Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1P.511/1999
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1P.511/1999

        Ie   C O U R   D E   D R O I T   P U B L I C
       **********************************************

                        10 avril 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Aeschlimann, Jacot-Guillarmod, Catenazzi et Favre. Greffier:
M. Parmelin.

           Statuant sur le recours de droit public
                          formé par

A.________, B.________ et C.________,

                           contre

l'arrêt rendu le 18 juin 1999 par la Cour de droit public du
Tribunal cantonal du canton du Valais, dans la cause qui op-
pose les recourants à la Commune de  S i e r r e, représentée
par Me Jacques Evéquoz, avocat à Sierre;

 (art. 4 et 22ter aCst.: contribution aux frais d'équipement
                   d'une route communale)

          Vu les pièces du dossier d'où ressortent
                 les  f a i t s  suivants:

   A.- Par décision du 17 mars 1976, le Conseil d'Etat
du canton du Valais a approuvé le plan général d'accès de
Sierre-ouest établi par la commune de Sierre en relation avec
la réalisation de l'autoroute N9. Ce plan prévoyait notamment
de prolonger vers l'ouest l'avenue de Rossfeld, le nouveau
tronçon se terminant par une place de rebroussement pour les
véhicules en provenance du centre de la localité. Il compre-
nait également la réalisation d'une route communale perpendi-
culaire à l'avenue de Rossfeld débouchant sur la route canto-
nale T9 au nord, baptisée par la suite route de Potence, en
lieu et place d'un chemin agricole goudronné.

   Le plan de route a subi, en 1987 et en 1988, diver-
ses modifications qui ont fait l'objet d'une mise à l'enquête
publique. Le 13 janvier 1989, le Département de l'intérieur
du canton du Valais l'a déclaré d'utilité publique et a auto-
risé la Commune de Sierre à exproprier les droits réels né-
cessaires à sa réalisation. Par avis paru dans le Bulletin
officiel du canton du Valais du 22 février 1991, celle-ci a
informé les propriétaires des parcelles se trouvant dans la
zone d'influence de l'ouvrage de sa décision de mettre à leur
charge une partie des frais de construction. Ces propriétai-
res ont également été informés personnellement par courrier
recommandé.

   En février 1993, la Commune de Sierre a modifié le
plan de route en prévoyant de raccorder la route communale à
réaliser, dénommée route des Lacustres, à la route cantonale
T9 au lieu de la place de rebroussement initialement prévue
dans les plans de 1976. Le plan de circulation et de signali-
sation du quartier du Rossfeld a été mis à l'enquête publique
le 24 décembre 1993 et approuvé le 4 février 1994. Par avis

paru dans le Bulletin officiel du 10 juin 1994, la Commune de
Sierre a mis à l'enquête publique un dossier comprenant un
exposé général, les plans généraux et d'exécution du projet,
le devis, le mode de financement général mis en place et le
projet de perception de contribution comprenant le périmètre,
les zones contributives, les coefficients et les critères
d'évaluation. Les propriétaires concernés ont également été
avisés personnellement par envoi recommandé.

   B.- Dans son rapport établi le 5 avril 1995, la Com-
mission d'experts mandatée par la Commune de Sierre a estimé
à 5'365'000 fr. le coût total de l'oeuvre et à 3'219'000 fr.
la participation financière des propriétaires qui en reti-
raient un avantage particulier, selon le taux de 60% adopté
par le Conseil municipal de Sierre dans sa séance du 1er sep-
tembre 1992. Ces experts ont également divisé le périmètre
d'appel à contribution arrêté par la Commune de Sierre en
quatre zones contributives, de la manière suivante: la zone I
comprenant toutes les parcelles avoisinant les nouvelles ar-
tères et les voies d'accès à celles-ci et influencées direc-
tement ou indirectement par l'oeuvre; la zone II englobant
les parcelles avec caractéristiques identiques à la zone I,
mais ayant déjà contribué à la construction du réseau de
"Glarier-Potence"; la zone III regroupant les parcelles si-
tuées à l'arrière de la zone I, au pied du talus de la route
cantonale; la zone IV incluant enfin les parcelles situées à
l'arrière de la zone I, bénéficiant déjà d'un accès sur la
route cantonale.

   L'ensemble des parcelles comprises dans le périmètre
sont classées en zone de construction mixte, qui permet la
réalisation de bâtiments destinés à l'industrie, à l'arti-
sanat et au logement selon le règlement communal des cons-
tructions et des zones approuvé par le Conseil d'Etat valai-
san, le 14 octobre 1998.

