Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2A.461/2001
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2A.461/2001/dxc

Arrêt du 21 février 2002
IIe Cour de droit public

Les juges fédéraux Wurzburger, président de la Cour,
Yersin, Berthoud, juge suppléant,
greffier Dubey.

X.________ SA, recourante,

contre

Service cantonal des contributions du canton du Valais, Commission d'impôt
des personnes morales, bâtiment
Planta 577, avenue de la Gare 35, 1951 Sion et
Commission cantonale de recours en matière fiscale du canton du Valais,
bâtiment Planta 577, 1950 Sion.

impôt fédéral direct; bénéfice des personnes morales

(recours de droit administratif contre la décision de la Commission cantonale
de recours en matière fiscale du canton du Valais du 26 mai 1999)
Faits:

A.
X. ________ SA, dont le siège social est à Sion, est une société anonyme dont
le but principal est l'exploitation d'un atelier d'architecture et tous les
travaux s'y rapportant. A.________ en est l'actionnaire et l'administrateur
unique.

Les comptes de la société sont clôturés au 30 juin. Pour les exercices
1992/1993, 1993/1994 et 1994/1995, la société a comptabilisé les montants
suivants:

1992/1993
1993/1994
1994/1995
Frais de véhicule
66'414
58'317
54'912
Amortissement
véhicule

20'000

12'000

7'200
Frais de
représentation

44'205

35'200

34'712
Frais de déplacement
55'613
41'334
45'712

Par décision du 10 septembre 1997, le Service cantonal des contributions du
canton du Valais (ci-après: le Service des contributions) a finalement
procédé à une reprise sur les frais de véhicule de 22'000 fr. pour 1993, de
19'500 fr. pour 1994 et de 18'300 fr. pour 1995. Il a estimé que le tiers des
frais comptabilisés devait être considéré comme des charges privées. Il a en
outre procédé à une reprise sur les frais de représentation de 20'000 fr.
pour 1993, de 11'200 fr. pour 1994 et de 10'700 fr. pour 1995, lesdits frais
ayant été admis à concurrence de 24'000 fr. au plus pour chacune des années
considérées.

B.
X.________ SA, a interjeté recours le 9 octobre 1997 auprès de la Commission
cantonale de recours en matière fiscale du canton du Valais (ci-après: la
Commission de recours). Elle a fait valoir que les frais de véhicule et de
représentation comptabilisés correspondaient tous à des dépenses
professionnelles réelles, établies sur la base de justificatifs.

Par décision du 26 mai 1999, notifiée le 28 août 2001, la Commission de
recours a partiellement admis le recours. Elle a supprimé la reprise opérée
sur les frais de véhicule et a arrêté, pour chaque exercice, celle liée aux
frais de représentation à 12'000 fr., tant en ce qui concerne les impôts
cantonaux et communaux qu'en ce qui concerne l'impôt fédéral direct.

C.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, X.________ SA,
demande au Tribunal fédéral de réformer la décision de la Commission de
recours en ce sens qu'aucune reprise n'est opérée pour chacun des exercices
1992, 1993 et 1994. Elle invoque en substance le caractère arbitraire et
insuffisamment motivé de la reprise retenue.

Le Service des contributions renonce à déposer des observations sur le
recours. La Commission de recours conclut au rejet du recours, dans la mesure
où il est recevable. L'Administration fédérale des contributions conclut au
rejet du recours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des
recours qui lui sont soumis (ATF 127 IV 148 consid. 1a p. 151; 127 I 92
consid. 1 p. 93; 127 II 198 consid. 2 p. 201 et la jurisprudence citée).

1.2 Selon l'art. 97 al. 1 OJ, le Tribunal fédéral connaît en dernière
instance des recours de droit administratif contre des décisions fondées sur
le droit public fédéral qui émanent de l'une des autorités énumérées à l'art.
98 OJ pour autant qu'aucune des exceptions prévues aux art. 99 à 102 OJ ou
dans la législation spéciale ne soit réalisée (ATF 127 II 1 consid. 2b/aa p.
3 et la jurisprudence citée). En tant qu'elle concerne l'impôt fédéral
direct, la décision de la Commission de recours a été rendue par une autorité
judiciaire statuant en dernière instance cantonale (cf. art. 98 lettre g OJ
et art. 8 al. 1 de la loi valaisanne du 24 septembre 1997 d'application de la
loi fédérale sur l'impôt fédéral direct); elle se fonde en outre sur le droit
public fédéral et n'entre pas dans le champ d'application des articles 99 à
102 OJ, de sorte que, déposé en temps utile et dans les formes prescrites par
la loi (art. 103 ss OJ), le recours de droit administratif est en principe
recevable à son encontre au regard des art. 97 ss OJ et de l'art. 146 de la
loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct (LIFD; RS
642.11).

