Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1P.81/2001
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1P.81/2001

       Ie   C O U R   D E   D R O I T   P U B L I C
      **********************************************

                        19 avril 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Vice-président du Tribunal fédéral, Aeschlimann et Mme Pont
Veuthey, Juge suppléante. Greffier: M. Jomini.

       Statuant sur le recours de droit administratif
                         formé par

C.________,

                           contre

l'arrêt rendu le 5 décembre 2000 par le Tribunal adminis-
tratif de la République et canton de Genève, dans la cause
qui oppose le recourant au Grand Conseil de la République et
canton de Genève;

                    (plan d'affectation)

          Vu les pièces du dossier d'où ressortent
                  les  f a i t s  suivants:

   A.-  Le Grand Conseil de la République et canton de
Genève a adopté le 28 octobre 1999 la loi n° 7888 modifiant
les limites de zones sur le territoire de la commune du
Grand-Saconnex (création d'une zone de développement 4B).
Cette mesure de planification concerne une bande de terrain
d'une surface totale d'environ 3'600 m2, auparavant classée
dans la 5e zone (zone résidentielle destinée aux villas - cf.
art. 19 al. 3 de la loi cantonale d'application de la loi fé-
dérale sur l'aménagement du territoire [LaLAT]). Le régime
d'affectation de la zone 4B, prévu pour cette zone de déve-
loppement, est celui d'une zone destinée principalement aux
maisons d'habitation, comportant en principe plusieurs loge-
ments (art. 4 al. 2 LaLAT).

   En approuvant cette modification du plan d'affecta-
tion (cf. art. 1 de la loi n° 7888), le Grand Conseil a re-
jeté les oppositions qui avaient été formées à l'occasion de
l'enquête publique (art. 3 de la loi). C.________, proprié-
taire d'un terrain, en 5e zone, attenant au périmètre de la
nouvelle zone de développement 4B, figurait parmi les oppo-
sants; il critiquait en substance l'augmentation des possibi-
lités de construction (coefficient d'utilisation du sol) à
l'intérieur du périmètre concerné, avec les diverses consé-
quences ou nuisances que cela entraînerait pour les voisins.
Les motifs du rejet de l'opposition ont été exposés dans le
rapport que la Commission d'aménagement du canton a rédigé à
l'intention du Grand Conseil au sujet du projet de loi n°
7888.

   Un projet de plan localisé de quartier, dont le pé-
rimètre correspond à celui de la zone de développement 4B
précitée, a par ailleurs été mis à l'enquête publique (à
partir du 27 janvier 1997). Il prévoit la construction de

trois immeubles d'habitation, d'un ou deux niveaux sur rez-
de-chaussée. Le Conseil d'Etat, autorité compétente pour
adopter ce plan de détail (cf. art. 30 LaLAT et art. 2 de la
loi générale sur les zones de développement [LGZD]), n'avait
pas encore statué à ce sujet à la date de l'adoption par le
Grand Conseil de la loi n° 7888.

   B.-  C.________ a recouru contre la loi n° 7888 au-
près du Tribunal administratif cantonal, en critiquant les
possibilités de construction découlant de l'adoption de la
zone de développement 4B, trop importantes selon lui au re-
gard de la planification directrice, et en invoquant les nui-
sances qu'il subirait après la réalisation du plan localisé
de quartier. Le Tribunal administratif a rejeté ce recours
par un arrêt rendu le 5 décembre 2000.

   C.-  Agissant par la voie du recours de droit ad-
ministratif, C.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler
l'arrêt rendu par le Tribunal administratif et, statuant lui-
même sur le fond, d'abroger la loi n° 7888. Il fait valoir
que la création de la zone de développement 4B n'est pas
conforme à certains principes d'aménagement du territoire et
il se plaint des nuisances que provoqueront, dans le voisi-
nage, les habitants des bâtiments que le plan localisé de
quartier permettra de réaliser à cet endroit.

   Le Grand Conseil conclut à l'irrecevabilité du re-
cours de droit administratif, subsidiairement à son rejet.

          C o n s i d é r a n t   e n   d r o i t :

   1.-  Le Tribunal fédéral examine d'office et libre-
ment la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 126
I 207 consid. 1 p. 209 et les arrêts cités).

   a)  La contestation porte sur l'approbation d'un
plan d'affectation au sens des art. 14 ss de la loi fédérale
sur l'aménagement du territoire (LAT; RS 700). En vertu de
l'art. 34 al. 3 LAT, la voie du recours de droit public est
en principe seule ouverte, devant le Tribunal fédéral, contre
les décisions prises par les autorités cantonales de dernière
instance concernant des plans d'affectation. La jurisprudence
admet cependant qu'une décision relative à l'adoption d'un
plan d'affectation fasse l'objet d'un recours de droit admi-
nistratif, lorsque l'application du droit fédéral de la pro-
tection de l'environnement, ou d'autres prescriptions du
droit public fédéral en matière de protection des biotopes,
des forêts, etc., est en jeu, notamment quand le plan se rap-
porte à un projet concret (ATF 125 II 10 consid. 2a p. 13;
123 II 88 consid. 1a p. 91, 231 consid. 2 p. 233; 121 II 72
consid. 1b p. 75 et les arrêts cités).

   b)  Dans son arrêt, le Tribunal administratif s'est
prononcé, en relation avec les nuisances provoquées par les
habitants des futurs immeubles dans le périmètre litigieux
(bruit du trafic routier), sur l'application de l'art. 9 de
la loi fédérale sur la protection de l'environnement (LPE; RS
814.01), soit sur la nécessité d'une étude de l'impact sur
l'environnement lors de la création de la zone de dévelop-
pement 4B. Dans cette mesure, la décision attaquée est fondée
sur le droit fédéral de la protection de l'environnement et,
en tant que la contestation se rapporte à la protection con-
tre le bruit, elle peut faire l'objet d'un recours de droit
administratif. Le propriétaire d'un bien-fonds directement
voisin, qui se plaint du bruit des installations prévues dans
un plan d'affectation, a qualité pour recourir au sens de
l'art. 103 let. a OJ (ATF 126 II 300 consid. 1c p. 302; 124
II 293 consid. 3a p. 303; 121 II 171 consid. 2b p. 174 et les
arrêts cités). Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le
recours de droit administratif (infra, consid. 2).

   c)  Cela étant, la plupart des griefs du recourant
concernent l'application du droit de l'aménagement du terri-
toire, et ils ne sont pas dans une relation suffisamment
étroite avec l'application des normes sur la protection
contre le bruit (cf. notamment ATF 121 II 72 consid. 1d p.
76). C'est pourquoi, à ce propos, une exception à la règle de
l'art. 34 al. 3 LAT ne se justifie manifestement pas. Il
conviendra donc d'examiner une éventuelle conversion du re-
cours de droit administratif en recours de droit public
(infra, consid. 3).

   2.-  Le recourant se réfère au projet de plan loca-
lisé de quartier, dans la nouvelle zone de développement 4B,
et il se plaint du bruit que provoqueront les véhicules des
habitants de ce futur lotissement, notamment à la sortie du
garage souterrain, proche de son propre immeuble.

   Se prononçant au sujet des nuisances alléguées et de
la prétendue nécessité d'une étude de l'impact sur l'environ-
nement, le Tribunal administratif a considéré que l'applica-
tion des prescriptions du droit fédéral de la protection de
l'environnement devrait être examinée le cas échéant dans le
cadre de la procédure du plan localisé de quartier, et non
pas au stade de la modification du plan général d'affecta-
tion; il a notamment renvoyé, sur ce point, aux explications
données par la commission d'aménagement dans son rapport au
Grand Conseil.

   La création d'une zone de développement 4B, destinée
à se substituer à la 5e zone, ne modifie pas le caractère ré-
sidentiel du secteur. Elle permet une utilisation du sol plus
dense, mais la construction de maisons d'habitation compor-
tant plusieurs logements requiert dans le cas particulier
l'adoption préalable, par le Conseil d'Etat, d'un plan d'af-
fectation spécial (plan localisé de quartier) définissant
notamment le gabarit des bâtiments à construire, le tracé des

voies de communication, l'emplacement des places de parcage
et des garages, etc. (cf. art. 30 LaLAT, art. 2  al. 1 let. a
et art. 3 al. 1 LGZD). Il appartiendra aux autorités cantona-
les, dans cette procédure subséquente, d'imposer les mesures
de limitation des émissions de bruit (cf. art. 11 LPE) qui
doivent être prévues, selon le droit fédéral, dans un plan
d'affectation spécial établi pour un projet de construction
déterminé; il n'apparaît en effet pas d'emblée exclu que le
bruit du trafic routier lié à quelques immeubles d'habitation
puisse être limité de manière à respecter les prescriptions
fédérales. Le Tribunal administratif a considéré à juste ti-
tre que la création de la zone de développement n'était
qu'une mesure de planification générale ou, en d'autres ter-
mes, qu'elle n'était pas une mesure de planification par la-
quelle on définirait d'ores et déjà, de façon suffisamment
précise pour permettre l'évaluation des immissions de bruit
(ou d'autres nuisances éventuelles), les caractéristiques des
constructions et installations à réaliser. Aussi les griefs
du recourant relatifs à ces nuisances - formulés du reste de
manière très sommaire - sont-ils mal fondés.

   3.-  Le recourant prétend par ailleurs que la créa-
tion de la zone de développement 4B, permettant une augmenta-
tion du coefficient d'utilisation du sol par rapport au ré-
gime de la 5e zone, serait contraire à certains objectifs
d'aménagement du territoire. En présentant son argumentation,
il déclare reprendre les griefs qu'il avait invoqués devant
le Tribunal administratif.

   a)  Comme cela a déjà été exposé, seule la voie du
recours de droit public, pour violation de droits constitu-
tionnels des citoyens (art. 84 al. 1 let. a OJ), peut entrer
en considération à ce propos (consid. 1). Une conversion du
recours de droit administratif, irrecevable dans cette mesure
(cf. art. 34 al. 3 LAT), en recours de droit public serait

admissible, pour autant que les conditions de recevabilité de
ce dernier recours soient remplies.

   b)  La qualité pour recourir est définie à l'art. 88
OJ. Elle est reconnue aux particuliers ou collectivités lésés
par des arrêtés ou décisions qui les concernent personnel-
lement ou qui sont de portée générale. Contre une décision
relative à l'adoption d'un plan d'affectation, le recours de
droit public n'est ainsi ouvert, selon la jurisprudence, qu'à
celui qui est atteint par l'acte attaqué dans ses intérêts
personnels et juridiquement protégés; le recours formé pour
sauvegarder l'intérêt général, ou visant à préserver de
simples intérêts de fait, est en revanche irrecevable (ATF
126 I 43 consid. 1a p. 44, 81 consid. 3b p. 85; 125 II 440
consid. 1c et les arrêts cités). Le recourant fait valoir,
en substance, que la création de la zone de développement 4B
modifie la réglementation antérieure (celle de la 5e zone)
sur le coefficient d'utilisation du sol; or selon la juris-
prudence, il s'agit là d'une règle destinée, en tout cas
accessoirement, à la protection des intérêts des voisins (cf.
ATF 119 Ia 362 consid. 1b p. 364; 118 Ia 112 consid. 1b p.
115, 232 consid. 1a-b p. 234 s. et les arrêts cités; voir
aussi l'arrêt du 12 décembre 2000, commune de Wollerau, des-
tiné à la publication, consid. 2d). Aussi la condition de
l'art. 88 OJ est-elle réalisée.

   c)  Cela étant, en vertu de l'art. 90 al. 1 let. b
OJ, l'acte de recours doit contenir un exposé des faits es-
sentiels et un exposé succinct des droits constitutionnels ou
des principes juridiques violés, précisant en quoi consiste
la violation. Il résulte de cette obligation de motiver que
le Tribunal fédéral n'examine que les griefs soulevés de ma-
nière claire et explicite. Le recourant ne saurait se conten-
ter de critiquer la décision attaquée de manière appellatoi-
re, en reprenant les arguments développés en dernière ins-
tance cantonale; il doit au contraire exposer en quoi leur

rejet par l'autorité cantonale violerait le droit constitu-
tionnel (ATF 125 I 71 consid. 1c p. 76, 492 consid. 1b p.
495; 117 Ia 412 consid. 1c p. 414 et les arrêts cités).

   L'acte de recours ne mentionne aucun droit consti-
tutionnel ni aucune règle de la législation fédérale ou can-
tonale sur l'aménagement du territoire, dont l'application
arbitraire (cf. art. 9 Cst.) serait implicitement dénoncée.
Il fait référence aux principes du plan directeur communal du
Grand-Saconnex, mais de manière purement appellatoire, sans
critiquer l'argumentation du Tribunal administratif ne recon-
naissant à cet instrument aucune force contraignante pour les
autorités cantonales. Les autres critiques au sujet de la
densité des constructions dans le périmètre litigieux, déjà
formulées devant le Tribunal administratif, sont simplement
reproduites, sans que le recourant tente de démontrer le ca-
ractère insoutenable de l'arrêt attaqué sur ce point. Il en
résulte que la motivation du recours ne répond pas aux exi-
gences de l'art. 90 OJ, applicables dans la procédure du re-
cours de droit public. Une conversion du recours de droit
administratif en recours de droit public est partant exclue.

   4.-  Il s'ensuit que le recours de droit administra-
tif doit être rejeté, dans la mesure où il est recevable. Le
recourant, qui succombe, doit payer l'émolument judiciaire
conformément aux art. 153, 153a et 156 al. 1 OJ. L'Etat de
Genève n'a pas droit à des dépens (art. 159  al. 1 et 2 OJ).

                       Par ces motifs,

           l e   T r i b u n a l   f é d é r a l :

   1. Rejette le recours, dans la mesure où il est re-
cevable;

   2. Met un émolument judiciaire de 3'000 fr. à la
charge du recourant;

   3. Dit qu'il n'est pas alloué de dépens;

   4. Communique le présent arrêt en copie au recou-
rant, au Grand Conseil, au Tribunal administratif et, pour
information, au Conseil d'Etat de la République et canton de
Genève.

Lausanne, le 19 avril 2001
JIA/col

            Au nom de la Ie Cour de droit public
                 du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
                        Le Président,

                        Le Greffier,