Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2A.192/2001
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2A.192/2001

        IIe   C O U R   D E   D R O I T   P U B L I C
       ***********************************************

                       9 octobre 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Wurzburger, président,
Hungerbühler et Berthoud, juge suppléant.
Greffière: Mme Rochat.

       Statuant sur le recours de droit administratif
                          formé par

la Commission fédérale des maisons de jeu, à Berne,

                          contre

l'arrêt rendu le 23 mars 2001 par le Tribunal administratif
du canton de Fribourg (IIIe Cour administrative), dans la
cause qui oppose la société X.________ SA, à Fribourg, repré-
sentée par Me Jean-Yves Hauser, avocat à Fribourg, au Service
de la police du commerce et des établissements publics du
canton de Fribourg;

       (autorisation d'exploiter des appareils de jeu)

          Vu les pièces du dossier d'où ressortent
                  les  f a i t s  suivants:

   A.- La société X.________ SA exploite des appareils
de jeu dans différents établissements publics du canton de
Fribourg, ainsi que le salon de jeu A.________, à Fribourg.

   Par décision du 21 décembre 2000, le Service de la
police du commerce et des établissements publics (ci-après:
le Service de la police du commerce) a refusé le renouvelle-
ment de l'autorisation d'exploitation de neuf appareils de
jeu, propriété de X.________ SA, et a ordonné leur mise hors
service à partir du 1er janvier 2001. Il a considéré que
l'exploitation de ces appareils était en contradiction avec
la règle impérative de l'art. 60 al. 2 de la loi du 18 décem-
bre 1998 sur les jeux de hasard et les maisons de jeu (loi
sur les maisons de jeu, LMJ; RS 935.52), dans la mesure où
leur installation datait du 27 juillet 1998 pour les deux ap-
pareils du café-restaurant B.________, à Saint-Aubin, du
18 septembre 1998 pour les appareils du restaurant
C.________, à Fribourg, et du 10 mai 2000 pour les cinq appa-
reils du salon de jeu.

   B.- X.________ SA a recouru auprès du Tribunal admi-
nistratif contre cette décision, en faisant essentiellement
valoir qu'elle avait reçu des assurances formelles de pouvoir
exploiter les appareils litigieux pendant le délai transi-
toire de cinq ans de l'art. 60 al. 2 LMJ.

   Par arrêt du 23 mars 2001, le Tribunal administratif
a partiellement admis le recours. Il a retenu en bref que si
les appareils litigieux avaient bien été mis en exploitation
postérieurement à la date butoir du 1er novembre 1997 et que
la poursuite de leur exploitation ne pouvait pas être autori-

sée au regard de l'art. 60 al. 2 LMJ, les autorités cantona-
les avaient toutefois fourni à X.________ SA des assurances
formelles de pouvoir continuer l'exploitation des appareils
installés au salon de jeu A.________ pendant le délai de cinq
ans de l'art. 60 al. 2 LMJ. Il se justifiait dès lors d'auto-
riser l'exploitation de ces appareils en application du prin-
cipe de la protection de la bonne foi. En revanche, le Tribu-
nal administratif a ordonné la mise hors service et l'enlève-
ment des appareils installés dans les établissements publics
C.________, à Fribourg, et B.________, à Saint-Aubin.

   C.- Agissant par la voie du recours de droit admi-
nistratif, la Commission fédérale des maisons de jeu conclut,
avec suite de frais et dépens, à l'annulation de l'arrêt du
Tribunal administratif du 23 mars 2001, en tant qu'il auto-
rise l'exploitation des cinq appareils servant aux jeux de
hasard au salon de jeu A.________, à Fribourg. A titre subsi-
diaire, elle invite le Tribunal fédéral à renvoyer X.________
SA devant les autorités cantonales compétentes pour lui al-
louer une éventuelle indemnité. Ses arguments et ses moyens
seront examinés ci-après, dans la mesure utile.

   Le Tribunal administratif et le Service de la police
du commerce ont renoncé à présenter des observations.

   X.________ SA conclut, sous suite de frais et dé-
pens, au rejet du recours dans la mesure où il est recevable.

          C o n s i d é r a n t   e n   d r o i t :

   1.- a) Le Tribunal fédéral examine d'office et li-
brement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF
127 III 41 consid. 2a p. 42; 126 I 207 consid. 1 p. 209 et
les arrêts cités).

   b) Selon l'art. 103 lettre b OJ, le département com-
pétent a qualité pour recourir ou, lorsque le droit fédéral
le prévoit, la division compétente de l'Administration fédé-
rale, s'il s'agit de décisions émanant de commissions fédéra-
les de recours ou d'arbitrage ou de décisions prises en der-
nière instance cantonale.

   En l'espèce, le recours n'est pas formé par le Dé-
partement fédéral de justice et police, de sorte que la re-
courante ne saurait fonder sa qualité pour recourir sur la
jurisprudence publiée aux ATF 125 II 633 ss. En fait, la re-
courante ne peut invoquer aucune norme de droit fédéral qui
l'autoriserait expressément à recourir en son propre nom con-
tre la décision d'une autorité cantonale (voir, par exemple,
art. 43 ss de la loi du 21 mars 1997 sur l'organisation du
gouvernement et de l'administration; RS 172.010). Elle se ré-
fère à la disposition générale de l'art. 48 LMJ qui lui assi-
gne la tâche de veiller au respect des dispositions légales
et de prendre les dispositions nécessaires à l'application de
la loi.

   Même en l'absence de délégation expresse dans la
loi, il faut admettre que la Commission fédérale des maisons
de jeu est compétente pour déposer un recours. A l'instar de
la Commission fédérale des banques, qui lui a servi de mo-
dèle, elle jouit en effet d'une grande autonomie (voir Mes-
sage du Conseil fédéral du 26 février 1997 relatif à la loi
sur les jeux de hasard et les maisons de jeu; FF 1997 III
pp. 137 ss, sp. p. 154). Conformément à l'art. 93 al. 1 de
l'ordonnance du Conseil fédéral du 23 février 2000 sur les
jeux de hasard et les maisons de jeu (OLMJ; RS 935.521), elle
est indépendante des autorités administratives et n'est rat-
tachée au Département fédéral de justice et police qu'au plan
administratif, par l'intermédiaire du secrétariat général du
Département (art. 93 al. 2 OLMJ); dans l'application de la

législation sur les maisons de jeu, elle n'est en outre pas
liée par les instructions du Département (art. 93 al. 3
OLMJ). N'étant subordonnée qu'au Conseil fédéral (art. 46
LMJ), la Commission fédérale des maisons de jeu jouit donc de
compétences étendues pour veiller au respect de la loi. Selon
l'art. 121 al. 3 OLMJ, elle est expressément habilitée à re-
courir contre les décisions de la Commission fédérale de re-
cours en matière de maisons de jeu. Dans ces conditions, il
se justifie de lui reconnaître également la qualité pour re-
courir contre les décisions rendues par les autorités canto-
nales dans le domaine très restreint laissé à la compétence
des cantons, soit la continuation de l'exploitation, à titre
temporaire et pour un nombre limité, d'appareils servant à
des jeux de hasard en dehors des casinos (art. 60 al. 2 LMJ
et 135 OLMJ).

   c) Il y a dès lors lieu d'entrer en matière sur le
recours de droit administratif qui a en outre été déposé en
temps utile et dans les formes requises.

   2.- a) D'après l'art. 104 OJ, le recours de droit
administratif peut être formé pour violation du droit fédé-
ral, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation
(lettre a) ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète
des faits pertinents, sous réserve de l'art. 105 al. 2 OJ
(lettre b).

   Le Tribunal fédéral vérifie d'office l'application
du droit fédéral, qui englobe notamment les droits constitu-
tionnels des citoyens (ATF 124 II 517 consid. 1 p. 519; 123
II 385 consid. 3 p. 388), sans être lié par les motifs invo-
qués par les parties (art. 114 al. 1 in fine OJ). En revan-
che, lorsque le recours est dirigé, comme en l'espèce, contre
la décision d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral
est lié par les faits constatés dans cette décision, sauf

s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont
été établis au mépris de règles essentielles de procédure
(art. 105 al. 2 OJ). En outre, le Tribunal fédéral ne peut
pas revoir l'opportunité de l'arrêt entrepris, le droit fédé-
ral ne prévoyant pas un tel examen en la matière (art. 104
lettre c ch. 3 OJ).

