Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1A.228/1999
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1A.228/1999
1P.580/1999

        Ie   C O U R   D E   D R O I T   P U B L I C
       **********************************************

                      30 novembre 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Aeschlimann, Féraud, Catenazzi et Favre. Greffier: M. Jomini.

     Statuant sur les recours de droit administratif et
                 de droit public formés par

X.________, représenté par Me Denis Bettems, avocat à
Lausanne,

                           contre

l'arrêt rendu le 26 août 1999 par le Tribunal administratif
du canton de Vaud, dans la cause qui oppose le recourant à la
commune de Mutrux et à la Société de tir Union Jurassienne, à
Mutrux, toutes deux représentées par Me Laurent Gilliard,
avocat à Yverdon-les-Bains, ainsi qu'au Département des in-
frastructures et au Département de la sécurité et de l'envi-
ronnement du canton de Vaud;

      (plan d'affectation, protection contre le bruit,
                        stand de tir)

          Vu les pièces du dossier d'où ressortent
                  les  f a i t s  suivants:

   A.-  X.________ est propriétaire des parcelles
contiguës n° 95 et 349 du registre foncier, sur le territoire
de la commune de Mutrux, au lieu-dit "Sur-la-Ville". Ces ter-
rains se situent au nord-ouest du village, au bord de la rou-
te conduisant au Mont-Aubert. Une villa et une dépendance
utilisée pour des activités de loisirs (bibliothèque, atelier
de peinture, etc.) se trouvent sur la parcelle n° 95, dont la
surface totale est de 10'587 m2. La parcelle n° 349, de 1'724
m2, n'est pas bâtie.

   Le stand de tir de Mutrux, qui appartient à la so-
ciété de tir Union Jurassienne (regroupant des tireurs des
communes de Provence et de Mutrux - ci-après: la société de
tir), a été construit vers 1920 à la limite nord du village.
La distance entre le stand et les deux bâtiments de
X.________ est d'environ 130 m; quant aux cibles, au nombre
de quatre, elles se trouvent à environ 200 m de ceux-ci.

   B.-  Le premier plan d'affectation de la commune de
Mutrux (plan des zones) a été adopté par son conseil général
le 23 avril 1997. Pour la propriété de X.________, ce plan
classe en zone du village la partie de la parcelle n° 95 où
se trouve la villa; le reste de cette parcelle - y compris
l'endroit où est implantée la dépendance - de même que la
parcelle n° 349 sont classés en zone agricole.

   L'installation de tir - stand d'une part, ciblerie
d'autre part - est classée en zone de constructions d'utilité
publique.

   X.________ s'était opposé à ce plan d'affectation au
moment de l'enquête publique, en février 1997. Il demandait

en substance une extension de la zone du village sur sa pro-
priété et il critiquait la zone d'utilité publique permettant
le maintien du stand de tir. En adoptant le plan, le conseil
général a rejeté cette opposition.

   C.-  X.________ a recouru contre l'adoption du plan
d'affectation et le rejet de son opposition auprès du Dépar-
tement cantonal des infrastructures (alors: Département des
travaux publics, de l'aménagement et des transports). Il a
derechef demandé un agrandissement de la zone du village, sur
ses parcelles n° 95 et 349, et il a fait valoir que les mesu-
res d'aménagement prévues pour l'installation de tir compro-
mettraient le développement normal de la localité.

   Le Département des infrastructures a rejeté ce re-
cours par un prononcé du 23 juillet 1998; il a par ailleurs
approuvé le plan des zones communal. En substance, il a
considéré, à propos de l'affection de la propriété de
X.________, que la délimitation des zone du village et zone
agricole était à cet endroit conforme aux règles des art. 15
et 16 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire
(LAT; RS 700). Pour l'installation de tir, il a jugé adéquat
le classement en zone d'utilité publique. Il s'est référé à
l'avis de l'officier fédéral de tir (cf. infra, let. E) pour
estimer que la sécurité du voisinage était garantie; en ou-
tre, un assainissement, conformément aux prescriptions fédé-
rales sur la protection contre le bruit, n'avait pas à être
décidé dans la procédure de planification.

