Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1A.278/1999
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1A.278/1999
1P.748/1999

       Ie   C O U R   D E   D R O I T   P U B L I C
      **********************************************

                       17 janvier 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Vice-président du Tribunal fédéral, Aeschlimann, Féraud,
Catenazzi et Favre. Greffier: M. Jomini.

     Statuant sur le recours de droit administratif et
           le recours de droit public formés par

l'Association pour un aménagement rationnel de Saint-Légier
(APAR), le Groupement d'action contre Lémanparc, A.________,
B.________, C.________, D.________, les époux E.________,
les époux F.________, les époux G.________, H.________ et
I.________, tous représentés par Me Jacques Ballenegger et Me
Jacques Haldy, avocats à Lausanne,

                           contre

l'arrêt rendu le 3 novembre 1999 par le Tribunal administra-
tif du canton de Vaud, dans la cause qui oppose les recou-
rants à la Société Coopérative Migros Vaud, à Ecublens, re-
présentée par Me Marc-Henri Chaudet, avocat à Vevey, à la
commune de Saint-Légier-La Chiésaz, représentée par Me
Alexandre Bonnard, avocat à Lausanne, et au Département des
travaux publics, de l'aménagement et des transports (actuel-
lement: Département des infrastructures) du canton de Vaud;

     (plan d'affectation, protection de l'environnement)

          Vu les pièces du dossier d'où ressortent
                  les  f a i t s  suivants:

   A.-  Le conseil communal de la commune de Saint-
Légier-La Chiésaz a adopté le 17 juin 1992 le plan partiel
d'affectation (PPA) intitulé "Au Pré Blanc", destiné princi-
palement à la construction d'un complexe commercial, hôte-
lier, sportif et de loisirs sur une parcelle (n° 1824, de
près de 6 ha) appartenant alors à une société immobilière du
groupe Migros, Lémanparc S.A. (à l'origine: MMM Saint-Légier
S.A.). Ce terrain lui avait été vendu en 1972 par l'Etat de
Vaud; Lémanparc S.A. l'a cédé en 1999 à la Société Coopéra-
tive Migros Vaud. La parcelle n° 1824 est longée à sa limite
nord-est par l'autoroute N9 et sa voie de sortie en direction
de Vevey; à sa limite sud par la route cantonale de Haute-
ville; à sa limite ouest par la route cantonale de Rio-
Gredon; enfin à sa limite nord-est par le chemin du Pré-au-
Blanc.

   Le périmètre du PPA "Au Pré Blanc" comprend encore
quelques parcelles au sud de la route de Hauteville; cette
bande de terrain, qui s'étend jusqu'au chemin des Boulin-
grins, est classée en zone agricole.

   A la suite d'une demande de référendum, l'adoption
du plan partiel d'affectation a été confirmée par l'assemblée
de commune le 6 septembre 1992.

   B.-  La parcelle n° 1824 était jusque là incluse
dans une zone destinée à la construction de locatifs résiden-
tiels, selon un ancien plan communal de 1963; cette zone
n'avait pas été remise en cause après l'arrêté fédéral du 19
mars 1972 instituant des mesures urgentes en matière d'aména-
gement du territoire (AFU). Le plan général d'affectation de
la commune adopté le 13 mai 1983 prévoyait d'insérer cette
parcelle dans la zone agricole, mais le Conseil d'Etat du

canton de Vaud avait refusé d'approuver cette mesure. Le gou-
vernement cantonal avait par ailleurs adopté pour cette par-
celle, le 8 août 1984, une zone réservée visant à empêcher
tout ce qui pourrait "entraver l'établissement d'un plan de
quartier ou d'un plan d'extension fixant une zone d'équipe-
ments d'intérêt régional ou cantonal, pouvant comprendre une
part réservée au commerce, en rapport avec la situation géo-
graphique particulière de la parcelle".

   L'Association pour un aménagement rationnel de
Saint-Légier (APAR) et quelques consorts avaient formé un
recours de droit public contre l'adoption de la zone réser-
vée; le Tribunal fédéral l'a rejeté, dans la mesure où il
était recevable, par un arrêt rendu le 7 juin 1985 (cause
P.738/1984).

   La durée de la zone réservée, initialement de cinq
ans, a été prolongée de trois ans par le Conseil d'Etat, le
19 juillet 1989.

   C.-  Avant la décision du conseil communal du 17
juin 1992, le projet de PPA avait été mis à l'enquête publi-
que, du 2 juin au 3 juillet 1989. Il était accompagné d'un
rapport d'impact, au sens de l'art. 9 al. 2 de la loi fédé-
rale sur la protection de l'environnement (LPE; RS 814.01).
En effet, comme l'ensemble à réaliser sur la parcelle n° 1824
- projet dénommé "Lémanparc" - inclut un centre commercial
(supermarché de 5'900 m2, commerce de produits de bricolage
et de jardinage sur 3'000 m2) et un parking d'une capacité
globale de 1'300 places, dont 1'200 enterrées, pour les
clients des magasins, de l'hôtel et des installations spor-
tives (bassins de baignade intérieur et extérieur, halles
couvertes destinées à la pratique du volley-ball, du badmin-
ton, du patinage, etc.), il est soumis à une étude de l'im-
pact sur l'environnement en vertu de l'art. 1 de l'ordonnance
y relative (OEIE; RS 814.011) et des ch. 11.4 et 80.5 de

l'annexe à cette ordonnance (parcs de stationnement pour plus
de 300 voitures, centres commerciaux d'une surface de vente
supérieure à 5'000 m2).

   Plusieurs centaines d'oppositions ont été déposées
durant l'enquête publique; elles ont été rejetées par le
conseil communal, qui a adopté sans modification le plan
partiel d'affectation, à savoir la réglementation de l'uti-
lisation des différents sous-périmètres selon le plan à
l'échelle 1:1000 et les articles du RPPA (activités hôte-
lières, activités sportives, activités commerciales, zone
agricole, etc.). Le conseil communal, sur la base du préavis
de la municipalité, a cependant pris acte d'une modification
du schéma des circulations qui figurait à titre indicatif sur
le document du plan partiel d'affectation: il est désormais
prévu trois accès au parking souterrain de Lémanparc, au lieu
de deux précédemment, et une amélioration de certains élé-
ments du réseau routier existant desservant directement ce
terrain. Cela implique la création d'une rampe d'accès depuis
la route de Hauteville (au sud), un nouvel aménagement de
l'intersection chemin du Pré-au-Blanc/route de Rio-Gredon, et
un nouveau carrefour à l'endroit où une voie à créer, traver-
sant le périmètre du PPA, débouche sur le chemin des Boulin-
grins. Ce nouveau schéma des circulations avait été proposé
après l'enquête publique par un mandataire de la société
Lémanparc S.A., le bureau Transitec Ingénieurs-Conseils S.A.,
et le service cantonal des routes et autoroutes avait, en
1991, fait part à la municipalité de son accord de principe à
ce sujet.