En revanche, s'agissant des impôts cantonaux, la décision attaquée est fondée
sur le droit cantonal; seul un recours de droit public pourrait être formé à
son encontre pour autant qu'elle ait été rendue en dernière instance, après
épuisement des moyens de droit cantonal. En l'espèce, la recourante pouvait
porter sa cause devant la Cour de droit public du Tribunal cantonal valaisan,
de sorte que le présent recours est irrecevable en tant qu'il concerne les
impôts cantonaux (cf. art. 153bis al. 1 de la loi fiscale valaisanne du 10
mars 1976).

1.3 Lorsque le recours est dirigé, comme en l'espèce, contre la décision
d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faits
constatés dans la décision, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou
incomplets ou s'ils ont été établis au mépris des règles essentielles de
procédure (art. 104 let. b et 105 al. 2 OJ).

Le Tribunal fédéral revoit d'office l'application du droit fédéral, qui
englobe notamment les droits constitutionnels du citoyen (ATF 126 V 252
consid. 1a p. 254; 125 III 209 consid. 2 p. 211). Comme il n'est pas lié par
les motifs que les parties invoquent, il peut admettre le recours pour
d'autres raisons que celles avancées par le recourant ou, au contraire,
confirmer la décision attaquée pour d'autres motifs que ceux retenus par
l'autorité intimée (art. 114 al. 1 in fine OJ; ATF 127 II 264 consid. 1b p.
268; 121 II 473 consid. 1b p. 477 et les arrêts cités). En outre, en matière
de contributions publiques, il peut aller au-delà des conclusions des
parties, à l'avantage ou au détriment de celles-ci, lorsque le droit fédéral
est violé ou lorsque des faits ont été constatés de manière inexacte ou
incomplète (art. 114 al. 1 OJ). En revanche, il ne peut pas revoir
l'opportunité de la décision attaquée, le droit fédéral ne prévoyant pas un
tel examen en la matière (art. 104 lettre c ch. 3 OJ).

2.
2.1En droit fiscal suisse, le bénéfice net imposable de la société comprend
en particulier le solde du compte de résultats (art. 58 al. 1 LIFD et art. 49
al. 1 de l'arrêté du 9 décembre 1940 concernant la perception d'un impôt
fédéral direct [AIFD] en vigueur jusqu'au 31 décembre 1994). Les comptes
annuels de la société anonyme sont dressés conformément aux principes
généralement admis dans le commerce; ils doivent être complets, clairs et
faciles à consulter (art. 662a et 959 CO). Si ces principes ne sont pas
respectés et que le compte de résultats ne reflète pas le bénéfice réel de la
société anonyme, le résultat doit être corrigé en faveur comme au détriment
du contribuable (Francis Cagianut, Bedeutung der kaufmännischen Buchhaltung
und Bilanz im Steuerrecht, in: Archives 37, p. 137 ss, 142).

2.2 Parmi les prélèvements opérés sur le résultat commercial avant le calcul
du solde du compte de résultats qui entrent également en considération pour
le calcul du bénéfice net imposable figurent les distributions ouvertes ou
dissimulées de bénéfices et les avantages procurés à des tiers qui ne sont
pas justifiés par l'usage commercial (art. 58 al. lettre b LIFD et art. 49
al. 1 lettre b AIFD). Il y a distribution dissimulée de bénéfices lorsqu'à la
prestation de la société aux détenteurs de droits de participation ne
correspondent pas de contre-prestations ou des contre-prestations
insuffisantes qui n'auraient pas été faites ou l'auraient été dans une mesure
moindre à un tiers n'ayant pas de droit de participation. En particulier, il
y a distribution dissimulée de bénéfices lorsque la société grève indûment
son compte de résultats en remboursant à ses actionnaires ou en prenant à sa
charge des dépenses d'entretien sous couvert de frais de représentation
(Archives 63 p. 208 consid. 2a 212 s.; Peter Agner/Beat Jung/Gotthard
Steinmann, Kommentar zum Gestez über die direkte Bundessteuer, Zurich 1995,
ch. 4 ad art. 26; Ernst Blumenstein/Peter Locher, System des Steuerrechts,
Zurich 1995, p. 245).