   C.- Par avis paru au Bulletin officiel du 14 avril
1995, la Commune de Sierre a mis à l'enquête publique un dos-
sier comprenant notamment le plan des zones contributives,
les biens-fonds assujettis, le décompte de l'ouvrage faisant
l'objet du premier appel intercalaire, les critères relatifs
à l'établissement des zones contributives et de leurs coeffi-
cients ainsi que le tableau de répartition des contributions
individuelles. Les propriétaires concernés ont également été
avisés personnellement.

   A.________, B.________ et C.________ sont coproprié-
taires des parcelles nos 4871, 4873, 8993, 14194 et 14298 du
registre foncier de la Commune de Sierre, se trouvant dans
les zones I et III du périmètre d'appel. L'opposition et le
recours qu'ils ont formés avec les époux D.________,
S.________ et R.________, tous également propriétaires ou
copropriétaires de parcelles comprises dans le périmètre de
contribution, ont été écartés par la Commune de Sierre le 2
avril 1996 et par le Conseil d'Etat valaisan le 10 février
1999.

   D.- Statuant le 18 juin 1999, la Cour de droit pu-
blic du Tribunal cantonal du canton du Valais (ci-après, le
Tribunal cantonal) a partiellement admis le recours des pro-
priétaires concernés contre la décision du Conseil d'Etat du
10 février 1999 en tant qu'il émanait de R.________, des
époux A.________ ainsi que de S.________ et renvoyé, en ce
qui les concerne, l'affaire à la commune de Sierre pour nou-
velles décisions dans le sens des considérants; il a rejeté
pour le surplus le recours. Il a en particulier écarté les
conclusions principales tendant à faire constater la nullité
du plan de route et, partant, de l'appel à contributions. Il
a rejeté les conclusions en annulation et en réforme après
avoir relevé la nécessité de remplacer le chemin agricole
goudronné existant par un accès susceptible d'absorber le
trafic induit par les biens-fonds classés en zone de cons-

truction mixte, avec une densité relativement élevée pour des
constructions destinées à l'industrie, à l'artisanat et au
logement. Il a considéré que le taux de contribution de 60%
mis à la charge des propriétaires du périmètre d'appel ne
violait pas l'art. 76 de la loi valaisanne sur les routes du
3 septembre 1965 (LR), même s'il était fixé à son maximum, et
assimilé les routes communales des Lacustres et de Potence à
des routes de transit, dont le taux maximal est de 60%.

   La Commune de Sierre a adressé aux propriétaires
concernés sa décision relative au deuxième appel intercalaire
le 15 mai 1996 et un appel égalisateur final le 24 février
1997, la participation finale des copropriétaires des par-
celles nos 4871, 4873, 8993, 14194 et 14298 s'élevant à
256'319.10 fr.

   E.- Agissant par la voie du recours de droit public
pour violation des art. 4 et 22ter aCst., A.________,
B.________ et C.________ demandent au Tribunal fédéral d'an-
nuler l'arrêt du Tribunal cantonal du 18 juin 1999, avec
suite de frais et dépens. Selon eux, l'autorité intimée
aurait commis un déni de justice formel en n'examinant pas la
situation particulière de leurs biens-fonds au regard des
avantages que leur procureraient les nouvelles dessertes com-
munales. Elle aurait retenu à tort que leurs parcelles reti-
raient un avantage économique appréciable de la construction
de la route des Lacustres et qu'il convenait de les maintenir
dans le périmètre de plus-value. Elle aurait fait preuve
d'arbitraire en confirmant la décision de la Commune de
Sierre de fixer la contribution due par les propriétaires au
maximum prévu par la législation cantonale. Elle aurait en
outre violé leur droit à l'égalité de traitement en classant
leurs terrains dans la même zone que d'autres parcelles qui
ne disposaient pas d'un accès suffisant auparavant. La divi-
sion de leurs terrains en deux zones de taxation ne repose-
rait sur aucun motif objectif et serait contraire au principe

de l'équivalence. Dans une motivation subsidiaire, les recou-
rants reprochent enfin à l'autorité intimée d'avoir fait
preuve d'arbitraire en refusant de constater la nullité de la
procédure ayant abouti à l'aménagement routier.

   La Commune de Sierre et le Conseil d'Etat concluent
au rejet du recours. Le Tribunal cantonal a renoncé à se dé-
terminer.

   F.- Par ordonnance du 27 octobre 1999, le Président
de la Ie Cour de droit public a rejeté la demande des recou-
rants tendant à la suspension de la procédure jusqu'à droit
connu sur la nouvelle décision que l'autorité communale est
appelée à prendre à propos de R.________, d'une part, et des
époux A.________, d'autre part.