   D.-  La décision du Département des infrastructures
a fait l'objet, de la part de X.________, d'un recours au
Tribunal administratif du canton de Vaud (cause AC 98/150).
Le recourant a pris, à titre principal, des conclusions ten-
dant à la réforme des décisions du conseil général et du Dé-
partement des infrastructures afin que la zone constructible

soit étendue sur sa propriété (pour qu'elle englobe les ter-
rains situés à l'arrière et en contrebas de la villa) et que
la zone d'utilité publique ne puisse pas être affectée à une
installation de tir; à titre subsidiaire, il a conclu à
l'annulation de la décision du conseil général et au renvoi
du dossier à la commune de Mutrux pour qu'elle modifie ses
plan et règlement après une nouvelle enquête publique.

   E.-  Une autre procédure administrative cantonale
concernant le stand de tir de Mutrux s'est déroulée parallè-
lement à la procédure d'établissement du plan général d'af-
fectation, pour aboutir également au Tribunal administratif.

   Dès 1983, X.________ avait effectué différentes dé-
marches pour se plaindre du bruit causé sur sa propriété par
les tirs. Le chef du service cantonal de la sécurité civile
et militaire (à cette époque: service des affaires militai-
res) a ordonné, le 21 décembre 1995, la fermeture momentanée
du stand dans l'attente de la présentation, par la société de
tir, d'une proposition concrète d'assainissement. Il n'était
pas question d'ordonner d'autres modifications du stand,
l'officier fédéral de tir de l'arrondissement ayant estimé
(dans un rapport du 19 septembre 1996) que les normes de
sécurité n'imposaient pas la construction d'un pare-balles.

   Avant l'issue de cette procédure d'assainissement,
le chef du service de la sécurité civile et militaire a, par
une décision du 31 mars 1998, levé l'ordre de fermeture mo-
mentanée du stand et autorisé provisoirement la société de
tir, sous la surveillance de la municipalité de Mutrux, à
organiser les tirs militaires obligatoires en 1998 "sur 2 x
1/2 jour avec 1/2 jour de réserve". X.________ a recouru au
Tribunal administratif contre la décision du 31 mars 1998.
Une transaction est intervenue et les parties sont convenues
de mettre fin à la procédure, la société de tir s'engageant à

soumettre avant le 15 novembre 1998 un plan d'assainissement
au service de la sécurité civile et militaire. Le 3 septembre
1998, le Tribunal administratif a pris acte de cette transac-
tion et il a déclaré sans objet le recours dirigé contre la
décision du 31 mars 1998 (cause AC 98/074).

   Le 5 janvier 1999, le Département de la sécurité et
de l'environnement, par son service de la sécurité civile et
militaire, a rendu une décision d'approbation d'un plan d'as-
sainissement établi le 12 novembre 1998 par la société de
tir, en fixant les conditions d'exploitation suivantes:
   - les quatre lignes de tir devront être équipées
d'un tunnel antibruit de type "Silento 300";
   - le nombre de demi-jours pondérés de tir devra être
limité à six, dont deux demi-jours pour le tir du 1er août;
aucun tir ne sera toléré les dimanches et, les années où le
1er août tombe un dimanche, le tir du 1er août devra être
effectué un autre jour, par exemple le 31 juillet;
   - le nombre de coups de feu tirés par année ne devra
pas dépasser 3'200; le programme des tirs devra être approuvé
en début de saison par le service de la sécurité civile et
militaire.

   Cette décision se référait à une détermination des
niveaux de bruit par le service cantonal de l'environnement
et de l'énergie (SEVEN) au sujet du plan d'assainissement. Ce
service a établi un rapport le 30 juillet 1998, sur la base
de mesures effectuées le 23 juin 1998 par un de ses collabo-
rateurs. Les immissions de bruit ont été mesurées à trois en-
droits sur la propriété de X.________: à une fenêtre en fa-
çade est de la villa (site de mesure n° 4); à une autre fe-
nêtre en façade nord de ce même bâtiment (site n° 5); à une
fenêtre de la dépendance (site n° 6). Le niveau d'évaluation
Lr (moyenne énergétique avec correction de niveau) a ensuite

été calculé pour deux hypothèses, en testant à cette occasion
un tunnel antibruit de type "Silento":

     Hypothèse n° 1 (programme annuel de deux séances d'une
     durée de quatre heures au maximum , 1'000 coups de feu -
     exploitation limitée aux "tirs obligatoires"):

            sans tunnel      avec tunnel
     site n° 4    64.0       57.8
     site n° 5    63.0       57.0
     site n° 6    62.3       58.1

     Hypothèse n° 2 (programme annuel de cinq séances d'une
     durée de quatre heures au maximum, 2'500 coups de feu):

            sans tunnel      avec tunnel
     site n° 4    69.6       63.6
     site n° 5    68.6       62.7
     site n° 6    68.3       63.9

   Le SEVEN a encore, dans un préavis du 13 novembre
1998 au sujet d'un projet de plan d'assainissement présenté
par la société de tir, envisagé une troisième hypothèse:

     Hypothèse n° 3 (programme annuel de six demi-jours,
     3'200 coups de feu):

            sans tunnel      avec tunnel
     site n° 4    70.7       64.7
     site n° 5    69.7       63.8
     site n° 6    69.4       65.0

   C'est précisément cette dernière hypothèse qui a été
retenue par le Département de la sécurité et de l'environne-
ment pour définir l'ampleur de l'assainissement et fixer les
conditions d'exploitation futures.

   F.-  X.________ a recouru contre la décision du Dé-
partement de la sécurité et de l'environnement du 5 janvier
1999 auprès du Tribunal administratif, en demandant son annu-
lation. Il a critiqué l'évaluation du bruit par le service
cantonal spécialisé; il a par ailleurs fait valoir que l'ins-

tallation litigieuse ne respectait pas les prescriptions ac-
tuelles en matière de pollution du sol par des métaux lourds.

   Le Tribunal administratif a joint ce recours à celui
dirigé contre le plan d'affectation, dont l'instruction avait
été suspendue dans l'intervalle (cf. supra, let. D.).

   G.-  Le Tribunal administratif a statué sur les deux
recours par un arrêt rendu le 26 août 1999, dont le disposi-
tif est le suivant:

     "I. Les recours sont partiellement admis.

     II. La décision du Département de la sécurité et de
     l'environnement, service de la sécurité civile et mi-
     litaire du 5 janvier 1999 est annulée, le dossier lui
     étant retourné afin qu'il complète l'instruction et la
     décision dans le sens des considérants qui précèdent.

     III.a) La décision du Département des infrastructures du
     23 juillet 1998 est annulée en tant qu'elle a trait aux
     secteurs "En Sagne" et "Sur la Ville" du territoire com-
     munal de Mutrux. La cause est renvoyée sur ce point aux
     autorités communales pour complément d'examen et nouvel-
     les décisions.

        b) Dite décision est au surplus confirmée.

     IV. Le présent arrêt est rendu sans frais.

     V.  Il n'est pas alloué de dépens".

   En substance, le Tribunal administratif a considéré
que les mesures de limitation du bruit imposées à la société
de tir étaient adéquates au regard des prescriptions fédéra-
les sur la protection de l'environnement (consid. 2 et 3 de
l'arrêt attaqué). La cause de l'annulation de la décision du
Département de la sécurité et de l'environnement, selon le
ch. II du dispositif, n'est pas liée au bruit du stand, mais
aux "atteintes éventuellement portées par le plomb et les

autres matières contenus dans les cartouches tant au sous-sol
qu'aux eaux captées à proximité de la ciblerie" (consid. 4 de
l'arrêt attaqué). Le renvoi de l'affaire au Département vise
à faire compléter la décision "par des mesures, à définir
encore avec le [service cantonal des eaux, sols et assainis-
sement], tendant à clôturer un espace adéquat autour de la
butte et des cibleries (secteur A) ainsi qu'à arrêter la
réglementation d'utilisation applicable au secteur B"
(consid. 5 de l'arrêt attaqué).

