Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1P.62/2001
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1P.62/2001

        Ie   C O U R   D E   D R O I T   P U B L I C
       **********************************************

                        1er mars 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Vice-président du Tribunal fédéral, Féraud et Favre.
Greffier: M. Zimmermann.

           Statuant sur le recours de droit public
                          formé par

G.________, représenté par Me Jean-Marie Crettaz, avocat à
Genève,

                           contre

l'ordonnance rendue le 22 novembre 2000 par la Chambre d'ac-
cusation du canton de Genève dans la cause opposant le recou-
rant au groupe X.________, représenté par Me Bruno de Preux,
avocat à Genève, au Juge d'instruction et au Procureur
général du canton de Genève;

(art. 87 OJ; irrecevabilité du recours formé pour la décision
                  de disjonction de causes)

          Vu les pièces du dossier d'où ressortent
                  les  f a i t s  suivants:

   A.- La République française a adressé à la Confédé-
ration plusieurs demandes d'entraide judiciaire pour les be-
soins de procédures ouvertes en France, concernant des mal-
versations commises dans la gestion du groupe X.________
(ci-après: le Groupe), au détriment de celui-ci. Le juge
français a prononcé plusieurs mises en examen (correspondant
à des inculpations), dont celle de G.________.

   Les demandes portaient notamment sur la saisie de
comptes et de documents auprès d'établissements bancaires de
Genève.

   Sur la base des faits portés à la connaissance des
autorités suisses, deux procédures pénales ont été ouvertes à
Genève. Il s'agit de la procédure désignée sous la rubrique
P/9740/97, concernant des faits de blanchiment d'argent (pro-
cédure dite générale) et de la procédure P/1338/99, concer-
nant l'acquisition, par le Groupe, de la raffinerie Leuna
Minoil.

   Au cours de son enquête, le Juge d'instruction du
canton de Genève a ordonné la saisie conservatoire de fonds
déposés sur des comptes ouverts au nom de sociétés de Panama
et du Liechtenstein, dont G.________ est l'ayant droit écono-
mique. Ces fonds pourraient être le produit de délits commis
au détriment du Groupe.

   Le 18 novembre 1999, le Juge d'instruction a décidé,
de manière informelle, de dissocier l'enquête concernant
G.________ de la procédure générale, et d'ouvrir une nouvelle
procédure, désignée sous la rubrique P/14124/99, concernant
les actes reprochés à G.________ dans ses relations avec le
Groupe. Simultanément, le Juge d'instruction a fait verser au

dossier de la procédure P/14124/99 plusieurs pièces provenant
de la procédure générale.

   G.________ a critiqué ce procédé, portant selon lui
atteinte aux droits de la défense et au principe de l'indivi-
sibilité de la poursuite pénale.

   Le 7 février 2000, le Juge d'instruction a confirmé
la disjonction des procédures P/9740/97 et P/14124/99, mesure
commandée par la bonne administration de la justice et la
protection des droits des tiers.

   Le 22 novembre 2000, la Chambre d'accusation du can-
ton de Genève a rejeté le recours formé par G.________ contre
cette décision, qu'elle a confirmée.

   B.- Agissant par la voie du recours de droit public,
G.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler la décision
du 22 novembre 2000. Il invoque les art. 29 et 32 Cst., ainsi
que les art. 6 par. 1 CEDH et 14 par. 1 Pacte ONU II.

   Il n'a pas été demandé de réponse au recours.

          C o n s i d é r a n t   e n   d r o i t :

   1.- Le Tribunal fédéral examine d'office et avec une
pleine cognition la recevabilité des recours qui lui sont
soumis (ATF 126 I 81 consid. 1 p. 83; 126 II 506 consid. 1 p.
507; 126 III 274 consid. 1 p. 275, 485 consid. 1 p. 486, et
les arrêts cités).

   2.- a) Selon l'art. 87 OJ dans sa teneur du 8 octo-
bre 1999, le recours de droit public est recevable contre les
décisions préjudicielles et incidentes sur la compétence et

sur les demandes de récusation, prises séparément; ces déci-
sions ne peuvent être attaquées ultérieurement (al. 1); le
recours de droit public est recevable contre d'autres déci-
sions préjudicielles et incidentes prises séparément s'il
peut en résulter un dommage irréparable (al. 2); lorsque le
recours de droit public n'est pas recevable selon l'alinéa 2
ou qu'il n'a pas été utilisé, les décisions préjudicielles et
incidentes peuvent être attaquées avec la décision finale
(al. 3).

   b) La décision attaquée est de nature incidente,
puisqu'elle ne met pas fin à la procédure en cours (cf. ATF
123 I 325 consid. 3b p. 327; 122 I 39 consid. 1a/aa p. 41;
120 Ia 369 consid. 1b p. 372, 120 III 143 consid. 1a p. 144,
et les arrêts cités). Il reste à examiner si elle cause au
recourant un dommage irréparable au sens de l'art. 87 OJ, par
quoi on entend exclusivement le dommage juridique qui ne peut
être réparé ultérieurement, notamment par le jugement final
(ATF 126 I 207 consid. 2 p. 210; 122 I 39 consid. 1a/bb p.
42; 117 Ia 247 consid. 3, p. 249, 396 consid. 1 p. 398; 115
Ia 311 consid. 2c p. 314, et les arrêts cités).

   La jonction ou la disjonction de causes, ordonnée
pour les besoins d'une saine administration de la justice
(art. 89 al. 1 CPP gen.), porte sur une question préjudiciel-
le, laquelle peut être soulevée à l'ouverture des débats de
la Cour correctionnelle et de la Cour d'assises (art. 281 al.
2 CPP gen.). Le recourant aura ainsi l'occasion, pour le cas
où il devrait être renvoyé en jugement, de réitérer sa requê-
te de jonction de la cause P/14124/99 avec les causes
P/9470/97 et P/1338/99. Si cette requête devait être rejetée,
il aurait en outre la faculté de reprendre ses moyens, tirés
de la violation de ses droits constitutionnels, dans le cadre
d'un recours de droit public formé contre un jugement final
qui lui serait défavorable (ATF 116 Ia 305). Le recours est

ainsi irrecevable au regard de l'art. 87 OJ (cf. l'arrêt non
publié B. du 20 avril 1998).

   3.- Les frais sont mis à la charge du recourant qui
succombe (art. 156 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer des dé-
pens au Groupe, lequel n'a pas été invité à répondre au re-
cours dont le sort était scellé d'emblée (art. 159 OJ). Il
n'y a pas lieu d'allouer des dépens pour le surplus.

                       Par ces motifs,

           l e   T r i b u n a l   f é d é r a l ,

                      vu l'art. 36a OJ:

   1. Déclare le recours irrecevable.

   2. Met à la charge du recourant un émolument judi-
ciaire de 3000 fr.

   3. Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

   4. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties, au Juge d'instruction, au Procureur gé-
néral et à la Chambre d'accusation du canton de Genève.

Lausanne, le 1er mars 2001
ZIR/col

            Au nom de la Ie Cour de droit public
                 du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
            Le Président,           Le Greffier,