   D.-  Après le vote de l'assemblée de commune sur le
plan partiel d'affectation, plusieurs opposants au projet
Lémanparc - dont l'Association pour un aménagement rationnel
de Saint-Légier (APAR), le Groupement d'action contre
Lémanparc, A.________, B.________, C.________, D.________,
les époux E.________, les époux F.________, les époux

G.________, H.________ et I.________ (ci-après: l'APAR et
consorts) - ont déposé des requêtes tendant au réexamen de
leurs oppositions par le Conseil d'Etat. La compétence pour
statuer sur ces requêtes ayant entre-temps été conférée au
Département cantonal des travaux publics, de l'aménagement et
des transports (actuellement: Département des infrastructu-
res; ci-après: le département cantonal), celui-ci les a reje-
tées le 10 mars 1994.

   L'APAR et consorts ont recouru contre le rejet de
leurs requêtes auprès du Tribunal administratif cantonal. Par
un arrêt rendu le 12 janvier 1996, celui-ci a admis les re-
cours et annulé les prononcés du département cantonal, lui
renvoyant l'affaire pour nouvelle décision. Il a considéré
que le dossier n'était pas suffisamment complet ou précis sur
certains points, au sujet notamment des objectifs d'aménage-
ment du territoire de la commune et de la région, ainsi qu'au
sujet de l'évaluation des nuisances (bruit et pollution atmo-
sphérique) liées au trafic engendré par le projet Lémanparc.

   E.-  Le département cantonal, ayant repris l'ins-
truction, a reçu des autorités communales un "rapport d'amé-
nagement selon l'art. 26 OAT" daté du 12 décembre 1996. Ce
document, établi conformément à l'art. 26 de l'ordonnance du
2 octobre 1989 sur l'aménagement du territoire (aOAT; RO 1989
p. 1985), donne des indications sur le contenu et les objec-
tifs du plan partiel d'affectation "Au Pré Blanc" ainsi que
sur la coordination régionale en matière d'aménagement du
territoire.

   Egalement au mois de décembre 1996, la société
Lémanparc S.A. a produit un rapport intitulé "PPA Au Pré
Blanc, Etudes techniques complémentaires", en deux parties
(circulation; protection contre le bruit et pollution de
l'air), rédigé par le bureau d'ingénieurs Transitec et par un
autre mandataire, la société Ecoscan S.A.

   Le département cantonal a statué à nouveau sur les
requêtes (ou "recours", selon la nouvelle terminologie du
droit cantonal) de l'APAR et consorts par un prononcé du 22
octobre 1997; il les a rejetées. A cette occasion, il a en
outre approuvé le plan partiel d'affectation.

   L'APAR et consorts ont recouru derechef au Tribunal
administratif, en faisant valoir en substance que le périmè-
tre du PPA aurait dû être classé dans une zone non construc-
tible, que les plans des équipements routiers pour le projet
Lémanparc auraient déjà dû être adoptés afin de respecter le
principe de la coordination, que les données fournies par le
promoteur ne permettraient pas d'évaluer correctement les
nuisances de ce complexe (bruit, pollution atmosphérique) et
que, le dossier ayant été complété au cours de la procédure,
une nouvelle enquête publique aurait dû être organisée.

   Le Tribunal administratif a rejeté ces recours par
un arrêt rendu le 3 novembre 1999.

   F.-  Agissant par la voie du recours de droit admi-
nistratif et par celle du recours de droit public (les deux
recours étant présentés dans le même acte), l'APAR et
consorts demandent au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du
Tribunal administratif.

   Dans le cadre du recours de droit administratif, ils
critiquent d'abord le refus d'ordonner une enquête publique
complémentaire, en invoquant l'art. 33 de la loi fédérale sur
l'aménagement du territoire (LAT; RS 700) ainsi que des dis-
positions du droit cantonal. Ils se plaignent ensuite de vio-
lations de la législation fédérale sur la protection de l'en-
vironnement, en relation avec les nuisances du trafic rou-
tier. Ils prétendent en outre que les décisions portant sur
l'adaptation du réseau routier auraient dû être coordonnées
avec la procédure d'adoption du plan partiel d'affectation;

les principes de l'art. 25a LAT auraient dès lors été mécon-
nus. Enfin, ils se plaignent d'une violation de l'art. 24
LAT.

   Dans le cadre du recours de droit public, ils se
plaignent d'une violation du droit d'être entendu, la cour
cantonale ayant refusé une écriture et une pièce qu'ils
avaient produites. Ils reprochent en outre au Conseil d'Etat
un déni de justice, en relation avec la zone réservée ayant
précédé l'adoption du plan d'affectation litigieux. Ils re-
prennent enfin leurs griefs concernant l'absence d'enquête
publique complémentaire.

   La commune de Saint-Légier-La Chiésaz et la Société
Coopérative Migros Vaud concluent au rejet des recours, dans
la mesure où ils sont recevables.

   Le département cantonal a renoncé à répondre aux re-
cours.

   L'Office fédéral de l'environnement, des forêts et
du paysage (OFEFP) a été invité à se déterminer sur le re-
cours de droit administratif. Ses observations ont été com-
muniquées aux parties, qui ont pu s'exprimer à ce sujet.

   L'Office fédéral de l'aménagement du territoire
(actuellement: Office fédéral du développement territorial) a
renoncé à se déterminer.

   G.-  Par ordonnance du 18 janvier 2000, le Président
de la Ie Cour de droit public a admis la requête d'effet sus-
pensif présentée par les recourants en ce sens que les auto-
rités cantonales ont été invitées à ne délivrer aucune auto-
risation de construire dans le périmètre du plan partiel
d'affectation avant la fin de la procédure devant le Tribunal
fédéral.

          C o n s i d é r a n t   e n   d r o i t :

   1.-  Un recours de droit administratif et un recours
de droit public ont été formés contre l'arrêt du Tribunal ad-
ministratif. Comme la voie du recours de droit public est
subsidiaire aux autres moyens de droit (art. 84 al. 2 OJ), il
convient d'examiner en premier lieu la recevabilité du re-
cours de droit administratif (ATF 126 II 377 consid. 1 p.
381).

   a)  En vertu de l'art. 34 al. 3 LAT, seule la voie
du recours de droit public est en principe ouverte, devant le
Tribunal fédéral, contre les décisions cantonales relatives
aux plans d'affectation. La jurisprudence admet cependant
qu'une décision relative à l'adoption d'un plan d'affectation
puisse faire l'objet d'un recours de droit administratif,
lorsque l'application du droit fédéral de la protection de
l'environnement, ou d'autres prescriptions fédérales spécia-
les en matière de protection des biotopes, des forêts, etc.,
est en jeu, notamment quand le plan se rapporte à un projet
concret (ATF 125 II 10 consid. 2a p. 13; 123 II 88 consid. 1a
p. 91, 231 consid. 2 p. 233; 121 II 72 consid. 1b p. 75 et
les arrêts cités).

   Le recours de droit administratif est également re-
cevable contre une décision prise par l'autorité cantonale de
dernière instance quand, pour un projet à réaliser hors de la
zone à bâtir, elle considère comme justifiée l'adoption préa-
lable d'un plan d'affectation spécial modifiant la destina-
tion de la zone, ce qui exclut donc une éventuelle autorisa-
tion dérogatoire selon l'art. 24 LAT (depuis l'entrée en vi-
gueur, le 1er septembre 2000, de la novelle du 20 mars 1998:
selon les art. 24 à 24d LAT). On peut ainsi éluder l'applica-
tion de l'art. 24 LAT. Dans la mesure où la contestation por-
te sur le refus d'appliquer cette disposition, l'art. 34 al.

1 LAT prescrit qu'il faut agir, devant le Tribunal fédéral,
par la voie du recours de droit administratif (ATF 124 II 391
ss; 123 II 289 consid. 1b-c p. 291; 115 Ib 508 consid. 5a/bb
p. 510 et les arrêts cités; cf. aussi ATF 124 II 252 consid.
1 p. 254).

   b)  En l'occurrence, les recourants se plaignent de
violations de la législation fédérale sur la protection de
l'environnement et d'un refus d'appliquer l'art. 24 LAT.
C'est à juste titre qu'ils ont présenté ces griefs dans un
recours de droit administratif. C'est également dans ce cadre
que doivent être examinés les griefs concernant la coordina-
tion entre le plan partiel d'affectation et les plans rou-
tiers visant au réaménagement des voies de desserte (cf.
infra, consid. 4), car ils se rapportent à l'organisation du
trafic et, partant, aux nuisances (pollution de l'air, en
l'occurrence) liées au projet litigieux. Ces questions de
procédure sont dans une relation suffisamment étroite avec
l'application du droit fédéral de la protection de l'environ-
nement et la voie du recours de droit administratif est donc
ouverte à cet égard (cf. ATF 125 II 10 consid. 2a p. 13; 121
II 72 consid. 1b p. 75). Cette solution vaut aussi pour d'au-
tres griefs concernant la procédure d'adoption du plan d'af-
fectation (l'absence d'enquête publique complémentaire après
le dépôt de rapports permettant d'évaluer les nuisances du
projet - cf. infra, consid. 3) et la procédure cantonale de
recours (le refus, par le juge instructeur du Tribunal admi-
nistratif, d'accepter une pièce relative aux émissions de CO2
- cf. infra, consid. 5a).

   c)  Appliquant une norme cantonale - l'art. 37 al. 1
de la loi sur la juridiction et la procédure administratives
(LJPA) - dont la teneur correspond à celle de l'art. 103 let.
a OJ définissant la qualité pour agir par la voie du recours
de droit administratif (cf. art. 33 al. 3 let. a LAT), le
Tribunal administratif a considéré que les recourants

A.________ et C.________, propriétaires de parcelles directe-
ment voisines du périmètre du plan partiel d'affectation li-
tigieux, avaient un intérêt digne de protection à l'annula-
tion ou à la modification de ce plan. Ces deux personnes ont,
manifestement, qualité pour recourir au Tribunal fédéral au
sens de l'art. 103 let. a OJ (ATF 126 II 300 consid. 1c p.
302; 124 II 293 consid. 3a p. 303; 121 II 171 consid. 2b p.
174 et les arrêts cités). Vu l'issue de la cause, il y a lieu
d'entrer en matière sans examiner, au regard de l'art. 103
OJ, la situation des autres recourants.

   2.-  Les recourants soutiennent que la parcelle n°
1824 de l'intimée se trouvait auparavant hors de la zone à
bâtir et qu'on ne pourrait pas y autoriser de constructions
sans respecter les exigences de l'art. 24 LAT. En adoptant un
plan partiel d'affectation permettant la réalisation du pro-
jet Lémanparc sans dérogation selon l'art. 24 LAT, les auto-
rités cantonales auraient violé cette disposition; en outre,
les conditions pour pareille dérogation ne seraient pas rem-
plies.

   a)  En vertu du principe de l'art. 22 al. 2 let. a
LAT, une construction ne peut être autorisée que si elle est
conforme à l'affectation de la zone. L'art. 24 LAT permet de
déroger à ce principe, pour de nouvelles constructions hors
de la zone à bâtir, si leur implantation est imposée par leur
destination et si aucun intérêt prépondérant ne s'y oppose
(sur ce point, le texte de l'art. 24 LAT, selon la novelle du
20 mars 1998 entrée en vigueur le 1er septembre 2000 [RO 2000
p. 2042], correspond à celui de l'ancien art. 24 al. 1 LAT).