   A propos du plan d'affectation, le Tribunal adminis-
tratif a considéré que le choix de ne pas étendre la zone à
bâtir sur la propriété du recourant n'était pas critiquable
(consid. 7a-b de l'arrêt attaqué). Il en allait de même du
classement de l'installation de tir (stand et ciblerie) en
zone d'utilité publique, en deux sous-périmètres séparés par
la zone agricole (consid. 7c de l'arrêt attaqué). L'annula-
tion partielle de la décision du Département des infrastruc-
tures (ch. III let. a du dispositif) était fondée sur des
dispositions du droit fédéral de la protection de l'environ-
nement. En effet, pour un compartiment de terrain situé au
nord-ouest du village (décrit par le Tribunal administratif
comme le "périmètre compris entre le chemin public conduisant
au Mont-Aubert, qui en forme la limite sud, la parcelle n°
342, à l'ouest, la parcelle n° 347 au nord, le chemin public
et la parcelle n° 95, à l'est", soit les secteurs "En Sagne",
autour de la ciblerie, et "Sur-la-Ville" - cf. consid. 10 de
l'arrêt attaqué), la planification communale nécessitait,
selon le Tribunal administratif, un nouvel examen. Au lieu-
dit "Sur-la-Ville", soit pour la parcelle n° 95 en particu-
lier, le classement en zone à bâtir était considéré comme
contraire à l'art. 24 al. 1 de la loi fédérale sur la protec-
tion de l'environnement (LPE; RS 814.01), puisque le bruit
provoqué par l'exploitation du stand entraînait à cet endroit
un dépassement des valeurs de planification (consid. 8a de

l'arrêt attaqué). Pour la partie de ce terrain classée en
zone agricole, l'annulation de la décision d'approbation du
plan d'affectation était fondée sur l'insuffisance des mesu-
res de protection du sol et des eaux, compte tenu de la pré-
sence de métaux lourds autour de la ciblerie; le Tribunal ad-
ministratif se référait sur ce point à l'ordonnance du 26
août 1998 sur l'assainissement des sites pollués par des dé-
chets (ordonnance sur les sites contaminés, OSC; RS 814.680 -
consid. 8b de l'arrêt attaqué).

   H.-  Agissant par la voie du recours de droit admi-
nistratif (cause 1A.228/1999), X.________, qui se plaint en
substance de violations du droit fédéral de la protection de
l'environnement, de la nature et des eaux, demande au Tribu-
nal fédéral de réformer l'arrêt du Tribunal administratif sur
deux points, dans le sens suivant:
   - quant au ch. II du dispositif: l'affaire doit être
renvoyée au Département de la sécurité et de l'environnement
afin qu'il se prononce également sur le maintien du stand de
tir et sur l'autorisation d'exploiter cette installation;
   - quant au ch. III du dispositif: la décision du
Département des infrastructures doit être maintenue en tant
qu'elle prévoit l'affectation partielle de la parcelle n° 95
en zone à bâtir; par ailleurs, le solde de cette parcelle n°
95 doit aussi être classé en zone à bâtir et la zone d'utili-
té publique comprenant l'installation de tir doit être sup-
primée.

   Dans les conclusions subsidiaires de son recours de
droit administratif, X.________ demande au Tribunal fédéral
d'annuler l'arrêt du Tribunal administratif et de renvoyer
l'affaire à cette juridiction pour nouvelle décision.

   Agissant simultanément par la voie du recours de
droit public pour violation de ses droits constitutionnels

(cause 1P.580/1999), X.________ demande également au Tribunal
fédéral d'annuler l'arrêt attaqué.

   La commune de Mutrux, la société de tir (celles-ci
agissant conjointement) et le Tribunal administratif
concluent au rejet des recours, dans la mesure où ils sont
recevables.

   Le Département de la sécurité et de l'environnement
a déposé des observations. Le Département des infrastructures
a renoncé à se déterminer.

   Dans le cadre de la procédure du recours de droit
administratif, l'Office fédéral de l'environnement, des fo-
rêts et du paysage (OFEFP) a pu déposer des observations.
L'Office fédéral de l'aménagement du territoire (OFAT), éga-
lement interpellé, a renoncé à le faire.

   Les parties ont pu se déterminer sur les observa-
tions de l'OFEFP.

   I.-  A la requête du recourant, qui avait demandé
l'effet suspensif, le Président de la Ie Cour de droit public
a rendu le 10 novembre 1999 une ordonnance de mesures provi-
sionnelles, autorisant la société de tir à n'organiser, du-
rant la procédure, qu'une demi-journée de tir par année pour
les exercices de tirs obligatoires, avec une autre demi-
journée de réserve.

   J.-  Une délégation du Tribunal fédéral a procédé à
une inspection locale le 30 juin 2000, en présence des par-
ties et des intéressés. La délégation a parcouru le village,
a visité le stand de tir puis s'est rendue sur la propriété
du recourant. A la demande de la délégation, des tirs ont été
effectués, avec et sans tunnel "Silento"; leur bruit a été

mesuré sur la propriété du recourant et à d'autres endroits
dans le village.

          C o n s i d é r a n t   e n   d r o i t :

   1.-  Un recours de droit administratif et un recours
de droit public ont été formés contre l'arrêt du Tribunal ad-
ministratif. Comme la voie du recours de droit public est
subsidiaire à celle du recours de droit administratif (art.
84 al. 2 OJ), l'examen de la recevabilité du recours de droit
public devrait en principe intervenir après celui de la rece-
vabilité du recours de droit administratif. Néanmoins, dans
le cas présent, il apparaît d'emblée que l'argumentation du
recours de droit public est trop sommaire - une simple réfé-
rence à la garantie de la propriété et aux principes de
l'aménagement du territoire - pour constituer une motivation
suffisante au regard des exigences de l'art. 90 al. 1 let. b
OJ. Dans cette procédure, la loi exige en effet que le recou-
rant présente un exposé succinct des droit constitutionnels
ou des principes juridiques violés, précisant en quoi consis-
te la violation; le Tribunal fédéral n'examine ainsi que les
griefs exposés de manière suffisamment claire et détaillée
(cf. ATF 125 I 492 consid. 1b p. 495 et les arrêts cités). Il
s'ensuit que, insuffisamment motivé, le recours de droit pu-
blic est irrecevable.

   2.-  Il y a lieu dès lors d'examiner la recevabilité
du recours de droit administratif.

   a)  Dans la décision attaquée, le Tribunal adminis-
tratif a traité deux recours: l'un dirigé contre un plan
d'affectation communal, l'autre contre un ordre d'assainisse-
ment d'une installation de tir. Dans les deux cas, il a ap-

pliqué des dispositions du droit fédéral de la protection de
l'environnement, voire d'autres dispositions du droit public
fédéral (au sens de l'art. 5 al. 1 PA) en matière de protec-
tion de la nature, du sol ou des eaux. La contestation porte
sur l'application de ces dispositions: la voie du recours de
droit administratif est donc en principe ouverte, selon une
jurisprudence bien établie relative aux art. 97 ss OJ et 34
LAT, même si l'arrêt attaqué est également fondé sur le droit
cantonal, notamment en matière d'aménagement du territoire
(cf. ATF 126 II 171 consid. 1a in fine p. 173; 125 II 10
consid. 2a p. 13; 123 II 88 consid. 1a p. 91, 231 consid. 2
p. 233; 122 II 241 consid. 2a p. 243; 121 II 72 consid. 1b p.
75 et les arrêts cités).

