Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1P.503/1999
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1P.503/1999

        Ie   C O U R   D E   D R O I T   P U B L I C
       **********************************************

                       10 janvier 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Jacot-Guillarmod et Favre. Greffier: M. Jomini.

           Statuant sur le recours de droit public
                          formé par

A.________, à Onex,

                           contre

l'arrêt rendu le 22 juin 1999 par le Tribunal administratif
de la République et canton de Genève, statuant sur une de-
mande de révision présentée par le recourant;

            (procédure administrative cantonale)

          Vu les pièces du dossier d'où ressortent
                  les  f a i t s  suivants:

   A.-  A.________, domicilié dans le canton de Genève,
a demandé en 1997 à l'administration de ce canton une aide
financière pour lui permettre de suivre les cours de la fa-
culté de droit de l'Université de Fribourg. La Commission des
allocations spéciales, instituée par la loi cantonale gene-
voise sur l'encouragement aux études, a statué sur cette de-
mande le 5 janvier 1998, en proposant d'accorder un prêt à
certaines conditions, pour l'année académique 1997/1998.
A.________ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal
administratif de la République et canton de Genève (ci-après:
le Tribunal administratif). Ce recours a été rejeté par un
arrêt rendu le 1er septembre 1998.

   Le juge délégué à l'instruction de cette affaire,
au sein du Tribunal administratif, était Mme le Juge
X.________, laquelle avait entendu le recourant lors de
l'audience de comparution personnelle du 26 juin 1998.

   B.-  Le 26 octobre 1998, A.________ a adressé au
Tribunal administratif une "demande de reconsidération" de
l'arrêt du 1er septembre 1998.

   Invité par le Tribunal administratif à répondre, le
Service cantonal des allocations d'études et d'apprentissage
(SAEA) s'est déterminé le 16 novembre 1998. Le même jour,
A.________ a déposé un mémoire complémentaire. Un nouveau
délai de déterminations a été fixé au service précité, qui en
a demandé la prolongation le 5 janvier 1999; son mémoire a
été déposé le 19 janvier 1999.

   Le Tribunal administratif a statué sur la "demande
de reconsidération", traitée comme une demande de révision,

par un arrêt rendu le 2 février 1999. Il l'a déclarée irre-
cevable, aucun motif de révision n'ayant été clairement invo-
qué par A.________. Mme le Juge X.________ était membre de la
cour qui a pris cette décision. L'arrêt du 2 février 1999 a
été communiqué aux parties le 5 février 1999.

   C.-  Par lettre du 1er février 1999, mise à la poste
le jour même, A.________ a demandé à Mme le Juge X.________
de se récuser dans la procédure concernant sa demande d'aide
financière. Il reprochait à ce magistrat un manque
d'impartialité, en invoquant l'attitude adoptée à son égard
lors de l'audience de comparution personnelle du 26 juin 1998
et les conditions de prolongation du dernier délai fixé au
Service cantonal des allocations d'études et d'apprentissage
(prolongation accordée de façon prétendument irrégulière le 5
janvier 1999).

   La demande de récusation de Mme le Juge X.________ a
été simultanément transmise au Président du Tribunal adminis-
tratif.

   Ces deux lettres ont été reçues au Tribunal adminis-
tratif le 2 février 1999. Il n'en a pas été fait mention dans
l'arrêt rendu ce même jour.

   Le 5 février 1999, le Président du Tribunal adminis-
tratif a écrit à A.________, en répondant à la demande de ré-
cusation dans les termes suivants: "Lorsque le Tribunal admi-
nistratif statuera sur les mérites de votre recours, il le
fera dans une composition qui ne comprendra pas Mme
X.________".

   D.-  Le 8 mars 1999, A.________ a adressé au Tribu-
nal administratif une "demande en annulation" de l'arrêt du 2
février 1999. Il y a retracé les différentes étapes de la

procédure administrative et judiciaire depuis le dépôt de sa
demande d'aide financière, en présentant divers griefs, no-
tamment à l'encontre d'actes d'instruction pris par Mme le
Juge X.________.

