Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1P.706/1999
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1P.706/1999

        Ie   C O U R   D E   D R O I T   P U B L I C
       **********************************************

                   Séance du 29 mars 2000

Présidence de M. Aemisegger, Président de la Cour.
Présents: MM. les Juges Féraud, Jacot-Guillarmod, Catenazzi
et Favre.
Greffier: M. Parmelin.

           Statuant sur le recours de droit public
                          formé par

D.________, représenté par Me Pascal Maurer, avocat à Genève,

                           contre

le jugement rendu le 2 juillet 1999 par la Cour d'appel
pénale du Tribunal cantonal valaisan dans la cause opposant
le recourant au Ministère public du  B a s - V a l a i s ;

(art. 4 aCst. et 6 § 3 let. d et e CEDH; droit à l'interro-
 gatoire des témoins à charge et à la traduction de pièces)

          Vu les pièces du dossier d'où ressortent
                  les  f a i t s  suivants:

   A.- Le 24 octobre 1989, un Grand Jury fédéral sié-
geant à Reno, dans l'Etat américain du Nevada, a accusé
D.________, citoyen suisse domicilié à Verbier, de diverses
infractions aux lois américaines réprimant le trafic de dro-
gue. Le Tribunal d'instance du district de Reno a décerné
contre lui un mandat d'arrêt le même jour. Il était reproché
à D.________ un trafic de marijuana portant sur plusieurs
tonnes, qui se serait déroulé de 1969 à 1989.

   Le 8 août 1991, l'Office fédéral de la police a dé-
légué au Juge d'instruction pénale du Bas-Valais (ci-après,
le Juge d'instruction) la poursuite pénale contre D.________.

   B.- Ce dernier a été arrêté le 19 novembre 1992, in-
culpé d'infractions à l'art. 19 ch. 2 et 4 de la loi fédérale
sur les stupéfiants (LStup) et placé en détention préventive.
Entendu le 23 décembre 1992 par le Juge d'instruction, il a
reconnu certains des faits contenus dans l'acte d'accusation
du 24 octobre 1989 avant de se rétracter.

   Par commission rogatoire du 21 juillet 1993, le Juge
d'instruction a demandé aux autorités américaines de pouvoir
se rendre à Reno afin d'y entendre divers témoins et les com-
plices de l'accusé. Par courrier du 28 juillet 1993, le Juge
d'instruction a informé le conseil genevois du prévenu, Me
Pascal Maurer, de cette mesure en lui donnant la possibilité
d'assister aux séances d'audition qui devaient avoir lieu le
13 septembre 1993. Il a adressé une copie de ce courrier au
conseil valaisan du prévenu, Me Pierre Gauye.

   Le 10 août 1993, Me Pascal Maurer a requis la mise à
disposition par les autorités américaines des dépositions re-
cueillies dans le cadre de la procédure en confiscation ou-
verte contre les époux D.________, préalablement à tout dé-
placement aux Etats-Unis et à toute audition. Il a en outre
sollicité des informations complémentaires sur l'identité des
témoins que le Juge d'instruction avait l'intention d'inter-
roger et sur les faits à propos desquels ils devaient être
entendus, en déclarant d'ores et déjà s'opposer à l'audition
des représentants de l'accusation. Il désirait également sa-
voir de quelle manière ce magistrat entendait assurer à son
client le respect de son "droit à la confrontation". Outre
l'audition de différents témoins à décharge, il demandait en-
fin à prendre connaissance des accords passés entre les té-
moins à charge et les autorités de répression et de l'exécu-
tion des peines, dans le cadre de "plea agreements" conclus
entre eux.

   Le 31 août 1993, le Juge d'instruction a adressé aux
autorités américaines une demande complémentaire d'entraide
judiciaire tendant à ce qu'elles l'autorisent à recueillir la
déposition des témoins requis par la défense et permettent à
l'un des avocats de D.________ d'assister aux audiences pré-
vues à Reno et de poser des questions, en application des
règles de la procédure pénale valaisanne. Le même jour, il a
informé Me Pascal Maurer qu'un report n'entrait pas en ligne
de compte et qu'une confrontation personnelle de D.________
avec ses coaccusés était exclue. Il renouvelait aux conseils
du prévenu son offre de participer aux séances d'audition et
de poser des questions aux personnes appelées à déposer en
qualité de témoins ou de tiers appelés à fournir des rensei-
gnements ou, à défaut, de lui adresser des questionnaires à
leur intention.

   En réponse à ce courrier, Me Pascal Maurer a précisé
qu'il n'entendait pas se rendre aux Etats-Unis, mais qu'il se

ferait remplacer par l'un des deux avocats américains qui as-
suraient la défense de son client dans la procédure civile en
confiscation dirigée contre les époux D.________. Il se ré-
servait la possibilité de solliciter une nouvelle commission
rogatoire suivant le résultat des mesures d'instruction opé-
rées aux Etats-Unis.

   Les dépositions et les autres pièces recueillies
lors de la commission rogatoire ont été communiquées au pré-
venu qui a pu se déterminer à leur sujet. Le 18 novembre
1993, ce dernier a sollicité l'apport à la procédure de l'in-
tégralité des documents financiers, bancaires et immobiliers
le concernant en mains des autorités américaines ainsi que
les arrangements conclus entre celles-ci et les personnes in-
culpées aux Etats-Unis dans le cadre de la même affaire que
lui. Il a également requis la mise en oeuvre d'une commission
rogatoire aux fins de réentendre certains témoins à charge
sur la base de ses questions et de procéder à l'audition
d'autres témoins, destinée à établir l'origine licite des
fonds déposés sur les comptes bancaires. Il demandait enfin
l'envoi d'une nouvelle commission rogatoire pour éclaircir
deux points litigieux résultant des dépositions recueillies
aux Etats-Unis.

   Par décision du 10 décembre 1993, le Juge d'instruc-
tion a refusé de donner suite à ces différentes requêtes.
Statuant le 22 février 1994, sur plainte du prévenu, la Cham-
bre pénale du Tribunal cantonal valaisan (ci-après, la Cham-
bre pénale) a confirmé cette décision. Le Tribunal fédéral a
déclaré irrecevable un recours de droit public formé contre
ce jugement par arrêt du 5 juillet 1994.

   Les 30 mars, 26 avril et 5 mai 1994, D.________ a
requis la mise en oeuvre d'une nouvelle commission rogatoire
afin de connaître les derniers développements de l'enquête
aux Etats-Unis et d'entendre de nouveaux témoins visant no-

tamment à établir sa présence à Hawaii lors des agissements
qui lui étaient reprochés en 1984 et le fait que l'un des
principaux coaccusés, M.________, aurait menti. Le 20 mai
1994, le Juge d'instruction a sursis à l'examen de ces requê-
tes jusqu'à l'ordonnance d'inculpation qu'il a formellement
rendue le 22 juillet 1994.

   Dans le délai imparti à cet effet, le prévenu a de-
mandé diverses mesures d'instruction, dont la traduction et
le classement des pièces de la procédure rédigées en anglais
ou en allemand; il a par ailleurs voulu entendre, par voie de
commission rogatoire, ses coaccusés et divers responsables
d'établissements bancaires, d'une part, et réentendre les té-
moins à charge interrogés par le Juge d'instruction dans le
cadre de la précédente commission rogatoire, d'autre part.
Afin de faciliter sa libération sous caution, il a renoncé à
solliciter une nouvelle commission rogatoire, à la condition
que les autorités américaines produisent "toute pièce perti-
nente relative à l'aspect financier de son dossier" ainsi que
les procès-verbaux d'audition recueillis dans la procédure
pénale pendante contre ses coaccusés et dans celle dirigée
contre H.________.

   Le 7 décembre 1994, le Juge d'instruction a partiel-
lement donné suite à cette requête en sollicitant des autori-
tés américaines la transmission des copies certifiées confor-
mes des pièces comptables, extraits de comptes, actes de pro-
priété, contrats, documents constitutifs de sociétés et toute
autre pièce pertinente relative à l'aspect financier qui
avaient été saisis aux Etats-Unis, la transmission du contenu
des "plea bargains" passés avec les co-inculpés du prévenu
aux Etats-Unis ainsi que celle de tous les procès-verbaux
d'audiences publiques pénales tenues par les juges américains
concernant sept témoins expressément cités; il a requis copie
des déclarations des co-inculpés entendus en tant que témoins
dans le cadre de la procédure pénale dirigée contre l'avocat

de M.________, H.________; il a demandé aux autorités améri-
caines de procéder à l'interrogatoire des sept témoins pré-
cités, au cas où il serait impossible d'envoyer les documents
requis, sur la base d'un questionnaire qu'il s'engageait à
leur remettre.

   Le 28 mars 1995, le prévenu a versé au dossier des
coupures de presse relatives au procès pénal ouvert contre
H.________, faisant état de mensonges proférés par certains
de ses co-inculpés; il sollicitait l'audition par voie de
commission rogatoire de différentes personnes afin d'établir
que deux des principaux témoins à charge avaient menti. Il a
également renouvelé sa requête tendant à l'apport au dossier
des déclarations recueillies dans le cadre de la procédure
pénale dirigée contre H.________. Le Juge d'instruction a
refusé de donner suite à cette demande par décision du 14
avril 1995. La Chambre pénale a confirmé celle-ci le 26
septembre 1995 sur plainte du prévenu.

   Les derniers documents requis par voie de commission
rogatoire ayant été transmis le 22 avril 1996, le Juge d'ins-
truction a clos celle-ci par décision du 15 mai 1996.

   Le 6 juin 1996, le prévenu a réitéré sa requête en
traduction de différentes pièces rédigées en langue étrangè-
re. Le 18 juin 1996, il a demandé à ce que soient versées au
dossier diverses pièces dont il demandait aussi la traduc-
tion. Le Juge d'instruction a refusé de donner suite à ces
requêtes et transmis le dossier au Ministère public du Bas-
Valais pour qu'il dresse l'acte d'accusation. Une plainte
pour déni de justice contre cette décision a été déclarée
irrecevable par prononcé de la Chambre pénale du 10 octobre
1996.

   Le 18 février 1997, D.________ a été renvoyé pour
jugement devant le Tribunal du IIIème arrondissement pour le

district de l'Entremont (ci-après, le Tribunal du IIIème ar-
rondissement) comme accusé de violation grave de la loi fé-
dérale sur les stupéfiants et de blanchissage d'argent. Le 19
mars 1997, il a requis le renvoi du dossier au Juge d'ins-
truction pour complément d'instruction et l'administration de
diverses preuves aux débats. Par décision du 3 octobre 1997,
le Président du tribunal a refusé de renvoyer la cause au
Juge d'instruction; il a partiellement admis la requête de
preuve à débat, en versant au dossier les pièces produites
par la défense le 19 mars 1997.

   A l'audience du 9 décembre 1997, le prévenu a plaidé
l'ajournement des débats pour qu'il soit procédé aux actes
d'instruction sollicités à l'appui de sa demande en complé-
ment de preuves du 19 mars 1997. Le Tribunal du IIIème arron-
dissement a écarté la requête, acceptant toutefois d'entendre
les témoins de la défense.

   C.- Par jugement des 9 et 12 décembre 1997, le Tri-
bunal du IIIème arrondissement a reconnu D.________ coupable
de violation grave de la loi fédérale sur les stupéfiants et
l'a condamné à six ans de réclusion sous déduction de la
détention préventive subie du 19 novembre 1992 au 14 octobre
1994 et à une amende de 100'000 fr. Il l'a en outre condamné
à verser à l'Etat du Valais une créance compensatrice de
800'000 fr. et a levé les séquestres ordonnés en cours d'ins-
truction. Il a retenu en substance que D.________ avait par-
ticipé à un trafic de stupéfiants en bande portant sur plus
de deux tonnes de marijuana entre 1984 et 1985; en revanche,
il a tenu la prescription pour acquise s'agissant des infrac-
tions à la loi fédérale sur les stupéfiants commises avant
1981. Il a en outre libéré l'accusé du chef de blanchissage
d'argent.

