Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1P.83/2001
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1P.83/2001

        Ie   C O U R   D E   D R O I T   P U B L I C
       **********************************************

                        4 avril 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Vice-président du Tribunal fédéral, Catenazzi et Favre.
Greffier: M. Parmelin.

           Statuant sur le recours de droit public
                          formé par

X.________, représenté par Me Pascal Perraudin, avocat à
Sion,

                           contre

l'arrêt rendu le 14 décembre 2000 par la Cour pénale I du
Tribunal cantonal du canton du Valais dans la cause qui op-
pose le recourant au Ministère public du canton du Valais;

  (procédure pénale; appréciation des preuves; arbitraire)

          Vu les pièces du dossier d'où ressortent
                  les  f a i t s  suivants:

   A.- Par jugement du 4 octobre 1999, le Tribunal du
IIe arrondissement pour les districts d'Hérens et de Conthey
a condamné X.________ à quinze mois de réclusion, peine com-
plémentaire à celle prononcée le 11 mai 1998 par le Tribunal
cantonal fribourgeois, pour complicité de vol et de violation
de domicile, détournement de valeurs patrimoniales mises sous
main de justice et violation de l'art. 19 ch. 1 de la loi fé-
dérale sur les stupéfiants (LStup).

   Cette juridiction a retenu que X.________ avait
fourni à Z.________ le matériel, le véhicule et le chauffeur
qui lui étaient nécessaires pour dérober, dans la nuit du 30
au 31 janvier 1998, des bijoux, des tableaux et divers objets
d'une valeur totale supérieure à 370'000 fr., au préjudice
des époux Y.________. Comme X.________ n'ignorait pas que le
cambrioleur utiliserait les outils qu'il lui avait procurés
pour entrer chez des tiers, contre leur gré, il s'était éga-
lement rendu coupable de complicité de violation de domicile.
Enfin, il avait financé l'achat de 3,5 à 4 grammes de cocaïne
en janvier 1997, d'un gramme de cocaïne entre mars et septem-
bre 1997 et de 10 à 12 grammes de cocaïne entre mars et no-
vembre 1997.

   Statuant le 14 décembre 2000 sur appel du condamné,
la Cour pénale I du Tribunal cantonal du canton du Valais
(ci-après: la Cour pénale ou le Tribunal cantonal) a reconnu
X.________ coupable des infractions qui lui étaient repro-
chées et l'a condamné à dix mois de réclusion, peine complé-
mentaire à celle prononcée le 11 mai 1998 par le Tribunal
cantonal fribourgeois, elle-même complémentaire à celle pro-
noncée le 14 décembre 1995 par le Tribunal criminel de la
Gruyère. Elle s'est déclarée convaincue que X.________ était

au courant du cambriolage que Z.________ avait l'intention de
commettre et qu'il lui avait fourni, par le biais de son
épouse, tous les moyens matériels indispensables à perpétrer
cette infraction. Par ailleurs, au vu de l'aide logistique
apportée à l'auteur du cambriolage, elle a admis que l'appe-
lant n'ignorait pas qu'il y aurait effraction et qu'il
s'était ainsi rendu coupable de complicité de violation de
domicile. Elle a enfin conclu à la culpabilité de X.________
du chef d'infraction à l'art. 19 ch. 1 LStup sur la base des
déclarations concordantes de plusieurs témoins.

   B.- Agissant par la voie du recours de droit public,
X.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler ce jugement.
Invoquant l'art. 9 Cst., il se plaint en substance d'une ap-
préciation arbitraire des preuves et tient la quotité de la
peine pour excessive, considérant comme justifiée une peine
complémentaire maximale de trois mois, compatible avec l'o-
ctroi du sursis. Il sollicite l'assistance judiciaire.

   La Cour pénale se réfère à son jugement; le Minis-
tère public du canton du Valais ne s'est pas déterminé.

          C o n s i d é r a n t   e n   d r o i t :

   1.- Le Tribunal fédéral examine d'office et libre-
ment la recevabilité des recours de droit public qui lui sont
soumis (ATF 127 III 41 consid. 2a p. 42 et les références ci-
tées).

