Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1P.57/2001
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1P.57/2001 1P.58/2001
1P.59/2001 1P.60/2001
1P.61/2001 1P.86/2001

        Ie   C O U R   D E   D R O I T   P U B L I C
       **********************************************

                        14 juin 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Vice-président du Tribunal fédéral, Catenazzi et Favre.
Greffier: M. Zimmermann.

          Statuant sur les recours de droit public
                         formés par

la Commune de Martigny, la Commune de Sierre, la Commune de
Bagnes, la Commune de Fully, et la Commune de St-Maurice,
toutes représentées par Me François Couchepin, avocat à
Martigny, la Commune d'Arbaz, la Commune d'Ardon, la Commune
d'Ayent, la Commune de Chamoson, la Commune de Conthey, la
Commune d'Evolène, la Commune de Grimisuat, la Commune
d'Hérémence, la Commune des Agettes, la Commune de Mase, la
Commune de Nax, la Commune de Nendaz, la Commune de Salins,
la Commune de Savièse, la Commune de Sion, la Commune de
St-Martin, la Commune de Vétroz, et la Commune de Vex, toutes
représentées par Me Malek Buffat Reymond, avocate à Pully,

                           contre

l'arrêté pris le 13 décembre 2000 par le Conseil d'Etat du
canton du Valais;

        (autonomie communale; loi fiscale cantonale)

          Vu les pièces du dossier d'où ressortent
                  les  f a i t s  suivants:

   A.- L'art. 235 de la loi fiscale valaisanne du 10
mars 1976 (LF), avait la teneur suivante:

     "1. Le paiement du traitement initial et des allo-
     cations de déplacement du personnel enseignant des
     écoles primaires est à la charge des communes à
     concurrence de 5 à 10% au maximum des recettes
     d'impôt calculées au taux moyen de toutes les com-
     munes et du 2% des revenus spéciaux.
     2. Ce taux sera fixé par le Grand Conseil.
     3. La contribution des communes au traitement du
     personnel enseignant dans les écoles du cycle
     d'orientation est fixée par décret du Grand
     Conseil."

   Selon un décret du 13 novembre 1974 le taux de la
contribution communale avait été fixé à 10%. Ce décret n'a
pas été modifié après l'introduction de l'art. 235 LF.

   Le 27 juin 2000, le Grand Conseil du canton du Va-
lais a modifié l'art. 235 al. 1 LF en réduisant le taux maxi-
mal prévu par cette disposition à 8%. L'art. 243 al. 1 de
cette loi prévoit que le Conseil d'Etat fixe la date d'entrée
en vigueur de la loi, sauf disposition contraire.

   Le 13 décembre 2000, le Conseil d'Etat du canton du
Valais a adopté un arrêté qui fait entrer en vigueur le 1er
janvier 2001 la loi du 27 juin 2000, à l'exception de l'art.
235 al. 1 LF, destiné à entrer en vigueur à une date ulté-
rieure (et non déterminée).

   B.- Agissant séparément par la voie du recours de
droit public, les communes de Martigny, de Sierre, de Bagnes,
de Fully et de Saint-Maurice demandent au Tribunal fédéral
d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2000, en tant qu'il exclut

l'entrée en vigueur au 1er janvier 2001 de l'art. 235 al. 1
LF modifié le 27 juin 2000. Agissant conjointement par la
voie du recours de droit public, les communes d'Arbaz,
d'Ardon, d'Ayent, de Chamoson, de Conthey, d'Evolène, de
Grimisuat, d'Hérémence, des Agettes, de Mase, de Nax, de
Nendaz, de Salins, de Savièse, de Sion, de Saint-Martin, de
Vétroz et de Vex demandent au Tribunal fédéral d'annuler
l'arrêté du 13 décembre 2000, ainsi que ses éventuelles dis-
positions d'application. Elles requièrent en outre un second
échange d'écritures. Les recourantes invoquent leur autonomie
communale, les art. 5, 9 et 50 Cst., ainsi que les art. 36,
58 et 70 Cst. val.

   Le Conseil d'Etat propose le rejet des recours dans
la mesure de leur recevabilité.

          C o n s i d é r a n t   e n   d r o i t :

   1.- a) Il se justifie de joindre les recours, diri-
gés contre le même arrêté et formés pour les mêmes motifs, et
de statuer par un seul arrêt.

   b) La situation étant claire, il n'est pas nécessai-
re d'accorder aux communes d'Arbaz, Ardon, Ayent, Chamoson,
Conthey, Evolène, Grimisuat, Hérémence, Les Agettes, Mase,
Nax, Nendaz, Salins, Savièse, Sion, Saint-Martin, Vétroz et
Vex, la réplique qu'elles ont demandée.

   2.- a) L'autonomie communale est garantie dans les
limites fixées par le droit cantonal (art. 50 al. 1 Cst.).
Une commune a qualité pour agir par la voie du recours de
droit public en invoquant une violation de son autonomie
lorsque la décision attaquée l'atteint en tant que détentrice
de la puissance publique. La question de savoir si, dans un

domaine juridique particulier, la commune jouit effectivement
de l'autonomie qu'elle invoque, ne se rapporte pas à la rece-
vabilité du recours, mais à son bien-fondé (ATF 124 I 223
consid. 1b p. 226; 121 I 218 consid. 2a p. 220; 119 Ia 214
consid. 1c p. 216/217, 285 consid. 4a p. 294, et les arrêts
cités). La commune est aussi recevable à invoquer, à titre
accessoire, la violation d'un autre droit constitutionnel,
notamment l'art. 9 Cst. prohibant l'arbitraire. Encore faut-
il que ce grief soit en relation étroite avec celui de la
violation de l'autonomie communale (ATF 121 I 218 consid. 2a
p. 220; 116 Ia 221 consid. 1c p. 224; 114 Ia 168 consid. 2a
p. 170; 112 Ia 268 consid. 1a p. 269, et les arrêts cités).
Une commune bénéficie de la protection de son autonomie, as-
surée par la voie du recours de droit public, dans les domai-
nes que le droit cantonal ne règle pas de façon exhaustive,
mais qu'il laisse en tout ou partie dans la sphère communale,
conférant par là aux autorités municipales une liberté de dé-
cision appréciable (ATF 126 I 133 consid. 2 p. 136; 124 I 223
consid. 2b p. 226/227; 122 I 279 consid. 8b p. 290; 120 Ia
203 consid. 2a p. 204, et les arrêts cités). L'existence et
l'étendue de l'autonomie communale dans une matière concrète
sont déterminées essentiellement par la constitution et la
législation cantonales, voire exceptionnellement par le droit
cantonal non écrit et coutumier (ATF 122 I 279 consid. 8b p.
290; 116 Ia 285 consid. 3a p. 287; 115 Ia 42 consid. 3 p. 44;
114 Ia 80 consid. 2b p. 83, 168 consid. 2b p. 170). L'autono-
mie de la commune lui permet de se plaindre tant des excès de
compétence d'une autorité cantonale que de la violation par
celle-ci des règles du droit fédéral, cantonal ou communal
qui régissent la matière (ATF 126 I 133 consid. 2 p. 136; 124
I 223 consid. 2b p. 227; 122 I 279 consid. 8c p. 291, et les
arrêts cités).

   b) Les recourantes reprochent au Conseil d'Etat de
n'avoir pas fait entrer en vigueur l'art. 235 al. 1 LF au 1er
janvier 2001, avec la conséquence qu'elles n'ont pas pu béné-

ficier de la réduction du taux maximal, de 10% à 8%, de leur
contribution aux frais de traitement du corps enseignant des
écoles primaires, comme le prévoit la loi du 27 juin 2000.
Elles se plaignent dans ce contexte de la violation de leur
autonomie.

   A teneur de l'art. 70 Cst. val., les communes jouis-
sent de leur autonomie en respectant le bien commun et l'in-
térêt des autres collectivités publiques (al. 1); elles ac-
complissent leurs tâches propres et celles que leur attribue
la loi (al. 2); elles utilisent judicieusement et adminis-
trent avec soin le patrimoine communal (al. 3). Le droit can-
tonal distingue entre la sphère d'autonomie communale qui
ressortit aux tâches originaires, d'une part, et aux tâches
déléguées, d'autre part (cf. aussi l'art. 2 de la loi valai-
sanne sur le régime communal, du 13 novembre 1980 - LRC).
L'art. 6 LRC, déterminant les attributions de la commune mu-
nicipale, confie à celle-ci notamment la gestion des finances
municipales (let. a) et l'enseignement dans les écoles enfan-
tines et primaires, ainsi qu'au cycle d'orientation (let. h).
Cela étant, le droit cantonal ne confère à la commune aucune
compétence propre pour la fixation de sa contribution aux
frais salariaux de l'enseignement. Tout au contraire, l'art.
235 LF, comme règle de répartition de ces frais, attribue ex-
pressément au Grand Conseil la compétence de fixer par décret
le montant de la contribution communale. Sans doute les com-
munes subissent-elles, à raison de l'arrêté attaqué, une per-
te financière liée à une économie qu'elles espéraient faire
et qui leur échappe - du moins provisoirement. Bien que l'en-
seignement enfantin et primaire, ainsi que celui dispensé par
le cycle d'orientation, entrent dans les compétences communa-
les selon l'art. 6 let. h LRC, les recourantes ne peuvent ce-
pendant prétendre disposer, pour ce qui est du financement de
la rétribution des enseignants, d'une quelconque autonomie.
Au demeurant, les recourantes ne sont pas en mesure d'invo-
quer, à l'appui de leur grief, une disposition cantonale qui

leur donnerait une quelconque marge de manoeuvre pour modi-
fier unilatéralement la règle de partage des frais instituée
à l'art. 235 LF - à supposer même que cela soit concrètement
possible. Pour le surplus, les recourantes ne sauraient sé-
rieusement soutenir que le manque à gagner résultant du re-
port de l'entrée en vigueur de l'art. 235 al. 1 LF dans sa
teneur du 27 juin 2000 mettrait en danger l'autonomie géné-
rale que leur reconnaît le droit cantonal. La règle qu'elles
contestent touche plutôt au régime des finances publiques
cantonales, domaine dans lequel les communes ne sont en prin-
cipe pas autonomes (cf., dans un contexte légal analogue,
l'arrêt concernant les communes de Begnins et autres, du 30
mars 1998 et celui concernant la commune de Moutier, du 28
décembre 1998).

   Les recourantes ne pouvant se prévaloir d'une sphère
d'autonomie dans le domaine considéré, les recours doivent
être rejetés, sans qu'il soit possible d'examiner, pour le
surplus, les autres griefs dirigés contre l'arrêté attaqué.
La demande de second échange d'écritures, présentée à l'appui
du recours 1P.86/2001, n'a ainsi plus d'objet.

   3.- Il se justifie en l'occurrence de statuer sans
frais. Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens.

                       Par ces motifs,

           l e   T r i b u n a l   f é d é r a l :

   1.- Joint les causes 1P.57/2001, 1P.58/2001,
1P.59/2001, 1P.60/2001, 1P.61/2001 et 1P.86/2001.

   2. Rejette les recours.

   3. Dit qu'il n'est pas perçu d'émolument judiciaire,
ni alloué de dépens.

   4. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des recourantes et au Conseil d'Etat du canton du
Valais.

Lausanne, le 14 juin 2001
ZIR/col

            Au nom de la Ie Cour de droit public
                 du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
                        Le Président,

                        Le Greffier,