   Le Tribunal administratif - dans une composition ne
comprenant pas le magistrat précité - a statué sur cette "de-
mande en annulation" par un arrêt rendu le 22 juin 1999. Il a
traité cette demande comme une demande de révision de l'arrêt
du 2 février 1999 et il l'a déclarée irrecevable. Il s'est
prononcé exclusivement sur la question de la récusation de
Mme le Juge X.________, en considérant en substance que la
requête de A.________ à cet égard était tardive.

   E.-  Agissant par la voie du recours de droit pu-
blic, A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler
l'arrêt du 22 juin 1999, afin que le Tribunal administratif
statue à nouveau en donnant suite à sa demande de récusation,
en ordonnant une nouvelle comparution des parties et en pre-
nant en considération l'ensemble de ses griefs. Il se plaint
de la violation de nombreuses garanties formelles du droit
constitutionnel (art. 4 et 58 aCst., art. 6 par. 1 CEDH) et
du droit cantonal de procédure.

   Invité à répondre au recours, le Tribunal adminis-
tratif se réfère simplement à son arrêt.

   F.-  Le recourant demande l'assistance judiciaire
(cf. art. 152 OJ). Il requiert en outre d'être admis à compa-
raître et à s'exprimer lors d'une audience publique du Tribu-
nal fédéral.

          C o n s i d é r a n t   e n   d r o i t :

   1.-  Le Tribunal fédéral statue en l'espèce par voie
de circulation, sans audience en délibération, conformément à
la règle de l'art. 36b OJ applicable en cas d'unanimité des
membres de la Cour. Il n'y a aucun motif d'y déroger.

   2.-  Seul l'arrêt rendu le 22 juin 1999 par le Tri-
bunal administratif fait l'objet du recours de droit public.
Les deux arrêts précédents rendus dans la même cause, le 1er
septembre 1998 et le 2 février 1999, ne peuvent pas être re-
vus. Ils n'ont au reste pas été attaqués devant le Tribunal
fédéral dans le délai légal de trente jours dès leur commu-
nication (art. 89 al. 1 OJ).

   3.-  Le recourant se plaint d'un déni de justice
formel car la plupart de ses griefs, concernant le fond de
l'affaire ou la procédure suivie par les autorités compéten-
tes aux différents stades, n'ont pas été examinés dans l'ar-
rêt attaqué. Il fait valoir que son mémoire, à l'appui de sa
"demande en annulation", remplissait les conditions formelles
énoncées aux art. 57 ss de la loi cantonale genevoise sur la
procédure administrative (LPA) pour la recevabilité des re-
cours au Tribunal administratif.

   Dans l'arrêt attaqué, le Tribunal administratif,
saisi d'une "demande en annulation" - notion inconnue de la
législation cantonale sur la juridiction administrative - a
examiné la recevabilité de cet acte au regard des disposi-
tions régissant la révision (art. 80 ss LPA). Il a donc
considéré, implicitement, qu'il n'y avait pas d'autre voie
ouverte devant lui - a fortiori celle du recours, recevable
contre une décision d'une autorité administrative inférieure
- pour remettre en cause un arrêt définitif rendu précédem-

ment dans la même affaire. Cette conclusion est manifestement
juste.

   Le refus de traiter la "demande en annulation" comme
un nouveau recours ne constitue donc pas un déni de justice
formel.

   Le recourant ne prétend par ailleurs pas, au sujet
de ses griefs non évoqués dans la décision attaquée, qu'ils
rempliraient les exigences spéciales de recevabilité prévues
pour la procédure de révision (art. 80 et 81 LPA; cf. consid.
1 de l'arrêt du Tribunal administratif du 2 février 1999).

   4.-  Dans l'arrêt attaqué, le Tribunal administratif
a examiné si la participation de Mme le Juge X.________ à des
décisions précédentes dans cette affaire pouvait justifier
l'entrée en matière sur une demande de révision de l'arrêt du
2 février 1999. Il a cependant conclu, en définitive, qu'au-
cun des arguments de la "demande en annulation" ne représen-
tait un motif de révision, d'où l'irrecevabilité de cette de-
mande.

   Ainsi, le Tribunal administratif s'est implicitement
référé au motif de l'art. 80 let. e LPA, qui prévoit qu'il y
a lieu à révision lorsque, dans une affaire réglée par une
décision définitive, il apparaît que les dispositions sur la
récusation ont été violées. Il a cependant considéré, en
substance, que jusqu'au prononcé de son arrêt du 2 février
1999, le magistrat concerné n'avait pas à se récuser en
l'absence d'une demande présentée en temps utile, conformé-
ment aux prescriptions formelles des art. 96 ss de la loi
cantonale sur l'organisation judiciaire (LOJ). Le Tribunal
administratif a en effet retenu que, si le recourant enten-
dait invoquer l'attitude de ce magistrat lors de l'audience
de comparution personnelle précédant l'arrêt du 1er septembre

1998, il aurait dû le faire au plus tard dans sa demande de
révision de cet arrêt-là; s'il voulait critiquer, sous cet
angle, une prolongation de délai accordée le 5 janvier 1999 à
l'autorité intimée - prolongation dont il admet avoir été
informé déjà le 6 janvier 1999 - il aurait dû le faire dès
qu'il en avait acquis connaissance (art. 96 al. 2 LOJ) et non
pas quelques semaines plus tard (cf., dans la jurisprudence
fédérale, ATF 119 Ia 221 consid. 5a p. 228/229; 119 II 386
consid. 1a p. 388; cf. aussi 122 I 97 consid. 3a/aa p. 99 in
fine).

   Le recourant développe différents arguments au sujet
de la prétendue partialité du magistrat concerné, mais il ne
discute pas l'interprétation des règles formelles applicables
à une demande de récusation. En particulier, il ne cherche
pas à démontrer qu'il n'aurait pas agi de manière tardive,
voire qu'il aurait été empêché de présenter sa demande de
récusation en temps utile. Or c'est le point décisif pour le
sort de la demande de révision. Dans la procédure du recours
de droit public, l'art. 90 al. 1 let. b OJ requiert un exposé
succinct des droits constitutionnels ou des principes juridi-
ques violés, précisant en quoi consiste la violation; il en
résulte que le Tribunal fédéral n'examine que les griefs pré-
sentés de manière claire et détaillée (cf. ATF 125 I 71
consid. 1c p. 76; 123 III 261 consid. 4a p. 270, 122 I 70
consid. 1c p. 73 et les arrêts cités). Cette condition de
recevabilité n'est, à l'évidence, pas remplie en l'espèce.

   Il importe au demeurant peu, comme cela est exposé
dans l'arrêt attaqué, que le Président du Tribunal adminis-
tratif se soit prononcé en faveur de la récusation de Mme le
Juge X.________ postérieurement à l'arrêt dont la révision
était demandée. Cela ne change rien à l'interprétation des
règles de forme que, selon l'arrêt attaqué, le recourant
aurait dû observer.

   5.-  Il s'ensuit que le recours de droit public est
rejeté, en tant qu'il est recevable.

   Vu la situation financière et professionnelle parti-
culière du recourant, il n'y a pas lieu de percevoir un émo-
lument judiciaire. La demande d'assistance judiciaire devient
ainsi sans objet.

                       Par ces motifs,

           l e   T r i b u n a l   f é d é r a l :

   1. Rejette le recours de droit public, en tant qu'il
est recevable;

   2. Dit qu'il n'est pas perçu d'émolument judiciaire
et déclare sans objet la demande d'assistance judiciaire;

   3. Communique le présent arrêt en copie au recourant
et au Tribunal administratif de la République et canton de
Genève.

Lausanne, le 10 janvier 2000
JIA/col

            Au nom de la Ie Cour de droit public
                 du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
            Le Président,           Le Greffier,