Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Zivilabteilung 5P.466/1999
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5P.466/1999

                 IIe  C O U R   C I V I L E
                 **************************

                        11 avril 2000

Composition de la Cour: M. Reeb, président, M. Bianchi et
Mme Nordmann, juges. Greffier: M. Abrecht.

                          _________

           Statuant sur le recours de droit public
                          formé par

T.________ SA, représentée par Me Jacques Baumgartner, avocat
à Lausanne,

                           contre

l'arrêt rendu le 16 décembre 1999 par la Cour des poursuites
et faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud, confir-
mant le rejet de la requête d'ajournement de faillite ainsi
que le prononcé de la faillite de la société;

         (art. 4 aCst.; ajournement de la faillite)

          Vu les pièces du dossier d'où ressortent
                   les f a i t s suivants:

   A.- T.________ SA, qui recourt devant la Cour de
céans contre le refus de l'autorité intimée d'ajourner sa
faillite, est active dans le commerce et les services liés
principalement à la branche alimentaire. Elle est une filiale
de N.________ SA, dont l'autorité intimée a également refusé
d'ajourner la faillite par une décision distincte attaquée
devant la Cour de céans par un recours séparé.

   Le 1er avril 1999, X.________ SA, agissant en sa
qualité d'organe de contrôle de T.________ SA dont elle avait
constaté le surendettement, a donné au Président du Tribunal
du district de Lausanne, avec l'accord de tous les adminis-
trateurs, l'avis obligatoire de l'art. 725 al. 2 CO.

   B.- Le 26 avril 1999, T.________ SA a demandé l'a-
journement de la faillite (art. 725a al. 1 CO). Elle a pro-
duit notamment les bilans comparés de la société au 31 dé-
cembre 1998 et au 20 avril 1999, dont il résultait une perte
au bilan de quelque 2'350'000 fr. pour un actif brut de quel-
que 13'180'000 fr. au 31 décembre 1998 et une perte au bilan
de quelque 2'180'000 fr. pour un actif brut de quelque
12'105'000 fr. au 20 avril 1999. A l'appui de sa demande d'a-
journement de faillite, T.________ SA a notamment indiqué
qu'elle avait pris des mesures très importantes pour diminuer
les frais généraux. Elle a en outre exposé que deux partici-
pations détenues par la société mère N.________ SA dans les
sociétés anglaises F.________ Ltd et C.________ Ltd avaient
été vendues le 25 janvier 1999 pour 1'500'000 fr. à dame
H.________, épouse du président du conseil d'administration;
les négociations relatives à la revente de ces participations
à des partenaires anglais étaient sur le point d'aboutir et

permettraient à N.________ SA d'encaisser environ 2'000'000
fr. rétrocédés par dame H.________, ce qui améliorerait sen-
siblement la situation des deux sociétés (mère et fille) qui
étaient en quelque sorte solidaires l'une de l'autre.

   A la première audience, qui s'est tenue le 29 avril
1999, la procédure a été suspendue d'abord jusqu'au 17 juin
1999, puis jusqu'au 26 août 1999, afin que les négociations
en cours sur la revente des participations dans les sociétés
F.________ Ltd et C.________ Ltd puissent être menées à chef.

   C.- Par jugement rendu à l'issue de l'audience de
reprise de cause du 26 août 1999, le Président du Tribunal de
district a rejeté la demande d'ajournement de faillite et
prononcé la faillite de T.________ SA; il a rendu une déci-
sion séparée identique à l'égard de N.________ SA.

   Le premier juge a considéré en substance que la si-
tuation était demeurée identique depuis le mois d'avril 1999,
les tractations invoquées entre la société mère et des parte-
naires anglais n'ayant toujours pas abouti. Il a constaté que
même si les dispositions en cours de négociation se réali-
saient, la perte au bilan de T.________ SA se monterait tou-
jours à 2'365'000 fr. après le premier versement prévu de la
part de la société mère N.________ SA; elle serait encore de
916'000 fr. au 31 décembre 2004, pour autant que N.________
SA abandonne la créance de 1'449'000 fr. qu'elle aurait alors
contre sa filiale. Dès lors, en l'absence de réelles perspec-
tives de redressement, il convenait de rejeter la requête
d'ajournement et de prononcer la faillite.

   D.- T.________ SA a recouru contre ce jugement de-
vant la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal
du canton de Vaud, qui a conféré l'effet suspensif au re-
cours. Elle a produit les bilans de N.________ SA et de

T.________ SA au 23 septembre 1999; il en résultait pour la
première une perte au bilan de quelque 1'124'000 fr. pour un
actif brut de quelque 1'142'000 fr., et pour la seconde une
perte au bilan de quelque 2'820'000 fr. pour un actif brut de
quelque 160'000 fr.

   T.________ SA a exposé que la vente par la société
F.________ Ltd de certains actifs, intervenue le 11 septembre
1999, avait dégagé des liquidités de 2'475'000 fr. en faveur
de dame H.________; or celle-ci avait d'ores et déjà rétrocé-
dé à N.________ SA l'entier de ce bénéfice de réalisation de
la participation. Cet apport de liquidités avait permis à
N.________ SA de réduire le montant de ses dettes à quelque
250'000 fr., auxquelles il fallait ajouter des créances post-
posées ou sur le point de l'être pour un montant de quelque
820'000 fr.; compte tenu des conventions de postposition, les
dettes étaient ainsi couvertes par les actifs. De plus, le
"groupe N.________" profiterait prochainement d'apports pour
un montant total de quelque 3'500'000 fr., soit: perception
de l'excédent net de la société anglaise F.________ Ltd (env.
1'000'000 fr.); produit net de la vente des participations de
cette société anglaise (env. 750'000 fr.); rétrocession par
dame H.________ du produit net de la participation C.________
Ltd (env. 1'700'000 fr.); bénéfice net sur la vente d'un ap-
partement propriété de N.________ SA (43'000 fr.). Un assai-
nissement "intersociétés" permettrait dès lors de ramener la
couverture du capital-actions cumulé des deux sociétés
(1'000'000 fr. chacune) à plus de la moitié, de sorte que
l'art. 725 CO ne serait plus applicable ni à N.________ SA ni
à sa société fille T.________ SA.

   E.- Par arrêt rendu le 16 décembre 1999, la cour
cantonale a rejeté le recours interjeté par T.________ SA
contre la décision du premier juge et confirmé celle-ci. Elle
a considéré que la production de pièces nouvelles ayant trait

à des faits postérieurs au jugement de faillite (vrais nova)
était en principe admissible, au regard du droit cantonal ap-
plicable, dans le cadre d'un recours contre un jugement refu-
sant l'ajournement de la faillite. Toutefois, les vrais nova
ne pouvaient être pris en considération que si la société
faillie avait entrepris de véritables mesures d'assainisse-
ment avant d'y être contrainte par le jugement de faillite.
Or tel n'était pas le cas en l'espèce, toutes les mesures
d'assainissement invoquées à l'appui du recours étant posté-
rieures au jugement de faillite (arrêt attaqué, consid. 1b et
4).

   Au surplus, même si l'on avait retenu sans réserve
les vrais nova invoqués par la recourante, il était manifeste
pour l'autorité cantonale que T.________ SA n'avait pas les
moyens d'éviter la faillite en procédant à un assainissement
crédible par elle-même, sans une aide sérieuse de sa société
mère N.________ SA. Or les opérations susceptibles de dégager
les liquidités nécessaires à un assainissement, soit la vente
de participations à des sociétés anglaises et la vente d'un
appartement, ne concernaient que la société mère et n'influe-
raient pas directement sur la situation de la société fille
T.________ SA. Au demeurant, les opérations de ventes de par-
ticipations invoquées n'étaient pas exemptes d'ambiguïtés. En
effet, on ne connaissait pas la base juridique en vertu de
laquelle dame H.________, qui avait acquis le 25 janvier 1999
de N.________ SA des participations dans deux sociétés an-
glaises, rétrocéderait à N.________ SA le produit net de la
réalisation de ces participations, ni les conséquences éco-
nomiques et fiscales de cette rétrocession; il pourrait en
outre s'agir d'un acte simulé destiné à échapper au séquestre
évoqué par la recourante dans sa demande initiale d'ajourne-
ment. Ainsi, faute d'éléments concrets permettant d'éclaircir
ces questions, les opérations invoquées ne paraissaient pas
pouvoir aboutir à un assainissement crédible de N.________ SA
(arrêt attaqué, consid. 5).

   Enfin, les juges cantonaux ont constaté que la si-
tuation de la société fille T.________ SA elle-même n'avait
pas évolué depuis le mois d'avril 1999. Ses perspectives
d'assainissement reposaient ainsi entièrement, d'une part sur
l'assainissement de la société mère qui ne paraissait pas
pouvoir être réalisé, et d'autre part sur un apport important
de liquidités de cette même société, ce qui était irréaliste
sur le vu de la situation de N.________ SA (arrêt attaqué,
consid. 7).

   Par arrêt du même jour, la cour cantonale a égale-
ment rejeté le recours de N.________ SA contre la décision
identique du premier juge.

   F.- Agissant par la voie du recours de droit public
au Tribunal fédéral, T.________ SA conclut avec suite de
frais et dépens à l'annulation de l'arrêt cantonal la concer-
nant ainsi qu'à l'admission de sa requête d'ajournement de la
faillite. Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.

   Le 22 décembre 1999, le Président de la Cour de
céans a rejeté la requête d'effet suspensif présentée par la
recourante.

   Le recours de droit public interjeté parallèlement
par N.________ SA contre l'arrêt cantonal la concernant est
rejeté dans la mesure de sa recevabilité par arrêt séparé de
ce jour.

           C o n s i d é r a n t  e n  d r o i t :

   1.- a) Le prononcé de dernière instance cantonale
accordant ou refusant la mise en faillite du débiteur ne peut
faire l'objet que d'un recours de droit public au Tribunal

fédéral, au sens de l'art. 84 al. 1 OJ (ATF 119 III 49 con-
sid. 2; 118 III 4 consid. 1; 107 III 53 consid. 1). Déposé en
temps utile (cf. art. 89 al. 2 OJ) contre un prononcé de der-
nière instance cantonale refusant l'ajournement de la fail-
lite et prononçant celle-ci, le recours est ainsi recevable
en principe. Le chef de conclusions tendant à ce que le Tri-
bunal fédéral prononce lui-même l'ajournement de la faillite
est toutefois irrecevable en raison de la nature cassatoire
du recours de droit public, dont le Tribunal fédéral ne
s'écarte qu'à des conditions exceptionnelles qui ne sont pas
réalisées en l'espèce (cf. ATF 124 I 327 consid. 4b et les
arrêts cités).

   b) La Cour de céans ne saurait tenir compte du rap-
port établi le 13 mars 2000 par l'organe de révision de
N.________ SA et de T.________ SA, que la recourante produit
à l'appui de son recours de droit public. En effet, lorsqu'il
est saisi d'un recours de droit public pour arbitraire, le
Tribunal fédéral ne prend pas en considération les alléga-
tions, preuves ou faits qui n'ont pas été soumis à l'autorité
cantonale (ATF 119 II 6 consid. 4a; 118 III 37 consid. 2a et
les arrêts cités).

   2.- Les motifs à l'appui du recours peuvent être
résumés comme suit.

   Il n'existe aucune règle absolue concernant la durée
de l'ajournement nécessaire à la réalisation des mesures
d'assainissement de la société. Un assainissement à moyen
terme n'est pas nécessairement plus précaire qu'un redresse-
ment à court terme. L'octroi d'un ajournement doit simplement
ne pas être contraire à l'intérêt des créanciers. De même,
les perspectives de succès des mesures d'assainissement ne
s'apprécient pas à l'aune de la durée qu'elles nécessitent.
En l'espèce, lesdites mesures consistent en des négociations
portant sur des reprises du capital des sociétés C.________

Ltd et F.________ Ltd, qui dégageront un apport de liquidités
important moyennant la cession prévue du produit de ces réa-
lisations par dame H.________. Les contrats de reprise de
capital déjà rédigés mais non encore signés démontrent que
des négociations sérieuses sont en cours avec des repreneurs
potentiels. En reprochant à la recourante de n'avoir encore
mené à terme aucune mesure d'assainissement, l'arrêt attaqué
confond ainsi assainissement et perspectives d'assainisse-
ment.

   Par ailleurs, s'il résulte du bilan au 9 mars 2000
figurant dans le rapport établi le 13 mars 2000 par l'organe
de révision que la perte au bilan reste de quelque 2'600'000
fr., la société dispose d'actifs réalisables lui permettant
de rembourser l'ensemble des créanciers à l'exception de la
société mère N.________ SA, qui se trouve dans une position
particulièrement liée par sa qualité d'actionnaire et par ses
intérêts communs. Ainsi, les deux conditions d'un ajournement
de la faillite - à savoir d'une part les perspectives d'as-
sainissement, et d'autre part un régime conservatoire assu-
rant la protection des créanciers durant le temps de l'ajour-
nement - sont remplies en l'espèce. Aussi le grief fait par
l'autorité cantonale à la recourante de n'avoir réagi que
tardivement et pressée par la faillite ne résiste-t-il pas à
la constatation de la réalisation objective des conditions
légales de l'ajournement. Il en va de même lorsque les juges
cantonaux s'appuient sur le prononcé simultané de la faillite
de N.________ SA, car ils s'appuient alors sur leur propre
fait. C'est en outre arbitrairement que l'autorité cantonale
s'accroche à sa jurisprudence critiquée subordonnant l'octroi
d'un ajournement à la perspective d'un paiement intégral des
créanciers; en effet, l'ensemble des autres juridictions et
auteurs estiment au contraire aujourd'hui que les créanciers
ne doivent simplement pas être plus mal traités par l'octroi
de l'ajournement que par l'ouverture immédiate de la
faillite.

   Enfin, les restrictions posées par la cour cantonale
à l'admissibilité des vrais nova sont contraires au texte
clair des dispositions cantonales topiques et ne trouvent
pour tout appui qu'un arrêt valaisan, alors même que la ques-
tion de l'admissibilité des vrais nova dans la procédure de
recours prévue par l'art. 174 LP relève exclusivement du
droit cantonal.

   3.- a) Il n'est pas nécessaire de trancher la ques-
tion de savoir si l'autorité cantonale a arbitrairement res-
treint l'admissibilité des vrais nova au regard du droit can-
tonal applicable (cf. consid. 2c supra). En effet, les juges
cantonaux ont exposé que même en retenant sans réserve les
vrais nova invoqués par la recourante, les conditions d'un
ajournement de la faillite n'étaient pas réalisées; or cette
motivation subsidiaire et indépendante résiste aux griefs
d'arbitraire formulés par la recourante, comme on va le voir
(cf. consid. 4 infra).

   b) L'art. 725a al. 1 CO permet au juge qui reçoit
l'avis obligatoire de l'art. 725 al. 2 CO d'ajourner la
faillite, à la requête du conseil d'administration ou d'un
créancier, si l'assainissement de la société paraît possible.
Le requérant doit présenter au juge un plan d'assainissement
exposant les mesures propres à assainir la société - telles
qu'une postposition par les créanciers de la société (cf.
art. 725 al. 2 in fine CO), la conversion de créances en
actions, des cautionnements ou garanties bancaires, etc. -
ainsi que le délai dans lequel le surendettement sera éliminé
(Christine Hertel, Ajournement de la faillite, in Insolvenz-
und Wirtschaftsrecht 1998 p. 111; Jürg A. Koeferli, Der
Sanierer einer Aktiengesellschaft, thèse Zurich 1994, p. 162
et 164; Roger Giroud, Die Konkurseröffnung und ihr Aufschub
bei der Aktiengesellschaft, 2e éd., 1986, p. 120; Rudolf
Lanz, Kapitalverlust, Überschuldung und Sanierungsverein-

barung, thèse Berne 1985, p. 163; Peter Böckli, Das neue
Aktienrecht, 2e éd., 1996, n. 1717; Hanspeter Wüstiner,
Basler Kommentar, Obligationenrecht II, n. 7 ad art. 725a
CO).

   Sur la base des éléments ainsi présentés, le juge
doit estimer les chances d'un assainissement réussi et
durable (ATF 120 II 425 consid. 2b; Giroud, op. cit., p.
120/121; Koeferli, op. cit., p. 166; Lanz, op. cit., p. 163;
Alexander Brunner, Insolvenz und Überschuldung der Aktien-
gesellschaft, in AJP 1992 p. 806 ss, 819; Wüstiner, op. cit.,
n. 4 ad art. 725a CO). L'assainissement paraît possible - le
texte italien de l'art. 725a al. 1 CO dit "probabile", tandis
que le texte allemand parle de "Aussicht auf Sanierung" -
lorsque les mesures d'assainissement proposées permettront
selon toute vraisemblance d'éliminer le surendettement dans
le délai prévu et de restaurer à moyen terme la capacité de
gain, qui seule laisse entrevoir des perspectives d'avenir
(ATF 99 II 283 consid. II/3 p. 289; Wüstiner, op. cit., n. 7
ad art. 725a CO; Giroud, op. cit., p. 120; Koeferli, op.
cit., p. 164; Hertel, loc. cit.; Lanz, op. cit., p. 162/163).
En effet, l'ajournement aux fins d'assainissement a pour but
de permettre la continuation de l'activité de la société, et
non sa liquidation en dehors de la procédure de faillite
(Wüstiner, op. cit., n. 7 ad art. 725a CO; Böckli, op. cit.,
n. 1717; Louis Dallèves, Dépôt du bilan, ajournement de fail-
lite et nouveau droit concordataire, in La responsabilité des
administrateurs, 1994, p. 89 ss, 94), même si une telle li-
quidation devait s'avérer plus favorable pour les créanciers
(Giroud, op. cit., p. 114 et 117).

   4.- a) En l'espèce, les perspectives d'assainisse-
ment de la recourante reposaient entièrement sur l'assainis-
sement de la société mère N.________ SA et sur un apport im-
portant de liquidités de cette même société. Le plan d'assai-
nissement de N.________ SA consistait essentiellement, outre

en la postposition de diverses créances, en la vente des par-
ticipations qu'elle détenait dans les sociétés anglaises
F.________ Ltd et C.________ Ltd.

   b) Comme l'a constaté la cour cantonale à la suite
du premier juge, il ressortait du document intitulé "bilan au
20 août 1999 et bilans futurs présumés" produit à l'audience
du 26 août 1999 que même si les dispositions en cours de né-
gociation s'étaient réalisées, la perte au bilan de
T.________ SA se serait toujours montée à 2'365'000 fr. après
le premier versement prévu de la part de la société mère
N.________ SA; elle aurait encore été de 916'000 fr. au 31
décembre 2004, pour autant que N.________ SA eût abandonné la
créance de 1'449'000 fr. qu'elle aurait alors eu contre sa
filiale. Pour ce qui était de la société mère N.________ SA,
la perte au bilan se serait toujours montée à 2'025'000 fr.
après le premier apport de liquidités de la part de dame
H.________ ensuite de la vente de ses participations; elle
aurait encore été de 858'000 fr. au 31 décembre 2004, après
diverses opérations croisées d'abandon de créances.

   Les bilans de N.________ SA et de T.________ SA au
23 septembre 1999 ne faisaient que confirmer cette situation.
En effet, la perte au bilan de N.________ SA se montait tou-
jours à quelque 1'124'000 fr. après un premier apport de li-
quidité de quelque 1'300'000 fr. comptabilisé dans le compte
pertes et profits au 23 septembre 1999 comme "bénéfice sur
vente participation F.________ Ltd". La perte au bilan de
T.________ SA se montait quant à elle à quelque 2'821'000 fr.

   Ainsi, sur la base des documents qui leur étaient
soumis, les juges cantonaux pouvaient sans arbitraire consi-
dérer que les mesures d'assainissement proposées ne permet-
traient selon toute vraisemblance pas à la société mère
N.________ SA de sortir du surendettement pendant la durée -
pourtant déjà longue - de l'ajournement requis. A plus forte

raison pouvaient-ils émettre semblable appréciation à l'égard
de la recourante, dont l'assainissement dépendait entièrement
de celui de la société mère et dont les actifs au 23 septem-
bre 1999 ne consistaient qu'en 160'000 fr. de créances contre
divers débiteurs.

   c) Certes, la loi ne règle pas la question de la du-
rée de l'ajournement, qui est ainsi laissée à l'appréciation
du juge (Wüstiner, op. cit., n. 4 ad art. 725a CO; Lanz, op.
cit., p. 165). Toutefois, il est clair que plus l'ajournement
demandé pour mener à bien le plan d'assainissement est long,
plus le redressement de la société apparaît aléatoire, les
prévisions à moyen ou long terme étant notoirement et de par
la nature des choses plus risquées que celles à plus court
terme. En effet, plus la durée de l'assainissement projeté
est longue, plus le risque s'accroît que les mesures propo-
sées ne puissent pas - ou pas entièrement - être réalisées ou
qu'elles soient contrecarrées par d'autres facteurs défavo-
rables qui ne peuvent pas être éliminés par les mesures con-
servatoires ordonnées par le juge. En l'espèce, les juges
cantonaux ne sauraient ainsi encourir le reproche d'arbi-
traire pour avoir tenu compte du risque accru lié à la longue
durée du plan d'assainissement; ce d'autant moins que, comme
on l'a vu (cf. consid. b supra), même la réalisation intégra-
le de ce plan à moyen terme ne permettait pas à la société
mère N.________ SA de sortir du surendettement, et encore
moins de restaurer sa capacité de gain. Ainsi, non seulement
l'assainissement de la société mère ne paraissait pas possi-
ble, mais même le plein succès du plan d'assainissement n'au-
rait pas permis à la filiale T.________ SA ne serait-ce que
de sortir de sa situation de surendettement.

   d) Par ailleurs, il est vrai que, comme le souligne
la recourante, la jurisprudence vaudoise subordonnant l'oc-
troi d'un ajournement à la perspective d'un paiement intégral
des créanciers (JdT 1954 II 125) paraît aujourd'hui plus

qu'isolée; jurisprudence et doctrine s'accordent en effet gé-
néralement pour dire qu'il suffit à cet égard que les créan-
ciers ne se trouvent pas dans une plus mauvaise situation
ensuite de l'octroi de l'ajournement qu'en cas d'ouverture
immédiate de la faillite (cf. notamment ATF 120 II 425 con-
sid. 2b; Giroud, op. cit., p. 121; Koeferli, op. cit., p.
164; Lanz, op. cit., p. 164; Wüstiner, op. cit., n. 6 ad art.
725a CO). Il n'en demeure pas moins que l'ajournement ne peut
être octroyé que pour permettre l'assainissement de la socié-
té et ainsi la continuation de son activité, et non sa liqui-
dation - même au moins aussi favorable pour les créanciers -
en dehors de la procédure de faillite (cf. consid. 3b supra).
Or, comme on l'a vu (cf. consid. b supra), la cour cantonale
pouvait considérer sans arbitraire que l'assainissement de la
société mère N.________ SA et de sa filiale T.________ SA ne
paraissait pas possible au sens de l'art. 725a CO. La Cour de
céans ne saurait revoir cette appréciation sur la base des
pièces nouvelles produites à l'appui du recours de droit pu-
blic (cf. consid. 1b supra).

   5.- En définitive, le recours se révèle manifeste-
ment mal fondé en tant qu'il est recevable et doit donc être
rejeté dans cette même mesure. La recourante, qui succombe,
supportera les frais judiciaires (art. 156 al. 1 OJ).

                       Par ces motifs,

            l e  T r i b u n a l  f é d é r a l ,

                      vu l'art. 36a OJ:

   1. Rejette le recours dans la mesure où il est
recevable.

   2. Met un émolument judiciaire de 5'000 fr. à la
charge de la recourante.

   3. Communique le présent arrêt en copie au mandatai-
re de la recourante, à X.________ SA, à la Cour des poursui-
tes et faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud et à
l'Office des faillites de Lausanne.

                         __________

Lausanne, le 11 avril 2000
ABR/frs

                Au nom de la IIe Cour civile
                du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE :
                        Le Président,

                        Le Greffier,