         C o n s i d é r a n t   e n   d r o i t :

   1.- Le Tribunal fédéral examine d'office et libre-
ment la recevabilité des recours de droit public dont il est
saisi (ATF 125 I 412 consid. 1a p. 414; 125 II 497 consid. 1a
p. 499; 125 III 461 consid. 2 p. 463 et la jurisprudence ci-
tée).

   a) L'arrêt attaqué est une décision finale à l'égard
des recourants en tant qu'il rejette leurs conclusions et
confirme leur participation financière à la réalisation des
dessertes du quartier de Rossfeld (cf. sur les notions de
décision finale et incidente, ATF 123 I 325 consid. 3b p.
327); le fait que le Tribunal cantonal ait admis les recours
émanant d'autres propriétaires du périmètre d'appel et ren-
voyé la cause les concernant pour nouvelle décision n'y chan-
ge rien. L'arrêt attaqué revêt au demeurant, aussi sur ce
point, le caractère d'une décision finale dans la mesure où

le renvoi a lieu uniquement en vue de son exécution par l'au-
torité inférieure sans que celle-ci ne dispose encore d'une
liberté d'appréciation notable (cf. ATF 120 Ia 369 consid. 1b
p. 372; 116 Ia 41 consid. 1b p. 44, 221 consid. 1d/aa p.
225). Le recours est donc recevable au regard de l'art. 87
OJ, dans sa nouvelle teneur au 1er mars 2000 (cf. RO 2000,
p. 417).

   b) Déposé en temps utile contre une décision prise
en dernière instance cantonale, qui ne peut être attaquée que
par la voie du recours de droit public (cf. ATF 112 Ib 235;
ZBl 96/1995 p. 231 consid. 1a, p. 431 consid. 1) et qui tou-
che les recourants dans leurs intérêts juridiquement proté-
gés, le présent recours répond aux autres exigences des art.
84 ss OJ, de sorte qu'il convient d'entrer en matière sur le
fond.

   2.- La situation de fait ressort suffisamment clai-
rement des explications fournies par les recourants et des
pièces du dossier pour que le Tribunal fédéral se prononce en
connaissance de cause, de sorte qu'il ne se justifie pas de
donner suite à la demande d'inspection locale présentée par
ces derniers (ATF 123 II 248 consid. 2a; 122 II 274 consid.
1d p. 279).

   3.- Dans une argumentation subsidiaire qu'il con-
vient d'examiner en premier lieu, les recourants reprochent
au Tribunal cantonal de ne pas avoir constaté la nullité de
la procédure d'appel à contribution, nullité qui résulterait
du fait que la modification apportée en février 1993 au plan
de route établi le 17 mars 1976 n'a pas fait l'objet d'une
enquête publique comme le requérait l'art. 42 al. 3 LR.

   a) Selon la jurisprudence, la nullité d'un acte com-
mis en violation de la loi doit résulter ou bien d'une dispo-
sition légale expresse, ou bien du sens et du but de la norme
en question (ATF 122 I 97 consid. 3a/aa p. 98; 119 II 147
consid. 4a p. 155 et les arrêts cités). En d'autres termes,
hormis les cas expressément prévus par la loi, il n'y a lieu
d'admettre la nullité qu'à titre exceptionnel, lorsque les
circonstances sont telles que le système d'annulabilité n'of-
fre manifestement pas la protection nécessaire (cf. ATF 121
III 156 consid. 1). Tel est le cas lorsque le vice dont la
décision est entachée est particulièrement grave, est mani-
feste ou du moins facilement décelable et si, en outre, la
constatation de la nullité ne met pas sérieusement en danger
la sécurité du droit. Des vices de fond n'entraînent qu'à de
rares exceptions la nullité d'une décision; de graves vices
de procédure, ainsi que l'incompétence qualifiée de l'auto-
rité qui a rendu la décision, sont en revanche des motifs de
nullité (ATF 122 I 97 consid. 3a/aa p. 98; 118 Ia 336 consid.
2a p. 340; 116 Ia 215 consid. 2c p. 219; 113 IV 123 consid.
2b p. 124; 104 Ia 172 consid. 2c p. 176/177; Archives 65 p.
918 consid. 2; Archives 56 p. 636 consid. 2; RDAT 1996 I n°
49 p. 137 consid. 5a; RDAT 1996 II n° 5 p. 18 consid. 3 et
les références citées). Selon la jurisprudence, l'absence de
mise à l'enquête publique d'un projet ou d'une modification
essentielle d'un projet autorisé n'entraîne qu'exceptionnel-
lement la nullité de l'autorisation de construire lorsque le
bénéficiaire de celle-ci en a déjà fait usage de bonne foi
(ATF 99 Ia 126 consid. 4a p. 135; ZBl 81/1980 p. 24 consid.
5a p. 29).

   b) La question de savoir si le raccordement de la
route des Lacustres à la route cantonale T9, au lieu de la
place de rebroussement initialement prévue dans le plan de
route du 17 mars 1976, constitue une modification de peu
d'importance de ce plan, autorisant une dispense d'enquête
aux conditions fixées à l'art. 42 al. 3 LR, peut rester in-

décise; supposé établi, le vice de procédure n'entraînerait
la nullité que des seuls éléments modifiés du plan de route
et non la nullité de celui-ci dans son ensemble ou de la pro-
cédure d'appel à contribution (cf. ATF 116 Ia 207 consid. 3b
p. 211; 111 Ia 129 consid. 3c p. 130/131; 107 Ia 331 consid.
1b p. 334 et la jurisprudence citée). Or, les travaux concer-
nés touchent un secteur du périmètre d'appel à plus-value si-
tué à l'opposé des parcelles des recourants et ne justifie-
raient dès lors pas une appréciation différente de l'avantage
que ces derniers retirent des ouvrages pour lesquels ils sont
appelés à contribution. Les conditions pour conclure à la
nullité de la procédure d'appel à contribution ne sont dès
lors pas réalisées. On observera au demeurant que la modifi-
cation apportée au plan de route est favorable aux recourants
puisqu'elle permet de traiter la route des Lacustres comme
une route de transit, au sens de l'art. 76 al. 2 let. b LR,
et non plus comme une route sans issue à laquelle les pro-
priétaires peuvent être appelés à contribution à raison de
75% de ses coûts (art. 76 al. 2 let. c LR).

   Le moyen tiré de la nullité de la décision de répar-
tition est donc mal fondé.

   4.- a) Selon l'art. 70 LR, les propriétaires des im-
meubles auxquels la construction, la correction ou la réfec-
tion d'une voie publique cantonale ou communale et de ses an-
nexes confèrent une plus-value peuvent être appelés à contri-
buer aux frais de l'oeuvre proportionnellement aux avantages
qu'ils en retirent et dans les limites fixées à l'art. 76 LR.
Cette dernière disposition précise que lorsque l'appel à con-
tribution est effectué par une commune, l'ensemble des con-
tributions à la charge des propriétaires ne peut excéder 60%
du coût des travaux déterminant la plus-value, pour les rou-
tes de transit communales (art. 76 al. 2 let. b LR), et 75%
pour les routes communales sans issue (art. 76 al. 2 let. c
LR); dans les limites de la plus-value et des maxima, la con-

tribution est fixée compte tenu de l'intérêt public plus ou
moins prononcé de l'oeuvre (art. 76 al. 3 LR); les frais
d'entretien sont exclusivement à la charge de la corporation
publique (art. 76 al. 4 LR).

   A teneur de l'art. 14 al. 1 du Décret du 15 novembre
1988 concernant la perception des contributions de proprié-
taires fonciers aux frais d'équipements et aux frais d'autres
ouvrages publics (DCPF), le montant de la contribution est
déterminé dans les limites de la loi, compte tenu de l'impor-
tance des avantages économiques particuliers dont bénéficient
les propriétaires intéressés et des exigences de l'égalité de
traitement entre les personnes tenues à contribuer. Les in-
convénients causés par l'oeuvre doivent être équitablement
pris en considération, dans la mesure où ils n'ont pas été
indemnisés dans la procédure d'expropriation. Les contribu-
tions des propriétaires fonciers sont, en règle générale,
déterminées d'après les possibilités d'utilisation des immeu-
bles à la construction selon le droit en vigueur, ainsi que
d'après les conditions locales (art. 14 al. 2 DCPF).

   Selon l'art. 16 al. 1 DCPF, les éléments de calcul
du montant de la contribution particulière sont notamment la
surface du bien-fonds (let. a), la valeur cadastrale des im-
meubles (let. b), l'indice d'utilisation (let. c) et l'appar-
tenance à une zone contributive (let. d). L'autorité compé-
tente peut appliquer séparément les critères de détermina-
tion, les cumuler ou en établir d'autres, afin de garantir
une répartition équitable tenant compte de l'avantage retiré
(art. 16 al. 2 DCPF).

   b) En l'espèce, les recourants ne discutent pas la
base légale de l'appel à contribution dont ils font l'objet.
Ils prétendent en revanche que leurs parcelles ne retire-
raient aucun avantage de l'amélioration du réseau routier
litigieux et reprochent à l'autorité intimée d'avoir tenu ce

fait pour établi sans en indiquer les raisons, en violation
de l'obligation que lui fait l'art. 4 aCst. de motiver ses
décisions.

   aa) Selon la jurisprudence rendue en application de
l'art. 4 aCst. (cf. aujourd'hui, l'art. 29 al. 1 Cst.), une
autorité cantonale de recours commet un déni de justice for-
mel si elle omet de statuer sur une conclusion du recours
dont elle est saisie alors qu'elle est compétente pour le
faire (ATF 117 Ia 116 consid. 3a p. 117/118 et les arrêts ci-
tés; cf. aussi ZBl 96/1995 p. 174 consid. 2 p. 175). En ou-
tre, le droit d'être entendu découlant de l'art. 4 aCst. (cf.
aujourd'hui, l'art. 29 al. 2 Cst.) impose à l'autorité de ju-
gement l'obligation de motiver ses décisions afin que le jus-
ticiable puisse les comprendre et exercer ses droits de re-
cours à bon escient (ATF 125 II 369 consid. 2c p. 372). Pour
satisfaire cette exigence, il suffit que celle-ci mentionne
au moins brièvement les motifs qui l'ont guidée et sur les-
quels elle a fondé sa décision. Elle n'a pas l'obligation
d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et
griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se
limiter à ceux qui, sans arbitraire, peuvent être tenus pour
pertinents (ATF 124 V 180 consid. 1a p. 181; 121 I 54 consid.
2c p. 57 et les arrêts cités).

   bb) En l'occurrence, l'autorité intimée n'a pas cité
concrètement les avantages que les parcelles des recourants
retiraient de la réalisation des dessertes litigieuses; ces
derniers n'ont cependant pas expressément contesté ce point
dans leur recours au Tribunal cantonal, mais se sont bornés à
critiquer le taux de participation mis à la charge des pro-
priétaires du périmètre et les critères de répartition choi-
sis par la Commission d'experts. Ils ne prétendent par ail-
leurs pas que le Tribunal cantonal aurait dû examiner d'of-
fice cette question, de sorte que l'on ne saurait lui repro-
cher d'avoir commis un déni de justice en tenant ce fait pour

établi sans en indiquer les raisons. L'autorité intimée a de
toute manière satisfait à son obligation de motivation; elle
a en effet relevé que les tronçons de routes servaient avant
tout à la desserte des immeubles classés dans le périmètre
d'appel et qu'ils favorisaient les intérêts particuliers des
bordiers plutôt que les intérêts généraux de la collectivité;
elle a également constaté que le chemin agricole goudronné
préexistant à la route de Potence n'aurait pu suffire à
absorber l'ensemble du trafic du quartier de Rossfeld ouest,
après l'achèvement de toutes les constructions qu'il est ap-
pelé à recevoir selon la planification locale. Elle a donc
implicitement admis que les recourants retiraient des ou-
vrages litigieux un avantage particulier justifiant leur
appel à contribution. Ces derniers ne s'y sont d'ailleurs pas
trompés puisqu'ils attaquent précisément cette motivation.

   Le recours doit dès lors être rejeté en tant qu'il
porte sur un éventuel déni de justice formel.

   cc) Avant la réalisation de la route de Potence, les
parcelles des recourants et des autres propriétaires du péri-
mètre étaient reliées à la route cantonale T9 par un chemin
agricole goudronné. Cette desserte ne constituait manifeste-
ment pas un équipement suffisant pour les activités tolérées
dans une zone mixte ouverte à la construction d'immeubles
commerciaux et artisanaux. En l'absence de toute disposition
légale définissant les travaux de plus-value entrant dans le
calcul de la contribution (sous réserve de l'exclusion des
frais d'entretien, art. 76 al. 4 LR), l'autorité intimée n'a
pas fait preuve d'arbitraire en admettant que la réalisation
de la route de Potence, en lieu et place de l'ancien chemin
agricole, apportait une plus-value aux immeubles riverains
dont font partie les parcelles des recourants (ATF 98 Ia 169
consid. 4a p. 173; arrêt non publié du 4 décembre 1995 dans
la cause C. contre Commune de Charrat, consid. 5c; RDAT 1998
II n° 29 p. 101 consid. 6; Jean Quinodoz, Taxes et contribu-

tions de plus-value pour la construction de routes, d'ins-
tallations d'approvisionnement en eau et d'épuration des eaux
usées, RVJ 1971 p. 340; Christian Lindenmann, Beiträge und
Gebühren für die Erschliessung nach zürcherischem Planungs-
und Baurecht, thèse Zurich 1989, p. 65). Par conséquent, le
grief que ces derniers déduisent de l'absence d'avantages
retirés des travaux litigieux pour justifier l'exclusion du
périmètre d'appel n'est pas fondé.

   c) Les recourants tiennent pour excessif le taux de
participation aux frais des dessertes mis à la charge des
propriétaires riverains.

   Selon l'art. 76 al. 3 LR, la contribution est fixée
compte tenu de l'intérêt public plus ou moins prononcé de
l'oeuvre, dans les limites de la plus-value et des maxima
fixées à l'alinéa précédent. Cette conception est conforme à
l'opinion de la doctrine selon laquelle la part incombant aux
propriétaires dépend de la relation entre la somme des avan-
tages de l'oeuvre pour la collectivité publique elle-même et
celle des avantages particuliers qu'elle présente plus spé-
cialement pour les propriétaires bénéficiaires (cf. German
Mathier, Mehrwertsbeiträge an die Kosten öffentlicher
Strassen, Berne 1974, p. 94; Alexander Ruch, Die Bedeutung
des Sondervorteils im Recht der Erschliessungsbeiträge, ZBl
97/1996 p. 539; René Reitter, Les contributions d'équipement,
plus particulièrement en droit neuchâtelois, thèse Neuchâtel
1986, p. 86). La route des Lacustres est une route de transit
au sens de l'art. 76 al. 2 let. b LR dès lors qu'elle est re-
liée à la route cantonale T9 et se prolonge vers le centre de
la localité; cette disposition fixe la participation maximale
des propriétaires à 60% du coût des travaux déterminant la
plus-value pour cette catégorie de route lorsque, comme en
l'espèce, l'appel à contribution émane d'une commune.

   En l'occurrence, les recourants ne contestent pas le
fait que malgré sa liaison avec le route cantonale T9, la
route des Lacustres ne présenterait qu'une attractivité ré-
duite pour le trafic de transit en raison de la configuration
des lieux et des mesures de modération du trafic qu'il est
prévu de réaliser sur cette artère. S'agissant ainsi d'un ou-
vrage destiné en priorité à la desserte d'un quartier indus-
triel et ne présentant pas d'intérêt particulier pour les au-
tres usagers qui désireraient se rendre dans le centre de la
localité, la Commune de Sierre n'a pas versé dans l'arbitrai-
re en fixant la contribution des propriétaires du périmètre
au taux maximum prévu par la loi.

   d) Les recourants se plaignent des critères choisis
pour délimiter les zones contributives et déterminer les
avantages particuliers recueillis par chacun des propriétai-
res. Ils reprochent à l'autorité intimée d'avoir méconnu leur
droit à l'égalité de traitement et le principe de l'équiva-
lence et tiennent la division de leur parcelle dans deux
zones différentes pour arbitraire.

   aa) Il n'est pas contesté que la contribution récla-
mée aux recourants en application de l'art. 70 LR est une
charge de préférence (ATF 110 Ia 205 consid. 3c p. 309; 102
Ia 46 consid. 1 p. 47; 98 Ia 169 consid. 2 p. 171/172; arrêt
du 14 octobre 1985 paru à la RVJ 1986 p. 50 consid. 3b p. 52;
sur cette notion, cf. ATF 122 I 61 consid. 3b p. 67 et les
arrêts cités). Une telle contribution doit être calculée
d'après la dépense à couvrir et mise à la charge de celui qui
profite des installations réalisées, dans une proportion cor-
respondant à l'importance des avantages économiques particu-
liers dont il bénéficie (ATF 122 I 305 consid. 4b p. 309). Le
principe de l'équivalence, auquel est notamment soumise cette
contribution, exige que le montant de cette dernière soit en
rapport avec la valeur objective de la prestation fournie par
la collectivité publique et reste dans des limites raisonna-

bles (cf. ATF 122 I 279 consid. 6c p. 289 et la jurisprudence
citée). La valeur de la prestation se mesure soit à son uti-
lité pour le contribuable, soit à son coût par rapport à
l'ensemble des dépenses de l'activité en cause (ATF 120 Ia
171 consid. 2a p. 174 et les arrêts cités). Par ailleurs,
lorsque - comme en l'espèce - la prestation fournie par la
collectivité publique a une valeur commerciale (Handelswert),
il n'est pas nécessaire que le montant précis de la contri-
bution soit fixé dans une base légale, le principe de l'équi-
valence permettant d'en contrôler le calcul (cf. ATF 121 I
230 consid. 3g/aa p. 238 et les références citées).

   L'avantage économique retiré par chaque bénéficiaire
de la réalisation ou de la réfection d'une route est souvent
difficile, voire impossible à déterminer en pratique. Pour
cette raison, la jurisprudence rendue en application de
l'art. 4 aCst. a admis que les contributions d'équipement
soient aménagées de manière schématique et tiennent compte de
normes fondées sur des situations moyennes (ATF 122 I 61
consid. 3b p. 67; 110 Ia 205 consid. 4c p. 209; 109 Ia 325
consid. 5/6 p. 328; 106 Ia 241 consid. 3b et 4d p. 244 et
247; cf. arrêt du 29 mai 1997 in RDAF 1999 I p. 94 consid. 3a
p. 97/98). La taxe litigieuse doit toutefois respecter les
principes de l'égalité de traitement et de l'interdiction de
l'arbitraire (ATF 109 Ia 325 consid. 4 p. 327; arrêt du 10
juillet 1997 publié in DEP 1998 p. 759 consid. 3a). Ceux-ci
sont violés lorsque le législateur adopte une réglementation
qui ne se fonde sur aucun motif sérieux et objectif au regard
de la situation de fait à réglementer, qui procède à des dis-
tinctions dépourvues de justification raisonnable ou qui, au
contraire, omet de faire des distinctions qui s'imposent au
vu des circonstances (cf. ATF 125 I 1 consid. 2b/aa p. 4, 166
consid. 2a in fine p. 168, 173 consid. 6b p. 178 et les ar-
rêts cités). Dans ces limites, le législateur dispose d'un
large pouvoir d'appréciation que les autorités judiciaires
doivent respecter en n'intervenant que si les distinctions

effectuées sont insoutenables (ATF 123 I 1 consid. 6a p. 7;
121 I 102 consid. 4a p. 104; cf. ATF 109 Ia 325 consid. 4 p.
327/328).

   bb) A teneur de l'art. 17 DCPF, la part de contri-
bution est fixée en classant les divers biens-fonds et sec-
tions de terrains compris dans le périmètre en différentes
zones (al. 1). Lors de l'établissement des zones contribu-
tives, l'autorité compétente tiendra compte des critères
d'évaluation, pour autant qu'ils s'avèrent importants dans le
cas particulier. L'existence d'autres accès suffisants doit
être prise en considération (al. 2). Pour la contribution des
propriétaires à des ouvrages routiers, on peut de plus tenir
compte notamment de la longueur du tronçon desservant l'im-
meuble (al. 3 let. a), de la longueur de l'immeuble contigu à
l'oeuvre (al. 3 let. b) et de l'éloignement de l'immeuble par
rapport à la route (al. 3 let. c).

   L'art. 18 al. 1 DCPF prévoit que si, en raison de
circonstances particulières, les règles de calcul précédentes
devaient conduire, dans un cas d'espèce, à un résultat iné-
quitable, l'autorité compétente réduit ou augmente de façon
appropriée la contribution. L'existence de circonstances par-
ticulières est admise notamment lorsque l'utilisation légale-
ment admissible du terrain ne pourrait se concrétiser pour
des motifs de protection des sites ou du paysage ou pour
d'autres raisons objectives (let. a) ou lorsque, par le biais
d'une dérogation ou pour d'autres motifs, l'immeuble est uti-
lisé ou peut être utilisé pour la réalisation d'une construc-
tion ou d'une installation plus importante que celle résul-
tant du régime ordinaire des constructions (let. b).

   cc) En l'occurrence, la Commission d'experts a déli-
mité le périmètre d'appel en quatre zones contributives selon
la proximité des parcelles par rapport aux ouvrages réalisés,
avec un correctif consistant à déclasser les parcelles ayant

déjà participé financièrement à la réalisation de l'équipe-
ment du réseau de "Glarier-Potence".

   La distance des biens-fonds par rapport à l'ouvrage
constitue un critère prévu par la loi (cf. art. 17 al. 3 let.
c CDPF) et reconnu en règle générale comme approprié pour ap-
précier l'avantage économique particulier retiré de la réali-
sation d'une route, notamment lorsque les parcelles considé-
rées sont situées, comme en l'espèce, dans une zone offrant
des possibilités de construire identiques (cf. ATF 98 Ia 169;
Lindenmann, op. cit., p. 112; Reitter, op. cit., p. 94). La
Commission d'experts n'a toutefois pas délimité les zones
contributives en fonction de la route à laquelle les parcel-
les étaient directement rattachées, mais par rapport à l'en-
semble des dessertes du périmètre. Une telle manière de pro-
céder n'est pas nécessairement arbitraire; la doctrine et la
jurisprudence admettent en effet qu'un seul périmètre d'appel
soit délimité pour deux ou plusieurs objets lorsqu'il existe
entre eux une unité naturelle ou un lien objectif certain
(cf. Alfred Bührer, Der Mehrwertsbeitrag an öffentlich-recht-
liche Erschliessungsbauwerke unter besonderer Berücksichti-
gung des schaffhausischen Rechts, thèse Zurich 1970, p. 64;
Werner Otzenberger, Die Grundeigentümerbeiträge im Kanton
Luzern, thèse Berne 1975, p. 52; cf. arrêt non publié du 3
septembre 1985 dans la cause H. contre Commune de Pontresina,
consid. 4). La Commission d'experts pouvait ainsi, sans excé-
der le pouvoir d'appréciation étendu qui lui est reconnu dans
ce domaine, retenir l'existence d'un tel lien en l'espèce,
même si la route des Lacustres ne présente effectivement
qu'une utilité réduite pour les parcelles des recourants.
Elle a d'ailleurs partiellement tenu compte de cette situa-
tion en classant une partie de celles-ci dans la zone contri-
butive III. Sur ce point, l'arrêt attaqué, qui confirme la
solution de la Commission d'experts, échappe au grief d'ar-
bitraire.

   Selon les documents soumis à l'enquête publique et
communiqués aux propriétaires concernés, la zone III comprend
les parcelles situées à l'arrière de la zone I, au pied du
talus de la route cantonale; dans les faits, cette zone
s'étend aux terrains situés en contrebas de la route canto-
nale T9 sur une profondeur de quarante mètres, sans égard
aux limites parcellaires; cela a pour conséquence qu'une
partie des parcelles des recourantes est classée en zone I
alors même qu'elles n'avoisinent pas la route des Lacustres.
La Commission d'experts s'est donc écartée sans motif objec-
tif des principes régissant la délimitation des zones contri-
butives qu'elle avait elle-même fixés. Sur ce point, la solu-
tion retenue et confirmée sur recours par le Tribunal canto-
nal n'est pas soutenable et doit être corrigée en classant
les parcelles des recourants dans leur intégralité en zone
III.

   dd) Ces derniers reprochent enfin à l'autorité inti-
mée d'avoir ignoré le fait que leurs parcelles bénéficiaient
déjà d'un accès indirect à la route cantonale avant les tra-
vaux. Dans la mesure toutefois où les autres parcelles in-
clues dans le périmètre d'appel bénéficiaient également d'un
tel accès, la Commission d'experts pouvait, sans excéder son
pouvoir d'appréciation, faire abstraction de cette circons-
tance dans la délimitation des zones contributives. En con-
firmant ce point de vue, le Tribunal cantonal n'est pas tombé
dans l'arbitraire. Pour le surplus, les recourants ne sont
pas fondés à se plaindre d'une inégalité de traitement par
rapport à la parcelle de R.________ dans la mesure où, con-
trairement à celle-ci, leurs parcelles ne disposent d'aucun
accès direct à la route cantonale (cf. sur le droit à l'éga-
lité de traitement, ATF 125 I 161 consid. 3a p. 163).

   e) Le recours doit ainsi être admis, dans la mesure
où il est recevable, l'arrêt attaqué étant partiellement an-
nulé et le dossier replacé dans la situation où il se trou-

vait avant l'arrêt du 18 juin 1999 (Walter Kälin, Das Ver-
fahren der staatsrechtlichen Beschwerde, Berne 1994, p. 399).

   5.- Vu l'issue du recours, il n'y a pas lieu de per-
cevoir de frais (art. 156 al. 2 OJ). Les recourants, qui
agissent seuls, ne sauraient prétendre à des dépens dans la
mesure où ils n'établissent pas avoir engagé des frais pour
la procédure de recours devant le Tribunal fédéral (cf. ATF
113 Ib 353 consid. 6b p. 356/357).

                       Par ces motifs,

           l e   T r i b u n a l   f é d é r a l :

   1. Admet le recours dans la mesure où il est receva-
ble et annule l'arrêt attaqué en tant qu'il concerne les re-
courants.

   2. Dit qu'il n'est pas perçu d'émolument judiciaire,
ni alloué de dépens.

   3. Communique le présent arrêt en copie aux parties,
au Conseil d'Etat et à la Cour de droit public du Tribunal
cantonal du canton du Valais.

                         __________

Lausanne, le 10 avril 2000
PMN/col
            Au nom de la Ie Cour de droit public
                 du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
            Le Président,           Le Greffier,