   3.- L'objet du présent recours porte exclusivement
sur l'autorisation accordée à X.________ SA de poursuivre
l'exploitation de cinq appareils de jeux de hasard dans le
salon de jeu A.________, à Fribourg, en raison des assurances
formelles que lui auraient fournies les autorités cantonales
fribourgeoises.

   a) Découlant directement de l'art. 9 Cst. et valant
pour l'ensemble de l'activité étatique, le principe de la
bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu'il
met dans les assurances reçues des autorités (ATF 126 II 377
consid. 3a p. 387 et les arrêts cités; 124 II 265 consid. 4a
p. 269/270). Selon la jurisprudence établie sur la base de
l'art. 4 aCst., applicable au regard de l'art. 9 Cst., un
renseignement ou une décision erronés de l'administration
peuvent obliger celle-ci à consentir à un administré un avan-
tage contraire à la réglementation en vigueur, à condition
que l'autorité soit intervenue dans une situation concrète à
l'égard de personnes déterminées, qu'elle ait agi ou soit
censée avoir agi dans les limites de ses compétences et que
l'administré n'ait pas pu se rendre compte immédiatement de
l'inexactitude du renseignement obtenu. Il faut encore qu'il
se soit fondé sur les assurances ou le comportement dont il
se prévaut pour prendre des dispositions auxquelles il ne
saurait renoncer sans subir de préjudice, et que la réglemen-
tation n'ait pas changé depuis le moment où l'assurance a été
donnée (ATF 122 II 113 consid. 3b/cc p. 123 et les références
citées; 121 II 473 consid. 2c p. 479). La question de savoir

si, dans un cas déterminé, le principe de la bonne foi a été
violé est une question de droit que le Tribunal fédéral exa-
mine librement (art. 104 lettre a OJ en relation avec
l'art. 114 al. 1 OJ; ATF 117 Ia 285 consid. 2 p. 287; 108 Ib
377 consid. 3b p. 385).

   b) La recourante fait valoir en premier lieu que le
Tribunal administratif a retenu à tort l'existence d'une pro-
messe formelle de la part des autorités cantonales fribour-
geoises.

   Le 2 juin 1999, alors qu'elle bénéficiait d'une pa-
tente autorisant l'exploitation de deux machines à sous pour
le salon de jeu A.________, la société X.________ SA s'est
adressée au Service de la police du commerce pour se rensei-
gner sur les modalités d'application de l'ordonnance du Con-
seil fédéral du 22 avril 1998 concernant les appareils auto-
matiques servant aux jeux d'argent (ordonnance sur les auto-
mates de jeux d'argent, OAJA; RS 935.522) à compter du 1er
janvier 2000. Le chef du Service de la police du commerce a
répondu à cette interpellation par deux lettres du 9 septem-
bre 1999. Il relevait que, d'une manière générale, il serait
contraint de refuser à l'avenir toute demande d'autorisation
d'exploiter des jeux à jetons non autorisés à la date du
22 avril 1998 mais qu'il tolérerait, durant un délai de cinq
ans à compter du 1er janvier 2000, la poursuite de l'exploi-
tation des jeux à jetons admis jusqu'ici dans un salon de
jeu. Au sujet du salon de jeu A.________, il constatait que
cet établissement n'avait pas encore ouvert ses portes et que
l'autorisation d'exploiter des machines à sous avait été ac-
cordée après la date fatidique du 22 avril 1998. Au lieu de
déduire de ces constatations que l'autorisation d'exploiter
des machines à sous dans le salon de jeu A.________ ne pou-
vait pas être accordée, conformément aux principes généraux
qu'il venait d'exposer, le chef de Service de la police du

commerce a invité X.________ SA à obtenir confirmation, de la
part du Conseiller d'Etat en charge de la Direction de la
justice, de la police et des affaires militaires du canton de
Fribourg (ci-après: le Directeur de la police), de sa déci-
sion du 18 août 1998 autorisant expressément l'exploitation
de machines à sous et à lui donner ainsi la possibilité de se
déterminer sur le cas particulier de ce salon de jeu à la lu-
mière des récentes prises de position fédérales. Dans sa ré-
ponse du 4 octobre 1999, le Directeur de la police a d'abord
rappelé que l'autorisation délivrée le 18 août 1998, pour
l'exploitation d'un salon de jeu à Y.________, constituait
une confirmation de celle octroyée le 14 novembre 1994 pour
un emplacement sis à la rue de Locarno. Il en a déduit qu'il
serait excessivement rigoureux de réduire à néant un projet
initié plusieurs années auparavant, de sorte qu'il admettait
la mise en exploitation du salon de jeu A.________ dans les
semaines à venir, à condition qu'il n'abrite pas un nombre
d'appareils de jeu supérieur à celui annoncé antérieurement
au Service de la police du commerce.

