récusation seulement lorsqu'une prévention effective
du juge est établie, car une disposition interne de sa part
ne peut guère être prouvée; il suffit que les circonstances
donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une
activité partiale du magistrat. Seules des circonstances
constatées objectivement doivent être prises en considéra-
tion; les impressions purement individuelles d'une des par-
ties au procès ne sont pas décisives (ATF 125 I 119 consid.
3a p. 122 et les arrêts cités).

    C'est au regard de ces principes qu'il convient
d'examiner les griefs formulés par la recourante à l'encontre
de la décision attaquée.

    b) A l'appui de sa demande de révision, la recou-
rante reprochait, en substance, au juge A.________ d'avoir
refusé d'instruire à nouveau la cause "conformément aux
injonctions du Tribunal fédéral et de la Cour de justice",
violant ainsi son droit à la preuve, et d'avoir repris tex-
tuellement le jugement rendu par le juge récusé et fondé, de
ce fait, sur des actes d'instruction entachés de nullité.

    aa) Quant à leur pertinence, certains de ces repro-
ches appellent déjà les remarques suivantes: d'abord, il est
faux d'affirmer que le Tribunal fédéral aurait enjoint le
Tribunal des baux et loyers d'instruire la cause, ce qui eût
été du reste contraire à la nature cassatoire du recours de
droit public dont il était saisi. Il est vrai, en revanche,
que la Chambre d'appel a formulé semblable injonction dans
son arrêt du 21 janvier 1999; mais elle l'a fait de manière
toute générale, dans le dispositif dudit arrêt, sans motiver
sa décision sur ce point. Ensuite, le prétendu refus du juge
d'instruire la cause doit être replacé dans le contexte pro-
cédural assez singulier de l'affaire en litige; il convient
d'observer, à cet égard, que, si la recourante avait certes
demandé "l'annulation de la procédure", lors de l'audience de
comparution personnelle du 3 mai 1999, elle n'a, en revanche,
pas pris de conclusions formelles en vue de la réouverture
d'enquêtes dans son mémoire complémentaire du 6 décembre
1999; en fait, son avocat a attendu d'être cité à l'audience
de plaidoiries du 17 janvier 2000 pour indiquer au juge, dans
une lettre du 13 janvier 2000, qu'il renonçait à plaider mais
qu'il souhaitait que le Tribunal veuille bien ouvrir des en-
quêtes, et il n'est revenu à la charge au sujet de celles-ci
que par lettre du 11 septembre 2000, soit quelque huit mois

après que la cause avait été gardée à juger; il apparaît ain-
si que la recourante n'a pas fait montre d'un grand empresse-
ment à requérir une nouvelle instruction de la cause et
qu'elle a plutôt cherché à faire durer la procédure en formu-
lant sa requête in fine litis. Enfin, il ne va pas de soi,
contrairement à ce que laisse entendre la recourante, que
tous les actes de procédure accomplis par le juge récusé se-
raient nuls de plein droit; la loi de procédure fédérale,
pour ne citer qu'un seul exemple, dispose, à son art. 28 al.
2, qu'en cas de récusation facultative, les opérations posté-
rieures à la demande de récusation sont seules annulées; or,
la recourante ne précise pas quels effets emporte, en procé-
dure civile genevoise, l'admission d'une demande de récusa-
tion facultative d'un juge sur les actes d'instruction accom-
plis par ce magistrat.

    bb) De toute façon, quand bien même ils seraient
avérés, les reproches adressés par la recourante au juge
A.________ ne justifieraient pas nécessairement la récusation
de ce magistrat.