2.3 Selon un principe généralement admis en matière fiscale, il incombe à
celui qui fait valoir l'existence d'un fait de nature à éteindre ou à
diminuer sa dette fiscale d'en apporter la preuve et de supporter les
conséquences de l'échec de cette preuve (Revue fiscale 54 118 consid. 9a p.
126; ATF 121 II 257 consid. 4c/aa p. 266 et les arrêts cités). Par ailleurs,
conformément aux art. 662a et 959 CO, les comptes annuels doivent observer le
principe de la justification (documentation) corollaire du principe de
sincérité: l'exactitude de la saisie et du traitement doit en tout temps
permettre un contrôle ultérieur de la comptabilité (Chambre fiduciaire,
Chambre suisse des experts comptables, fiduciaires et fiscaux, Manuel suisse
d'audit 1998, tome 1, ch. 2.124, p. 17). Dans ces conditions, il incombe à la
société de prouver que ses charges sont justifiées par l'usage commercial et
de supporter les conséquences de l'échec de cette preuve (Archives de droit
fiscal 68, 746 consid. 2b p. 749/750 et les arrêts cités).

3.
3.1En l'espèce, les reprises confirmées par la Commission de recours
concernent exclusivement les frais de représentation des exercices clôturés
en 1993, 1994 et 1995. La recourante fait valoir que les charges
comptabilisées correspondent à des dépenses effectives. A cet effet, elle a
produit le détail du compte "frais de représentation" pour l'exercice
1993-1994. Le total des charges enregistrées correspond au chiffre figurant
dans le compte d'exploitation de l'exercice considéré. Cette concordance ne
suffit toutefois pas à fonder l'admission de l'ensemble de ces dépenses au
titre de charges commerciales à charge du compte de résultats.

Les frais de représentation comptabilisés représentent 35'200 fr. Ils ont été
payés à concurrence de 30'250 fr. au moyen de deux cartes de crédit. La
recourante affirme que la plupart des frais de représentation se rapportent à
des frais de restaurant destinés à privilégier ses rapports avec les clients,
à élargir le cercle de ses mandants et à remercier les intervenants qui lui
permettaient de conserver son volume d'affaires.

Ces explications très générales et non étayées ne suffisent pas à établir que
l'usage commercial justifie les frais en cause. En effet, conformément à la
répartition du fardeau de la preuve, il incombait à la recourante d'apporter
la preuve que la totalité des dépenses comptabilisées était en relation
directe avec l'acquisition ou le maintien du chiffre d'affaires. Il ne
suffisait pas d'en tenir une liste. Pour les frais de restaurant ainsi que
pour les autres dépenses, elle devait produire les factures correspondantes
et préciser quels avaient été les clients et relations d'affaires qui avaient
bénéficié de ses invitations ou de ses cadeaux, d'autant, précise-t-elle, que
le paiement par carte de crédit permettait un contrôle aisé, selon elle, de
l'affectation des dépenses, démonstration qu'elle n'a pourtant pas été en
mesure d'apporter.

3.2 Par conséquent, en retenant que la recourante n'a pas démontré le
caractère justifié par l'usage commercial d'une partie des frais de
représentation comptabilisés en charge des comptes de résultats des exercices
comptables sous examen et en considérant qu'ils correspondent à des dépenses
privées qu'il convient d'ajouter au bénéfice net imposable, la Commission de
recours a correctement appliqué les art. 58 al. lettre b LIFD et 49 al. 1
lettre b AIFD.

4.
La recourante reproche encore à la Commission de recours d'avoir confirmé
arbitrairement le montant de la reprise opérée. Il est vrai que la Commission
de recours n'a pas exposé les critères l'ayant amenée à confirmer une reprise
de 12'000 fr. par exercice. Les frais de représentation comptabilisés
représentent 44'205 fr. pour 1993, 35'200 fr. pour 1994 et 34'712 fr. pour
1995. La reprise correspond ainsi respectivement à environ 27%, 34% et 34.5%
des dépenses invoquées. L'autorité intimée a donc concédé à la recourante que
les 2/3 environ des frais de représentation pouvaient être considérés comme
justifiés par l'usage commercial. En l'absence de toute justification du
caractère déductible des frais en cause, une telle proportion n'est
manifestement pas défavorable à la recourante. Dans ces conditions, la
Commission de recours n'a pas omis de prendre en considération des éléments
de fait ou de droit essentiels et l'évaluation chiffrée à laquelle elle a
procédé n'excède pas le pouvoir d'appréciation dont elle jouit en la matière.
Le grief de la recourante doit dès lors être écarté.

5.
Mal fondé, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable.

Succombant, la recourante doit supporter les frais judiciaires (art. 156 al.
1, 153 et 153a OJ) et n'a pas droit à des dépens (art. 159 al. 1 0J).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge de la recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie à la recourante, au Service cantonal
des contributions, Commission d'impôt des personnes morales et à la
Commission cantonale de recours en matière fiscale du canton du Valais, ainsi
qu'à l'Administration fédérale des contributions.

Lausanne, le 21 février 2002

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier: