Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2A.34/2001
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2A.34/2001

         IIe  C O U R  D E  D R O I T  P U B L I C
        *******************************************

                      16 juillet 2001

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger,
président, Hartmann et Yersin.
Greffière: Mme Ieronimo Perroud.

      Statuant sur le recours de droit administratif
                         formé par

Le Département fédéral de la défense, de la protection de
la population et des sports, à Berne,

                          contre

la décision rendue le 24 novembre 2000 par la Commission de
recours du Département fédéral de la défense, de la popula-
tion et des sports, à Esslingen, dans la cause qui oppose
le recourant à Y.________ , à Berne;

              (contrôles de sécurité relatifs
                       aux personnes)

         Vu les pièces du dossier d'où ressortent
                 les  f a i t s  suivants:

   A.- Y.________ , ressortissante française arrivée
en Suisse en septembre 1997, vit à Berne avec son mari,
Z.________ , citoyen suisse. Le 9 novembre 1999 elle a été
engagée par la Secrétaire générale des Services du Parle-
ment en qualité de stagiaire, d'abord auprès du Service des
commissions, puis, dès le mois de février 2000, auprès du
Secrétariat des commissions de gestion, où elle s'occupait
essentiellement de la tenue des procès-verbaux de langue
française. Ce dernier engagement, prévu initialement du 1er
février au 31 juillet 2000, a été prolongé jusqu'au 31 jan-
vier 2001.

   B.- Le 6 janvier 2000, à la demande de l'autorité
de nomination, l'engagement de Y.________ auprès du Secré-
tariat des commissions de gestion (l'activité précédemment
exercée ne nécessitant pas ce genre de contrôle) a été sou-
mis pour contrôle au service spécialisé chargé des contrô-
les de sécurité relatifs aux personnes, service appartenant
à la Division de la protection des informations et des ob-
jets du Département fédéral de la défense, de la protection
de la population et des sports (ci-après: le service spé-
cialisé). La demande de contrôle était fondée sur la loi
fédérale du 21 mars 1997 instituant des mesures visant au
maintien de la sûreté intérieure (LMSI; RS 120) et l'ordon-
nance du 20 janvier 1999 sur les contrôles de sécurité re-
latifs aux personnes (OCSP; RS 120.4).

   Après avoir rendu le 10 mai 2000 une première déci-
sion négative, annulée le 30 mai suivant pour vice de for-
me, le service spécialisé a invité Y.________ à consulter
son dossier et à se déterminer, ce qu'elle a fait le 9 juin
2000. Le 4 juillet 2000, l'autorité précitée a rendu une
nouvelle décision négative. Elle a relevé que, de par sa

fonction, l'intéressée pouvait avoir accès à des données et
à des informations sensibles. Elle a ajouté qu'elle était
de nationalité française et qu'elle n'était domiciliée en
Suisse que depuis octobre 1997. Elle a par ailleurs consi-
déré que l'exception, prévue par la loi, à l'exigence de la
nationalité suisse pour les agents fédéraux ne concernait
pas les services où les domaines de la sécurité intérieure
et extérieure ainsi que de la protection des informations
au niveau national jouaient un rôle prépondérant. Le servi-
ce spécialisé a donc conclu que l'engagement de Y.________
représentait un risque pour la sécurité et que celle-ci ne
pouvait avoir accès à des données personnelles ni à des in-
formations classifiées.

   C.- Par décision du 24 novembre 2000, la Commission
de recours du Département fédéral de la défense, de la pro-
tection de la population et des sports (ci-après: la Com-
mission de recours) a admis le recours interjeté le 21
juillet 2000 par Y.________ contre la décision susmention-
née et l'a annulée. Après avoir relevé que c'était à juste
titre que la recourante avait été soumise à un contrôle de
sécurité, la Commission de recours a constaté que les élé-
ments retenus par l'autorité intimée - soit sa nationalité
française et la brièveté de son séjour en Suisse - ne suf-
fisaient pas à fonder des craintes objectives et sérieuses
quant aux risques pour la sécurité que ferait courir son
engagement. Elle en a donc déduit qu'en l'absence d'infor-
mations concrètes et fiables relatives aux critères spéci-
fiques résultant de l'art. 20 LMSI, la décision attaquée
relevait d'un abus du pouvoir d'appréciation.

   D.- Agissant par la voie du recours de droit admi-
nistratif, le Département fédéral de la défense, de la pro-
tection de la population et des sports (ci-après: le Dépar-
tement fédéral de la défense) demande d'annuler la décision

de la Commission de recours du 24 novembre 2000 et d'ap-
prouver sa décision initiale négative.

   La Commission de recours conclut au rejet du re-
cours. Y.________ formule la même conclusion et demande en
outre la rectification des données inexactes ou obsolètes
la concernant qui figurent dans les dossiers du service
spécialisé.

         C o n s i d é r a n t   e n   d r o i t :

   1.- a) Selon l'art. 97 OJ en relation avec l'art. 5
PA, la voie du recours administratif est ouverte contre les
décisions fondées sur le droit public fédéral, à condition
qu'elles émanent des autorités énumérées à l'art. 98 OJ et
pour autant qu'aucune des exceptions prévues aux art. 99 à
102 OJ ou dans la législation spéciale ne soit réalisée.

   Ces conditions sont remplies en l'espèce. La déci-
sion attaquée, qui se fonde sur les art. 19 ss LMSI, a été
prise par une commission fédérale de recours au sens de
l'art. 98 lettre e OJ. Aucune des exceptions prévues aux
art. 99 à 102 OJ ou dans la législation spéciale n'est réa-
lisée. Le présent recours est donc recevable.

   b) En tant qu'autorité fédérale habilitée à recou-
rir en vertu de l'art. 103 lettre b OJ afin d'assurer
- dans l'intérêt public - une application correcte et uni-
forme du droit fédéral (ATF 127 II 32 consid. 1b et les ré-
férences citées), le Département fédéral n'a pas à justi-
fier d'un intérêt digne de protection à l'annulation ou à
la modification de la décision attaquée (cf. André Grisel,
Traité de droit administratif, vol. II, Neuchâtel 1984,
p. 906; Fritz Gygi, Bundesverwaltungsrechtspflege, 2e éd.,
Berne 1983, p. 164). Il peut ainsi recourir sans avoir à
établir l'existence d'un intérêt public spécifique à l'an-

nulation de la décision (ATF 113 Ib 219 consid. 1b). Quoi
qu'il en soit, la recevabilité du recours de droit adminis-
tratif exercé par une autorité fédérale au sens de l'art.
103 lettre b OJ suppose également un intérêt actuel (ATF
122 II 411 consid. 1d). Sur ce point, la jurisprudence re-
lative à l'art. 103 lettre a OJ s'applique donc ici par a-
nalogie (voir ci-après).

   c) D'après cette jurisprudence, le recours de droit
administratif, tout comme le recours de droit public, sup-
pose en principe l'existence d'un intérêt pratique et ac-
tuel à l'annulation ou à la modification de la décision at-
taquée (ATF 121 IV 345 consid. 1b; 118 Ib 442 consid. 2b).
Déduite du principe de l'économie de la procédure, cette
exigence vise à ce que le Tribunal fédéral se prononce sur
des questions concrètes et non pas purement théoriques (ATF
122 II 97 consid. 3 et les arrêts cités). Aussi l'intérêt
pratique et actuel fait-il en général défaut lorsque la dé-
cision attaquée a été exécutée ou est devenue sans objet,
comme dans la présente affaire, étant donné que l'engage-
ment de Y.________ a pris fin le 31 janvier 2001. Il est
toutefois renoncé à cette exigence lorsque la contestation
peut se reproduire en tout temps dans des circonstances
identiques ou analogues, que sa nature ne permet pas de la
soumettre à un contrôle du Tribunal fédéral avant qu'elle
ne perde son actualité et qu'en raison de sa portée de
principe, il existe un intérêt public suffisamment impor-
tant à la solution de la question litigieuse (ATF 118 Ib 1
consid. 2b, 356 consid 1a; 111 Ib 56 consid. 2b, 182 con-
sid. 2c; s'agissant du recours de droit public, voir notam-
ment ATF 121 I 279 consid. 1 et les arrêts cités). Tel est
le cas en l'espèce. En effet, des affaires analogues à la
présente cause peuvent se représenter. Par ailleurs, comme
selon l'art. 19 al. 3 LMSI, le contrôle de sécurité doit
être effectué avant la nomination à la fonction, il est
pratiquement impossible qu'une procédure de recours puisse

aboutir avant la date d'engagement prévue. Enfin, il existe
un intérêt public suffisamment important à statuer sur le
présent litige, vu la portée de principe de la question li-
tigieuse. En conséquence, il y a lieu d'entrer en matière
sur le recours.

   d) Selon l'art. 104 OJ, le recours de droit admi-
nistratif peut être formé pour violation du droit fédéral,
y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation. Com-
me le Tribunal fédéral n'est pas lié par les motifs que les
parties invoquent, il peut admettre le recours pour d'au-
tres raisons que celles avancées par le recourant ou, au
contraire, confirmer la décision attaquée pour d'autres mo-
tifs que ceux retenus par l'autorité intimée (art. 114 al.
1 in fine; ATF 121 II 447 consid. 1b, 473 consid. 1b; 117
Ib 114 consid. 4a). Lorsque le recours est dirigé - comme
dans la présente affaire - contre la décision d'une autori-
té judiciaire, le Tribunal fédéral est en revanche lié par
les faits constatés dans la décision, sauf s'ils sont mani-
festement inexacts ou incomplets ou s'ils ont été établis
au mépris de règles essentielles de procédure (art. 105 al.
2 OJ). De plus, le Tribunal fédéral ne peut pas revoir
l'opportunité de la décision attaquée, le droit fédéral ne
prévoyant pas un tel examen en la matière.

   e) Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête de
Y.________ de rectification des données inexactes ou obso-
lètes figurant dans les dossiers du service spécialisé
(art. 20 OCSP). Cette requête excède en effet l'objet du
litige tel que soumis à la Commission de recours.

   2.- a) Selon l'art. 19 al. 1 LMSI, le Conseil fédé-
ral peut prévoir des contrôles de sécurité à l'égard d'a-
gents de la Confédération (...) qui, dans leur activité,
ont connaissance, de manière régulière et approfondie, de
l'activité gouvernementale ou d'importants dossiers de la

politique de sécurité sur lesquels ils peuvent exercer une
influence (lettre a), ont régulièrement accès à des secrets
relevant de la sûreté intérieure ou extérieure ou à des in-
formations dont la révélation pourrait menacer l'accomplis-
sement de tâches importantes de la Confédération (lettre
b), (...) ont régulièrement accès à des données personnel-
les sensibles, dont la révélation pourrait porter gravement
atteinte aux droits individuels des personnes concernées
(lettre. e). Le contrôle de sécurité est effectué avant la
nomination à la fonction (...). La personne assujettie au
contrôle doit consentir à l'exécution de celui-ci (al. 3
1ère et 2ème phrases). Le Conseil fédéral arrête la liste
des fonctions qui, au sein de l'administration fédérale,
impliquent l'assujettissement de leur titulaire à un con-
trôle de sécurité (al. 4, 1ère phrase, ainsi que l'art. 2
OCSP).

   b) Conformément à l'art. 20 LMSI, le contrôle con-
siste à recueillir des données pertinentes pour la sécurité
touchant au mode de vie de la personne concernée, notamment
à ses liaisons personnelles étroites et à ses relations fa-
miliales, à sa situation financière, à ses rapports avec
l'étranger et à des activités illégales menaçant la sûreté
intérieure et extérieure. Aucune donnée n'est recueillie
sur l'exercice de droits constitutionnels (al. 1). Selon
l'alinéa 2 de cette disposition, les données peuvent être
recueillies par l'entremise de l'office fédéral, à partir
des registres des organes de sûreté et de poursuite pénale
de la Confédération et des cantons, ainsi que du casier ju-
diciaire (lettre a); à partir des registres des offices
cantonaux des poursuites et des faillites, ainsi que des
contrôles de l'habitant (lettre b); par des enquêtes sur
les personnes soumises au contrôle effectuées par les poli-
ces cantonales compétentes sur mandat du service spécialisé
(lettre c); en demandant des renseignements relatifs à des
procédures pénales en cours aux organes de poursuite pénale

compétents (lettre d); par le biais de l'audition de tiers,
si la personne concernée y a consenti (lettre e); par le
biais de l'audition de la personne concernée (lettre f).