   Au vu de la correspondance précitée, il résulte
clairement que les autorités cantonales fribourgeoises ont
accepté de faire une exception en faveur du salon de jeu
A.________ et de l'autoriser à exploiter des machines à sous
en l'an 2000, dès son ouverture, prévue à brève échéance à
Y.________. Les renseignements communiqués à X.________ SA
constituaient donc bien une promesse formelle de pouvoir
exploiter des machines à sous au salon de jeu A.________.

   A cela s'ajoute que, dans une communication du
6 mars 2000, liée à l'entrée en vigueur, le 1er avril 2000,
de la loi sur les maisons de jeu, le chef du Service de la
police du commerce a informé X.________ SA que, dans la me-
sure où sa demande d'autorisation d'exploiter des machines à
sous portait sur un salon de jeu existant, elle n'était pas

touchée par les modifications législatives, mais que seuls
cinq appareils servant à des jeux de hasard pourraient encore
être exploités, pendant le délai transitoire de cinq ans de
l'art. 60 al. 2 LMJ. Partant, il a invité X.________ SA à lui
transmettre la liste des cinq appareils qu'elle entendait
maintenir en exploitation. Ce courrier peut dès lors claire-
ment être compris comme une décision de mettre X.________ SA
au bénéfice du régime transitoire de l'art. 60 al. 2 LMJ. Il
faut également préciser que le 6 mars 2000, le Service de la
police du commerce était informé du nouvel emplacement prévu
pour le salon de jeu A.________ à Z.________, puisque, le
15 décembre 1999 déjà, le Directeur de la police avait accep-
té ce déplacement, occasionné par la propriétaire de l'immeu-
ble sis à Y.________. La cautèle qu'il avait exprimée dans sa
lettre du 4 octobre 1999 au sujet de l'emplacement du salon
était donc devenue sans objet, de sorte que la recourante ne
saurait y voir une condition impérative de l'autorisation
d'exploiter.

   Dans ces conditions, même si le Service de la police
du commerce a considéré à tort que l'établissement pouvait
abriter des machines à sous indépendamment de son exploita-
tion effective, dès lors qu'il bénéficiait d'une autorisation
semblable depuis 1994, le Tribunal administratif pouvait re-
tenir que X.________ SA avait reçu la promesse formelle des
autorités cantonales de la mettre au bénéfice du régime tran-
sitoire de l'art. 60 al. 2 LMJ.

   c) La recourante fait valoir également, à l'encontre
de l'arrêt attaqué, que la loi a changé entre l'émission de
l'hypothétique promesse des autorités cantonales et l'alléga-
tion de la bonne foi. Cet argument n'est pas fondé. En effet,
il ressort du dossier que des assurances formelles ont été
données à X.________ SA au cours de chaque étape des modifi-
cations législatives intervenues, soit déjà dans la décision

du Directeur de la police du 14 novembre 1994, puis lors de
l'octroi de la patente d'exploitation du 18 août 1998, pour
la période courant jusqu'à fin 1999 (régime de la loi fédé-
rale du 5 octobre 1929 sur les maisons de jeu et de l'ordon-
nance du 22 avril 1998 sur les automates servant aux jeux
d'argent), dans le courrier du Directeur de la police du
6 mars 2000 pour l'année 2000 (régime de l'ordonnance du
22 avril 1998 et de la loi sur les maisons de jeu) et, fina-
lement, lors de la délivrance de la nouvelle patente d'ex-
ploitation le 31 août 2000 (régime de la loi sur les maisons
de jeu).

   d) La recourante soutient enfin que X.________ SA ne
pouvait pas croire de bonne foi que les assurances des auto-
rités cantonales étaient conformes au droit. Il est cependant
établi que X.________ SA s'est assurée régulièrement du sort
réservé au salon de jeu A.________, au gré de l'évolution lé-
gislative. Compte tenu des réponses obtenues de la part des
autorités compétentes, sans doute tiraillées entre les exi-
gences de la nouvelle loi fédérale et les intérêts économi-
ques en jeu, la société intimée a continué à investir dans
son projet de salon de jeu pour lequel elle avait déjà con-
senti à de nombreuses dépenses. Ainsi, tout porte à croire
qu'elle aurait renoncé à l'ouverture de ce salon et qu'elle
n'aurait en tout cas pas engagé de frais liés au transfert de
Y.________ à la Z.________, ainsi que les frais relatifs aux
travaux de construction et d'aménagement, si les autorités
fribourgeoises avaient refusé l'autorisation d'exploiter des
machines à sous dans un salon de jeu encore à l'état de pro-
jet.

