Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1P.328/2001
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1P.328/2001

        Ie   C O U R   D E   D R O I T   P U B L I C
       **********************************************

                        30 août 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Vice-président du Tribunal fédéral, Catenazzi et Favre.
Greffier: M. Zimmermann.
                          ________

          Statuant sur le recours de droit public
                         formé par

A.________ S.A., représentée par Me Pierre-Alain Schmidt,
avocat à Genève,

                           contre

l'arrêt rendu le 3 avril 2001 par le Tribunal administratif
genevois, dans la cause qui oppose la recourante au Départe-
ment de l'aménagement, de l'équipement et du logement de la
République et Canton de  G e n è v e;

       (Art. 8, 9 et 29 Cst.; amende administrative)

          Vu les pièces du dossier d'où ressortent
                 les  f a i t s  suivants:

     A.- La Ville de Vernier est propriétaire de la parcelle
n°xxx du Registre foncier de cette commune, l'Etat de Genève
de la parcelle contiguë n°xxx.

     Sur ces bien-fonds classés dans la zone de développe-
ment industriel au sens de la loi genevoise sur les zones de
développement industriel, du 13 décembre 1984 (LZDI), la so-
ciété B.________ S.A. (ci-après: B.________) a, le 26 novem-
bre 1998, demandé l'autorisation de construire une halle
destinée à servir d'entrepôt. Sur les documents présentés à
l'appui de la demande, la société A.________ S.A. (ci-après:
la Société) était désignée comme entreprise générale de
l'ouvrage projeté.

     Le 24 février 1999, le Conseil d'Etat du canton de Ge-
nève a autorisé l'application au projet des prescriptions de
la LZDI.

     Le 3 mars 1999, le Département cantonal de l'aménage-
ment, de l'équipement et du logement (ci-après: le Départe-
ment cantonal) a accordé l'autorisation de construire, sous
diverses charges et conditions.

     Lors d'un contrôle du chantier effectué le 21 juin
1999, l'inspecteur du Département cantonal a constaté divers
manquements aux prescriptions du règlement cantonal sur les
chantiers, du 30 juillet 1958 (ci-après: RCh), s'agissant
notamment de la sécurité des travailleurs et de normes
d'hygiène. A raison de ces faits, le Département cantonal a,
le 5 juillet 1999, infligé à la Société une amende de
5000 fr. Cette décision, entrée en force, a été exécutée.

     Le 14 janvier 2000, l'inspecteur du Département can-
tonal a constaté que les mesures de sécurité prévues par
l'art. 94 RCh n'étaient pas respectées. A raison de ces
faits, le Département cantonal a, le 8 février 2000, infligé
une amende de 10'000 fr. à la Société, laquelle a recouru
auprès de la Commission cantonale de recours en matière de
constructions du canton de Genève (ci-après: la Commission
cantonale).

     Le 1er février 2000, B.________ a décidé de suspendre
les travaux sur le chantier. Elle en a informé la recou-
rante, en lui demandant de bien vouloir lui remettre le dou-
ble des clés correspondant aux serrures installées sur le
bâtiment.

     Simultanément, B.________ a, le 1er février 2000,
averti le Département cantonal de l'interruption des tra-
vaux, qui devait se prolonger durant "quelques semaines", en
vue de la réorganisation de la direction du chantier.

     Le 23 février 2000, l'inspecteur du Département canto-
nal a constaté que des matériaux avaient été entreposés dans
une partie de la halle (soit 19'000 m2 pour une superficie
totale de 26'000 m2), notamment pour le compte du Comité in-
ternational de la Croix-Rouge, et que toute une série de me-
sures techniques, liées à la construction et à la sécurité
du bâtiment, telles qu'elles avaient été définies dans l'au-
torisation de construire, ou bien n'avaient pas été prises
ou bien ne fonctionnaient pas. A raison de ces faits, le Dé-
partement cantonal a, par deux décisions séparées du 6 mars
2000, ordonné à B.________ et à la Société de prendre des
mesures immédiates de sécurité; il leur a infligé en outre,
solidairement entre elles, une amende de 60'000 fr.

     Contre ces décisions, B.________ et la Société ont
recouru séparément auprès du Tribunal administratif du can-
ton de Genève (procédures A/385/2000 et A/386/2000).

     Le 21 novembre 2000, la Commission cantonale a rejeté
le recours formé par la Société contre la décision du 8 fé-
vrier 2000. La Société a recouru auprès du Tribunal adminis-
tratif (procédure A/1377/2000).

     Par arrêt du 3 avril 2001, celui-ci, après avoir joint
les causes A/385/2000, A/386/2000 et A/1377/2000, a rejeté
le recours formé contre la décision du 21 novembre 2000. Il
a en revanche admis ceux formés contre les décisions du 6
mars 2000, qu'il a annulées. Après avoir considéré que
l'amende ne pouvait être infligée aux différents pertur-
bateurs pris conjointement et solidairement entre eux, le
Tribunal administratif a déterminé leur responsabilité res-
pective de manière séparée. Il a infligé à la Société une
amende de 40'000 fr. et à B.________ une amende de
20'000 fr.

     B.- Agissant par la voie du recours de droit public, la
société A.________ S.A. demande au Tribunal fédéral d'annu-
ler l'arrêt du 3 avril 2001. Elle invoque les art. 8, 9 et
29 Cst.

     Le Tribunal administratif se réfère à son arrêt. Le Dé-
partement cantonal propose le rejet du recours dans la mesu-
re où il serait recevable.

         C o n s i d é r a n t   e n   d r o i t :

     1.- En rendant l'arrêt attaqué, le Tribunal administra-
tif a tranché le sort des amendes prononcées les 8 février
et 6 mars 2000 à l'encontre de la recourante. Dans son argu-
mentation, celle-ci remet cependant en cause uniquement les
motifs qui ont conduit la cour cantonale à lui infliger une
amende de 40'000 fr. à raison des faits constatés le 23 fé-
vrier 2000. En revanche, la recourante ne critique pas les
raisons pour lesquelles le Tribunal administratif a rejeté
le recours dirigé contre la décision rendue le 21 novembre
2000 par la Commission cantonale, confirmant ainsi l'amende
du 8 février 2000. Au regard du principe d'allégation (art.
90 al. 1 let. b OJ), cette décision ne fait partant pas
l'objet du recours, dont les conclusions, même formulées de
manière générale, doivent être comprises comme limitées im-
plicitement à l'annulation de l'arrêt du 3 avril 2001 en
tant qu'il porte sur l'amende du 6 mars 2000, à l'exclusion
de celle prononcée le 8 février 2000.

     2.- La recourante reproche au Tribunal administratif
d'avoir joint les procédures A/385/2000 et A/386/2000, sans
lui donner l'occasion de se déterminer sur le recours et les
autres écritures de B.________. Elle y voit une violation de
son droit d'être entendue.

     a) La portée du droit d'être entendu et les modalités
de sa mise en oeuvre sont tout d'abord déterminées par la
législation cantonale, dont le Tribunal fédéral revoit l'ap-
plication sous l'angle restreint de l'arbitraire (ATF 126 I
15 consid. 2a p. 16; 125 I 257 consid. 3a p. 259; 124 I 241
consid. 2 p. 242/243, et les arrêts cités). Il examine en
revanche librement si les garanties minimales consacrées par
le droit constitutionnel fédéral ont été respectées (ATF 126
I 15 consid. 2a p. 16; 125 I 257 consid. 3a p. 259; 124 I

241 consid. 2 p. 242/243, et les arrêts cités). La recouran-
te n'invoquant pas la violation de règles du droit cantonal
régissant son droit d'être entendue, c'est à la lumière de
l'art. 29 al. 2 Cst. qu'il convient d'examiner son grief
(cf., s'agissant de l'art. 4 aCst., ATF 125 I 257 consid. 3a
p. 259; 124 I 49 consid. 3a p. 51; 119 Ia 136 consid. 2c
p. 138, 260 consid. 6 p. 260/261, et les arrêts cités).

     b) Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2
Cst. inclut le droit du particulier de s'expliquer avant
qu'une décision ne soit prise à son détriment, de fournir
des preuves quant aux faits de nature à influer sur la déci-
sion, d'avoir accès au dossier, de participer à l'adminis-
tration des preuves, d'en prendre connaissance et de se dé-
terminer à leur propos (ATF 127 I 54 consid. 2b p. 56; 126 V
130 consid. 2 p. 130-132; cf., pour la jurisprudence relati-
ve à l'art. 4a Cst., ATF 126 I 15 consid. 2a/aa p. 16; 124 I
49 consid. 3a p. 51, 242 consid. 2 p. 242, et les arrêts
cités).

     c) En l'espèce, le Tribunal administratif a, conformé-
ment à l'art. 70 de la loi cantonale sur la procédure admi-
nistrative, du 12 septembre 1985 (LPA), joint les recours
A/385/2000 et A/386/2000, dirigés contre les décisions du 6
mars 2000. Il était au demeurant tenu d'agir de la sorte.
L'amende de 60'000 fr. ayant été infligée à la recourante et
à B.________, prises conjointement et solidairement entre
elles, le sort de l'un des recours pouvait influer sur
l'issue de l'autre, et réciproquement, ce qui commandait de
procéder à la jonction.

     d) Sans contester celle-ci, la recourante se plaint de
n'avoir pas pu se déterminer sur le recours et les autres
écritures de B.________.

     Sans avertir les recourantes de l'existence de deux re-
cours formés contre les décisions du 6 mars 2000, le Tribu-
nal administratif a instruit les procédures A/385/2000 et
A/386/2000 de manière séparée, mais parallèle. Il a procédé
à un double échange d'écritures: le Département cantonal a
répondu aux recours; les recourants ont répliqué; le Dépar-
tement cantonal a dupliqué. Dans la cause A/385/2000, le
mandataire de B.________, s'apercevant que le Département
cantonal avait répondu par une seule et même écriture aux
deux recours, en désignant ceux-ci, a demandé au Tribunal
administratif, le 29 juin 2000, de recevoir une copie du
recours de la recourante, ce qui lui a été accordé le 5
juillet suivant. Dans le cadre de la procédure A/386/2000,
la recourante s'est adressée au Tribunal administratif, le
23 mai 2000. Elle a indiqué avoir eu connaissance du recours
de B.________ - dont elle contestait l'allégué des faits -
dans une procédure civile parallèle; elle a demandé expres-
sément à pouvoir se déterminer, dans le cadre d'un second
échange, sur les écritures "adverses". Le 25 mai 2000, le
Juge délégué a assuré à la recourante qu'elle aurait l'oc-
casion de répliquer ultérieurement. Dans la suite de la
procédure toutefois, le Tribunal administratif n'a pas in-
vité formellement B.________ à se déterminer sur le recours
et la réplique de la recourante, ni inversement - ce qui
peut paraître discutable compte tenu de la connexité des
causes qui a précisément conduit à leur jonction. Cela
étant, il est constant que B.________ (par l'entremise du
Tribunal administratif) et la recourante (dans le cadre
d'une autre procédure) ont eu connaissance du recours formé
par l'une et par l'autre, qu'elles ont pu prendre en compte
dans la confection de leur réplique. En revanche, le Tribu-
nal administratif ne leur a pas communiqué la réplique de
l'autre recourante, en vue de la duplique. Ce fait, sans
doute regrettable, n'a cependant pas porté à conséquence. En
effet, tous les arguments déterminants pour la solution du

litige ont été exposés dans les recours et les répliques,
tant pour ce qui concernait les rapports entre les diffé-
rents protagonistes de l'affaire, le prononcé d'une amende
en solidarité et la quotité de celle-ci. La communication
croisée des répliques, en vue de la duplique, n'aurait rien
appris aux recourantes qu'elles ne savaient déjà.

     3.- La recourante se plaint de ce que le Tribunal admi-
nistratif n'aurait pas ordonné les mesures d'instruction né-
cessaires pour établir correctement les faits déterminants
de la cause.

     a) L'autorité peut renoncer au moyen de preuve offert
par une partie, pour autant qu'elle puisse admettre sans
arbitraire que ce moyen n'aurait pas changé sa conviction
(ATF 124 I 241 consid. 2 p. 242, 274 consid. 5b p. 285; 124
V 90 consid. 4b p. 94; 122 II 464 consid. 4a p. 469, et les
arrêts cités). Viole la Constitution l'autorité qui nie sans
motifs suffisants toute pertinence à un moyen de preuve (ATF
114 II 289 consid. 2a p. 291). Le Tribunal fédéral revoit
cette question sous l'angle restreint de l'arbitraire, car
elle porte uniquement sur l'appréciation des preuves, et non
point sur la portée du droit d'être entendu (ATF 115 Ia 8
consid. 3a p. 11/12; 106 Ia 161).

     b) Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole grave-
ment une norme ou un principe juridique clair et indiscuté,
ou lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le senti-
ment de la justice et de l'équité; à cet égard, le Tribunal
fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité
cantonale de dernière instance que si elle apparaît insoute-
nable, en contradiction manifeste avec la situation effec-
tive, adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un
droit certain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de
la décision critiquée soient insoutenables, encore faut-il
que cette dernière soit arbitraire dans son résultat (ATF

127 I 54 consid. 2b p. 56, 60 consid. 5a p. 70; 126 I 168
consid. 3a p. 170, et les arrêts cités). Il n'y a pas arbi-
traire du seul fait qu'une autre interprétation de la loi
soit possible, ou même préférable (ATF 124 I 247 consid. 5
p. 250/251; 120 Ia 369 consid. 3a p. 373; 118 Ia 497 consid.
2a p. 499).

     c) Dans un premier moyen, la recourante reproche au
Tribunal administratif de n'avoir pas clarifié le rôle, dans
la direction des travaux, de la société C.________ S.A. (ci-
après: C.________). Elle prétend à cet égard avoir allégué,
pièces à l'appui, que C.________ devait être tenue comme
l'entreprise générale responsable du chantier; elle ne
serait pour sa part que le sous-traitant de C.________.

     aa) A teneur de l'art. 7 al. 1 let. a de la loi gene-
voise sur les constructions et les installations diverses,
du 14 avril 1988 (LCI), nul ne peut, sans l'autorisation du
Département cantonal, occuper, faire occuper ou utiliser à
un titre quelconque des constructions ou installations neu-
ves ou modifiées, destinées à l'habitation ou au travail.
Une construction doit remplir en tout temps les conditions
de sécurité ou de salubrité exigées par la loi, ses règle-
ments d'application ou les autorisations délivrées en ap-
plication de ceux-ci (art. 121 al. 1 LCI). Est passible
d'une amende administrative de 100 fr. à 60'000 fr. toute
personne contrevenant à la loi, aux règlements d'application
et aux décisions prises en exécution de ceux-ci (art. 137
al. 1 LCI).

     bb) L'amende du 8 février 2000 a été prononcée en rai-
son d'infractions à diverses dispositions du RCh destinées à
assurer la sécurité et l'hygiène des travailleurs, pour des
faits constatés que le 14 janvier 2000. L'amende du 6 mars

2000 a été prononcée parce que, selon un constat établi le
23 février 2000, l'entrepôt aurait été occupé sans autorisa-
tion et que les conditions de l'autorisation de construire,
concernant notamment la sécurité du bâtiments, n'auraient
pas été respectées. Après avoir rappelé sa jurisprudence re-
prenant la distinction classique entre le perturbateur par
comportement et le perturbateur par situation, ainsi que les
principes généraux relatifs au prononcé des amendes adminis-
tratives, le Tribunal administratif a considéré que la re-
courante devait être punie, dans l'un et l'autre cas, comme
perturbateur par situation. Selon l'arrêt attaqué, il res-
sortirait du dossier que la recourante, désignée comme en-
treprise générale, aurait de fait assumé la responsabilité
des travaux, dirigeant ceux-ci et coordonnant l'activité de
plusieurs sous-traitants. Le Département cantonal pouvait
dès lors, selon le Tribunal administratif, imputer à la re-
courante les manquements aux prescriptions de sécurité et le
défaut d'observation des conditions de l'autorisation de
construire, même si ces actes devaient être attribués à
d'autres personnes.

     Tenant ainsi la situation pour claire, sur le vu des
déclarations faites par témoins devant la Commission can-
tonale, le Tribunal administratif a rejeté les offres de
preuve tendant à éclaircir le point de savoir si C.________
était, sous l'angle du droit civil, l'entreprise générale
responsable des travaux et la recourante son sous-traitant.
Ce point n'était pas déterminant, selon le Tribunal adminis-
tratif, pour établir si la recourante devait être tenue pour
un perturbateur par situation. Même si elle est discutable,
cette appréciation anticipée des preuves n'était pas arbi-
traire pour autant. Eu égard aux autres moyens de preuve à
sa disposition, le Tribunal administratif pouvait en effet
considérer que le rôle effectif de la recourante et de ses
dirigeants dépassait celui défini par contrat.

     d) Dans un deuxième moyen, la recourante reproche au
Tribunal administratif d'avoir mis à sa charge les faits à
l'origine de l'amende du 6 mars 2000, sans avoir instruit le
point de savoir si, comme elle l'avait allégué, les travaux
étaient suspendus depuis le 1er février 2000. La recourante
en a déduit qu'elle ne pouvait être tenue pour responsable
des faits constatés le 23 février 2000.

     Dans sa décision du 6 mars 2000, le Département canto-
nal s'est référé au rapport du 23 février 2000. Contraire-
ment à ce que suggère la recourante, les infractions consta-
tées ne concernaient pas uniquement l'entreposage de maté-
riaux dans la halle, au mépris des règles de sécurité. Le
rapport en question faisait aussi état de l'occupation sans
autorisation des locaux, et surtout du défaut des mesures
"techniques et constructives" de sécurité posées comme con-
ditions à l'octroi de l'autorisation. Alors que la recouran-
te avait allégué devant lui ne pas pouvoir être tenue comme
responsable des faits survenus entre la suspension du chan-
tier, le 1er février 2000, et le constat du 23 février 2000,
le Tribunal administratif n'a pas examiné ce point. En tout
cas, l'arrêt attaqué n'en dit rien. Il faut en déduire que,
de manière implicite, le Tribunal administratif a, par une
appréciation anticipée des preuves, tenu le fait allégué par
la recourante comme dénué de force probante. Or, il n'est
pas exclu qu'une partie des faits mis à la charge de la re-
courante - soit notamment d'avoir toléré que des tiers en-
treposent du matériel dans les locaux, en violation des
prescriptions de sécurité - se soit produite pendant la pé-
riode durant laquelle la recourante a affirmé n'avoir plus
eu la maîtrise du chantier. Si la thèse de la recourante de-
vait se vérifier, cela aurait pour conséquence de voir sa
responsabilité réduite sur ce point, qui méritait d'être
éclairci. Le Tribunal administratif ne pouvait ainsi se
dispenser, comme il l'a fait, de procéder aux investigations
nécessaires. En effet, le rapport du 23 février 2000 ne per-

met pas d'établir, avec toute la précision voulue, le dérou-
lement chronologique de l'occupation de la halle par des
tiers, partant, dans quelle mesure les infractions consta-
tées le 23 février 2000 auraient été commises avant le 1er
février précédent.

     Le grief est bien fondé.

     4.- Le recours doit ainsi être admis sur ce point et
l'arrêt attaqué annulé en tant qu'il porte sur l'amende pro-
noncée le 6 mars 2000, sans qu'il soit nécessaire, pour le
surplus, d'examiner les autres griefs soulevés par la recou-
rante. Il convient de statuer sans frais. Une indemnité de
3000 fr. est mise à la charge de l'Etat de Genève, en faveur
de la recourante, à titre de dépens (art. 159 al. 1 OJ).

                      Par ces motifs,

          l e   T r i b u n a l   f é d é r a l :

     1. Admet le recours et annule l'arrêt attaqué en tant
qu'il porte sur l'amende prononcée le 6 mars 2000.

     2. Statue sans frais. Met à la charge de l'Etat de Ge-
nève une indemnité de 3000 fr. en faveur de la recourante, à
titre de dépens.

     3. Communique le présent arrêt en copie au mandataire
de la recourante, au Département de l'aménagement, de
l'équipement et du logement et au Tribunal administratif de
la République et Canton de Genève.

                         _________

Lausanne, le 30 août 2001
ZIR/moh

            Au nom de la Ie Cour de droit public
                du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
                       Le Président,

                        Le Greffier,