   Le Ministère public du Bas-Valais et D.________ ont
interjeté appel auprès de la Cour d'appel pénale du Tribunal

cantonal du canton du Valais (ci-après, la Cour d'appel pé-
nale ou la cour cantonale); l'accusé demandait notamment à ce
que la cause soit retournée à l'instruction pour qu'il soit
procédé à la traduction de l'intégralité des pièces du dos-
sier pénal et des dossiers annexes en langue étrangère, à la
production des pièces et documents sollicités par la défense
le 19 mars 1997 ainsi qu'à l'audition contradictoire en
Suisse ou par voie de commission rogatoire de différents
témoins selon la liste annexée. Cette requête a été rejetée
par décision présidentielle du 20 mars 1998, sous réserve de
la décision du tribunal lors des débats. D.________ a réitéré
en vain sa demande en complément d'instruction à l'audience
d'appel du 10 mai 1999.

   Par jugement du 2 juillet 1999, la Cour d'appel pé-
nale a rejeté l'appel du Ministère public du Bas-Valais et
partiellement admis celui de l'accusé; elle a condamné celui-
ci pour violation grave de la loi fédérale sur les stupé-
fiants à cinq ans de réclusion, sous déduction de la déten-
tion préventive subie, et à une amende de 200'000 fr., fixant
à 2'000'000 fr. la créance compensatrice en faveur de l'Etat
du Valais. Elle a confirmé le jugement de première instance
en tant qu'il libérait l'appelant des chefs d'accusation de
blanchissage d'argent et d'infraction à la loi fédérale sur
les stupéfiants pour les faits antérieurs à l'été 1981. Elle
a également libéré D.________, pour cause de prescription, de
l'accusation de violation grave à la loi fédérale sur les
stupéfiants en rapport avec les faits intervenus en 1984 pour
finalement retenir qu'il s'était livré en 1985 à un trafic en
bande entre la Thaïlande et les Etats-Unis, portant sur plus
de 2 tonnes de marijuana. Elle a enfin ordonné le séquestre
des valeurs patrimoniales saisies en cours de procédure en
vue de l'exécution de la créance compensatrice.

   D.- Agissant par la voie du recours de droit public,
D.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler ce jugement.

Invoquant les art. 4 aCst. et 6 CEDH, il reproche à la cour
cantonale d'avoir violé son droit d'être entendu et son droit
à un procès équitable en refusant d'ordonner la production
des pièces et documents détenus ou saisis par les autorités
américaines, sollicitée à l'appui de sa requête en complément
de preuves du 19 mars 1997, en refusant de procéder à l'au-
dition contradictoire des témoins conformément à sa demande
en complément d'instruction déposée lors des débats et en
refusant d'ordonner la traduction en français des pièces
rédigées en langue étrangère. Il se plaint en outre d'une
violation arbitraire du droit cantonal de procédure.

   La Cour d'appel pénale se réfère aux considérants de
son jugement. Le Ministère public du Bas-Valais conclut au
rejet du recours.

          C o n s i d é r a n t   e n   d r o i t :

   1.- Le Tribunal fédéral examine d'office et libre-
ment la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 125
I 412 consid. 1a p. 414; 125 II 497 consid. 1a p. 499; 125
III 461 consid. 2 p. 463 et la jurisprudence citée).

   a) Le pourvoi en nullité à la Cour de cassation pé-
nale du Tribunal fédéral n'est pas ouvert pour invoquer la
violation directe d'un droit constitutionnel (ATF 120 IV 113
consid. 1a p. 114) ou d'un droit découlant de la Convention
européenne des droits de l'homme (ATF 121 IV 104 consid. 2b
p. 207; 119 IV 107 consid. 1a p. 109). Au vu des arguments
soulevés, seule la voie du recours de droit public est ou-
verte en l'espèce.

   b) Le recourant est personnellement touché par l'ar-
rêt attaqué qui le condamne à cinq ans de réclusion ainsi
qu'à une amende de 200'000 fr. et qui l'astreint à verser à

l'Etat du Valais une créance compensatrice de 2'000'000 fr.
Il a un intérêt personnel, actuel et juridiquement protégé à
ce que cet arrêt soit annulé et a, partant, qualité pour
recourir selon l'art. 88 OJ (ATF 125 I 394 consid. 4a p. 397;
125 II 86 consid. 5b p. 97 et les arrêts cités).

   Pour le surplus, le recours répond aux conditions de
recevabilité du recours de droit public, de sorte qu'il con-
vient d'entrer en matière sur le fond.

   2.- Le recourant reproche à l'autorité intimée
d'avoir refusé d'entendre les témoins à charge auxquels il
n'avait pas été confronté en violation de son droit de les
faire interroger consacré aux art. 4 aCst. et 6 § 3 let. d
CEDH.

   a) Selon cette dernière disposition, tout accusé a
le droit d'interroger ou de faire interroger les témoins à
charge et d'obtenir la convocation et l'interrogatoire des
témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins
à charge. La jurisprudence a admis que le même droit décou-
lait de l'art. 4 aCst. (aujourd'hui art. 29 al. 2 Cst.; ATF
125 I 127 consid. 6b p. 133; 124 I 274 consid. 5b p. 284; 121
I 306 consid. 1b p. 308 et les arrêts cités). Il s'agit d'une
règle concrétisant le droit à un procès équitable garanti par
l'art. 6 § 1 CEDH (ATF 125 I 127 consid. 6a p. 132; 121 I 306
consid. 1b p. 308; 116 Ia 289 consid. 3b p. 292).

   Les éléments de preuve doivent en principe être pro-
duits en présence de l'accusé lors d'une audience publique,
en vue d'un débat contradictoire (ATF 125 I 127 consid. 6b p.
132). Cette règle tend à assurer l'égalité des armes entre
l'accusateur public et la défense (ATF 121 I 306 consid. 1b
p. 308; 104 Ia 314 consid. 4b p. 316). Il n'est toutefois pas
exclu de prendre en compte des dépositions recueillies durant
la phase de l'enquête, pour autant que l'accusé ait disposé

d'une occasion adéquate et suffisante de contester ces témoi-
gnages à charge et d'en interroger ou d'en faire interroger
les auteurs (ATF 125 I 127 consid. 6b p. 132/133 et les ar-
rêts cités). L'accusé ne peut en principe exercer qu'une seu-
le fois le droit d'interroger ou de faire interroger les té-
moins à charge (ATF 125 I 127 consid. 6c/ee p. 136; 124 I 274
consid. 5b p. 285; 121 I 306 consid. 1b p. 308; 120 Ia 48
consid. 2b/aa p. 50; 118 Ia 457 consid. 2b/aa p. 459 et les
arrêts cités).

   Exceptionnellement, le juge peut prendre en considé-
ration une déposition faite au cours de l'enquête alors que
l'accusé n'a pas eu l'occasion d'en faire interroger l'au-
teur, en particulier s'il n'est plus possible de faire pro-
céder à une audition contradictoire en raison du décès ou
d'un empêchement durable du témoin (ATF 125 I 127 consid.
6c/dd p. 136; 105 Ia 396 consid. 3b p. 397; Tomas Poledna,
Praxis zur EMRK, Zurich 1993, no 696, p. 166). S'il n'est pas
possible d'organiser une confrontation avec les témoins à
charge, l'accusé doit avoir la possibilité de faire poser par
écrit des questions complémentaires à ces témoins (ATF 124 I
274 consid. 5b p. 286; 118 Ia 462 consid. 5a/aa p. 469 et les
arrêts cités). Tel est en particulier le cas lorsque ceux-ci
se trouvent à l'étranger et qu'ils ne peuvent être entendus
que par le biais d'une commission rogatoire (ATF 125 I 127
consid. 6c/ee p. 137; 118 Ia 462 consid. 5a/bb p. 470 et les
arrêts cités).

   Dans sa jurisprudence, la Cour européenne des droits
de l'homme s'emploie à rechercher si la procédure examinée
dans son ensemble, y compris le mode de présentation des
moyens de preuve, revêt un caractère équitable (cf. arrêt de
la CourEDH du 9 juin 1998 dans la cause Teixeira de Castro c.
Portugal, Recueil des arrêts et décisions 1998, p. 1451, §
34); elle a ainsi admis que le juge se réfère à des déclara-
tions faites à la police lorsque leur auteur refuse de témoi-

gner, qu'il est introuvable ou qu'il est décédé, à la condi-
tion qu'elles soient corroborées par d'autres éléments de
preuve (cf. les arrêts cités aux ATF 125 I 127 consid. 6c/dd
p. 135/136). En revanche, elle a vu une violation de l'art. 6
§ 1 CEDH dans deux cas où les autorités judiciaires avaient
refusé d'organiser une confrontation et se sont fondées ex-
clusivement ou dans une mesure déterminante sur les déposi-
tions de personnes que l'accusé n'avait pas pu interroger
(arrêts de la CourEDH du 14 décembre 1999 dans la cause A. M.
c. Italie, Recueil 1999, § 20, du 20 septembre 1993 dans la
cause Saïdi c. France, Série A n° 261-C, §§ 41 à 44, et du 24
novembre 1986 dans la cause Unterpertinger c. Autriche, Série
A n° 110, § 33).

   L'exercice du droit à l'interrogatoire des témoins
est soumis aux dispositions de la loi de procédure applica-
ble, qui peut poser des conditions de forme et de délai; il
peut aussi être renoncé, expressément ou tacitement, à ce
droit; une telle renonciation ne rend pas nulles les déposi-
tions recueillies en cours d'enquête et ne donne aucun droit
à ce qu'elles soient répétées (ATF 125 I 127 consid. 6c/bb p.
134; 121 I 306 consid. 1b p. 309 et les arrêts cités). La
volonté de l'accusé de renoncer à son droit d'être confronté
aux témoins à charge ne doit pas être admise trop facilement,
en particulier lorsque celui-ci ne maîtrise pas la langue de
la procédure et qu'il n'est pas assisté d'un défenseur et
d'un interprète, mais doit être établie de manière non équi-
voque et s'entourer d'un minimum de garanties correspondant à
sa gravité (ATF 121 I 30 consid. 5f p. 37/38). Le fait que le
prévenu n'a pas demandé à être confronté à un témoin à charge
durant l'instruction ou à l'audience de débats de l'autorité
de première instance ne signifie pas encore qu'il aurait re-
noncé à une telle mesure d'instruction lorsque le droit de
procédure cantonal autorise à produire des moyens de preuve
en procédure d'appel, sous réserve des cas de mauvaise foi
manifeste (arrêt non publié du 7 avril 1998 dans la cause D.

contre Ministère public du canton d'Argovie; cf. Robert
Hauser/Erhard Schweri, Schweizerisches Strafprozessrecht,
3ème éd., Zurich 1997, § 57, n. 6 p. 226; Niklaus Oberholzer,
Grundzüge des Strafprozessrechts, Berne 1994, p. 151 et le
renvoi à l'arrêt paru in ZR 86/1987, p. 158 ss); il en va de
même lorsque l'accusé s'est plaint à l'audience de jugement
de ne pas avoir eu l'occasion d'exercer le droit garanti par
l'art. 6 § 3 let. d CEDH, même s'il n'a alors pas pris for-
mellement de conclusions tendant à l'interrogation contra-
dictoire des témoins à charge (arrêt non publié du 24 sep-
tembre 1990 dans la cause D. contre Cour de cassation pénale
du canton de Fribourg).

   La question de savoir si le droit d'interroger ou de
faire interroger les témoins à charge garanti à l'art. 6 § 3
let. d CEDH est respecté doit en conséquence être examinée
dans chaque cas en fonction de l'ensemble de la procédure et
des circonstances concrètes de l'espèce.

   b) En l'occurrence, le recourant a été libéré, pour
cause de prescription, des accusations d'infraction grave à
la loi fédérale sur les stupéfiants portées contre lui en
relation avec les faits survenus avant l'année 1985. Il ne
saurait par conséquent se plaindre du fait que la cour can-
tonale se serait référée à des déclarations de témoins aux-
quels il n'aurait pas été confronté pour aboutir à cette con-
clusion.

   La Cour d'appel pénale s'est fondée en revanche sur
les déclarations à charge de plusieurs témoins entendus par
le Juge d'instruction pénale en exécution de la commission
rogatoire décernée le 21 juillet 1993, pour retenir que l'ac-
cusé avait mis sur pied en 1985 un trafic en bande portant
sur plus de 2 tonnes de marijuana. Or, à l'exception de
Z.________, le recourant n'a pas été confronté à ces témoins
au cours de la procédure.

   aa) Pour s'opposer à une nouvelle audition des té-
moins à charge entendus par le Juge d'instruction dans le
cadre de la commission rogatoire du 21 juillet 1993, le Tri-
bunal d'arrondissement a considéré que malgré l'absence de
confrontation directe avec les témoins à charge, le recourant
avait pu valablement exercer ses droits de défense à l'occa-
sion de la commission rogatoire et que, s'agissant des faits
nouveaux survenus depuis l'audition par le Juge d'instruc-
tion, les dépositions des témoins concernés avaient été ver-
sées au dossier et qu'il appartiendrait au Tribunal de se
forger sa conviction sur la base de ces pièces. Pour écarter
la requête similaire dont elle était saisie, la Cour d'appel
pénale s'est principalement prévalue de l'absence de nouveau-
té du moyen de preuve offert.

    L'art. 6 § 3 let. d CEDH n'exclut pas de refuser
l'interrogatoire d'un témoin parce que la déposition sollici-
tée n'est pas pertinente ou parce que les faits sont déjà
établis à la suite d'une appréciation anticipée des preuves;
un interrogatoire ne peut être exigé que s'il doit porter sur
des faits pertinents et si le témoignage est un moyen de
preuve apte à les établir. L'interrogatoire peut également
être refusé par une appréciation anticipée des preuves,
c'est-à-dire si le juge parvient sans arbitraire à la consta-
tation, sur la base des éléments déjà recueillis, que l'admi-
nistration de la preuve sollicitée, même si elle conduit à un
résultat favorable au requérant, ne peut plus modifier sa
conviction (ATF 121 I 306 consid. 1b p. 308). Dans tous ces
cas, le juge décide de ne pas retenir un moyen de preuve. Il
en va autrement lorsque le juge retient les dépositions anté-
rieures d'un témoin pour asseoir, fût-ce de manière non dé-
terminante, sa conviction. Il ne saurait alors être question
de refuser à l'accusé la possibilité d'interroger ou de faire
interroger ce témoin, quand bien même le juge considérerait
que cela n'est de toute façon pas susceptible de modifier son
appréciation et de l'amener à douter de la crédibilité du té-

moin (cf. arrêt non publié du 29 juin 1999 dans la cause G.
contre Cour de cassation du canton de Genève, consid. 2f).

   Dans ces conditions, ni les premiers juges ni la
Cour d'appel pénale ne pouvaient refuser l'audition des té-
moins à charge entendus par le Juge d'instruction sous pré-
texte que ce moyen de preuve n'était pas essentiel au sens de
l'art. 116 ch. 2 CPP val. ou qu'il n'était pas nouveau selon
l'art. 190 ch. 1 al. 1 CPP val. Cela ne signifie pas encore
que les droits de la défense découlant de l'art. 6 § 3 let. d
CEDH auraient été violés. Ce grief doit être examiné en rela-
tion avec l'art. 6 § 1 CEDH qui garantit à tout accusé le
droit à un procès équitable.

   bb) Le Juge d'instruction a exclu que l'accusé as-
siste personnellement à l'audition des témoins qu'il se pro-
posait d'interroger en exécution de la commission rogatoire
du 21 juillet 1993. Le recourant était certes représenté à
tour de rôle par l'un des deux avocats américains qui assu-
rent sa défense et celle de son épouse dans la procédure ci-
vile en confiscation ouverte à leur encontre aux Etats-Unis.
Le fait que ses conseils américains aient pu assister aux
auditions et poser des questions aux témoins ne suffit toute-
fois pas à satisfaire les exigences des art. 6 CEDH et 4
aCst. car les contradictions entachant un témoignage, suscep-
tibles d'être révélées ou éliminées avec la confrontation, ne
peuvent, par nature, apparaître qu'après avoir entendu leur
auteur (cf. ATF 118 Ia 462 consid. 5b p. 471). Seule une con-
frontation directe ou une occasion de poser des questions
écrites aux témoins sur la base des déclarations recueillies
était dès lors de nature à assurer le respect des droits de
la défense.

   Afin de faciliter sa libération provisoire, le re-
courant a toutefois renoncé à requérir une nouvelle audition
des témoins à charge entendus dans le cadre de la commission

rogatoire du 21 juillet 1993 à la condition que les autorités
américaines transmettent les pièces saisies aux Etats-Unis,
relatives à l'aspect financier de son dossier ainsi que les
procès-verbaux d'audiences publiques établis dans le cadre
des procédures pénales pendantes ou closes dirigées contre
ses co-inculpés, ou dans le cadre du procès pénal concernant
H.________. Or, le Juge d'instruction a fait droit à cette
requête et clos l'instruction après avoir recueilli les
pièces demandées. Le recourant a certes requis à nouveau
l'audition des principaux témoins à charge devant le Tribunal
du IIIème arrondissement en excipant des faits nouveaux sur-
venus depuis leur interrogatoire par le Juge d'instruction.
Il n'indiquait toutefois pas de quels faits nouveaux il
s'agissait, mais se bornait à évoquer les contradictions que
les pièces recueillies en exécution de la demande d'entraide
judiciaire complémentaire auraient mises en évidence, sans
indiquer en quoi une nouvelle audition des témoins à charge
aurait été nécessaire pour lever ces contradictions. Dans ces
conditions, il est douteux que le recourant puisse de bonne
foi se plaindre du fait qu'il n'a pas été confronté aux té-
moins à charge (ATF 121 I 30 consid. 1f p. 37/38, 306 consid.
2b p. 312; cf. arrêt de la CourEDH du 6 décembre 1988 dans la
cause Barberà, Messegué et Jabardo c. Espagne, Série A n°
146, § 82). Cette question peut finalement demeurer indécise,
car les déclarations des témoins à charge auxquels il n'a pas
été confronté ne constituaient pas le seul élément de preuve
sur lequel les juges du fond ont appuyé leur condamnation
(cf. arrêts de la CourEDH du 28 août 1992 dans la cause
Artner c. Autriche, Série A, vol. 242-A, §§ 23-24, et du 26
avril 1991 dans la cause Asch c. Autriche, Série A n° 203, §
30).

   La Cour d'appel pénale a vu un indice à charge dans
les aveux que l'appelant avait faits devant le Juge d'ins-
truction le 23 décembre 1992, en expliquant les raisons pour
lesquelles elle les tenait pour crédibles malgré ses rétrac-

tations. Elle a aussi tenu compte de l'attitude souvent peu
cohérente de l'accusé au cours de la procédure et des nom-
breuses contradictions qui émaillaient ses déclarations. Elle
s'est également fondée sur les rapports de police établis par
les autorités américaines en indiquant les motifs pour les-
quels ces rapports étaient dignes de foi. Elle s'est référée
au témoignage du principal témoin à charge, Z.________, au-
quel le recourant a été confronté, qui confortait les accu-
sations portées contre ce dernier. Elle a en outre pris en
compte les déclarations faites par O.________ dans le cadre
de la procédure civile de confiscation en expliquant les rai-
sons pour lesquelles elle n'ajoutait aucun crédit aux rétrac-
tations de ce témoin opérées à l'audience d'appel. Elle a vu
un indice à charge dans une note saisie dans le cadre du pro-
cès ouvert contre H.________, qui corroborait les accusations
portées à l'endroit du prévenu quant à la réception d'une
cargaison de marijuana en 1985. Elle a relevé la présence
d'autres indices matériels, tels que la présence de safes
dans une banque genevoise détenus conjointement avec plu-
sieurs co-inculpés, qui corroboraient les déclarations con-
cordantes des témoins à charge. Elle a enfin vu dans la
situation économique inexplicablement florissante du recou-
rant un indice important de l'origine illicite de ses biens.
Or, tous ces éléments confortaient les déclarations à charge
des témoins auxquels le recourant avait ou non été confronté.

   L'autorité intimée n'a donc pas conclu à la culpabi-
lité du recourant sur la base des seules déclarations des té-
moins à charge auxquels il n'a jamais été confronté; il con-
vient par ailleurs de tenir compte du fait que ces déclara-
tions n'étaient pas nouvelles, mais qu'elles confirmaient
pour l'essentiel celles déjà recueillies dans le cadre de la
procédure civile en confiscation ouverte contre les époux
D.________ conformément aux règles de la procédure américaine
(cf. JAAC 1998 n° 105 p. 396). De ce point de vue, le cas
d'espèce se distingue de ceux dans lesquels la Cour euro-

péenne des droits de l'homme a discerné une violation inad-
missible des droits de la défense.

   Au vu de ces différents éléments, le procès a pré-
senté, dans son ensemble, un caractère équitable au sens de
l'art. 6 § 1 CEDH, quand bien même le recourant n'a pas été
confronté à certains des témoins à charge.

   c) Le recourant voit également une violation de
l'art. 6 § 3 let. d CEDH dans le fait que la plupart des té-
moins à décharge cités par la défense n'ont jamais été enten-
dus, ni pendant l'instruction ni devant les deux instances
cantonales de jugement.

   L'art. 6 § 3 let. d CEDH ne confère pas à l'accusé
un droit illimité d'obtenir la convocation de témoins et le
juge peut en particulier refuser d'assigner à comparaître
ceux dont il estime que les dépositions ne seront pas perti-
nentes (ATF 125 I 127 consid. 6c/cc p. 135; JAAC 1995 n° 134
p. 1021). L'art. 4 aCst. n'accorde pas au prévenu de garantie
plus étendue. Le droit d'être entendu, tel qu'il découle de
cette disposition, comprend notamment le droit de faire admi-
nistrer les moyens de preuves pour autant que celles-ci
soient requises dans les formes prévues par le droit cantonal
et qu'elles soient utiles à l'établissement des faits perti-
nents. Le juge peut ainsi renoncer à procéder à des mesures
d'instruction lorsqu'il parvient à la conclusion qu'elles ne
sont pas décisives pour la solution du litige ou qu'elles ne
pourraient l'amener à modifier son opinion. Ce refus d'ins-
truire ne viole le droit d'être entendu des parties que si
l'appréciation anticipée de la pertinence du moyen de preuve
offert est entachée d'arbitraire (ATF 124 I 241 consid. 2 p.
242; 124 V 180 consid. 1a p. 181 et les arrêts cités). La
renonciation à l'audition de témoins dont les dépositions
porteraient sur des faits non pertinents ou ne seraient pas
en mesure de modifier la conviction du juge, acquise sur

d'autres preuves déjà réunies, ne viole donc pas l'art. 4
aCst. (ATF 124 I 274 consid. 5b p. 285 et les références
citées).

   Il appartient au recourant qui requiert l'adminis-
tration d'un moyen de preuve d'expliquer en quoi celui-ci
revêtirait une importance déterminante pour l'issue du liti-
ge. Or, le recourant n'indique pas précisément l'identité des
témoins à décharge qui n'auraient pas été entendus; il n'est
dès lors pas possible d'examiner s'ils se trouvaient sur la
liste des personnes dont il requérait l'audition en première
instance, dans sa déclaration d'appel ou encore à l'audience
de débats et, par conséquent, si ses demandes successives en
complément d'instruction respectaient les formes prévues par
le droit cantonal de procédure. De même, le recourant ne
précise pas sur quels points déterminants pour l'issue du li-
tige ces témoins devaient être interrogés, de sorte qu'il
n'est pas possible d'apprécier la pertinence de ces moyens de
preuve. Faute d'une motivation conforme aux exigences de
l'art. 90 al. 1 let. b OJ, le moyen est irrecevable (art. 90
al. 1 let. b OJ; cf. ATF 125 I 70 consid. 1c p. 76).

    d) Le grief tiré de la violation de l'art. 6 § 3
CEDH doit ainsi être rejeté dans la mesure où il est rece-
vable.

   3.- Le recourant voit une violation des art. 4 aCst.
et 6 § 3 let. e CEDH dans le refus opposé par la Cour d'appel
pénale à sa requête tendant à faire traduire les pièces du
dossier rédigées en langue étrangère.

   a) Les art. 4 aCst. et 6 § 3 let. e CEDH garantis-
sent à l'accusé le droit d'obtenir gratuitement la traduction
de toutes les pièces et déclarations qu'il lui est nécessaire
de comprendre pour assurer efficacement sa défense et bénéfi-
cier d'un procès équitable (ATF 121 I 196 consid. 5a p. 205;

118 Ia 462 consid. 2a p. 464/465 et les références citées;
cf. arrêt de la CourEDH du 19 décembre 1989 dans la cause
Kamasinski c. Autriche, Série A n° 168, § 74). Cette assis-
tance doit lui être accordée non seulement pour garantir sa
bonne compréhension de la procédure et des débats, mais aussi
pour concrétiser son droit de s'entretenir librement avec son
défenseur (Arthur Häfliger, Die Europäische Menschenrechts-
konvention und die Schweiz, Berne 1993, p. 191; Thomas
Braitsch, Gerichtssprache für Sprachunkundige im Lichte des
"fair trial", Francfort-sur-le-Main 1991, p. 183-185).

   En l'occurrence, le recourant demande la traduction
des pièces rédigées en langue étrangère non pas pour sa bonne
compréhension de la procédure et des débats, mais uniquement
pour celle du tribunal. Il est dès lors douteux qu'une telle
prétention puisse se fonder sur l'art. 6 § 3 let. e CEDH.
Quoi qu'il en soit, cette question peut demeurer ouverte car
le grief est de toute manière mal fondé.

   b) L'autorité intimée a considéré que la traduction
en français de l'intégralité des pièces rédigées en anglais
et en allemand ne répondait à aucun besoin véritable, car les
membres de la Cour avaient une maîtrise suffisante de ces
langues pour statuer en connaissance de cause.

   Ces considérations résistent au grief d'arbitraire.
A teneur de l'art. 4 ch. 1 CPP val., l'allemand est langue
officielle dans le canton du Valais et chaque juge est pré-
sumé le comprendre; par ailleurs, le recourant ne signale
aucune circonstance propre à établir ou, à tout le moins, à
rendre vraisemblable que les juges de la Cour d'appel pénale
ne maîtrisaient pas suffisamment la langue anglaise ou alle-
mande au point de justifier la traduction des pièces de la
procédure rédigées dans ces langues.

   Le recours est donc également mal fondé sous cet
angle.

   4.- Le recourant voit enfin une violation de son
droit d'être entendu dans le refus de la cour cantonale d'or-
donner la production des pièces et documents détenus ou sai-
sis par les autorités américaines selon sa requête en complé-
ment de preuves du 19 mars 1997.

   a) La portée du droit d'être entendu et les modali-
tés de sa mise en oeuvre sont déterminées en premier lieu par
le droit cantonal, dont le Tribunal fédéral revoit l'applica-
tion et l'interprétation sous l'angle restreint de l'arbi-
traire; le justiciable peut par ailleurs invoquer les garan-
ties minimales découlant de l'art. 4 aCst., dont le Tribunal
fédéral examine librement si elles ont été respectées (ATF
125 I 257 consid. 3a p. 259 et les arrêts cités).

   Selon l'art. 190 ch. 1 let. a CPP val., auquel se
réfère le recourant, un complément d'enquête n'est possible
en appel que lorsque les parties justifient la découverte,
depuis les débats, de nouveaux faits et moyens essentiels et
déterminants quant au fond. Il n'apparaît pas que cette dis-
position confère un droit à l'administration de preuves de-
vant une autorité de recours qui soit plus large que celui
découlant du droit d'être entendu garanti par l'art. 4 aCst.
Il suffit donc d'examiner le grief sous l'angle de cette der-
nière disposition.

   b) Le droit d'être entendu tiré de l'art. 4 aCst.
comporte notamment le droit pour le justiciable de fournir
des preuves quant aux faits de nature à influer sur le sort
de la décision à rendre. A cet égard, la jurisprudence a pré-
cisé que l'autorité a l'obligation de donner suite aux offres
de preuves présentées en temps utile et dans les formes re-
quises, à moins qu'elles ne soient manifestement inaptes à

établir le fait à prouver ou que celui-ci soit sans perti-
nence. Cela n'empêche toutefois pas le juge de refuser d'ad-
ministrer une mesure probatoire si, au terme d'une apprécia-
tion anticipée non arbitraire des preuves déjà apportées, il
parvient à la conclusion que les faits pertinents sont déjà
établis et qu'un résultat, même favorable au recourant, de la
mesure probatoire sollicitée ne pourrait plus modifier sa
conviction (ATF 124 I 208 consid. 4a p. 211, 241 consid. 2 p.
242; 124 V 180 consid. 1a p. 181; 122 II 464 consid. 4a p.
469 et les arrêts cités).

   c) A l'appui de sa requête de preuves du 19 mars
1997, réitérée dans sa déclaration d'appel, le recourant de-
mandait la production aux débats des documents bancaires et
financiers saisis par les autorités américaines et qui
n'avaient, selon lui, pas été transmis en exécution de la
commission rogatoire du 7 décembre 1994. Ces documents de-
vaient permettre d'établir l'origine licite de ses biens. Or,
la cour cantonale a considéré que la détermination exacte des
activités licites exercées par le recourant et des profits
qui en découlaient pouvait rester ouverte car il était exclu
d'établir aujourd'hui avec précision le cheminement de l'ar-
gent sale depuis 1985; en conséquence de quoi, elle a libéré
l'appelant de l'accusation de blanchissage d'argent. Les piè-
ces dont le recourant demandait la production n'étaient donc
pas pertinentes pour l'issue du litige. Sur ce point, le
grief est mal fondé.

   Les pièces requises à l'appui de la demande du 19
mars 1997 concernaient également certaines dépositions de té-
moins à charge auxquelles il était fait référence dans les
documents remis par les autorités américaines en exécution de
la commission rogatoire du 7 décembre 1994. Le Président du
Tribunal d'arrondissement a refusé de faire droit à cette re-
quête au motif que les renseignements avaient tous été trans-
mis. Les juges de première instance se sont ralliés à la dé-

cision de leur président. Quant à la Cour d'appel pénale,
elle a écarté la requête au motif qu'elle ne portait pas sur
des moyens de preuve nouveaux au sens de l'art. 190 ch. 1
let. a CPP val.

   Une telle attitude n'est pas conforme aux exigences
du droit d'être entendu. Les premiers juges ne pouvaient se
borner à constater que la commission rogatoire avait été cor-
rectement exécutée, mais devaient se prononcer sur la perti-
nence des pièces dont le recourant demandait la production.
En écartant la requête pour des questions de forme, la Cour
d'appel pénale n'a pas réparé ce vice. Il serait toutefois
excessivement formaliste d'annuler l'arrêt attaqué pour ce
motif, dès lors que les documents requis ne sont manifeste-
ment pas de nature à remettre en cause l'issue du litige.

   Le premier document concerne une déposition que le
témoin W.________ aurait faite devant le Grand jury des
Etats-Unis pour le district du Nevada préalablement à sa dé-
position du 13 décembre 1988 versée au dossier; lors de cette
première audition, le témoin avait toutefois refusé de répon-
dre à la question de savoir s'il était impliqué dans un tra-
fic de marijuana, de sorte que le document dont le recourant
demande la production n'est pas déterminant.

   La déposition que P.________ aurait faite préala-
blement à celle versée au dossier est également dénuée de
pertinence, dès lors que la Cour d'appel pénale ne s'est pas
fondée sur les déclarations de ce témoin à charge, aujour-
d'hui décédé, pour conclure à la culpabilité du recourant. Il
en va de même de la déposition de Q.________, recueillie par
les agents de la Drug Enforcement Administration (DEA) en
1988, qui se rapporte à des faits pour lesquels le recourant
a bénéficié de la prescription absolue.

   T.________ a également été interrogé en mai 1988 par
les agents de la DEA. Toutefois, selon les déclarations
faites au Juge d'instruction, il s'est alors borné à relater
les faits en relation avec l'importation de marijuana opérée
en 1984 pour laquelle le recourant a été libéré de toute
peine. Dans ces conditions, la production de la déposition
que ce témoin avait faite aux agents de la DEA n'est pas
pertinente.

   Pour le surplus, la Cour d'appel pénale disposait de
l'ensemble des dépositions recueillies dans le cadre de la
procédure pénale ouverte aux Etats-Unis contre F.________.
L'absence au dossier des dépositions que ce témoin a faites
aux autorités fiscales américaines et à l'audience du 13 fé-
vrier 1995 dans le cadre du procès pénal dirigé contre
H.________ ne suffit dès lors pas pour conclure que le re-
courant a été condamné sur la base d'un dossier incomplet.

   d) La Cour d'appel pénale n'a donc pas violé le
droit d'être entendu du recourant en s'opposant à la produc-
tion des pièces requises à l'appui de sa demande du 19 mars
1997.

   5.- Le recourant se plaint enfin d'une application
arbitraire du droit cantonal de procédure. Il se borne toute-
fois à citer les dispositions qu'il considère avoir été vio-
lées sans chercher à démontrer en quoi elles lui confére-
raient des garanties plus étendues que celles déduites des
normes conventionnelles et constitutionnelles évoquées ci-
dessus. Le recours ne satisfait dès lors pas sur ce point aux
exigences de motivation de l'art. 90 al. 1 let. b OJ et doit
être déclaré irrecevable (ATF 125 I 492 consid. 1b p. 495).

   6.- Le recours doit par conséquent être rejeté, dans
la mesure où il est recevable, aux frais du recourant qui

succombe (art. 156 al. 1, 153 et 153a OJ). Il n'y a pas lieu
à l'allocation de dépens (art. 159 al. 2 OJ).

                       Par ces motifs,

           l e   T r i b u n a l   f é d é r a l :

   1. Rejette le recours, dans la mesure où il est re-
cevable;

   2. Met un émolument judiciaire de 10'000 fr. à la
charge du recourant;

   3. Dit qu'il n'est pas alloué de dépens;

   4. Communique le présent arrêt en copie au manda-
taire du recourant, au Ministère public du Bas-Valais et à la
Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton du Valais.

Lausanne, le 29 mars 2000
PMN/col

            Au nom de la Ie Cour de droit public
                 du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
                        Le Président,

                        Le Greffier,