   3.- a) Selon le recourant, il serait erroné de con-
sidérer que les faits ont été élucidés de manière insuffi-
sante. Il reproche en outre à la Commission de recours de
ne pas avoir mentionné dans son jugement comment le service
spécialisé aurait dû procéder afin de recueillir d'autres
renseignements fiables sur l'intimée. A ce sujet, il affir-
me que ce service a expressément renoncé à demander à l'in-
téressée l'autorisation de se procurer des informations au-
près de ses connaissances ou d'autorités étrangères, étant
donné que ce genre de renseignements ne pouvait être véri-
fié de façon critique dans un laps de temps raisonnable.

   b) Ces griefs sont infondés. Comme la Commission de
recours l'a constaté avec pertinence, le dossier de la cau-
se contient peu d'éléments sur l'enquête menée par le ser-
vice spécialisé. Y figurent seulement le formulaire relatif
à la demande d'enquête, une lettre de la Police fédérale
qui demande à la police de la ville de Berne d'établir un
rapport sur l'intimée (soit des renseignements sur des ac-
tivités susceptibles de menacer la sûreté intérieure et ex-
térieure, sur sa situation fiscale actuelle, sur d'éven-
tuelles poursuites et sur son honorabilité) et ledit rap-
port, d'où il résulte que l'intéressée n'a pas fait l'objet
de poursuites, que son revenu et sa fortune imposables sont
pour le moment inconnus. On y trouve enfin la prise de po-
sition écrite de l'intimée, qui n'a toutefois été sollici-
tée qu'après l'annulation de la première décision rendue
par le service spécialisé. Par ailleurs, contrairement à
l'affirmation du recourant, la Commission de recours - com-
me clairement indiqué dans la décision attaquée (cf. con-
sid. 4, par. 2) - savait que des informations avaient été
demandées tant à la Police fédérale qu'au Bureau central

suisse de police. Enfin, il n'incombait pas à la Commission
de recours de fournir des indications au service spécialisé
sur la manière dont il devait mener son enquête: en effet,
la loi définit clairement les moyens à sa disposition dans
ce but. A cet égard, on peut relever que l'argument selon
lequel le service spécialisé a renoncé à pousser plus loin
ses recherches, parce que le temps consacré à l'enquête ne
devait pas être disproportionné, n'est pas pertinent si
l'on considère que ce service a mis plus de six mois pour
rendre sa décision.

   4.- a) Le recourant fait valoir que pour les per-
sonnes qui, comme l'intimée, vivent depuis peu de temps en
Suisse, la portée des registres cantonaux et fédéraux d'où
sont tirées les informations nécessaires est forcément très
limitée; en l'absence de renseignements, une attestation de
"non-défiance" ("Persilschein") ne peut entrer en considé-
ration. A son avis, c'est pour pallier ce genre de problè-
me qu'en application de l'art. 2 al. 1 et 2 du statut des
fonctionnaires du 30 juin 1927 (StF; RS 172.221.10), en re-
lation avec l'art. 6 al. 2 du règlement des employés du 10
novembre 1959 (RE; RS 172.221.104), seuls des citoyens
suisses sont en principe éligibles comme fonctionnaires fé-
déraux au sens large. Il relève ensuite que l'exigence de
la nationalité suisse pour les fonctionnaires fédéraux - si
évidente qu'elle ne fait, selon lui, l'objet d'aucun com-
mentaire dans le message relatif à la loi sur le statut des
fonctionnaires de 1927 - s'explique essentiellement par des
motifs de sécurité; elle est par ailleurs reprise dans la
loi fédérale du 24 mars 2000 sur le personnel de la Confé-
dération, à son art. 8 al. 3, qui prévoit que la nationali-
té suisse et même sa possession exclusive reste la condi-
tion pour accéder aux emplois désignés par le Conseil fédé-
ral. En méconnaissant le lien étroit existant entre la loi
fédérale sur des mesures visant au maintien de la sûreté

intérieure et celle sur le statut des fonctionnaires, la
Commission de recours aurait donc violé le droit fédéral.