    Il a été jugé de longue date que les mesures de
procédure, justes ou fausses, ne sont pas, comme telles, de
nature à fonder un soupçon objectif de prévention du juge qui
les a prises (ATF 114 Ia 153 consid. 3b/bb p. 158, 113 Ia 407
consid. 2b p. 410, 111 Ia 259 consid. 3b/aa p. 264 et les ré-
férences). Seules des erreurs particulièrement lourdes ou ré-
pétées, qui doivent être considérées comme des violations
graves de ses devoirs, peuvent avoir cette conséquence. Pour
le surplus, c'est aux juridictions de recours normalement
compétentes qu'il appartient de constater et de redresser les
erreurs éventuellement commises, si bien que le juge de la
récusation ne saurait examiner la conduite du procès à la fa-
çon d'une instance d'appel (ATF 116 Ia 135 consid. 3a p. 138
et l'arrêt cité). Appliqués au cas particulier, ces principes
jurisprudentiels excluent de voir un motif de récusation dans

le simple fait que le juge A.________ aurait par hypothèse
refusé sans raison valable d'ordonner de nouvelles enquêtes.
Au demeurant, la recourante ne mentionne pas de circonstances
spéciales susceptibles de faire apparaître ce refus comme un
indice concluant de ce que le magistrat incriminé aurait des
préventions contre elle. En tout état de cause, si des er-
reurs de procédure ont été commises, il appartiendra à la
Chambre d'appel en matière des baux et loyers, saisie d'un
appel visant le jugement au fond, de les rectifier et l'on ne
saurait affirmer que le juge A.________, s'il recevait l'or-
dre d'instruire la cause, ne serait pas disposé à le faire de
manière impartiale, en sauvegardant le droit d'être entendu
des deux parties, sauf à lui faire un procès d'intention.

    Quant au grief fait au juge A.________ d'avoir
repris textuellement et servilement le jugement rendu par le
juge récusé deux ans et demi plus tôt et qualifié d'"incons-
tant" par la Chambre d'appel, il est dénué de fondement. On
relèvera d'emblée, à ce propos, que le jugement du 20 novem-
bre 2000 a été rendu par une cour composée de trois juges et
donc pas uniquement par le magistrat en cause. Force est de
souligner, par ailleurs, que la notion d'"inconstance" appa-
raît obscure en tant qu'elle s'applique à une décision de
justice. Cela étant, les art. 30 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH
n'interdisent pas à l'autorité appelée à statuer une seconde
fois dans une nouvelle composition d'aboutir au même résultat
que l'autorité précédente, et cela pour des motifs sembla-
bles, pour autant que cette démarche procède d'un jugement
indépendant et impartial. Il est dès lors concevable que la
nouvelle autorité reprenne, même littéralement, s'ils lui
paraissent objectivement fondés, les arguments retenus dans
la première décision. Ce n'est que si des circonstances par-
ticulières laissent à penser que la nouvelle autorité a jugé
sous une influence inadmissible de l'autorité récusée que ce
mode de faire est contraire aux garanties procédurales offer-
tes par les deux dispositions citées (arrêt non publié du 2

mai 1988, dans la cause 1P.100/1988, consid. 1). Il apparte-
nait à la recourante de démontrer que de telles circonstances
particulières existaient concrètement en l'espèce. Or, elle
ne l'a pas fait. Son grief est ainsi dénué de fondement.

    4.- Dans ces conditions, le présent recours ne peut
qu'être rejeté avec suite de frais (art. 156 al. 1 OJ), dès
lors que la décision attaquée ne porte pas atteinte aux
droits constitutionnels invoqués par la recourante, sinon
dans tous ses motifs, du moins dans son résultat. Il n'y a
pas lieu d'allouer des dépens à l'intimé puisque celui-ci n'a
pas été invité à déposer une réponse.

                       Par ces motifs,

            l e  T r i b u n a l  f é d é r a l ,

                      vu l'art. 36a OJ:

    1. Rejette le recours;

    2. Met un émolument judiciaire de 2000 fr. à la
charge de la recourante;

    3. Communique le présent arrêt en copie aux parties
et à la 2ème Chambre du Tribunal des baux et loyers du canton
de Genève.

                        ____________

Lausanne, le 25 avril 2001
ECH

                 Au nom de la Ie Cour civile
                 du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
                        Le Président,

                        Le Greffier,