   b)  Le Tribunal administratif a partiellement admis
les deux recours, donnant donc en partie gain de cause au re-
courant. Il a d'une part annulé la décision sur l'assainisse-
ment de l'installation de tir et renvoyé l'affaire au dépar-
tement cantonal compétent pour nouvelle décision (ch. II du
dispositif); d'autre part, il a annulé partiellement la déci-
sion d'approbation du plan général d'affectation de la com-
mune (secteurs "En Sagne" et "Sur-la-Ville") et renvoyé l'af-
faire aux autorités communales afin qu'elles se prononcent à
nouveau à ce sujet (ch. III du dispositif).

   Dans ces conditions, il faut examiner si le recou-
rant a encore un intérêt actuel et pratique à l'annulation de
l'arrêt attaqué. Cette exigence de recevabilité du recours de
droit administratif découle de l'art. 103 let. a OJ (ATF 123
II 285 consid. 4 p. 286). Comme plusieurs décisions ont été
contestées devant le Tribunal administratif - assainissement
du stand de tir en raison du bruit, protection des alentours
de la ciblerie, mesures de planification pour la propriété du
recourant et pour l'installation de tir -, l'intérêt du re-

courant à une annulation de ces différentes décisions doit
être examiné dans chaque cas.

   aa)  Cet intérêt actuel et pratique existe dans la
mesure où le programme d'exploitation de l'installation de
tir, après l'assainissement, est contesté. Le Tribunal admi-
nistratif a en effet considéré que la décision du département
cantonal était conforme au droit fédéral, ce point ne devant
pas être réexaminé à la suite du renvoi de l'affaire à cette
autorité (cf. consid. 3 et 5 de l'arrêt attaqué). Il est en
outre manifeste que le recourant, comme voisin du stand de
tir litigieux, est touché plus que quiconque ou la généralité
des administrés par la décision attaquée; il remplit, à cet
égard également, les conditions de l'art. 103 let. a OJ (ATF
126 II 300 consid. 1c p. 302; 124 II 293 consid. 3a p. 303;
121 II 171 consid. 2b p. 174 et les arrêts cités).

   bb)  Le recourant se plaint d'une violation des dis-
positions fédérales sur la protection des biotopes (art. 18
de la loi fédérale sur la protection de la nature et du pay-
sage [LPN; RS 451]) et des eaux souterraines (art. 1 et 6 de
la loi fédérale sur la protection des eaux [LEaux; RS
814.20]), en faisant valoir que des mesures concrètes de pro-
tection des alentours de la ciblerie devraient être prises,
compte tenu notamment des risques de pollution par l'infil-
tration dans le sol et les eaux des métaux lourds contenus
dans les balles. Or le renvoi de l'affaire au département
cantonal, selon le ch. II du dispositif de l'arrêt attaqué,
tend précisément à ce que les autorités compétentes examinent
les mesures de protection à prendre dans le périmètre compre-
nant la butte pare-balles, la ciblerie et leurs environs
(secteurs A et B - cf. consid. 4 de l'arrêt attaqué). Il ap-
paraît donc que les griefs du recourant ont été admis, dans
cette mesure, en dernière instance cantonale; il n'a donc pas

d'intérêt actuel et pratique à contester en l'état, devant le
Tribunal fédéral, cette admission partielle de son recours.