   a) Dans la mesure où le recourant reproche à la ju-
ridiction cantonale une appréciation arbitraire des preuves
et des constatations de fait qui en découlent, seule la voie
du recours de droit public est ouverte à l'exclusion du pour-
voi en nullité à la Cour de cassation pénale du Tribunal fé-

déral (ATF 124 IV 81 consid. 2a p. 83 et les arrêts cités).
En revanche, lorsqu'il se plaint du caractère excessif de la
quotité de la peine et des conséquences de celle-ci sur l'oc-
troi éventuel du sursis, le recourant invoque des violations
des art. 41 et 63 CP, soit de règles de droit pénal fédéral
matériel, dont il ne peut faire contrôler l'application et
l'interprétation qu'au moyen du pourvoi en nullité à la Cour
de cassation pénale du Tribunal fédéral (art. 269 al. 1 PPF;
ATF 126 I 97 consid. 1c p. 101). En vertu de la règle de la
subsidiarité du recours de droit public ancrée à l'art. 84
al. 2 OJ, le présent recours est donc irrecevable sur ce
point comme recours de droit public; par ailleurs, une con-
version de celui-ci en un pourvoi en nullité n'entre pas en
considération, car le recourant a retiré la déclaration de
pourvoi qu'il avait dans un premier temps formée à l'encontre
de l'arrêt de la Cour pénale.

   b) Le recourant est directement touché par l'arrêt
cantonal qui emporte sa condamnation à une peine de dix mois
de réclusion, complémentaire à celles prononcées les 14 dé-
cembre 1995 et 11 mai 1998 par le Tribunal criminel de la
Gruyère et par le Tribunal cantonal fribourgeois; il a un
intérêt personnel, actuel et juridiquement protégé à ce que
ce jugement soit annulé et a, partant, qualité pour recourir
selon l'art. 88 OJ.

   Interjeté en temps utile contre une décision finale
rendue en dernière instance cantonale, le recours répond au
surplus aux réquisits des art. 86 al. 1 et 89 al. 1 OJ.

   2.- Invoquant l'art. 9 Cst., le recourant se plaint
à divers titres d'une appréciation arbitraire des preuves.

   a) La jurisprudence rendue en application de l'art.
4 aCst., mais qui garde toute sa valeur sous l'empire de
l'art. 9 Cst., reconnaît au juge un important pouvoir d'ap-

préciation dans la constatation des faits et leur apprécia-
tion (ATF 124 IV 86 consid. 2a p. 88; 120 Ia 31 consid. 4b p.
40). Le Tribunal fédéral n'intervient en conséquence pour
violation de l'art. 9 Cst. que si celui-ci a abusé de ce pou-
voir, en particulier lorsqu'il admet ou nie un fait pertinent
en se mettant en contradiction évidente avec les pièces et
les éléments du dossier, lorsqu'il méconnaît des preuves per-
tinentes ou qu'il n'en tient arbitrairement pas compte, lors-
que les constatations de fait sont manifestement fausses ou
encore lorsque l'appréciation des preuves se révèle insoute-
nable (ATF 118 Ia 28 consid. 1b p. 30; 117 Ia 133 consid. 2c
p. 39, 292 consid. 3a p. 294; sur la notion d'arbitraire,
voir ATF 126 I 168 consid. 3a p. 170).

   b) Concernant les infractions de complicité de vol
et de violation de domicile, le recourant soutient qu'il
n'était pas au courant des intentions de l'auteur du cam-
briolage et qu'il avait des raisons légitimes de croire que
les outils demandés par celui-ci étaient destinés à sa pro-
fession de carreleur.

   X.________ ne conteste pas avoir reçu de Z.________,
au début 1998, une liste des outils dont celui-ci avait be-
soin pour commettre le cambriolage perpétré à Chamoson dans
la nuit du 30 au 31 janvier 1998. Il a certes prétendu ne pas
avoir lu cette liste et l'avoir donnée directement à son
épouse. Il a toutefois également déclaré qu'il s'agissait
d'outils destinés à l'exercice de la profession de carreleur.
La Cour pénale pouvait dès lors sans arbitraire déduire de
ces dernières déclarations que le recourant avait pris con-
naissance du contenu de cette liste. De plus, au vu des dif-
férents objets mentionnés, soit une meule à disque, un burin,
une massette, un pied-de-biche, un tournevis, des gants, une
lampe de poche et une cagoule, elle n'a pas davantage fait
preuve d'arbitraire en considérant que la destination de ce
matériel était, pour l'essentiel, étrangère à l'activité de

carreleur et que le recourant devait s'en rendre compte et en
inférer que Z.________ utiliserait ce matériel pour commettre
un vol par effraction. Cette conclusion s'imposait aussi au
regard de la nécessité pour l'auteur de l'infraction de dis-
poser d'un véhicule et d'un chauffeur, que le recourant lui a
fourni en la personne de son épouse.

