Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1P.15/2001
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1P.15/2001

        Ie   C O U R   D E   D R O I T   P U B L I C
       **********************************************

                        20 mars 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Vice-Président du Tribunal fédéral, Féraud et Favre.
Greffier: M. Parmelin.

                        ____________

           Statuant sur le recours de droit public
                          formé par

X.________, représenté par Me Stéphane Riand, avocat à Sion,

                           contre

le jugement rendu le 11 décembre 2000 par la Cour d'appel pé-
nale du Tribunal cantonal du canton du Valais dans la cause
qui oppose le recourant au Département fédéral des finances,
au Ministère public de la Confédération et au Procureur du
Valais central;

 (art. 8 et 9 Cst.; répartition des frais et dépens dans la
                 procédure pénale cantonale)

          Vu les pièces du dossier d'où ressortent
                  les  f a i t s  suivants:

   A.- X.________ a fait l'objet de deux procédures pé-
nales, la première pour infraction à la loi fédérale sur les
banques et les caisses d'épargne (ci-après: la première pro-
cédure), la seconde pour faux dans les titres (ci-après: la
deuxième procédure), à raison de faits survenus alors qu'il
était contrôleur et réviseur de la Banque cantonale du
Valais, dans le cadre de l'affaire dite "BCV-Dorsaz". Il a
finalement été acquitté des divers chefs d'accusation retenus
à son endroit.

   Dans le cadre d'un arrêt rendu le 17 avril 2000, le
Tribunal fédéral a annulé un premier jugement du 21 mai 1999
de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton du
Valais (ci-après: la Cour d'appel ou le Tribunal cantonal)
dans la mesure où il arrêtait à 7'000 fr. les dépens dus par
le fisc à l'avocat de X.________ (procédure 6P.121/1999).

   Statuant à nouveau par jugement du 26 juin 2000, la
Cour d'appel a mis à la charge de l'accusé une partie des
frais d'instruction de la deuxième procédure, par 3'290,60
fr., et lui a alloué une indemnité à titre de dépens de
65'500 fr., à la charge de l'Etat du Valais. Aux termes d'un
arrêt rendu le 24 octobre 2000, le Tribunal fédéral a annulé
ce jugement en tant qu'il concernait les frais d'instruction
de la deuxième procédure et les débours de première instance
et d'appel arrêtés à 400 fr.; il l'a en revanche confirmé en
tant qu'il avait trait à la fixation des honoraires d'avocat
(procédure 1P.467/2000).

   B.- Le 7 novembre 2000, X.________ a conclu au paie-
ment d'une indemnité de 143'887,50 fr. pour la phase d'ins-
truction, soit 95'280 fr. d'honoraires et 48'607,50 fr. pour
les débours.

   Statuant par jugement du 11 décembre 2000, la Cour
d'appel a mis à la charge du fisc les frais d'instruction de
la deuxième procédure, par 3'290,60 fr. Elle a arrêté à
109'800 fr. les dépens dus à X.________, sous déduction du
montant de 65'500 fr. déjà versé; se référant au décompte
établi par le Tribunal d'arrondissement pour le district de
Sion concernant le sous-directeur et le directeur-adjoint de
la Banque cantonale du Valais ainsi qu'aux nombreuses séances
d'instruction, au temps nécessaire à leur préparation, aux
entrevues avec le client, au volume et à la complexité de la
cause, elle a estimé ex aequo et bono à 200 heures le temps
utilement consacré à l'instruction par le conseil de
X.________ et fixé à 40'000 fr. les honoraires dus à ce ti-
tre, compte tenu d'un tarif horaire de 200 fr.; elle a en
outre alloué un montant de 500 fr. à titre de dépens posté-
rieurs au jugement du 24 octobre 2000; vu l'ampleur du dos-
sier, des frais de copies estimés à 50 centimes l'unité et
des frais de port au tarif alors en vigueur, elle a arrêté à
3'800 fr. les débours de la phase de l'instruction.

   C.- Agissant par la voie du recours de droit public,
X.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt et
de renvoyer la cause au Tribunal cantonal pour nouveau juge-
ment dans le sens des considérants. Invoquant les art. 8 et 9
Cst., il dénonce le caractère arbitraire des montants qui lui
ont été alloués à titre de dépens et de débours pour la
deuxième procédure. Il fait en outre grief à la Cour d'appel
de ne pas lui avoir octroyé de dépens pour la première procé-
dure.

   Le Tribunal cantonal se réfère aux considérants de
son jugement. Le Département fédéral des finances conclut à
ce que le Tribunal fédéral constate que les frais de la pre-
mière procédure ont été entièrement remis et que la Confédé-
ration suisse ne doit verser aucune indemnité à X.________ à
titre de participation aux dépens pour cette procédure. Le
Ministère public de la Confédération se réfère à la prise de
position du Département fédéral des finances. Le Procureur du
Valais central n'a pas déposé d'observations.

          C o n s i d é r a n t   e n   d r o i t :

   1.- Le Tribunal fédéral examine d'office et libre-
ment la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 127
III 41 consid. 2a p. 42; 126 I 81 consid. 1 p. 83; 126 II 506
consid. 1 p. 507 et les arrêts cités).

   a) Le recourant reproche à l'autorité intimée de ne
pas lui avoir accordé de dépens pour la phase d'instruction
de la première procédure.

   Comme l'a relevé à juste titre la Cour d'appel,
l'autorité cantonale dont la décision a été annulée sur re-
cours de droit public est liée par l'arrêt de cassation rendu
par le Tribunal fédéral (cf. art. 38 OJ; ATF 112 Ia 353 con-
sid. 3c/bb p. 354/355 et l'arrêt cité). Il en va de même des
parties à la procédure qui ne sont pas admises à remettre en
cause les points qui ont définitivement été tranchés par le
Tribunal fédéral. Or, il ressort de l'arrêt rendu le 24 octo-
bre 2000 que le jugement du Tribunal cantonal du 26 juin 2000
a été annulé uniquement en tant qu'il concernait les frais et
les débours de la deuxième procédure; en revanche, ce juge-
ment a été intégralement confirmé s'agissant des honoraires
et des débours de la première procédure. Le recourant n'est

dès lors pas habilité à se plaindre du refus de l'autorité
intimée de ne pas lui avoir alloué de dépens pour la phase de
l'instruction de la première procédure. A supposer que ce
grief soit recevable, il serait de toute manière mal fondé
puisque la somme de 8'400 fr. accordée au recourant pour les
honoraires de son conseil en relation avec cette procédure
est une indemnité globale qui comprend également la rémunéra-
tion de l'avocat pour les activités déployées durant la phase
de l'instruction.

   b) Pour le surplus, dans la mesure où le recourant
précise les trois postes des frais et dépens qu'il reproche
au Tribunal cantonal d'avoir arbitrairement calculés, le re-
cours répond aux exigences de motivation de l'art. 90 al. 1
let. b OJ (ATF 126 III 534 consid. 1b p. 536 et les arrêts
cités); il est à cet égard recevable, malgré une tendance à
la prolixité, qui affecte la rédaction et sur laquelle le
Tribunal fédéral avait déjà attiré l'attention du conseil du
recourant (cf. arrêt précité du 24 octobre 2000, consid. 1b;
arrêt non publié du 10 novembre 2000, dans la cause Z. contre
Tribunal cantonal valaisan, consid. 1c in fine).

   Sous ces réserves, il y a lieu d'entrer en matière.

   2.- Selon le recourant, le Tribunal cantonal aurait
fait preuve d'arbitraire dans la fixation des honoraires et
des débours de la deuxième procédure.

   a) Conformément à la jurisprudence du Tribunal fédé-
ral connue du recourant et de son conseil (cf. arrêts préci-
tés des 24 octobre et 10 novembre 2000), la loi valaisanne du
14 mai 1998 fixant le tarif des frais et dépens devant les
autorités judiciaires et administratives (LTar) s'applique en
l'espèce, soit plus particulièrement les art. 3, 26, 28, 30
et 36 LTar. Dans l'application de ces normes, le Juge canto-
nal dispose d'un large pouvoir d'appréciation, limité par

l'interdiction de l'arbitraire (cf. arrêt non publié du 24
octobre 2000, consid. 2a; sur la notion d'arbitraire, voir
ATF 126 I 168 consid. 3a p. 170 et la jurisprudence citée).

   b) aa) Concernant l'indemnité à titre de dépens,
fixée à 40'000 fr., le Tribunal cantonal l'a déterminée ex
aequo et bono, comme le recourant l'avait lui-même suggéré,
en se référant à l'estimation du temps consacré à la défense
utile de deux autres cadres supérieurs de la Banque cantonale
du Valais. Pour tenir compte de la complexité particulière de
la cause et des implications spécifiques à la fonction de
contrôleur et de réviseur de la banque, le Tribunal cantonal
a retenu un total de 452 heures pour la phase de l'instruc-
tion et du jugement en première instance, alors que seules
300 heures, respectivement 275 heures avaient été admises
pour le sous-directeur et le directeur-adjoint. En invoquant
les mesures d'organisation prises dans le corps judiciaire
valaisan pour permettre le traitement de l'affaire "BCV-
Dorsaz", ou en faisant valoir l'horaire de travail d'une
secrétaire engagée dans le but spécial d'assumer sa défense,
le recourant ne fait qu'opposer à la solution retenue par le
Tribunal cantonal sa propre estimation, ce qui ne suffit pas
pour considérer comme arbitraire l'estimation de son temps de
travail à 200 heures pour la phase de l'instruction pénale de
la deuxième procédure (cf. ATF 126 III 534 consid. 1b préci-
té). En particulier, le temps consacré par les magistrats à
l'examen de l'ensemble de cette procédure, comprenant de nom-
breux prévenus, dans la perspective de la décision judiciaire
et de la rédaction de jugements et d'arrêts, ne peut être
comparé avec la défense d'un seul accusé. De même, l'engage-
ment d'une secrétaire ad hoc, pendant une période limitée, ne
fait que confirmer l'ampleur de la procédure, dont le Tribu-
nal cantonal a tenu compte, et qui n'est pas contestée. Cette
circonstance ne renseigne toutefois pas sur l'activité intel-
lectuelle de l'avocat dans l'accomplissement de son mandat
et, par voie de conséquence, sur le temps requis pour sa bon-

ne exécution. A cet égard, la comparaison avec le travail de
deux confrères chargés de la défense de deux employés diri-
geants de la Banque cantonale du Valais ne prête pas flanc à
la critique.

   Par ailleurs, le fait de retenir un tarif horaire de
200 fr. entre dans le large pouvoir d'appréciation du juge,
et ne saurait être qualifié d'arbitraire, conformément à
l'arrêt rendu le 24 octobre 2000 entre les mêmes parties.

   Le grief relatif à la fixation des honoraires est
ainsi mal fondé.

   bb) Concernant les débours de l'instruction, la Cour
d'appel les a arrêtés à 3'800 fr., à nouveau par référence à
ceux évalués dans les procédures concernant le sous-directeur
et le directeur-adjoint de la Banque cantonale du Valais, en
les majorant d'environ 300 fr. Le recourant avait prétendu
pour ce poste au paiement d'une somme de 48'607,50 fr. et ar-
gumente en soutenant que le dossier comportait 37 classeurs
réunissant plus de 16'000 pages, ce qui représentait environ
8'000 fr. de frais de photocopies, à 50 centimes l'unité. Si
le Tribunal cantonal a raison de souligner la démesure de la
prétention du recourant, il ne peut cependant pas fixer les
débours à un montant inférieur à la moitié des frais de pho-
tocopies sans autre motivation, de sorte que sur ce point sa
décision doit être considérée comme arbitraire.

   Le jugement du 11 décembre 2000 sera donc annulé en
tant qu'il fixe à 3'800 fr. les débours de l'instruction de
la deuxième procédure. Il appartiendra à la Cour d'appel de
procéder à une nouvelle estimation en fonction des frais ef-
fectifs objectivement prouvés.

   cc) Enfin, dans le cadre de l'arrêt rendu le 24 oc-
tobre 2000, le Tribunal fédéral avait aussi annulé le juge-

ment rendu le 26 juin 2000 par le Tribunal cantonal en tant
qu'il fixait à 400 fr. les débours de première instance et
d'appel de la deuxième procédure. Reprenant l'examen de la
cause, la Cour d'appel ne s'est pas déterminée à ce sujet
mais elle a simplement confirmé l'allocation d'une somme de
400 fr., soit 200 fr. pour la procédure devant le Tribunal
d'arrondissement et 200 fr. pour la procédure d'appel, sans
indiquer les motifs pour lesquels elle estimait justifié de
maintenir ces montants. Sur ce point également, le jugement
entrepris doit être annulé, ce qui amènera le Tribunal can-
tonal à se prononcer à nouveau sur cette question.

   c) En résumé, le jugement de la Cour d'appel du 11
décembre 2000 est annulé en tant qu'il fixe les débours de la
deuxième procédure à 3'800 fr. pour la phase d'instruction, à
200 fr. pour la procédure devant le Tribunal d'arrondissement
et à 200 fr. pour la procédure devant le Tribunal cantonal.
Il est confirmé pour le surplus.

   3.- Comme le recourant n'obtient que partiellement
gain de cause sur des points mineurs, il y a lieu de mettre à
sa charge un émolument judiciaire de 4'000 fr. (art. 156 al.
1, 153, 153a OJ). Une indemnité réduite de 800 fr. lui sera
allouée à titre de dépens, à la charge du canton du Valais
(art. 159 al. 1 OJ).

                       Par ces motifs,

           l e   T r i b u n a l   f é d é r a l :

   1. Admet partiellement le recours dans la mesure où
il est recevable. Annule le jugement attaqué en tant qu'il
fixe les débours de la deuxième procédure à 3'800 fr. pour la
phase d'instruction, à 200 fr. pour la procédure de première
instance et à 200 fr. pour la procédure d'appel.

   Rejette le recours pour le surplus;

   2. Met un émolument judiciaire de 4'000 fr. à la
charge du recourant;

   3. Alloue une indemnité de 800 fr. au recourant à
titre de dépens, à la charge du canton du Valais;

   4. Communique le présent arrêt en copie au mandatai-
re du recourant, au Département fédéral des finances, au Mi-
nistère public de la Confédération, au Procureur du Valais
central et au Tribunal cantonal du canton du Valais.

                        _____________

Lausanne, le 20 mars 2001
PMN/col

            Au nom de la Ie Cour de droit public
                 du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
                        Le Président,

                        Le Greffier,