   L'application de l'art. 24 LAT est cependant d'em-
blée exclue pour les projets dont les dimensions ou les inci-
dences sur la planification locale ou l'environnement sont si
importantes qu'ils doivent être prévus dans les plans d'amé-
nagement (cf. art. 2 al. 1, 6 ss, 14 ss LAT). Il faut donc en

principe délimiter, dans les plans d'affectation, les zones
nécessaires à la réalisation de ces projets, qu'il s'agisse
de zones à bâtir au sens de l'art. 15 LAT ou d'autres zones
selon l'art. 18 al. 1 LAT (ATF 124 II 252 consid. 3 p. 255,
391 consid. 2a p. 393; 120 Ib 207 consid. 5 p. 212; 119 Ib
439 consid. 4a p. 440 et les arrêts cités). Cette obligation
d'aménager (cf. titre de l'art. 2 LAT) s'applique en règle
générale aux installations importantes soumises à une étude
de l'impact sur l'environnement (ATF 124 II 252 consid. 3 p.
255; 119 Ib 439 consid. 4b p. 441).

   b)  Le projet Lémanparc (complexe commercial, hôte-
lier, sportif et de loisirs) est important par ses effets sur
l'organisation du territoire et sur l'environnement dans la
région concernée. Il est, à un double titre (parking et cen-
tre commercial), soumis à une étude de l'impact sur l'envi-
ronnement, les seuils des ch. 11.4 et 80.5 de l'annexe OEIE
étant clairement dépassés. Il ne s'agit donc pas, de ce point
de vue, d'un cas limite (cf. ATF 124 II 252 consid. 4d/cc p.
258). En outre, pour les centres commerciaux dont la surface
de vente excède 2'000 m2, l'adoption d'un plan d'affectation
spécial est prévue à l'art. 47 al. 2 ch. 11 de la loi canto-
nale sur l'aménagement du territoire et les constructions
(LATC). Dans ces circonstances, la délimitation d'une zone à
bâtir spéciale, de plusieurs hectares et contiguë à d'autres
secteurs déjà bâtis, ne pouvait être assimilée à la création
d'une "petite zone à bâtir" isolée, contraire au but de
l'aménagement du territoire consistant à empêcher la disper-
sion des constructions (cf. ATF 124 II 391 consid. 2c et 3 p.
394). La solution retenue par les autorités communales et
cantonales, conforme à l'art. 2 LAT, s'imposait et une simple
dérogation fondée sur l'art. 24 LAT n'entrait manifestement
pas en considération. Aussi ces autorités n'ont-elles pas
éludé l'art. 24 LAT en choisissant d'adapter la planification
en fonction du projet litigieux. Ce premier grief du recours
de droit administratif est en conséquence mal fondé.

   3.-  En invoquant l'art. 33 LAT et certaines règles
du droit cantonal, les recourants se plaignent de l'absence
d'enquête publique complémentaire. Ils font valoir que le
projet Lémanparc apparaîtrait sous un jour nouveau à la lu-
mière des schémas, études et compléments produits par le pro-
moteur après la première enquête publique en 1989. Ils remar-
quent en particulier que l'évaluation du trafic n'est pas la
même dans le rapport d'impact de 1989 et dans les documents
établis en 1996, après le premier arrêt du Tribunal adminis-
tratif. Une enquête publique permettrait aux intéressés de se
prononcer en ayant connaissance du nouveau schéma des circu-
lations et des nouvelles études sur les nuisances du trafic
routier.

   a)  Aux termes de l'art. 33 al. 1 LAT, les plans
d'affectation sont mis à l'enquête publique. Cette formalité
est pour le surplus réglée par le droit cantonal: l'art. 57
LATC en fixe la durée (trente jours) et le moment (après
l'examen préalable du projet de plan par le département can-
tonal, mais avant la décision d'adoption). Le droit cantonal
prévoit par ailleurs la possibilité d'organiser une enquête
publique complémentaire après la décision d'adoption du
conseil communal, lorsque le projet a subi des modifications
susceptibles de porter atteinte à des intérêts dignes de pro-
tection (cf. art. 58 al. 3 et 4 LATC).

   Le Tribunal administratif a retenu que ni le plan
partiel d'affectation ni son règlement n'avaient subi de mo-
difications depuis l'enquête publique en 1989. Seuls des do-
cuments annexes ont ensuite été modifiés (schéma des circula-
tions, figurant à titre indicatif sur le plan) ou ajoutés au
dossier (rapport d'aménagement selon l'art. 26 OAT, rapports
techniques complémentaires sur la circulation, le bruit et la
pollution de l'air). Les recourants prétendent que la produc-
tion de ces nouveaux documents annexes, même s'ils ne modi-

fient pas le contenu du plan, justifiait une enquête publique
complémentaire.

   En mettant à l'enquête publique le projet de plan
partiel d'affectation conformément au droit cantonal, l'auto-
rité communale en a assuré la publicité; elle a ainsi fait
connaître les dispositions contraignantes destinées à régler
le mode d'utilisation du sol dans le périmètre concerné. Sur
cette base, les intéressés ont pu d'emblée exercer leur droit
d'être entendus et former opposition; cette phase préliminai-
re leur a permis d'obtenir des décisions attaquables devant
les autorités de recours. Les actuels recourants ont été en
mesure de participer à la procédure dès le début et de faire
valoir leurs droits devant les autorités qui se sont succes-
sivement prononcées sur le plan partiel d'affectation. Ce
sont là les diverses fonctions que l'art. 33 al. 1 LAT assi-
gne à l'enquête publique (cf. Heinz Aemisegger/Stephan Haag,
Commentaire LAT, Zurich 1999, n. 10 ad art. 33 LAT). L'appli-
cation du droit cantonal a manifestement permis, en l'espèce,
la mise en oeuvre du principe de l'art. 33 al. 1 LAT. Les re-
courants ne le contestent pas; ils font en revanche valoir
que les prescriptions pertinentes ont été interprétées, dans
le cas particulier, de manière trop restrictive.

   b)  Il appartient en effet au droit cantonal de
fixer les modalités de l'enquête publique (cf. art. 25 al. 1
LAT; ATF 116 Ia 215 consid. 2c p. 219). Les recourants se
prévalent, précisément, de règles du droit cantonal: l'art.
57 al. 1 LATC, qui dispose que le dossier de l'enquête publi-
que doit comprendre le projet de plan d'affectation "et ses
annexes", et l'art. 14 al. 1 du règlement d'application de la
LATC (RATC), selon lequel le rapport prévu à l'art. 26 OAT
fait partie de ces annexes. Il n'est pas contesté que tous
les documents annexes pertinents disponibles au moment de
l'enquête publique en 1989 faisaient partie du dossier acces-
sible aux intéressés (il s'agit notamment du rapport d'impact

- cf. à ce propos art. 15 OEIE). Les recourants se réfèrent à
des documents établis plus tard, qui n'auraient donc pas pu
être joints au dossier à ce moment-là. Selon eux, il découle-
rait de l'obligation de joindre les pièces annexes au dossier
de l'enquête publique, en vertu des art. 57 LATC et 14 RATC,
la nécessité d'organiser une nouvelle enquête publique lors-
que de nouvelles pièces annexes sont produites. Ils se plai-
gnent à ce propos d'une application arbitraire du droit can-
tonal.

   Conformément à l'art. 104 let. a OJ, le Tribunal fé-
déral ne revoit pas - dans le cadre du recours de droit admi-
nistratif - l'application du droit cantonal, mais exclusive-
ment celle du droit public fédéral au sens de l'art. 5 PA,
notion qui comprend le droit constitutionnel fédéral. C'est
pourquoi il examine sous l'angle de l'arbitraire le respect
des exigences du droit cantonal ou, en d'autres termes, il se
borne à vérifier si le Tribunal administratif a violé ou non
l'art. 9 Cst. en appliquant le droit cantonal (ATF 125 II 1
consid. 2a p. 5; 124 II 409 consid. 5 p. 423 et les arrêts
cités). Selon la jurisprudence, une décision est arbitraire
lorsqu'elle méconnaît gravement une norme ou un principe ju-
ridique clair et indiscuté ou lorsqu'elle heurte de manière
choquante le sentiment de la justice ou de l'équité. Le Tri-
bunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue en dernière
instance cantonale que si elle est insoutenable, en contra-
diction manifeste avec la situation effective, si elle a été
adoptée sans motif objectif ou en violation d'un droit cer-
tain. Il ne suffit pas que la motivation de la décision soit
insoutenable; encore faut-il qu'elle soit arbitraire dans son
résultat (ATF 125 I 166 consid. 2a p. 168; 125 II 10 consid.
3a p. 15, 129 consid. 5b p. 134; 124 V 137 consid. 2b p. 139;
124 IV 86 consid. 2a p. 88 et les arrêts cités).

   Le Tribunal administratif a considéré qu'une enquête
publique complémentaire n'était requise que dans l'hypothèse

prévue à l'art. 58 al. 2 et 3 (recte: al. 3 et 4) LATC, à sa-
voir lorsque sont décidées des modifications du plan suscep-
tibles de porter atteinte à des intérêts dignes de protec-
tion. On ne saurait donc l'exiger quand le plan lui-même (ou
son règlement) n'est pas modifié, mais que des précisions,
des corrections ou des compléments sont apportés à des études
accompagnant le plan. Cette interprétation du droit cantonal,
qui fait en somme la distinction entre le contenu du plan
d'affectation (la réglementation contraignante du mode d'uti-
lisation du sol, au sens de l'art. 14 al. 1 LAT) et les piè-
ces justificatives annexes, évoquées notamment aux art. 57
al. 1 LATC et 14 al. 1 RATC, n'est pas arbitraire. Elle se
fonde sur le texte d'une disposition - l'art. 58 LATC - qui
définit l'enquête complémentaire en ne l'imposant que dans
une situation particulière, sans donc l'exiger de façon géné-
rale en cas d'évolution des circonstances ou de dépôt de nou-
velles pièces. L'enquête publique n'est pas la seule modalité
de consultation de ces pièces annexes (cf. à ce propos l'art.
15 al. 3 OEIE, qui se borne à exiger des cantons qu'ils ren-
dent le rapport d'impact accessible aux intéressés, si la
mise à l'enquête n'est pas prescrite; cf. aussi l'art. 20
OEIE, au sujet de la consultation du dossier de l'étude d'im-
pact après la décision finale); les recourants ne prétendent
du reste pas qu'ils n'en auraient pas été informés de manière
appropriée. Aussi le grief tiré de l'absence d'une nouvelle
enquête publique est-il mal fondé.

   4.-  Les recourants dénoncent une mauvaise coordi-
nation entre la procédure d'établissement du plan partiel
d'affectation "Au Pré Blanc" et les procédures relatives aux
aménagements routiers nécessaires en vue de l'exploitation du
complexe Lémanparc. Ils invoquent à ce propos l'art. 25a LAT.

   a)  L'art. 25a LAT, introduit par une novelle du 6
octobre 1995, est en vigueur depuis le 1er janvier 1997 (RO
1996 p. 965). Cette disposition énonce, à ses al. 1 à 3, des

principes en matière de coordination "lorsque l'implantation
ou la transformation d'une construction ou d'une installation
nécessite des décisions émanant de plusieurs autorités". Une
autorité chargée de la coordination doit en particulier veil-
ler à ce que toutes les pièces du dossier de demande d'auto-
risations soient mises simultanément à l'enquête publique
(art. 25a al. 2 let. b LAT) et à qu'il y ait une concordance
matérielle des décisions ainsi que, en règle générale, une
notification commune ou simultanée (art. 25a al. al. 2 let. d
LAT); ces décisions ne doivent pas être contradictoires (art.
25a al. 3 LAT). Ces principes ont été conçus pour être mis en
oeuvre au stade de l'autorisation de construire (cf. Arnold
Marti, Commentaire LAT, n. 15 ad art. 25a); la loi prévoit
cependant qu'ils "sont applicables par analogie à la procé-
dure des plans d'affectation" (art. 25a al. 4 LAT). On vise
ainsi, en premier lieu, les cas où une autorisation de défri-
cher au sens de l'art. 12 de la loi fédérale sur les forêts
(LFo; RS 921.0) ou une autre autorisation doit être délivrée
à l'occasion de l'adoption d'un plan d'affectation (cf. Mes-
sage du Conseil fédéral concernant cette modification de la
LAT, FF 1994 III 1074).

   Dans le cas particulier, le grief des recourants ne
concerne pas la coordination dans l'application des différen-
tes normes du droit fédéral et cantonal au stade de l'adop-
tion du plan d'affectation (coordination matérielle) - cette
coordination, par une appréciation globale de tous les inté-
rêts en jeu, étant déjà une exigence du droit fédéral avant
l'art. 25a LAT, notamment pour les projets soumis à étude
d'impact (cf. ATF 123 II 88 consid. 2a p. 93 et les arrêts
cités) -, mais il porte sur une question purement formelle.
Les recourants font en effet valoir que les plans de certains
aménagements routiers, extérieurs au périmètre du plan par-
tiel d'affectation "Au Pré Blanc" (création d'un passage dé-
nivelé permettant aux véhicules en provenance de Vevey d'ac-
céder à Lémanparc ou à la zone industrielle voisine sans

avoir à couper le trafic descendant la route de Rio-Gredon,
création d'un giratoire au chemin des Boulingrins sur la rou-
te de Saint-Légier et création d'une piste supplémentaire
permettant aux véhicules descendant la route de Hauteville
d'accéder à Lémanparc en évitant le carrefour du Genévrier et
la route de Rio-Gredon), auraient dû être adoptés simultané-
ment.

   b)  Le Tribunal administratif a examiné, à ce pro-
pos, la nature du plan d'équipement routier en droit cantonal
vaudois. Le "projet de construction de route", au sens des
art. 11 ss de la loi cantonale sur les routes (LR), est selon
la juridiction cantonale à la fois un plan d'affectation et
une autorisation de construire; il s'agit d'un projet d'exé-
cution détaillé qu'il est opportun, dans le cas particulier,
d'élaborer et de faire adopter au stade de l'octroi des auto-
risations de construire pour le complexe Lémanparc. Le Tribu-
nal administratif a en outre relevé que, sur le fond, les au-
torités cantonales compétentes pour l'aménagement du réseau
routier avaient été consultées et avaient d'ores et déjà don-
né leur accord, dans le cadre de la procédure relative au
plan partiel d'affectation litigieux, en se ralliant au nou-
veau schéma de circulation avant la décision du conseil com-
munal.

   Ainsi, le droit cantonal ne prévoit pas nécessaire-
ment, pour la réalisation ou la modification des ouvrages
d'équipement routier, un plan partiel d'affectation préalable
à l'autorisation de construire (cf. au sujet des plans
d'équipement: Eric Brandt/Pierre Moor, Commentaire LAT, n.
106 ss ad art. 18). Les recourants ne critiquent pas la ré-
glementation cantonale à ce sujet. En outre, les travaux dont
il est question (passage dénivelé, giratoire, piste supplé-
mentaire d'une route cantonale existante) sont de simples
aménagements d'éléments existants du réseau routier, par le-
quel la desserte du complexe Lémanparc est d'ores et déjà

assurée; les autorités cantonales n'ont donc pas à se pronon-
cer sur la construction de nouvelles voies pour l'équipement
du périmètre "Au Pré Blanc", ni sur un changement de destina-
tion des voies existantes. En d'autres termes, les décisions
de principe quant à l'équipement routier de ce secteur ont
déjà été prises, indépendamment du projet Lémanparc, et le
réseau de desserte est déjà réalisé. Dans ces conditions, la
solution choisie par les autorités cantonales de planifica-
tion et de recours - à savoir un examen préalable, sans dé-
cision formelle, des quelques aménagements du réseau routier
à réaliser, la procédure d'adoption des projets de construc-
tion de route au sens des art. 11 ss LR étant renvoyée à une
phase ultérieure, correspondant à celle des autorisations de
construire - n'empêche pas une application coordonnée, d'un
point de vue matériel, de toutes les prescriptions se rappor-
tant au trafic routier (limitation des nuisances, etc. - cf.
infra, consid. 5). Cette solution est admissible au regard
des principes généraux de coordination formelle énoncés à
l'art. 25a LAT, applicables ici par analogie (art. 25a al. 4
LAT). Les critiques des recourants à l'encontre de l'arrêt
attaqué sont donc, sur ce point, mal fondées.

   5.-  Les recourants soutiennent que les données de
base - du rapport d'impact, des rapports techniques complé-
mentaires - ne permettraient pas de démontrer la conformité
du projet Lémanparc à la législation fédérale sur la protec-
tion de l'environnement. Ils se réfèrent à la pollution de
l'air causée par les véhicules des utilisateurs de ce com-
plexe sur les routes d'accès et ils prétendent qu'aucune me-
sure adéquate n'est prise pour limiter les émissions. Ce cen-
tre commercial et de loisirs doit en effet être considéré
comme une installation à laquelle s'appliquent les disposi-
tions des art. 11 ss LPE sur la limitation des émissions (cf.
ATF 124 II 272 consid. 2a p. 275; 120 Ib 436 consid. 2a p.
440 ss et les arrêts cités).

   a)  Lorsqu'ils se plaignent d'une violation du droit
fédéral de la protection de l'environnement (cf. art. 104
let. a OJ) et, implicitement, d'une constatation manifeste-
ment inexacte ou incomplète des faits pertinents (cf. art.
104 let. b OJ en relation avec l'art. 105 al. 2 OJ), les re-
courants invoquent les émissions d'oxydes d'azote (NOx) dont
les véhicules à moteur constituent la source principale.

   Cela étant, dans un autre grief d'ordre purement
formel, ils mentionnent aussi les émissions de gaz carbonique
(CO2); ils font valoir que le Tribunal administratif aurait
violé leur droit d'être entendus en refusant de verser au
dossier une lettre et une pièce qu'ils avaient produites le
27 février 1998 concernant les résultats de la Conférence de
Kyoto sur les changements climatiques et les engagements pris
par les pays - dont la Suisse - y ayant participé.

   Conformément à la jurisprudence constitutionnelle
relative au droit d'être entendu, l'autorité peut refuser une
mesure d'instruction supplémentaire lorsque les preuves admi-
nistrées lui ont permis de former sa conviction et que, pro-
cédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anti-
cipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la
certitude qu'elles ne pourraient l'amener à modifier son opi-
nion (ATF 124 I 49 consid. 3a p. 51, 208 consid. 4a p. 211;
122 I 53 consid. 4a p. 55; 122 II 464 consid. 4a p. 469; 120
Ib 379 consid. 3b p. 383 et les arrêts cités). En l'occurren-
ce, les documents des recourants relatifs à la limitation des
émissions de CO2 n'étaient à l'évidence pas pertinents pour
le sort de la contestation. Il ne s'agit pas, dans ce domai-
ne, d'appliquer les normes de la loi fédérale sur la protec-
tion de l'environnement, car un autre régime législatif a été
mis en place au niveau fédéral (sur la base d'engagements in-
ternationaux concernant les changements climatiques), qui
tend à réduire les émissions de CO2 dues à l'utilisation
énergétique des agents fossiles (combustibles et carburants).

Les objectifs et les mesures ont été arrêtés dans la loi fé-
dérale du 8 octobre 1999 sur la réduction des émissions de
CO2 (RS 641.71). Ces mesures - relevant de la politique de
l'énergie, des transports, de l'environnement et des finan-
ces, qui peuvent prendre la forme d'une taxe d'incitation sur
les agents fossiles (cf. art. 3 de la loi précitée) - ne peu-
vent pas être assimilées aux mesures de limitation préventive
des émissions dues aux installations qui causent des pollu-
tions atmosphériques, au sens des art. 11 ss LPE et 3 ss de
l'ordonnance sur la protection de l'air (OPair; RS
814.318.142.1). Or ces dernières normes étaient seules déter-
minantes dans le cas particulier. Aussi le Tribunal adminis-
tratif n'a-t-il pas violé le droit d'être entendu des recou-
rants en refusant d'enregistrer les documents qu'ils avaient
produits.

   b)  Selon les recourants, les données sur lesquelles
le Tribunal administratif s'est fondé au sujet de l'estima-
tion du nombre de visiteurs de Lémanparc, des taux de crois-
sance annuels du trafic automobile et de l'état de l'hygiène
de l'air à l'horizon 2005 (après l'ouverture du complexe com-
mercial et de loisirs), seraient dépourvues de justification.

   aa)  L'arrêt attaqué reprend différents éléments du
rapport complémentaire de décembre 1996 des bureaux Transitec
et Ecoscan. En particulier, l'évaluation de la génération de
trafic de Lémanparc à l'horizon 2005 est de 7'500 mouvements
de véhicules (entrées et sorties) par jour moyen et d'environ
11'500 mouvements par samedi, jour le plus fréquenté. Cette
évaluation a été faite sur la base de statistiques de centres
commerciaux ainsi que d'un complexe commercial et de loisirs
("Säntispark", à Saint-Gall) du groupe Migros. Ces calculs
tiennent compte des taux de croissance annuels du trafic, es-
timés à 2 % sur le réseau autoroutier et à 1,5 % sur le reste
du réseau. Au sujet de la pollution atmosphérique, il est re-
tenu que le trafic sur les autoroutes A9 et A12 représente

dans ce secteur la source de plus de 80 % des immissions to-
tales d'oxydes d'azote. Cela étant, à une distance de 100 à
150 m de ces autoroutes, les concentrations en dioxyde d'azo-
te étaient en 1996 inférieures à 30 µg/m3 (en moyenne an-
nuelle) dans tous les quartiers d'habitation de Saint-Légier
et de Vevey. Ce niveau de concentration correspond à la va-
leur limite d'immission de l'annexe 7 OPair, laquelle n'était
donc dépassée qu'à proximité directe de ces voies de circu-
lation.

   Quant au pronostic concernant l'hygiène de l'air à
l'horizon 2005, l'arrêt attaqué retient que l'on peut s'at-
tendre à une amélioration sensible dans cette région grâce à
l'évolution de la qualité du parc des véhicules automobiles,
qui permettra une réduction des émissions globales d'oxydes
d'azote (NOx) de près de 30 %. Les immissions de dioxyde
d'azote (NO2) dans le voisinage de Lémanparc seront inférieu-
res aux valeurs limites de l'annexe 7 OPair, tant en moyenne
annuelle qu'en moyenne journalière. Les émissions provoquées
par l'exploitation de Lémanparc sont évaluées, en moyenne an-
nuelle, à moins de 0,4 µg/m3 dans les traversées de Saint-
Légier et La Chiésaz, et à des taux compris entre 0,4 µg/m3
et 1 µg/m3 le long des routes permettant d'accéder directe-
ment à ce complexe (routes de Rio-Gredon, de Hauteville, de
Saint-Légier, des Boulingrins).

   bb)  Ces données reposent sur des pronostics qui,
par nature, présentent un certain degré d'incertitude.

   En ce qui concerne la fréquentation probable de
Lémanparc, les recourants reprochent aux auteurs des rapports
techniques d'avoir prévu, pour la partie "centre de loisirs"
un nombre de visiteurs inférieur à celui enregistré dans un
centre comparable ("Säntispark"). Or le Tribunal administra-
tif s'est prononcé sur ce calcul, qu'il a considéré comme
fiable. Les recourants ne critiquent du reste pas de façon

substantielle les éléments statistiques retenus. Aussi ce
pronostic ne saurait être qualifié de manifestement inexact
(cf. ATF 125 II 643 consid. 8c p. 661).

   En ce qui concerne les données sur les émissions
polluantes du trafic routier (qui dépendent du volume global
du trafic dans la région), les pronostics des mandataires
techniques de la société intimée ont été approuvés aussi bien
par le service cantonal spécialisé (le service de lutte
contre les nuisances) lors de la procédure cantonale de re-
cours, que par l'OFEFP, dans ses observations adressées au
Tribunal fédéral. Cet office fédéral expose du reste claire-
ment qu'il peut souscrire au pronostic selon lequel les va-
leurs limites d'immission pour le NO2 pourront être respec-
tées à l'horizon 2005 dans le périmètre du plan litigieux et
aux alentours. Les critiques des recourants à cet égard ne
sont pas probantes et il n'y a aucun motif de mettre en doute
les avis de ces services spécialisés (cf. ATF 125 II 591
consid. 7a p. 602). Sur ce point également, les constatations
de fait de l'arrêt attaqué ne sont pas manifestement inexac-
tes ni incomplètes.

   c)  Les recourants relèvent que l'exploitation de
Lémanparc provoquera une augmentation sensible des émissions
d'oxydes d'azote (NOx); ils reprochent aux autorités canto-
nales d'avoir violé le droit fédéral en n'imposant aucune me-
sure de limitation.

   aa)  Le Tribunal administratif a considéré que, dès
lors que les valeurs limites d'immission pour le NO2 ne se-
raient pas dépassées au moment de la mise en service de
Lémanparc (horizon 2005), il ne se justifiait pas de prévoir,
en relation avec ce projet, l'élaboration d'un plan de mesu-
res au sens de l'art. 44a LPE.

   L'art. 44a al. 1 LPE impose l'établissement d'un
plan de mesures "lorsque plusieurs sources de pollutions at-
mosphériques entraînent des atteintes nuisibles ou incommo-
dantes, ou si de telles atteintes sont à prévoir". Il faut
donc que les valeurs limites d'immissions des pollutions
atmosphériques, telles qu'elles sont définies à l'art. 14
LPE, soient dépassées (cf. Theo Loretan, Kommentar zum Um-
weltschutzgesetz, Zurich 1998, n. 8 ad art. 44a LPE). Les
autorités cantonales n'ont pas, en l'état, établi de plan de
mesures pour la région de Vevey.

   Il ne s'agit pas, dans la présente procédure, d'exa-
miner la nécessité d'un plan de mesures au stade actuel; la
contestation porte sur un projet concret d'installation et
seule la situation au moment de la mise en exploitation de
cette installation est déterminante. Comme on peut s'attendre
à ce qu'il n'y ait plus, à ce moment-là, d'atteintes nuisi-
bles ou incommodantes dues au trafic routier (cf. supra,
consid. 5b), le Tribunal administratif n'a pas violé le droit
fédéral en renonçant à subordonner l'approbation du plan par-
tiel d'affectation "Au Pré Blanc" à l'établissement d'un plan
de mesures.

   bb)  Il appartient néanmoins aux autorités compéten-
tes d'ordonner des mesures de limitation préventive des émis-
sions, conformément aux art. 11 al. 2 LPE et 4 OPair, dans la
mesure que permettent l'état de la technique et les condi-
tions d'exploitation et pour autant que cela soit économique-
ment supportable. Pour un complexe tel que Lémanparc, ces me-
sures préventives peuvent consister en une limitation du nom-
bre de places de stationnement, ayant pour conséquence une
réduction du trafic automobile (cf. notamment ATF 124 II 272;
120 Ib 436 consid. 3 p. 453).

   Les recourants présentent, précisément, certaines
critiques à l'encontre de la capacité du parking de Lémanparc

qui, selon l'arrêt attaqué et les rapports techniques du dos-
sier (rapports de 1996 des bureaux Transitec et Ecoscan, com-
plétant le rapport d'impact), comprendra 1'200 places couver-
tes et 100 places en surface. Or, à lire leur argumentation,
ils paraissent soutenir que ce parking serait sous-dimension-
né, car on n'aurait pas tenu compte des fortes affluences les
samedis précédant Noël; de même, l'estimation du trafic lié à
Lémanparc aurait été revue à la hausse depuis le dépôt du
rapport d'impact de 1989, sans que l'on n'augmente la capaci-
té du parking. Dans ce contexte, les recourants ne demandent
donc pas, en définitive, des mesures préventives de limita-
tion des émissions sous la forme d'une réduction du nombre de
places de stationnement. Pour le reste, on ne voit pas quels
éléments du plan partiel d'affectation litigieux seraient,
pour les recourants, en contradiction avec le principe de
l'art. 11 al. 2 LPE. Leur grief de violation du droit fédéral
de la protection de l'environnement est donc mal fondé.

   6.-  Dans leur recours de droit public, les recou-
rants se plaignent d'un déni de justice en critiquant la dé-
cision prise par le Conseil d'Etat le 8 août 1984 consistant
à inclure la parcelle n° 1824 dans une zone réservée. La voie
du recours de droit administratif n'est manifestement pas ou-
verte à cet égard (cf. supra, consid. 1).

   La procédure de recours cantonale ayant abouti à
l'arrêt attaqué du Tribunal administratif ne concerne pas la
zone réservée, mais la mesure de planification communale qui
a été adoptée à la suite de cette mesure provisoire ou
conservatoire prise par le gouvernement cantonal (cf.
Alexander Ruch, Commentaire LAT, n. 20 ss ad art. 27 LAT).
Les décisions relatives à l'adoption et à la prolongation de
la zone réservée pouvaient être contestées directement après
leur notification, car elles étaient assimilées, d'un point
de vue formel et en raison de leurs effets, à des modifica-
tions d'un plan d'affectation (cf. notamment ATF 113 Ia 362).

C'est pourquoi le recours de droit public formé contre une
zone réservée à l'occasion d'une autre contestation, portant
sur une nouvelle mesure de planification dans le même péri-
mètre, est tardif (art. 89 OJ) et manifestement irrecevable.

   7.-  Il s'ensuit que le recours de droit administra-
tif, en tous points mal fondé, doit être rejeté dans la me-
sure où il est recevable. Quant au recours de droit public,
il est irrecevable.

   Les recourants, qui succombent, doivent payer l'émo-
lument judiciaire conformément aux art. 153, 153a et 156 al.
1 OJ. La société intimée a droit à des dépens, à la charge
des recourants (art. 159 al. 1 OJ). La commune de Saint-
Légier-La Chiésaz, qui agit en l'espèce dans le cadre de ses
attributions de collectivité publique, n'a pas droit à des
dépens (art. 159  al. 1 et 2 OJ).

                       Par ces motifs,

           l e   T r i b u n a l   f é d é r a l :

   1. Rejette le recours de droit administratif, dans
la mesure où il est recevable;

   2. Déclare le recours de droit public irrecevable;

   3. Met à la charge des recourants, solidairement
entre eux:
   a) un émolument judiciaire de 5'000 fr.;
   b) une indemnité de 3'000 fr. à payer à la Société
Coopérative Migros Vaud, à titre de dépens;

   4. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties, au Département des infrastructures et au
Tribunal administratif du canton de Vaud, ainsi qu'à l'Office
fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage et à
l'Office fédéral du développement territorial.

Lausanne, le 17 janvier 2001
JIA/col

            Au nom de la Ie Cour de droit public
                 du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
                        Le Président,

                        Le Greffier,