   Dans ces circonstances, même si X.________ SA devait
connaître les nouvelles exigences fédérales, elle pouvait
croire de bonne foi, à la lecture des différentes réponses à
ses interventions, que le régime de faveur dont elle bénéfi-
ciait était conforme aux dispositions transitoires de la loi

sur les maisons de jeu. L'arrêt attaqué n'est donc pas criti-
quable sur ce point.

   4.- Invoquant la primauté du principe de la légalité
sur celui de la protection de la bonne foi, la recourante
conclut subsidiairement au renvoi de X.________ SA à agir de-
vant les autorités cantonales compétentes pour qu'elles lui
allouent une éventuelle indemnité.

   Même lorsque ses conditions d'application sont réu-
nies, le principe de la protection de la bonne foi peut se
heurter à l'exigence d'une application correcte du droit.
L'intérêt particulier doit alors céder le pas à un intérêt
public prépondérant (ATF 116 Ib 185 consid. 3 p. 187). La loi
sur les maisons de jeu, entrée en vigueur le 1er avril 2000,
a pour but d'assurer une exploitation des jeux sûre et trans-
parente (art. 2 lettre a LMJ), d'empêcher la criminalité et
le blanchiment d'argent dans les maisons de jeu ou par leur
intermédiaire (art. 2 lettre b LMJ) et de prévenir les consé-
quences socialement dommageables du jeu. Elle répond donc à
un intérêt public digne de protection. Selon le Tribunal fé-
déral, la protection de la population - en particulier des
jeunes et des personnes socialement défavorisées - contre les
dangers de la passion du jeu, constitue un intérêt public
suffisant pour interdire, sur le plan cantonal, les appareils
servant aux jeux d'argent (ATF 106 Ia 191 consid. 6 p. 193 et
les arrêts cités).

   En adoptant la disposition transitoire de l'art. 60
al. 2 LMJ, le législateur a cependant admis que la réalisa-
tion de l'objectif fixé par la loi ne serait pas entravée par
la présence, hors des casinos, d'un nombre restreint d'appa-
reils à sous, pendant une période limitée à cinq ans. La por-
tée pratique de cette exception au principe général de l'in-
terdiction d'exploiter de tels appareils dans les salons de

jeu est particulièrement étendue dans le canton de Fribourg,
puisque 1'285 machines à sous y sont encore en exploitation
en 2001. La poursuite de l'exploitation de cinq appareils
dans les locaux du salon de jeu A.________, pendant le délai
transitoire de cinq ans, n'est donc pas de nature à mettre en
péril les intérêts publics protégés par la loi, encore moins
à vider la loi de sa substance, comme le soutient la recou-
rante. Au demeurant, l'autorité fédérale elle-même, sous
l'empire de l'ordonnance du 22 avril 1998, a admis certaines
dérogations au régime légal fondées sur des assurances don-
nées à un importateur de machines à sous (arrêt non publié du
24 novembre 1999 dans la cause P.________ SA et N.A.). Il ne
se justifie dès lors pas de priver X.________ SA de la pro-
tection du principe de la bonne foi.

   5.- Mal fondé, le recours doit être rejeté. La Com-
mission des maisons de jeu ayant saisi le Tribunal fédéral
dans l'exercice de ses attributions officielles, il n'y a pas
lieu de percevoir un émolument judiciaire (art. 156 al. 2
OJ). Vu le sort du recours, X.________ SA a droit à des dé-
pens (art. 159 al. 2 OJ).

                       Par ces motifs,

            l e  T r i b u n a l  f é d é r a l ,

   1. Rejette le recours.

   2. Dit qu'il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.

   3. Dit que la Confédération versera à X.________ SA
une indemnité de 2'000 fr. à titre de dépens.

   4. Communique le présent arrêt en copie à la recou-
rante, au représentant de la société X.________ SA, au Ser-
vice de la police du commerce et des établissements publics
et au Tribunal administratif du canton de Fribourg.

                       _______________

Lausanne, le 9 octobre 2001
ROC/dxc

            Au nom de la IIe Cour de droit public
                 du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
                        Le Président,

                  La Greffière,