Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2A.323/2001
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2A.323/2001

       IIe   C O U R   D E   D R O I T   P U B L I C
      ***********************************************

                     19 septembre 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Wurzburger, Président,
Hungerbühler et Müller. Greffier: M. Langone.

       Statuant sur le recours de droit administratif
                         formé par

V.________, représentée par Me Laurent Didisheim, avocat à
Genève,

                           contre

la décision prise le 19 juin 2001 par la Commission fédérale
de recours en matière de contributions dans la cause qui
l'oppose à l'Administration fédérale des contributions, Di-
vision principale de la taxe sur la valeur ajoutée;

  (TVA; art. 21 al. 1 et 63 al. 4 PA; observation du délai
               pour verser l'avance de frais)

          Vu les pièces du dossier d'où ressortent
                 les  f a i t s  suivants:

        A.- Le 27 février 2001, la société A.________,
(devenue entre-temps V.________) a recouru auprès de la Com-
mission fédérale de recours en matière de contributions
(ci-après: la Commission) contre la décision sur réclamation
du 29 janvier 2001 de l'Administration fédérale des contri-
butions.

        Par acte du 12 mars 2001, le président de la Com-
mission a imparti à ladite société un délai expirant le 27
mars 2001 pour s'acquitter d'une avance de frais de
5'000 fr., sous peine d'irrecevabilité, en application de
l'art. 63 al. 4 PA.

        Par télécopie du 26 mars 2001, portant la mention
"urgent", la société a donné l'ordre à la Banca Unione di
Credito, à Lugano, de verser le montant de l'avance de frais
requise sur le compte postal de la Commission.

        La banque a établi une liste regroupant divers
ordres de virement (y compris celui du 26 mars 2001) qu'elle
aurait déposée, sous pli ordinaire (courrier A), au bureau
de poste de Bioggio le 27 mars 2001.

        Ce courrier est parvenu à Postfinance, centre de
traitement de la Poste Suisse, le 28 mars 2001. Le compte
postal de la caisse de la Commission a été crédité le 29
mars 2001.

        Par décision du 19 juin 2001, la Commission a dé-
claré irrecevable le recours du 27 février 2001, au motif
que non seulement le support de données était parvenu à la
Poste après l'échéance du délai, mais encore que la date

d'exécution indiquée par la banque était celle du 28 mars
2001.

        B.- Agissant par la voie du recours de droit ad-
ministratif, V.________ demande au Tribunal fédéral
d'annuler cette décision et de renvoyer la cause à la Com-
mission pour qu'elle instruise et juge au fond.

        La Commission a renoncé à déposer ses observations,
tandis que l'Administration fédérale des contributions con-
clut au rejet du recours.

         C o n s i d é r a n t   e n   d r o i t :

        1.- a) Aux termes de l'art. 63 al. 4 PA, l'autorité
de recours perçoit du recourant une avance de frais équiva-
lente aux frais de procédure présumés. Elle lui impartit
pour le versement de cette créance un délai raisonnable en
l'avertissant qu'à ce défaut elle n'entrera pas en matière.
Selon l'art. 21 al. 1 PA (dont la teneur est à peu près
identique à celle de l'art. 32 al. 3 OJ), les écrits sont
remis à l'autorité ou, à son adresse, à la Poste Suisse
(Poste) le dernier jour du délai au plus tard.

        b) D'après la jurisprudence du Tribunal fédéral re-
lative à l'art. 32 al. 3 OJ, applicable ici par analogie
(André Moser, in: Moser/Uebersax, Prozessieren vor eidge-
nössischen Rekurskommissionen, Bâle/Francfort-sur-le-Main
1998, n. 4.5, p. 145), lorsque l'acte à accomplir consiste
dans le versement d'une avance de frais, le délai est ob-
servé si le versement est opéré au guichet postal ou si
l'ordre de versement est adressé à la Poste le dernier jour
du délai, alors même que le virement ne serait crédité
qu'ultérieurement au compte du tribunal (ATF 96 I 471 con-

sid. 1; 105 Ia 51; 110 V 218; 111 V 407 consid. 1b; 114 Ib
67 consid. 1. Voir aussi Poudret/Sandoz-Monod, Commentaire
de la loi fédérale d'organisation judiciaire, Berne 1990,
note 4.5 ad art. 32).

        c) En revanche, s'il est fait usage de l'ordre de
paiement électronique OPAE de la Poste (ancienne dénomina-
tion: service des ordres groupés [SOG] des PTT), utilisé par
la plupart des banques, le délai pour verser l'avance de
frais n'est considéré comme observé qu'à la double condition
que le support de données ait été remis à la Poste au plus
tard le dernier jour du délai fixé par le Tribunal fédéral
et que la date d'échéance déterminée dans le support de don-
nées corresponde au dernier jour, au plus tard, de ce délai
(cf. ATF 117 Ib 220 ss; voir aussi ATF 118 Ia 8 consid. 2a
p. 12).

        2.- a) En l'occurrence, la recourante a donné
l'ordre de paiement de l'avance de frais requise à la Banca
Unione di Credito le 26 mars 2001. Celle-ci a, semble-t-il,
remis cet ordre à la Poste (bureau de poste de Bioggio) le 27
mars 2001, soit le dernier jour du délai. Postfinance a reçu
et traité cet ordre de virement le 28 mars 2001. Le compte
postal de la Commission a été crédité du montant de 5'000 fr.
le 29 mars 2001.

        La Commission est partie de l'idée que le paiement
de l'avance de frais avait été opéré par le biais de l'ordre
de paiement électronique OPAE de la Poste, qui est utilisé
par la plupart des banques. Si tel est le cas, c'est à juste
titre qu'elle a considéré que toutes les exigences posées par
la jurisprudence y relative (cf. ATF 117 Ib 220 ss) n'étaient
pas respectées et déclaré le recours irrecevable pour non-
observation du délai pour verser l'avance de frais.

        Cependant, il semble plutôt que la banque de la
recourante n'ait pas fait usage de l'ordre de paiement élec-
tronique OPAE pour verser l'avance de frais, mais se soit
bornée à établir et à remettre à la Poste une liste sur pa-
pier groupant divers ordres de paiement. L'attestation de
Postfinance du 11 mai 2001 confirme d'ailleurs qu'il s'agis-
sait d'un "ordre sur papier" et ne fait aucune allusion à
l'ordre de paiement électronique OPAE. Le fait que la banque
de la recourante n'ait apparemment mentionné dans l'ordre en
question aucune date d'échéance - contrairement à ce qui res-
sort de la décision attaquée - est un indice supplémentaire
qu'elle a employé un ordre sous la forme papier, car l'indi-
cation d'une date d'échéance par le client de Postfinance est
obligatoire en cas d'utilisation d'un ordre de paiement élec-
tronique OPAE (cf. ch. 2.2 du Manuel OPAE). En résumé, si la
banque n'a pas fait usage de l'ordre de paiement électronique
OPAE, il semble de prime abord que la Commission aurait dû
retenir que le délai pour verser l'avance de frais avait été
respecté. En dehors des cas d'utilisation de l'OPAE, il suf-
fit en effet que l'ordre de virement soit adressé à la Poste
le dernier jour du délai pour que celui-ci soit considéré
comme observé, en application de la jurisprudence citée ci-
dessus (consid. 1b).

        b) En l'espèce toutefois, il n'est pas possible, sur
la base des seules pièces figurant au dossier, de déterminer
avec certitude si la banque de la recourante a fait usage ou
non de l'ordre de paiement électronique OPAE pour verser
l'avance de frais. Ainsi, dans la mesure où le Tribunal fédé-
ral ne dispose pas de tous les éléments nécessaires pour se
prononcer en toute connaissance de cause sur la question li-
tigieuse, il y a lieu d'annuler la décision attaquée et de
renvoyer l'affaire pour complément d'instruction et pour nou-
velle décision à la Commission, en application de l'art. 114
al. 2 OJ. Il appartiendra donc à celle-ci de demander à la
Poste tous les éclaircissements nécessaires pour trancher le

point de savoir si l'avance de frais a été versée à temps et,
le cas échéant, d'entrer en matière sur le recours.

        3.- Vu ce qui précède, il y a lieu d'admettre le re-
cours, d'annuler la décision attaquée et de renvoyer la cause
à la Commission pour nouvelle décision dans le sens des con-
sidérants. Si la Confédération n'a pas à supporter les frais
judiciaires (art. 156 al. 2 OJ), elle doit en revanche verser
une indemnité de dépens à la recourante, assistée d'un manda-
taire professionnel (art. 159 OJ).

                       Par ces motifs,

           l e   T r i b u n a l   f é d é r a l ,

                      vu l'art. 36a OJ:

        1.- Admet le recours et annule la décision attaqué.

            Renvoie la cause à la Commission fédérale de re-
cours en matière de contributions pour nouvelle décision dans
le sens des considérants.

        2.- Dit qu'il n'est pas perçu d'émolument judi-
ciaire.

        3.- Dit que la Confédération versera à la recourante
une indemnité de 1'500 fr. à titre de dépens pour la procé-
dure devant le Tribunal fédéral.

        4.- Communique le présent arrêt en copie au manda-
taire de la recourante, à l'Administration fédérale des con-
tributions, ainsi qu'à la Commission fédérale de recours en
matière de contributions.

Lausanne, le 19 septembre 2001
LGE/dxc

            Au nom de la IIe Cour de droit public
                 du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
                        Le Président

                        Le Greffier,