Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2A.513/2001
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2A.513/2001 /viz

Arrêt du 1er mars 2002
IIe Cour de droit public

Les juges fédéraux Wurzburger, président,
Hungerbühler, Berthoud, juge suppléant,
greffière Rochat.

X. ________,
A.A.________ et B.A.________, recourants,
tous les deux représentés par Me Alain Ribordy, avocat,
rue St-Pierre-Canisius 1, case postale 769, 1701 Fribourg,

contre

Commission fédérale des maisons de jeu, 3003 Berne,
Commission fédérale de recours en matière de maisons de jeu, Case postale
5972, 3001 Berne.

Autorisation d'exploiter des jeux; mesures provisionnelles

(recours de droit administratif contre la décision de la Commission fédérale
de recours en matière de maisons de jeu du 13 novembre 2001)
Faits:

A.
Le 21 décembre 2000, le Service de la police du commerce et des
établissements publics du canton de Fribourg (ci-après le Service de la
police du commerce) a refusé à la société X.________, qui fabrique et
exploite des appareils de jeu, de renouveler, pour l'année 2001,
l'autorisation d'exploiter notamment cinq appareils installés dans le salon
de jeu Y.________, à Romont. Il a retenu en substance que l'intéressée ne
pouvait pas être mise au bénéfice de l'art. 60 al. 2 de la loi fédérale sur
les jeux de hasard et les maisons de jeu du 18 décembre 1998 (LMJ; RS
935.52), dès lors que les appareils concernés avaient été mis en exploitation
après le 1er novembre 1997.

Saisi d'un recours contre cette décision, le Tribunal administratif du canton
de Fribourg l'a rejeté, par arrêt de 23 mars 2001.

Par la suite, X.________ a sollicité l'autorisation d'échanger deux appareils
installés dans le pub de Y.________, local distinct du salon de jeu. Le 30
août 2001, la Commission fédérale des maisons de jeu a constaté que le pub de
Y.________ ne bénéficiait pas d'une autorisation d'exploiter des jeux de
hasard le 1er novembre 1997 et a ordonné la mise hors service immédiate des
appareils en exploitation. En ce qui concerne les cinq appareils exploités
dans le salon de jeu, la Commission a confirmé la décision du 21 décembre
2000 (recte: l'arrêt du Tribunal administratif du 23 mars 2001).

B.
X.________, ainsi que A.A.________ et B.A.________, exploitants de
l'établissement Y.________, à Romont, ont recouru contre cette décision
auprès de la Commission fédérale de recours en matière de maisons de jeu
(ci-après : la Commission de recours). A titre provisoire, ils ont demandé à
être autorisés à exploiter cinq appareils de jeu dans le salon de jeu
Y.________ jusqu'à droit connu sur le recours.

Le Président de la Commission de recours a rejeté la requête de mesures
provisionnelles, par décision incidente du 13 novembre 2001. Il a retenu que
cette requête tendait en fait à octroyer provisoirement une nouvelle
autorisation inexistante, qu'il appartenait exclusivement aux cantons
d'octroyer des autorisations d'exploitation d'appareils de jeu en application
de l'art. 60 al. 2 LMJ et qu'il n'était pas possible de contourner le régime
établi par le droit matériel au moyen de mesures provisionnelles de nature
procédurale.

C.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, X.________,
A.A.________ et B.A.________ demandent au Tribunal fédéral, avec suite de
frais et dépens, d'annuler la décision du Président de la Commission de
recours et de les autoriser provisoirement à exploiter cinq appareils de jeu
dans le salon de jeu de l'établissement Y.________ à Romont. A.A.________ et
B.A.________ requièrent en outre d'être dispensés du paiement d'éventuels
frais judiciaires.
La Commission fédérale en matière de maisons de jeu se réfère aux
considérants de la décision attaquée et le Président de la Commission de
recours conclut implicitement au rejet du recours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
La décision attaquée est une décision incidente portant sur des mesures
provisionnelles.

1.1 Les décisions portant sur des mesures provisionnelles sont attaquables
séparément par la voie du recours de droit administratif si elles peuvent
causer un préjudice irréparable (art. 97 OJ en relation avec les art. 5 et 45
al. 1 et 2 lettre g PA). Dans la procédure du recours de droit administratif,
un pur intérêt de fait, en particulier économique, est suffisant pour
reconnaître aux recourants un intérêt digne de protection, c'est-à-dire pour
admettre le risque d'un préjudice irréparable (ATF 127 II 132 consid. 2a p.
136). Cette condition est assurément remplie en l'espèce pour la société
recourante, puisque la décision entreprise refuse, durant la procédure de
recours fédérale, l'exploitation d'appareils de jeu qui est, pour elle,
source de gains. Au stade des mesures provisionnelles, on peut aussi
reconnaître aux époux A.________ la possibilité d'invoquer leur intérêt
économique, bien que leurs fonctions respectives exactes ne ressortent pas
clairement des pièces du dossier.

1.2 Le recours de droit administratif n'est recevable contre des décisions
incidentes que s'il est ouvert contre la décision finale (art. 101 lettre a
OJ a contrario). Cette exigence est satisfaite, dans la mesure où le recours
de droit administratif est en principe recevable contre les décisions de la
Commission de recours prises en application de la loi sur les maisons de jeu
(art. 97 et 98 lettre e OJ).

Il y a lieu dès lors d'entrer en matière sur le présent recours qui a été
déposé dans le délai de dix jours de l'art. 106 al. 1 OJ, et remplit les
autres conditions de recevabilité des art. 97ss OJ.

2.
Les recourants sollicitent, par voie de mesures provisionnelles,
l'autorisation d'exploiter cinq appareils de jeu dans le salon de jeu
Y.________, à Romont.

2.1 En premier lieu, les recourants reprochent au magistrat intimé d'avoir
rejeté leur requête dans son principe, au motif qu'elle avait pour résultat
d'octroyer provisoirement une nouvelle autorisation inexistante.
L'autorisation d'exploiter les appareils litigieux pour l'année 2001 a été
refusée par le Service de la police du commerce dans sa décision du 21
décembre 2000, confirmée par le Tribunal administratif le 23 mars 2001. Ces
appareils sont hors service depuis le 31 mars 2001 et devaient être enlevés
du salon de jeu le 30 avril 2001 au plus tard. Faute d'avoir été déféré au
Tribunal fédéral, l'arrêt du Tribunal administratif du 23 mars 2001 est
devenu définitif et exécutoire. Malgré cela, la Commission fédérale des
maisons de jeu, dans sa décision du 30 août 2001, est entrée en matière sur
la nouvelle demande des recourants d'autoriser l'exploitation de ces
appareils. Le chiffre 2 du dispositif de sa décision, dans la mesure où il
confirme l'arrêt du Tribunal administratif, constitue un nouveau refus
d'exploiter des appareils hors service. Il s'analyse comme une décision
négative et c'est à juste titre que les recourants ont déposé une requête de
mesures provisionnelles et non pas une demande de restitution de l'effet
suspensif (ATF 117 V 185 consid. 1b p. 188; Fritz Gygi, L'effet suspensif et
les mesures provisionnelles en procédure administrative, in RDAF 1976 p.
217ss, spéc. p. 227; voir également Blaise Knapp, Précis de droit
administratif, 4ème édition, Bâle 1991, n. 1079, p. 242 et n. 2081, p. 430).

Aucun motif de principe ne s'oppose dès lors à l'examen de la requête de
mesures provisionnelles.

2.2 Les recourants estiment ensuite que l'autorité intimée a considéré à tort
que l'art. 48 LMJ ne permettait pas à l'autorité fédérale d'accorder une
autorisation d'exploiter là où le canton l'a refusée.

A teneur de l'art. 60 al. 2 LMJ, seuls les cantons sont compétents pour
autoriser la continuation de l'exploitation d'appareils à sous servant à des
jeux de hasard hors des casinos et des grands casinos. Ni la loi fédérale sur
les maisons de jeu, ni son ordonnance d'application ne prévoient de procédure
fédérale formelle d'autorisation ou de contrôle de l'application de l'art. 60
al. 2 LMJ. En sa qualité d'autorité de surveillance instaurée par l'art. 48
al. 1 LMJ, la Commission fédérale des maisons de jeu est en revanche
habilitée à rendre des décisions constatatoires, à la demande des administrés
ou des cantons, sur la conformité au droit fédéral des demandes
d'autorisation d'exploiter des appareils à sous servant aux jeux de hasard
(arrêt 2A.98/2001 du 17 septembre 2001, consid. 2b et c, non publié). Les
cantons ont alors la possibilité, mais non l'obligation, de délivrer des
autorisations formelles, à condition de respecter les décisions préalables de
l'autorité fédérale. Dans ce contexte, la Commission fédérale en matière de
maisons de jeu ne saurait autoriser l'exploitation de machines à sous refusée
par les cantons. Dès l'instant où le canton a statué, l'autorité fédérale ne
dispose donc plus de compétence décisionnelle.

2.3 Les recourants font aussi valoir que le refus de l'autorité cantonale de
renouveler les autorisations d'exploitation des appareils litigieux pour 2001
est consécutive à une injonction de la Commission fédérale en matière de
maisons de jeu et que la nouvelle demande d'autorisation présentée à cette
autorité le 6 juillet 2001 repose sur des arguments nouveaux, décisifs sous
l'angle de la protection de la bonne foi, dont le Tribunal administratif
n'avait pas non plus eu connaissance.

Dans son courrier du 25 octobre 2000 adressé à l'autorité fédérale, la
Direction de la justice, de la police et des affaires militaires du canton de
Fribourg a expressément relevé que les réponses fournies par la Commission
fédérale en matière de maisons de jeu ne constituaient en aucune façon des
décisions, mais devaient être considérées comme de simples éléments
constitutifs du dossier. En fait, la Commission fédérale en matière de
maisons de jeu n'a pas rendu de décision formelle préalable concernant les
cinq appareils en cause, de sorte que les recourants ne pouvaient pas
présenter une demande de reconsidération. En outre, les arguments
prétendument nouveaux auxquels ils font référence sont antérieurs à la
décision cantonale de non renouvellement des autorisations pour l'année 2001.
Il incombait donc aux recourants de les invoquer dans la procédure cantonale,
notamment auprès du Tribunal administratif. Cette omission ne saurait ainsi
être réparée par le biais d'une demande de reconsidération.

2.4 Il s'ensuit que la Commission fédérale des maisons de jeu ne disposait
d'aucune compétence propre pour autoriser l'exploitation des appareils du
salon de jeu Y.________ et qu'elle a confirmé à tort la décision du Tribunal
administratif (chiffre 2 du dispositif de sa décision du 30 août 2001). Elle
aurait dû, en réalité, refuser d'entrer en matière sur les conclusions des
recourants concernant les machines à sous installées dans le salon de jeu.
Leur sort avait en effet définitivement été scellé par l'arrêt du Tribunal
administratif du 23 mars 2001.
Dans ces conditions, le Président de la Commission de recours pouvait
admettre que l'octroi, en application de l'art. 56 PA, des mesures
provisionnelles requises, aurait pour effet de violer le droit fédéral et
l'exclusivité de compétence qu'il instaure, dans ce domaine, en faveur des
cantons. Une ordonnance de mesures provisionnelles ne saurait en effet
déroger à une règle de droit matériel dans une contestation portant
précisément sur l'application de ce droit.

3.
3.1Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté.

3.2 Les conclusions du recours étaient dénuées de toute chance de succès, de
sorte qu'il y a lieu de refuser aux recourants A.A.________ et B.A.________
la dispense d'émolument judiciaire requise. Cet émolument doit être mis à la
charge des recourants, solidairement entre eux (art. 156 al. 1 et 7, 153 et
153a OJ). Les recourants n'ont pas droit à des dépens (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
La demande d'assistance judiciaire est rejetée.

3.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge des recourants,
solidairement entre eux.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire des recourants, à la
Commission fédérale des maisons de jeu et à la Commission fédérale de recours
en matière de maisons de jeu.

Lausanne, le 1er mars 2002

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière: