I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1P.613/1999
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1P.613/1999 Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C ********************************************** 24 janvier 2000 Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président, Jacot-Guillarmod et Catenazzi. Greffier: M. Kurz. Statuant sur le recours de droit public formé par N.________, représentée par Me Peter Schaufelberger, avocat à Lausanne, contre la décision rendue le 22 septembre 1999 par le Conseil d'Etat du canton de Vaud, dans la cause qui oppose la recourante au Chef du Département des finances du canton de Vaud; (suspension provisoire d'une fonctionnaire) Vu les pièces du dossier d'où ressortent les f a i t s suivants: A.- N.________ a été engagée le 1er août 1987 comme taxatrice à l'administration vaudoise des impôts. Elle a en- suite été nommée fonctionnaire. Le 25 juin 1998, le chef du Département vaudois des finances (ci-après: le département) lui a infligé un avertis- sement pour avoir tenu, auprès de l'administration fédérale des contributions, des propos de nature à ternir l'image, no- tamment, du canton. Cette décision a fait l'objet d'un re- cours auprès du Conseil d'Etat vaudois, et la cause a été suspendue dans l'attente du prononcé de la commission pari- taire saisie par N.________. B.- Dans une lettre du 22 juin 1999 adressée à N.________, avec copie au chef du département, l'avocat S.________ indiquait que N.________ avait prétendu avoir été frappée par I.________, contre lequel elle menait une procé- dure de redressement fiscal. Le 24 juin 1999, Me S.________ demanda à ce que N.________ soit dessaisie du dossier: lors d'une audience tenue le jour précédent devant le Tribunal correctionnel de Lausanne, N.________ avait porté contre I.________ des accu- sations mensongères en déclarant que celui-ci avait été vio- lent, voire très violent à son égard. Le dépôt d'une plainte pénale pour diffamation était envisagé. Une entrevue a eu lieu le 25 juin 1999 avec le chef de l'administration cantonale des impôts et le chef de l'ins- pectorat. N.________ s'est vu signifier sa suspension provi- soire, en attendant que soient éclaircis les faits qui lui étaient reprochés. Par lettre de son conseil du 29 juin 1999, N.________ s'est opposée à sa suspension, estimant cette mesure disproportionnée. Le 7 juillet 1999, elle contesta les reproches qui lui étaient adressés, et demanda notamment l'accès au dossier. C.- Par décision du 30 juin 1999, notifiée le 8 juillet 1999, le chef du département a décidé la suspension provisoire pour une durée indéterminée, sans suppression de traitement. Les faits relatés dans la lettre de Me S.________, ajoutés à ceux qui avaient entraîné l'avertisse- ment du 25 juin 1998, affectaient gravement le lien de con- fiance et rendaient impossible la poursuite de ses activités au sein de l'administration des impôts. Une décision serait prise à l'issue de la nouvelle enquête administrative. Cette dernière a été confiée au Ministère public vaudois. D.- Par décision du 22 septembre 1999, le Conseil d'Etat du canton de Vaud a confirmé cette décision. La sus- pension ordonnée était une mesure préventive fondée sur l'art. 84 al. 1 de la loi vaudoise sur le statut général des fonctions publiques cantonales (ci-après: StF/VD); elle sup- posait une appréciation prima facie des faits. La recourante avait été entendue le 25 juin 1999. La mesure n'était pas arbitraire ou disproportionnée, car la recourante, dont le traitement était maintenu, avait fait l'objet de deux procé- dures disciplinaires en l'espace d'une année et les reproches qui lui étaient adressés "revêtaient une apparence de rai- son". Par la même décision, le Conseil d'Etat a déclaré sans objet un recours formé précédemment au sujet de l'effet sus- pensif. E.- N.________ forme un recours de droit public contre cette dernière décision. Elle en demande l'annulation. Le Conseil d'Etat conclut au rejet du recours. Par décision du 16 novembre 1999, le Président de la Ie cour de droit public a rejeté la demande d'effet suspensif formée par la recourante. Celle-ci a répliqué, sans y avoir été invitée, en reprochant notamment au Conseil d'Etat de se fonder, dans sa réponse, sur des pièces ne figurant pas dans le dossier au moment où la décision a été prise. C o n s i d é r a n t e n d r o i t : 1.- Le recours est formé en temps utile contre une décision rendue en dernière instance cantonale. Dans sa ré- ponse, le Conseil d'Etat évoque notamment les éléments re- cueillis au cours de l'enquête postérieurement au prononcé de la décision du 30 juin 1999. La recourante s'en plaint, en relevant qu'elle n'a pas pu s'exprimer à ce sujet. Point n'est besoin d'examiner la recevabilité des allégués du Con- seil d'Etat, ni de s'interroger sur la possibilité de permet- tre à la recourante de prendre connaissance des pièces qu'elle prétend ignorer. Le recours est en effet irrecevable en application de l'art. 87 OJ. 2.- Selon cette disposition, le recours de droit pu- blic fondé sur l'art. 4 aCst. n'est recevable que contre les décisions finales, ou contre les décisions incidentes causant à l'intéressé un dommage irréparable. a) Cette disposition est en l'espèce applicable, car le recours de droit public est exclusivement fondé sur l'art. 4 aCst.: la recourante s'y plaint d'une violation du droit d'être entendu (droit de s'expliquer, de consulter le dos- sier, de faire administrer des preuves et exigence de motiva- tion), et, sur le fond, d'arbitraire. b) Une décision est finale lorsqu'elle met un terme à la procédure dans laquelle elle s'inscrit; elle est inci- dente lorsqu'elle ne représente qu'une étape sur la voie de la décision finale (ATF 122 I 39 consid. 1a/aa p. 41 et les arrêts cités). En l'espèce, la décision du Conseil d'Etat confirme la suspension provisoire d'une fonctionnaire cantonale. Elle est fondée sur l'art. 84 StF/VD, dont la teneur est la sui- vante: Lorsque la bonne marche de l'administration l'exi- ge, l'autorité de nomination peut, par mesure pré- ventive, ordonner à un fonctionnaire de suspendre immédiatement son activité. Lorsque les faits justifiant la suspension sont graves, cette mesure peut être accompagnée de la suppression totale ou partielle du traitement. Si la suspension s'avère ensuite injustifiée, le fonctionnaire a droit au paiement dont il a le cas échéant été privé. Le Conseil d'Etat peut en outre lui allouer une in- demnité pour tort moral. L'art. 97 al. 1 est applicable par analogie. La suspension préventive est une mesure de sûreté instituée dans l'intérêt de la bonne marche de l'administra- tion, en vue d'une éventuelle mesure définitive de renvoi pour justes motifs au sens des art. 89-91 StF/VD. Il s'agit d'une mesure provisoire destinée à supprimer les dysfonction- nements de l'administration lorsque la situation exige une solution immédiate. Fondée sur une appréciation prima facie des faits, elle ne préjuge pas du sort d'une éventuelle pro- cédure de renvoi pour justes motifs. Même si elle peut être ordonnée avant - ou pendant - le déroulement d'une telle pro- cédure, elle ne possède aucun caractère autonome (arrêt non publié du 25 février 1997 dans la cause J., consid. 4a/bb). La suspension provisoire ne constitue dès lors qu'une étape dans le cadre d'une procédure de renvoi. Elle revêt par con- séquent un caractère incident. c) Un préjudice irréparable au sens de l'art. 87 OJ n'est réalisé que lorsque l'intéressé subit un dommage qu'une décision favorable sur le fond ne ferait pas disparaître com- plètement. Le dommage doit en outre être de nature juridique, un inconvénient matériel, comme par exemple l'allongement de la procédure, étant insuffisant (ATF 122 I 39 consid. 1a/bb p. 42). En l'espèce, la décision attaquée est fondée sur des critères semblables à ceux qui pourraient conduire à un ren- voi définitif. L'ensemble des questions de fond soulevées par la recourante pourra donc être examiné à l'occasion de la procédure principale, durant laquelle la recourante aura en outre l'occasion de faire valoir toutes les prérogatives liées à son droit d'être entendue. Par ailleurs, la suspen- sion provisoire a été ordonnée sans suppression de traite- ment, ce qui élimine tout préjudice d'ordre patrimonial. La recourante ne soutient pas, enfin, que son exclusion tempo- raire l'entraverait d'une quelconque manière dans la défense de ses intérêts sur le fond. On peut dès lors considérer qu'une décision finale favorable ferait entièrement cesser l'éventuel préjudice actuel. 3.- Sur le vu de ce qui précède, le recours de droit public est irrecevable. Un émolument judiciaire est mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 156 al. 1 OJ). Par ces motifs, l e T r i b u n a l f é d é r a l , vu l'art. 36a OJ: 1. Déclare le recours irrecevable. 2. Met à la charge de la recourante un émolument ju- diciaire de 1000 fr. 3. Communique le présent arrêt en copie au manda- taire de la recourante, au Chef du Département des finances et au Conseil d'Etat du canton de Vaud. Lausanne, le 24 janvier 2000 KUR/col Au nom de la Ie Cour de droit public du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE: Le Président, Le Greffier,