   La Cour pénale n'a par conséquent pas procédé à une
appréciation arbitraire des preuves en considérant, sur la
base de ces éléments, d'une part, ainsi que des déclarations
au demeurant non contestées de Z.________ et de l'épouse du
recourant, d'autre part, que ce dernier avait participé comme
complice au vol par effraction perpétré par Z.________ à
Chamoson, au détriment des époux Y.________, dans la nuit du
30 au 31 janvier 1998. Le fait que le recourant n'ait pas su
ou voulu savoir l'origine des tableaux placés chez lui à la
suite de ce cambriolage, notamment dans une valise, est dénué
de toute pertinence dans la mesure où il n'est pas poursuivi
pour recel ou complicité de cette infraction.

   c) La Cour pénale a également estimé qu'à plusieurs
reprises, le recourant avait acquis et détenu des stupéfiants
pour les offrir à des tiers et qu'il s'était entremis pour en
acheter, en violation de l'art. 19 ch. 1 LStup. Elle n'a en
revanche pas retenu à sa charge d'actes de consommation, car
ceux-ci étaient prescrits.

   Dans l'arrêt entrepris, la juridiction cantonale a
soigneusement analysé les déclarations des personnes mettant
en cause le recourant. On peut renvoyer sur ce point à la mo-
tivation retenue, en application de l'art. 36a al. 3 OJ. Au
surplus, dans la mesure où les actes de consommation étaient
prescrits, il n'y a pas lieu d'examiner plus avant les cir-
constances dans lesquelles ils auraient été perpétrés, ni
quelle incidence éventuelle ils auraient pu, à supposer
qu'ils aient été commis, avoir sur la santé du recourant.

Dans ce contexte, les attestations de son médecin-traitant et
de la direction de l'établissement pénitentiaire de Belle-
chasse, de même que deux témoignages divergents quant à
l'achat de stupéfiants, en très petites quantités, pour des
tiers, ne revêtent en l'espèce aucune pertinence. En tout
état, ils ne contredisent pas les autres témoignages versés
au dossier et sur lesquels s'appuie en détail le Tribunal
cantonal pour asseoir sa conviction quant à la violation de
l'art. 19 ch. 1 LStup par le recourant.

   d) Ce dernier ne peut pas davantage soutenir que "de
par sa notoriété plutôt négative suite aux divers démêlés ju-
diciaires qu'il a connus", il voit peser une sorte de pré-
somption de culpabilité en sa défaveur.

   Le Tribunal cantonal a fondé son jugement sur les
éléments concrets et précis relevés ci-dessus, en écartant du
dossier certains faits contestés et non prouvés, en donnant
leur juste mesure à des infractions mineures, par exemple en
constatant que l'implication dans le commerce de drogue por-
tait sur des quantités minimales dont le degré de pureté
n'avait pu être établi, et, d'une façon générale, en en res-
tant aux éléments matériels et aux dépositions des témoins
concordant dans leur ensemble.

   Examinant l'aspect subjectif des infractions repro-
chées au recourant, la Cour pénale ne pouvait ignorer les re-
lations directes ou indirectes entre codétenus, qui caracté-
risent toutes les personnes impliquées dans la présente pro-
cédure, à l'exclusion de leurs épouses ou compagnes. Même
s'il est maladroit d'écrire du recourant qu'il "semble à
l'aise dans le milieu carcéral (...) et met à profit ses re-
lations pour commettre de nouvelles infractions", les faits
pour lesquels il a été condamné dénotent les difficultés
qu'il rencontre pour se réadapter, compte tenu de sa capacité
de discernement et de ses aptitudes intellectuelles, et indi-

quent que l'opinion du Tribunal cantonal procède d'une cons-
tatation, et non pas d'un a priori contraire à ses droits
fondamentaux.

   3.- Le recours doit en conséquence être rejeté dans
la mesure où il est recevable. Les conditions de l'art. 152
al. 1 OJ étant réunies, il convient de faire droit à la de-
mande d'assistance judiciaire et de statuer sans frais. Il y
a lieu de désigner Me Pascal Perraudin comme avocat d'office
du recourant pour la présente procédure et de lui verser une
indemnité à la charge de la Caisse du Tribunal fédéral (art.
152 al. 2 OJ).

                       Par ces motifs,

           l e   T r i b u n a l   f é d é r a l :

   1. Rejette le recours dans la mesure où il est rece-
vable;

   2. Admet la demande d'assistance judiciaire;

   3. Dit qu'il n'est pas perçu d'émolument judiciaire;

   4. Désigne Me Pascal Perraudin comme avocat d'office
du recourant et lui alloue une indemnité de 1'000 fr. à titre
d'honoraires, à la charge de la Caisse du Tribunal fédéral;

   5. Communique le présent arrêt en copie au mandatai-
re du recourant, au Ministère public et au Tribunal cantonal
du canton du Valais.

                        _____________

Lausanne, le 4 avril 2001
PMN/col

            Au nom de la Ie Cour de droit public
                 du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
                        Le Président,

                        Le Greffier,