   b) aa) Cette opinion ne peut être partagée. Comme
relevé à juste titre dans la décision attaquée, le service
spécialisé s'est fondé sur deux critères pour décréter que
l'intimée représentait un risque pour la sécurité. En pre-
mier lieu, il a pris en compte sa nationalité française. A
ce sujet, il convient de relever que, contrairement à l'a-
vis du recourant, même si la nationalité suisse fait en
principe partie des conditions d'engagement ou de nomina-
tion pour les agents de la Confédération, des exceptions
sont possibles. Cela ressort clairement tant du Message du
18 juillet 1924 du Conseil fédéral concernant le projet de
loi fédérale sur le statut des fonctionnaires, où il a été
considéré opportun de prévoir la possibilité d'engager des
étrangers avec l'assentiment du Conseil fédéral (cf. FF
1924 III p. 51/52), que du Message du 14 décembre 1998 con-
cernant la loi sur le personnel de la Confédération, où il
est observé que l'exigence de la nationalité suisse est li-
mitée aux emplois où cette restriction est nécessaire pour
remplir des tâches relevant de l'exercice de la puissance
publique, soit principalement dans l'armée, la police,
l'administration fiscale et la diplomatie (cf. FF 1999 II
p. 1459). Il est donc faux de considérer que pour des rai-
sons de sécurité seuls des ressortissants suisses peuvent
accéder à la fonction publique. Par ailleurs, comme observé
à juste titre dans le jugement contesté, les contrôles de
sécurité sont liés uniquement à la fonction occupée et doi-
vent porter sur la personnalité et l'entourage de la per-
sonne concernée; nulle part n'est posée l'exigence de la
nationalité suisse.

   Ce dernier aspect ressort également du Message du 7
mars 1994 concernant la loi fédérale sur des mesures visant
au maintien de la sûreté intérieure (FF 1994 II p. 1123

ss). Dans celui-ci, la nécessité de procéder à des contrô-
les de sécurité relatifs aux personnes, en tant que mesure
préventive, est fondée sur l'estimation selon laquelle
l'une des menaces les plus grandes et les plus vives pour
la sûreté intérieure vient des personnes occupant des pos-
tes clés qui commettent une trahison, travaillent contre
l'Etat lui-même ou veulent changer ses institutions de ma-
nière illicite (FF 1994 II p. 1145). Plus précisément, il y
est relevé que dans de nombreux cas ce sont les antécédents
d'une personne qui ouvrent les portes à l'extorsion, la
corruption ou la trahison. De même, des difficultés person-
nelles et financières ou des relations nouées lors de voya-
ges à l'étranger, mais maintenues secrètes en Suisse, peu-
vent, selon les circonstances, créer ultérieurement des si-
tuations susceptibles de nuire gravement à l'Etat, lequel,
par ailleurs, ne peut pas se permettre d'occuper des per-
sonnes dont l'intention est de lui faire du tort (FF 1994
II p. 1187). On constate ainsi que l'élément propre à la
nationalité n'est pas au premier plan et ne peut, en tout
cas en l'espèce, être à lui seul décisif.

   bb) En ce qui concerne le second élément retenu,
soit la brièveté du séjour en Suisse de l'intimée, il n'est
également pas suffisant pour fonder des craintes objectives
pour la sécurité, vu que dans le cadre des investigations
menées, aucune information négative n'a pu être recueillie.
A cet égard, on peut également souligner que si le service
spécialisé, à la suite des recherches faites, avait encore
des doutes au sujet de l'intéressée, il lui incombait de
pousser plus loin son enquête, soit en procédant à son au-
dition personnelle, soit éventuellement et avec son accord
à l'audition de ses proches. Il ne pouvait en aucun cas se
contenter, comme il l'a fait dans le cas concret, d'une en-
quête aussi sommaire.

   c) Il ressort de ce qui précède que la Commission
de recours, en annulant la décision du service spécialisé
parce que cette dernière n'a pas été rendue en application
des critères légaux prévus à l'art. 20 LMSI, n'a pas violé
le droit fédéral. Le présent recours, infondé, doit donc
être rejeté et le jugement attaqué, qui annule la décision
de première instance, confirmé.

   5.- Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté.
L'intérêt pécuniaire de la Confédération n'étant pas en
jeu, il ne se justifie pas de prélever d'émolument judi-
ciaire (art. 156 al. 2 OJ). Il n'y a pas lieu non plus
d'allouer des dépens à l'intimée qui n'est pas assistée
d'un mandataire professionnel et qui, étant elle-même ju-
riste, n'a pas dû supporter des frais importants.

                      Par ces motifs,

           l e  T r i b u n a l  f é d é r a l :

   1. Rejette le recours.

   2. Dit qu'il n'est pas perçu d'émolument judiciai-
re, ni alloué de dépens.

   3. Communique le présent arrêt en copie au Départe-
ment fédéral de la défense, de la protection de la popula-
tion et des sports, à la Commission de recours du Départe-
ment fédéral de la défense, de la protection de la popula-
tion et des sports et à Y.________.

                        __________

Lausanne, le 16 juillet 2001
IER/vlc

           Au nom de la IIe Cour de droit public
                du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
                       Le Président,

                       La Greffière,