Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2A.504/2001
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2A.504/2001/dxc

Arrêt du 22 mars 2002
IIe Cour de droit public

Les juges fédéraux Hungerbühler, juge présidant la Cour,
Müller, Yersin,
greffière Rochat.

X.________, né le 4 juillet 1964, recourant, représenté par Me Jean Oesch,
avocat, avenue Léopold-Robert 66, case postale 1154, 2300 La Chaux-de-Fonds,

contre

Direction de la police et des affaires militaires du canton de Berne,
Kramgasse 20, 3011 Berne,
Tribunal administratif du canton de Berne, Cour des affaires de langue
française, Speichergasse 12, 3011 Berne.

art. 10 al. 1 lettre a LSEE; refus d'accorder une autorisation de séjour

(recours de droit administratif contre la décision du Tribunal administratif
du canton de Berne, Cour des affaires de langue française, du 12 octobre
2001)
Faits:

A.
X. ________, ressortissant de la République démocratique du Congo, est entré
en Suisse le 14 juillet 1991 et y a déposé une demande d'asile, qui a été
définitivement rejetée le 27 août 1992. Il est revenu depuis la France pour
épouser, le 30 juillet 1993, la ressortissante suisse, Y.________, dont il a
divorcé le 7 juin 1999.

Sur le plan pénal, X.________ a été condamné à trois reprises, en 1995, pour
conduite sans permis, la dernière fois par décision du Président 6 du
Tribunal du district de Berne du 31 août 1995, à 30 jours d'emprisonnement et
500 fr. d'amende. Le 16 décembre 1996, le Tribunal de police de Vevey l'a
condamné à 15 jours d'emprisonnement pour violence ou menace contre les
autorités et les fonctionnaires, ainsi que violation de diverses règles de la
circulation routière. Le 12 janvier 1999, le Tribunal pénal de Bâle-Ville l'a
condamné à 22 mois d'emprisonnement et à 7 ans d'expulsion du territoire
suisse avec sursis pendant 2 ans, pour infraction qualifiée à la loi fédérale
sur les stupéfiants, utilisation d'un document falsifié et conduite sans
permis. Il a aussi été arrêté, le 22 avril 2001, par la police cantonale de
Bâle-Ville pour être entré en Suisse sans document d'identité valable; il
était alors soupçonné de vouloir introduire de la drogue en Suisse, mais
aucune preuve n'a pu être retenue contre lui. Actuellement, il fait l'objet
d'une procédure dans le canton de Fribourg, à la suite d'une plainte pour
menace et lésions corporelles simples.

B.
Par décision de l'Office de contrôle des habitants et de police des étrangers
du canton de Vaud du 9 juillet 1999, confirmée sur recours par le Tribunal
administratif du canton de Vaud le 17 novembre 1999, la demande
d'autorisation de séjour présentée par X.________ a été rejetée.

Le 15 décembre 1999, X.________ a présenté une nouvelle demande
d'autorisation de séjour dans le canton de Berne, en faisant valoir qu'il
avait purgé sa peine de 22 mois d'emprisonnement et était fiancé à une
ressortissante suisse, Z.________, née en 1970, avec laquelle il faisait
ménage commun et avait l'intention de se marier.

Après rejet de cette demande par décisions respectives de la Police des
étrangers de la ville de Berne du 15 mars 2000 et de la Direction de la
police et des affaires militaires du canton de Berne du 30 août 2000,
X.________ et Z.________ ont recouru auprès du Tribunal administratif du
canton de Berne, en invoquant l'art. 8 CEDH.

Ce recours a été rejeté, par arrêt du 12 octobre 2001. Laissant ouverte la
question de savoir si les recourants pouvaient se prévaloir de l'art. 8 § 1
CEDH, le Tribunal administratif a estimé qu'il existait un intérêt public
prépondérant en faveur du renvoi de Suisse du recourant.

C.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, X.________ conclut,
avec suite de frais et dépens, à l'annulation de l'arrêt du Tribunal
administratif du 12   octobre 2001 et demande au Tribunal fédéral de
prononcer qu'une autorisation de séjour lui soit accordée avec effet
rétroactif au 13 novembre 1999.

Le Tribunal administratif n'a pas formulé d'observations et la Direction de
la police et des affaires militaires se réfère à l'arrêt attaqué, en
concluant implicitement au rejet du recours, dans la mesure où il est
recevable.

L'effet suspensif a été attribué au recours à titre superprovisoire.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Selon l'art. 100 al. 1 lettre b ch. 3 OJ, le recours de droit
administratif est irrecevable contre l'octroi ou le refus d'autorisations
auxquelles le droit fédéral ne confère pas un droit. Les autorités
compétentes statuent librement, dans le cadre des prescriptions légales et
des traités avec l'étranger, sur l'octroi de l'autorisation de séjour ou
d'établissement (art. 4 de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement
des étrangers: LSEE; RS 142.20). En principe, l'étranger n'a pas de droit à
l'octroi d'une autorisation de séjour; le recours de droit administratif
n'est donc pas recevable, à moins que ne puisse être invoquée une disposition
particulière du droit fédéral ou d'un traité, accordant le droit à la
délivrance d'une telle autorisation (ATF 127 II 60 consid. 1a p. 62/63 et les
arrêts cités).

1.2 Le recourant ne prétend pas à juste titre qu'il aurait droit à une
autorisation d'établissement en raison de son précédent mariage avec une
Suissesse, qui a duré de juillet 1993 à juin 1999. Les autorités vaudoises
compétentes ont d'ailleurs rejeté définitivement la demande d'autorisation
fondée sur l'art. 7 LSEE, pour le motif que le droit du conjoint étranger à
une autorisation d'établissement s'éteint lorsqu'il existe un motif
d'expulsion (art. 7 al. 1 3ème phrase LSEE).

1.3 Un étranger peut toutefois, selon les circonstances, se prévaloir du
droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l'art. 8 CEDH pour
s'opposer à l'éventuelle séparation de sa famille et obtenir ainsi une
autorisation de séjour. Encore faut-il, pour être habilité à invoquer l'art.
8 CEDH, que la relation entre l'étranger et une personne de sa famille ayant
le droit de s'établir en Suisse (nationalité suisse ou autorisation
d'établissement) soit étroite et effective (ATF  126 II 377 consid. 2b/aa p.
382). En ce qui concerne les fiançailles, elles ne permettent en principe pas
d'invoquer le respect de la vie privée et familiale garanti par l'art. 8 CEDH
pour s'opposer à un départ de Suisse (Luzius Wildhaber, Internationaler
Kommentar zur Europäischen Menschenrechtskonvention, rem. 350 ad art. 8; Mark
E. Villiger, Handbuch der Europäischen Menschenrechtskonvention, 2ème éd.
Zurich 1999 n. 571, p. 365/366).
En l'espèce, le recourant prétend qu'il aurait été empêché de se marier avec
sa compagne, de nationalité suisse, parce qu'il n'était pas au bénéfice d'une
autorisation de séjour et que les autorités cantonales se sont opposées à son
mariage. Plusieurs éléments permettent cependant de douter que le recourant
puisse se prévaloir d'un lien étroit avec sa nouvelle compagne. La question
de la recevabilité du recours sous cet angle peut cependant demeurer
indécise, dans la mesure où le recours doit de toute manière être rejeté.

2.
2.1La protection découlant de l'art. 8 CEDH n'est pas absolue; une ingérence
dans l'exercice du droit au respect de la vie privée et familiale est
possible, selon l'art. 8 par. 2 CEDH, pour autant qu'elle soit prévue par la
loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est
nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être
économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des
infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la
protection des droits et libertés d'autrui. Comme pour l'art. 10 al. 1 LSEE,
la question de savoir si, dans un cas particulier, les autorités de police
des étrangers sont tenues d'accorder une autorisation de séjour fondée sur
l'art. 8 CEDH doit être résolue sur la base d'une pesée de tous les intérêts
privés et publics en présence.

2.2 Lorsque le motif d'expulsion ou de refus d'autorisation de séjour est la
commission d'une infraction, la peine infligée par le juge pénal est le
premier critère servant à évaluer la gravité de la faute et à peser les
intérêts. Ainsi, selon la pratique du Tribunal fédéral, une condamnation à
deux ans de privation de liberté constitue la limite à partir de laquelle il
y a lieu, en principe, de refuser l'autorisation de séjour (ATF 120 Ib 6
consid. 4b p. 14 se référant à l'arrêt Reneja, ATF 110 Ib 201). Il s'agit
toutefois d'une limite indicative qui, si elle est atteinte, nécessite des
circonstances exceptionnelles pour que l'expulsion ne soit pas prononcée.
Inversement, lorsque la peine est moins sévère, il n'est pas exclu de
prononcer une expulsion ou de ne pas renouveler une autorisation de séjour à
laquelle le conjoint étranger aurait normalement droit (art. 7 al. 1 3ème
phrase LSEE) si, par l'accumulation des infractions qu'il a commises, il
démontre son manque d'intégration en Suisse. Dans un tel cas, seule est
déterminante la pesée des intérêts publics et privés qu'il y a lieu d'opérer
en tenant compte de toutes les circonstances particulières (Alain Wurzburger,
La jurisprudence récente du Tribunal fédéral en matière de police des
étrangers, in RDAF 53/1997 p. 311). Cette jurisprudence est applicable en
l'espèce, quand bien même le recourant ne peut pas se prévaloir d'un lien
juridique formel avec une personne ayant le droit de séjourner en Suisse,
comme c'est le cas pour les autorisations de séjours fondées sur les art. 7
ou 17 LSEE.

2.3 Dans la situation du recourant, la continuité des infractions pénales
commises depuis 1995 revêt une importance prépondérante dans l'appréciation
de ses facultés d'intégration. Replacée dans son contexte, la condamnation à
22  mois d'emprisonnement pour trafic de drogue, qui s'ajoutait à une
condamnation à 15 jours d'emprisonnement pour violence ou menace contre les
autorités et à trois précédentes condamnations pour conduite sans permis, est
donc un motif suffisant au sens de l'art. 10 al. 1 lettre a LSEE. A cet
égard, le fait que le recourant a été condamné pour des infractions aux
règles de la circulation routière et que ses condamnations pénales pour
crimes et délits soient inférieures à la limite indicative de deux ans n'est
pas de nature à influer sur la décision de refuser l'autorisation de séjour.
L'ensemble du comportement du recourant pendant toute la durée de son séjour
en Suisse démontre en effet clairement qu'il ne veut pas ou n'est pas capable
de se conformer à l'ordre établi. Au demeurant, les objections du recourant
au sujet de ses condamnations pour conduite sans permis n'ont pas à être
prises en considération, dès lors qu'elles ont déjà été soulevées devant le
juge pénal, dont le jugement lie les autorités de police des étrangers.
Enfin, la procédure pénale encore pendante dans le canton de Fribourg, à la
suite d'une plainte pour menace et lésions corporelles simples, confirme les
difficultés d'intégration de l'intéressé.
Compte tenu de tous ses éléments, le refus d'accorder au recourant une
autorisation de séjour pour pouvoir demeurer en Suisse n'apparaît pas
disproportionné. Au surplus, le Tribunal fédéral renvoie à la motivation
détaillée contenue dans l'arrêt attaqué (art. 36a al. 3 OJ). Il s'ensuit que
le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable, avec suite de
frais à la charge du recourant (art. 156 al. 1 OJ).

3.
Au vu de l'issue du recours, la demande de mesures provisionnelles présentée
par le recourant devient sans objet.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral, vu l'art. 36a OJ, prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, à la
Direction de la police et des affaires militaires et au Tribunal
administratif du canton de Berne, ainsi qu'à l'Office fédéral des étrangers.

Lausanne, le 22 mars 2002

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le Juge présidant: La greffière: