Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Kassationshof in Strafsachen 6S.439/1999
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6S.439/1999/mnv

     C O U R   D E   C A S S A T I O N   P E N A L E
    *************************************************

                      17 avril 2000

      (suite à la délibération du 24 février 2000)

Composition de la Cour: M. Schubarth, Président, Prési-
dent du Tribunal fédéral, M. Schneider, M. Wiprächtiger,
M. Kolly, Juges, et Mme Brahier Franchetti, Juge sup-
pléante. Greffière: Mme Michellod.
                        _________

           Statuant sur le pourvoi en nullité
                        formé par

X.________, représenté par Me Stéphane Riand, avocat à
Sion,

                         contre

le jugement rendu le 21 mai 1999 par la Cour d'appel pé-
nale du Tribunal cantonal valaisan dans la cause qui op-
pose le recourant au Ministère public du   V a l a i s
c e n t r a l;

     (art. 251 aCP et 46 al. 1 let. k LB, concours)

        Vu les pièces du dossier d'où ressortent
               les   f a i t s   suivants:

  A.-  Par jugement du 27 avril 1998, le Tribunal
du IIe arrondissement pour le district de Sion a notam-
ment condamné X.________ pour divers faux dans les titres
à huit mois d'emprisonnement avec sursis pendant deux
ans.

  X.________ a interjeté appel. Par jugement du 21
mai 1999, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal va-
laisan a partiellement réformé le jugement du 27 avril
1998; elle a acquitté X.________ sur un point et a réduit
sa peine à six mois d'emprisonnement avec sursis pendant
deux ans.

  B.-  La Cour d'appel a notamment retenu les faits
suivants:

  X.________ était chef contrôleur de la Banque
cantonale du Valais (BCV) depuis le 1er janvier 1985. A
ce titre, il était non seulement contrôleur interne mais
aussi réviseur indépendant au sens de la loi sur les ban-
ques. Dans sa fonction de réviseur, X.________ a notam-
ment établi les rapports de révision des 26 avril 1989 et
22 mai 1990 relatifs aux exercices 1988 et 1989.

  Ces deux rapports de révision n'affirmaient rien
d'inexact mais ils étaient lacunaires sur des points im-
portants. Le rapport 1988 ne faisait pas expressément
mention de Y.________, ni du fait que les dépassements le
concernant provenaient d'un abus de sa position de repré-
sentant indépendant de la BCV à Fully; il ne précisait
pas non plus que la régularisation des suspens sur le

compte représentant se faisait par le biais du compte
courant privé de Y.________.

  Dans le rapport 1989, il n'était pas fait mention
du lien entre les suspens et les dépassements de crédit
par Y.________, ni du fait que ces suspens avaient été
remplacés par d'autres tout aussi critiquables; il
n'était rien dit au sujet de la politique du fait accom-
pli pratiquée par Y.________ pour dépasser ses limites de
crédit, ni du dépassement de plus de 13 millions de
francs sur le compte courant de Z.________, frère de
Y.________. Ces lacunes objectives sur des points impor-
tants étaient de nature à convaincre le lecteur de l'ab-
sence d'irrégularités; c'était notamment le cas des mem-
bres du conseil d'administration de la BCV, personnes
étrangères au domaine bancaire.

  X.________ avait connaissance des dépassements de
comptes, des abus de la position de représentant, de la
longueur anormale des suspens et des faiblesses du sys-
tème de contrôle interne des représentants; il avait
aussi conscience de ses obligations de contrôleur, notam-
ment de son devoir d'informer sans délai le conseil d'ad-
ministration et l'autorité de surveillance des irrégula-
rités qu'il constatait. Par son silence, il a appuyé la
politique du secret voulue par le directeur A.________.
En revanche, aucune connivence avec Y.________ n'a été
établie.

  La Cour d'appel a estimé que X.________ avait, en
rédigeant les rapports relatifs aux exercices 1988 et
1989, commis un faux dans les titres par omission au sens
de l'art. 251 aCP. Elle a par contre abandonné l'accusa-
tion de violation de l'art. 46 al. 1 let. k de la loi sur
les banques, cette infraction étant prescrite.

  C.-  X.________ a interjeté un pourvoi en nul-
lité. Invité à se déterminer, le Ministère public du Va-
lais central s'est purement et simplement référé aux con-
sidérants du jugement attaqué.

        C o n s i d é r a n t   e n   d r o i t :

  1.-  Le pourvoi en nullité ne peut être formé que
pour violation du droit fédéral (art. 269 PPF). Le Tribu-
nal fédéral n'est pas lié par les motifs invoqués dans le
pourvoi mais il ne peut aller au-delà des conclusions
(art. 277bis PPF), lesquelles doivent être interprétées à
la lumière de leur motivation; celle-ci circonscrit donc
les points litigieux que le Tribunal fédéral peut exami-
ner (ATF 124 IV 53 consid. 1; 123 IV 125 consid. 1).

  En l'espèce, le recourant ne se plaint que d'une
violation de l'art. 251 aCP; il ne remet pas en cause
l'application des art. 18 ss de la loi fédérale sur les
banques et les caisses d'épargne (RS 952.0, LB) et 43 ss
de l'ordonnance sur les banques et les caisses d'épargne
(RS 952.02, OB), dispositions fixant le contenu des rap-
ports de révision bancaire; il n'y a donc pas à revenir
sur cette question.

  Saisi d'un pourvoi en nullité, le Tribunal fédé-
ral est lié par les constatations de fait contenues dans
la décision attaquée (art. 277bis al. 1 PPF). Il est éga-
lement lié par les constatations d'instances inférieures
ou d'experts lorsque la dernière instance cantonale s'y
réfère ou y renvoie, explicitement ou implicitement (ATF
118 IV 122 consid. 1). Le Tribunal fédéral ne peut pas
lui-même compléter l'état de fait; il n'examine l'appli-
cation du droit fédéral que sur la base de l'état de fait

retenu (ATF 106 IV 338 consid. 1). Dans la mesure où
l'argumentation du recourant serait fondée sur des faits
qui ne sont pas constatés dans l'arrêt attaqué, il n'est
pas possible d'en tenir compte; le pourvoi en nullité est
une voie de recours qui provoque le contrôle de l'appli-
cation du droit fédéral à un état de fait arrêté défini-
tivement par l'autorité cantonale (ATF 124 IV 81 consid.
2a).

  2.-  Le recourant invoque une violation de l'art.
251 aCP. Il estime que cette disposition n'est pas appli-
cable aux faux rapports de révision bancaire litigieux,
car ceux-ci ne sont pas aptes à prouver la véracité de
leur contenu.

  a) Les infractions du droit pénal relatif aux ti-
tres protègent la confiance qui, dans les relations juri-
diques, est placée dans un titre comme moyen de preuve.
C'est pourquoi parmi les titres on ne trouve notamment
que les écrits destinés et propres à prouver un fait
ayant une portée juridique (art. 110 ch. 5 al. 1 CP). Le
caractère de titre d'un écrit est relatif. Par certains
aspects, il peut avoir ce caractère, par d'autres non.
Selon la jurisprudence, la destination d'un écrit à prou-
ver peut se déduire directement de la loi ou, à défaut,
du sens et de la nature de l'écrit en question. Savoir si
un écrit est propre à prouver se détermine en vertu de la
loi ou, à défaut, des usages commerciaux (ATF 125 IV 17
consid. 2a/aa p. 22, 273 consid. 3a/aa).

  L'art. 251 ch. 1 aCP vise non seulement la créa-
tion d'un titre faux ou la falsification d'un titre (faux
matériel), mais aussi l'établissement d'un titre menson-
ger (faux intellectuel). Il y a création d'un titre faux
lorsqu'une personne fabrique un titre dont l'auteur réel

ne coïncide pas avec l'auteur apparent, alors que le faux
intellectuel vise l'établissement d'un titre qui émane de
son auteur apparent, mais qui est mensonger dans la mesu-
re où son contenu ne correspond pas à la réalité (ATF 125
IV 17 consid. 2a/aa p. 22 et les arrêts cités).

  Il est toutefois généralement admis qu'un simple
mensonge écrit ne constitue pas un faux intellectuel. La
confiance que l'on peut avoir à ne pas être trompé sur la
personne de l'auteur est plus grande que celle que l'on
peut avoir à ce que l'auteur ne mente pas par écrit; pour
cette raison, la jurisprudence exige, dans le cas du faux
intellectuel, que le document ait une crédibilité accrue
et que son destinataire puisse s'y fier raisonnablement.
Une simple allégation, par nature sujette à vérification
ou discussion, ne suffit pas; il doit résulter des cir-
constances concrètes ou de la loi que le document est di-
gne de confiance, de telle sorte qu'une vérification par
le destinataire n'est pas nécessaire et ne saurait être
exigée (ATF 123 IV 61 consid. 5b p. 64 s.; 122 IV 332
consid. 2c p. 339). Tel est le cas lorsque certaines as-
surances objectives garantissent aux tiers la véracité de
la déclaration; il peut s'agir, par exemple, d'un devoir
de vérification qui incombe à l'auteur du document ou en-
core de l'existence de dispositions légales comme les
art. 958 ss CO relatifs au bilan, qui définissent le con-
tenu du document en question. En revanche, le simple fait
que l'expérience montre que certains écrits jouissent
d'une crédibilité particulière ne suffit pas, même si
dans la pratique des affaires il est admis que l'on se
fie à de tels documents. Il faut noter, enfin, que la li-
mite entre le mensonge écrit et le faux intellectuel dans
les titres doit être fixée de cas en cas en fonction des
circonstances concrètes de l'espèce (ATF 125 IV 17 con-
sid. 2a/aa, 273 consid. 3a/aa et les arrêts cités).

  b) Le rapport de révision bancaire est exigé par
la loi qui en définit le contenu (art. 21 LB et 43 ss
OB). L'organe de révision, extérieur à la banque, doit
être agréé par la Commission fédérale des banques (CFB,
art. 20 LB et 35 ss OB); sous l'ancien droit, qui admet-
tait que les rapports de révision relatifs à des banques
cantonales soient établis par le service de révision de
la banque même, la CFB contrôlait si ce service était
suffisant et pouvait intervenir auprès de la banque si
tel n'était pas le cas (art. 18 al. 2 aLB, RS 1848-1947,
vol. 10 p. 325; art. 34 aOB du 17 mai 1972, RO 1972 832).
Le but du rapport de révision est de permettre aux orga-
nes responsables de la banque et à la CFB de prendre les
décisions nécessaires à l'application de la loi et de
veiller au respect des prescriptions légales. La valeur
probante d'un tel rapport s'impose à l'évidence. Le grief
est donc infondé.

  3.-  Le recourant soutient que l'art. 251 aCP
n'entre pas en considération lorsqu'un rapport de révi-
sion bancaire est incomplet; seuls seraient applicables
l'art. 46 al. 1 let. k LB et, subsidiairement, l'art. 49
al. 1 let. e LB.

  a) Les banques sont tenues de soumettre chaque
année leur compte annuel au contrôle de réviseurs indé-
pendants de l'établissement (art. 18 LB). Toutefois, jus-
qu'en 1994, les banques cantonales étaient dispensées de
faire appel à un réviseur externe si elles possédaient un
service de révision exercé par des personnes qualifiées
(art. 18 al. 2 aLB). La CFB décidait si ce service de ré-
vision était suffisant et, le cas échéant, invitait la
banque cantonale soit à le modifier soit à confier la ré-
vision à une institution reconnue extérieure (art. 34
aOB).

  Les réviseurs doivent s'assurer que les comptes
annuels sont établis, tant à la forme qu'au fond, confor-
mément aux prescriptions des lois, statuts et règlements
(art. 19 al. 1 LB). Le rapport de révision doit notamment
faire apparaître clairement la situation financière géné-
rale de la banque; il doit indiquer en premier lieu si
les engagements, portés au bilan régulièrement établi,
sont couverts par les actifs et si les fonds propres qui
y figurent sont intacts; le rapport s'ouvre par un résumé
des irrégularités constatées et des réserves émises, avec
un renvoi aux passages y relatifs du rapport (art. 43
OB).

  Les art. 46 à 51bis LB contiennent des disposi-
tions pénales. En vertu de l'art. 46 al. 1 let. k LB, est
passible de l'emprisonnement jusqu'à six mois ou de
l'amende jusqu'à 50'000 francs celui qui, intentionnelle-
ment, aura, en exécutant le contrôle ou en établissant le
rapport y afférent, violé de manière grossière les obli-
gations que cette loi ou les dispositions d'exécution lui
assignent en qualité d'organe de révision agréé, et aura
en particulier fourni dans le rapport de révision de
fausses indications ou dissimulé des faits importants;
s'il a agi par négligence, la peine est de 30'000 francs
d'amende au plus (art. 46 al. 2 LB). Quant à l'art. 49
al. 1 let. e LB, il prévoit qu'est puni des arrêts ou de
l'amende jusqu'à 20'000 francs celui qui, intentionnelle-
ment, aura omis de fournir à la CFB les informations
qu'il était tenu de lui communiquer; en cas de négligen-
ce, la peine est de 10'000 francs d'amende au plus (art.
49 al. 2 LB).

  b) Comme l'ont relevé le Tribunal d'arrondisse-
ment et la Cour d'appel, lorsque des indications inten-
tionnellement fausses ou incomplètes figurent dans les
rapports que l'institution de révision d'une banque

adresse au conseil d'administration ou à la CFB, se pose
le problème du concours entre les art. 46 al. 1 let. k LB
et 251 aCP, si ces avis inexacts ou ces faux rapports
réunissent les éléments constitutifs objectifs et subjec-
tifs des deux normes pénales.

  La Cour d'appel, en se référant aux motifs du
Tribunal d'arrondissement, a estimé que le faux dans les
titres au sens de l'art. 251 aCP n'était pas absorbé par
une éventuelle infraction à l'art. 46 al. 1 let. k LB. Le
Tribunal d'arrondissement s'est basé sur l'avis de
Niklaus Schmid. Cet auteur relève que la question du con-
cours entre les deux dispositions est controversée mais
qu'étant donné la différence entre les biens juridiques
protégés, on tend à admettre le concours idéal parfait;
il ajoute que cette solution s'impose lorsque les rap-
ports de révision ne sont pas adressés seulement à la CFB
en tant qu'instrument de surveillance, mais qu'ils sont
aussi présentés au conseil d'administration et correspon-
dent alors plutôt au rapport de l'organe de révision des
art. 729 et 729b CO (Niklaus Schmid, La responsabilité
pénale du réviseur, Publications de la Chambre fidu-
ciaire, vol. 149, Zurich 1997, p. 91 s.).

  Le Tribunal d'arrondissement a estimé que tel
était le cas en l'espèce. Il a constaté que les rapports
litigieux établis par le recourant n'avaient pas seule-
ment servi au contrôle administratif par la CFB mais
avaient aussi été communiqués au conseil d'administration
et à la direction, que le recourant n'était pas seulement
réviseur indépendant mais également responsable de l'ins-
pectorat interne, que les rapports étaient mis en discus-
sion avec les responsables concernés et que le recourant,
lorsqu'il constatait des infractions ou manquements gra-
ves, était tenu d'en rapporter immédiatement, par oral et
par écrit, à la direction, au président du conseil d'ad-

ministration et au gouvernement cantonal. Le Tribunal
d'arrondissement en a conclu que les rapports litigieux
n'étaient pas uniquement destinés à la CFB en tant
qu'instrument de surveillance des banques.

  Le recourant soutient en revanche que les art. 46
ss LB forment un corps de dispositions pénales cohérent
et autonome, que les éléments constitutifs de l'art. 46
al. 1 let. k LB recouvrent complètement ceux de l'art.
251 aCP et que le concours idéal parfait aurait pour con-
séquence que toute violation de l'art. 46 al. 1 let. k LB
serait aussi réprimée par l'art. 251 aCP, ce que le lé-
gislateur ne peut avoir voulu. Les rapports de révision
n'étant pas remis à des tiers hors de la CFB et de la
banque, ils n'ont servi qu'à éluder une réglementation
administrative, ce qui, par application de la jurispru-
dence rendue en matière de faux dans la procédure fiscale
ou d'acquisition d'immeubles par des personnes à l'étran-
ger, exclut l'application de l'art. 251 aCP.

  c) Afin de déterminer si l'art. 46 al. 1 let. k
LB entre en concours avec l'art. 251 aCP, il convient
d'examiner l'évolution de la loi sur les banques depuis
son adoption en 1934.

  Jusqu'en 1971, les dispositions pénales des art.
46 à 51 LB avaient la teneur reçue lors de l'adoption de
la loi en 1934. L'art. 47 al. 1 let. a aLB/1934 prévoyait
l'emprisonnement pour six mois au plus ou l'amende de
20'000 francs au plus pour celui qui, intentionnellement,
en sa qualité de réviseur ou d'aide-réviseur, manquait
gravement aux devoirs qui lui incombaient lorsqu'il pro-
cédait à une révision ou rédigeait le rapport de révi-
sion. L'art. 47 al. 2 aLB/1934 prévoyait une amende de
10'000 francs au plus en cas de négligence (RS 1848-1947,
vol. 10 p. 342). Selon le message, cette disposition

s'inspirait du projet de code pénal mais le maximum des
peines était abaissé parce que ces dispositions spéciales
visaient dans une large mesure des fautes administrati-
ves; il était néanmoins précisé que si les infractions à
la loi sur les banques constituaient un délit de droit
commun, le code pénal était applicable (FF 1934 I 189
s.). L'art. 50 al. 1 aLB/1934 renvoyait aux dispositions
générales du code pénal fédéral du 4 février 1853 (RO III
1851/53 335); elles correspondaient aux art. 1 à 110 CP
entrés en vigueur le 1er janvier 1942. Enfin, en vertu de
l'art. 50 al. 2 aLB/1934, la poursuite de toutes les in-
fractions prévues aux art. 46 ss aLB/1934 incombait aux
cantons.

  Les art. 46 ss LB ont été une première fois révi-
sés par loi du 11 mars 1971 entrée en vigueur le 1er
juillet 1971 (RO 1971 808). Selon le message, il s'agis-
sait de les adapter à l'évolution de la législation pé-
nale administrative, notamment par le groupement plus ri-
goureux des infractions en délits et contraventions selon
la nature de l'élément constitutif, par le relèvement
massif des amendes et par le transfert de la compétence
pénale au Département fédéral des finances et des douanes
(FF 1970 I 1158, 1173 ss et 1196 ss). Les nouveaux art.
46 à 49 sont, pour l'essentiel, toujours en vigueur; tel
est notamment le cas de l'art. 46 al. 1 let. k LB. La loi
du 11 mars 1971 a également modifié les dispositions re-
latives à la procédure. L'art. 51bis aLB/1971 prévoyait
nouvellement que les infractions aux art. 46, 49 et 50 LB
seraient poursuivies et jugées par le Département confor-
mément à la loi fédérale du 15 juin 1934 sur la procédure
pénale, tandis que les infractions aux art. 47 et 48 LB,
relatives à la violation du secret bancaire et à l'at-
teinte au crédit d'une banque, resteraient de la compé-
tence des cantons, pour le motif que ces dernières de-

vaient plutôt être considérées comme relevant du droit
commun.

  Les art. 46 ss LB ont été à nouveau révisés le 22
mars 1974 dans le cadre de l'adoption de la loi fédérale
sur le droit pénal administratif (DPA), entrée en vigueur
le 1er janvier 1975 (RO 1974 1857). Selon le message, les
modifications étaient avant tout d'ordre rédactionnel (FF
1971 I 1017, p. 1045). Néanmoins, à cette occasion a été
introduit un nouvel article prévoyant que les art. 14 à
18 DPA seraient applicables (art. 50bis LB). L'art. 51 LB
a été modifié en ce sens que les art. 2 à 13 DPA s'appli-
queraient aux infractions prévues aux art. 46, 49, 50 et
50bis LB (art. 51 al. 2 LB), et que les art. 1 à 110 CP
s'appliqueraient aux infractions prévues aux art. 47 et
48 LB (art. 51 al. 1 LB; RO 1974 1857, p. 1929).

  d) S'agissant de la question du concours, il ap-
paraît que le législateur de 1934 n'entendait pas faire
de l'art. 47 al. 1 let. a aLB/1934 une disposition régis-
sant le faux rapport du réviseur bancaire de manière ex-
clusive; selon son intention clairement exprimée, le
droit pénal ordinaire devait rester applicable lorsque
les éléments constitutifs d'une infraction étaient donnés
(FF 1934 I 189 s.). Il n'y a pas de motif de retenir que
cela ne s'appliquait pas, dès l'entrée en vigueur du nou-
veau code pénal en 1942, à l'art. 251 aCP réprimant le
faux dans les titres.

  La situation a changé au 1er janvier 1975. L'art.
51 al. 2 LB alors entré en vigueur a défini l'infraction
de l'art. 46 al. 1 let. k LB comme du droit pénal admi-
nistratif (cf. Bodmer/Kleiner/Lutz, Kommentar zum Bundes-
gesetz über die Banken und Sparkassen, 10e éd., Zurich
1999, remarques préliminaires ad art. 38-49, n° 6);
l'art. 50bis LB a déclaré les art. 14 à 18 DPA applica-

bles. Selon l'art. 15 DPA, le faux dans les titres dont
le but est de procurer un avantage illicite selon la lé-
gislation administrative fédérale ou de porter atteinte
aux intérêts pécuniaires ou à d'autres droits des pou-
voirs publics est puni de l'emprisonnement ou d'une
amende de 30'000 francs au plus. Cette norme spéciale,
créée pour la législation administrative fédérale, exclut
l'application de l'art. 251 aCP; l'application de l'art.
251 aCP est en particulier exclue en cas de faux intel-
lectuel, que l'art. 15 DPA, à la différence de l'art. 251
aCP, ne rend pas punissable (ATF 113 II 181 consid. 3b/
aa; 108 IV 180 consid. 3b).

  Il en découle que la rédaction et la présentation
d'un rapport de révision inexact ou incomplet ne tombent
pas sous le coup de l'art. 251 aCP lorsque le réviseur
agit dans le seul but d'éluder le contrôle prévu par le
droit administratif fédéral (cf. aussi Hans Walder, Die
Technik und Taktik der Untersuchung in Strafsachen, dar-
gestellt anhand von Beispielen aus der Praxis, Krimina-
listik 1978, p. 265 i.f.; Bodmer/Kleiner/Lutz, op. cit.,
remarques préliminaires ad art. 38-49, n° 9; de manière
générale: Stratenwerth, Schweizerisches Strafrecht, Bes.
Teil II, 4e éd., Berne 1995, § 36 n° 60 i.f.). Dans ce
cas, le réviseur tombe sous le coup de l'art. 15 DPA s'il
falsifie un rapport et sous celui de l'art. 46 al. 1 let.
k LB s'il établit un rapport faux. Par contre, si le ré-
viseur agit également dans un autre but ou consent à tout
le moins à une autre utilisation, par exemple s'il remet
le rapport à un tiers qui n'en est pas le destinataire
légal pour en retirer un avantage illicite, il y a, comme
en cas de faux en matière fiscale (cf. ATF 122 IV 25 con-
sid. 3 p. 30), concours entre l'infraction administrative
et le faux ou l'usage de faux du droit ordinaire (cf.
Stratenwerth, op. cit., loc. cit.).

  e) Pour déterminer si les personnes auxquelles le
recourant a remis ses rapports font partie des destina-
taires légaux au sens de la loi sur les banques, il est
nécessaire d'examiner le système prévu par cette loi et
son ordonnance.

  aa) L'art. 23bis al. 2 LB prévoit que la CFB peut
demander que le rapport de révision lui soit remis (cf.
art. 47a OB, introduit par ordonnance du 14 janvier 1976,
RO 1976 91). Cette faculté a été introduite par loi du 11
mars 1971 afin d'améliorer l'information de la CFB (RO
1971 808); précédemment, la CFB n'avait normalement pas
accès aux rapports de révision (FF 1970 I 1157, p. 1170).
Il apparaît donc que l'art. 47 al. 1 let. a aLB/1934,
correspondant à l'art. 46 al. 1 let. k LB, n'a pas été
introduit pour sanctionner la confection d'un faux rap-
port destiné à la CFB; un tel rapport tombait sous cette
disposition pénale indépendamment de sa connaissance par
la CFB.

  bb) S'agissant des autres destinataires, l'art.
21 al. 2 LB prévoit que le rapport de révision est commu-
niqué aux organes de la banque préposés à la haute direc-
tion, à la surveillance et au contrôle en vertu de la
loi, des statuts, du contrat de société ou du règlement;
si la banque a la personnalité juridique, il est égale-
ment remis à l'organe de contrôle prévu par le code des
obligations. Selon l'art. 48 al. 1 OB, les banques dotées
de la personnalité juridique doivent faire circuler leur
rapport de révision parmi les membres de l'organe respon-
sable de la direction supérieure, de la surveillance et
du contrôle; le rapport doit être discuté lors d'une
séance de cet organe, avec établissement d'un procès-
verbal; les comptes annuels ne peuvent être soumis à
l'approbation de l'assemblée générale qu'après que les
membres de cet organe ont pris connaissance du rapport de

révision relatif à l'exercice précédent (art. 48 al. 2
OB).

  On peut se demander si l'ordonnance sur les ban-
ques, qui parle d'organe au singulier, entend restreindre
la diffusion du rapport de révision à un seul organe ou
si celui-ci doit être distribué à tous les organes char-
gés des tâches de haute direction, de surveillance et de
contrôle comme le prévoit le texte de l'art. 21 al. 2 LB.

  L'art. 21 al. 2 aLB/1934 prévoyait, dans les
trois langues, que le rapport de révision était communi-
qué "aux organes responsables de la direction supérieure,
de la surveillance et du contrôle". Modifié par loi du 11
mars 1971, l'art. 21 al. 2 LB, dans ses versions françai-
se et italienne, prévoit toujours la communication "aux
organes préposés à la haute direction, à la surveillance
et au contrôle"; en revanche, dans le texte en langue al-
lemande, il est nouvellement question de la communication
"dem ... Organ". Quant aux anciennes dispositions d'exé-
cution, elles parlaient, dans les trois langues, d'organe
au singulier (art. 41 al. 3 du règlement d'exécution de
la LB du 26 février 1935, RS 1848-1947, vol. 10 p. 344;
art. 42 du règlement d'exécution de la LB du 30 août
1961, RO 1961 703, cf. RS 952.821).

  Les travaux préparatoires n'expliquent pas le
remplacement du pluriel par le singulier dans le texte
allemand de l'art. 21 al. 2 LB. Il faut en déduire que le
législateur n'a matériellement rien voulu changer et que
l'art. 21 al. 2 LB prévoit la communication à tous les
organes remplissant les fonctions de la haute direction,
de la surveillance et du contrôle afin que leurs membres
en prennent connaissance et en discutent. Lorsque la ban-
que est une société anonyme, cela a lieu par la remise
d'un exemplaire du rapport au président du conseil d'ad-

ministration (art. 47 al. 2 let. a OB); avec son accord,
des exemplaires peuvent être directement envoyés à d'au-
tres destinataires (Bodmer/Kleiner/Lutz, op. cit., art.
18-22, n° 126).

  Il est à noter que le réviseur qui ne remet pas
le rapport au président du conseil d'administration peut
être puni en vertu de l'art. 50 LB, disposition pénale
administrative (cf. art. 51 al. 2 LB). La remise du rap-
port de révision aux organes chargés de la haute direc-
tion, de la surveillance et du contrôle par l'entremise
du président du conseil d'administration constitue donc
l'exécution d'une obligation du réviseur découlant du
droit administratif fédéral.

  f) Les organes de la BCV préposés à la haute di-
rection, à la surveillance et au contrôle se déterminent
selon la loi, les statuts et les règlements (art. 21 al.
2 LB).

  La BCV est une banque cantonale qui, au moment
des faits, était régie par un décret du 24 juin 1969 sur
la Banque cantonale du Valais, complété par un règlement
du 19 février 1969, approuvé par le parlement le 24 juin
1969. Selon la législation précitée, le parlement canto-
nal exerçait la haute surveillance par l'intermédiaire du
gouvernement cantonal; les organes de la BCV étaient le
conseil d'administration, le comité de banque, la direc-
tion et l'office de contrôle.

  En vertu de l'art. 34 du règlement, la direction
assistait aux séances du conseil d'administration et du
comité avec voix consultative; il faut en déduire qu'elle
était un organe chargé de la haute direction, de la sur-
veillance et du contrôle de la BCV; le fait qu'elle rece-
vait ainsi connaissance du rapport de révision lors de sa

discussion par le conseil d'administration ne signifie
pas que le rapport était remis à des tiers. La même con-
clusion s'impose à l'égard du membre du gouvernement qui
participait aux séances du conseil d'administration en
tant qu'observateur avec voix consultative, puisque le
gouvernement valaisan était, en vertu de la législation,
un organe préposé à la haute surveillance de la BCV.

  L'autorité cantonale n'a pas constaté que les
deux rapports de révision litigieux auraient été communi-
qués à d'autres destinataires que ceux prévus aux art. 21
al. 2 LB, 47 al. 2 let. a et 47a al. 1 OB; le rapport du
26 avril 1989 mentionne d'ailleurs qu'il est adressé en
quatorze exemplaires au siège de la BCV à l'attention de
"Monsieur le Président du Conseil d'administration" et en
un exemplaire à la CFB.

  Elle n'a pas non plus constaté que le recourant
envisageait de remettre les rapports à d'autres personnes
ou à les utiliser à des fins étrangères aux buts d'un
rapport de révision. On ne saurait non plus retenir qu'il
devait, de par la nature de ces rapports de révision ou
pour d'autres motifs, s'attendre à ce qu'ils soient remis
en mains de personnes autres que les destinataires prévus
par la loi sur les banques.

  Quant au fait, relevé par l'autorité cantonale,
que le recourant était aussi chef du service de contrôle
interne, il est sans pertinence dès lors que cette double
fonction, admise par l'art. 18 al. 2 aLB/1934 pour les
réviseurs de banques cantonales, impliquait nécessaire-
ment la connaissance du rapport par l'organe responsable
du contrôle de la banque.

  Au vu de ce qui précède, il apparaît que les
omissions reprochées au recourant relèvent exclusivement

des dispositions pénales de la loi sur les banques et que
l'art. 251 aCP ne trouve donc pas application dans le cas
d'espèce. La cour cantonale a par conséquent violé le
droit fédéral en condamnant le recourant pour faux dans
les titres au sens de l'art. 251 aCP.

  4.-  Le recourant soulève encore d'autres griefs
en relation avec la violation de l'art. 251 aCP. Cette
disposition ne s'appliquant pas en l'espèce, il n'est pas
nécessaire de les examiner.

  Comme le recourant obtient gain de cause, il ne
sera pas perçu de frais et une indemnité lui sera versée
par la Caisse du Tribunal fédéral (art. 278 al. 3 PPF).

                     Par ces motifs,

         l e   T r i b u n a l   f é d é r a l :

  1. Admet le pourvoi, annule le jugement attaqué
et renvoie la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle
décision.

  2. Dit qu'il n'est pas perçu de frais.

  3. Dit que la Caisse du Tribunal fédéral versera
au recourant une indemnité de 2'500 francs à titre de dé-
pens.

  4. Communique le présent arrêt en copie au manda-
taire du recourant, au Ministère public du Valais central

et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal valai-
san.

Lausanne, le 17 avril 2000

          Au nom de la Cour de cassation pénale
               du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
                      Le Président,

                      La Greffière,