   Par ailleurs, le renvoi de l'affaire aux autorités
communales afin qu'elles revoient la planification pour une
partie du territoire communal (ch. III let. a du dispositif)
tend à ce que soit réexaminée l'affectation des terrains
agricoles voisins de la ciblerie (lieu-dit "En Sagne"), en
fonction des besoins de protection que l'on vient d'évoquer.
A cet égard, la question de la recevabilité du recours de
droit administratif doit être résolue de la même façon.

   cc)  Le recourant critique encore l'arrêt attaqué au
sujet du renvoi de l'affaire aux autorités communales pour
qu'elles statuent à nouveau sur l'affectation de la partie de
sa propriété qui avait été classée en zone à bâtir (une por-
tion de la parcelle n° 95). Le renvoi implique un déclasse-
ment dans une autre zone ou des mesures d'aménagement plus
restrictives, en vertu de l'art. 24 al. 1 LPE (cf. infra,
consid. 8). Le recourant a donc, à ce propos, un intérêt ac-
tuel et pratique à l'admission du recours de droit adminis-
tratif. Comme propriétaire du terrain litigieux, il est en
outre directement touché (cf. supra, consid. 2b/aa).

   dd)  Dans ses conclusions, le recourant demande en
outre au Tribunal fédéral d'ordonner le classement de l'en-
semble de sa parcelle n° 95 en zone à bâtir, soit également
la partie de cette parcelle que le plan d'affectation liti-
gieux inclut dans la zone agricole. Le refus de la commune et
du département cantonal d'étendre la zone constructible à cet
endroit avait été contesté devant le Tribunal administratif,
qui s'est prononcé à ce sujet sous l'angle des normes du
droit de l'aménagement du territoire (art. 15 et 16 LAT). Sur
ce point, le recours de droit administratif ne contient pas
la moindre motivation; aucun argument n'est présenté à l'en-

contre des considérants dans lesquels le Tribunal adminis-
tratif a exposé les raisons de ne pas agrandir la zone de
village dans cette partie de la localité. Présenter une
conclusion sans la moindre argumentation n'est, dans ces
conditions, pas conforme aux exigences formelles de l'art.
108 al. 2 OJ, qui exige du recourant qu'il indique des motifs
(cf. ATF 124 II 146 consid. 2c/aa p. 151; 123 II 359 consid.
6b/bb p. 369). Le Tribunal fédéral n'a donc pas à se pronon-
cer sur la modification de la zone agricole sur la parcelle
n° 95; ce chef de conclusions du recourant est irrecevable.

   ee)  Le recourant se plaint au surplus d'une viola-
tion de l'art. 24 LAT, en relation avec le classement de
l'installation de tir dans la zone de constructions d'utilité
publique.

   La portion de cette zone comprenant la ciblerie (au
lieu-dit "En Sagne") fait partie du périmètre pour lequel le
Tribunal administratif a imposé aux autorités communales de
réexaminer la planification; cela étant, l'arrêt attaqué a
préalablement admis le principe d'une affectation en zone
d'utilité publique. Le recourant a donc un intérêt actuel et
pratique à contester cette décision partielle. Quant à l'af-
fectation en zone d'utilité publique du terrain où se trouve
le stand lui-même, dans le village, elle a d'ores et déjà été
confirmée par le Tribunal administratif. Un propriétaire fon-
cier voisin d'une installation pour laquelle une zone à bâtir
a été spécialement délimitée, et qui est directement exposé
aux nuisances provoquées par cette installation, peut invo-
quer un intérêt digne de protection, au sens de l'art. 103
let. a OJ, à l'annulation de la mesure de planification (cf.
supra, consid. 2b/aa in fine).

   c)  A cause des renvois aux autorités inférieures,
l'arrêt attaqué ne met pas fin aux deux procédures adminis-

tratives concernant l'assainissement et le plan d'affectation
(en tant que le régime applicable aux secteurs "En Sagne" et
"Sur-la-Ville" est contesté, car pour le reste ce plan d'af-
fectation n'a plus à être revu par une autorité cantonale).
Le Tribunal administratif n'a pourtant pas rendu, à ce pro-
pos, des décisions incidentes au sens de l'art. 101 let. a
OJ. Sur les points qu'il y a lieu d'examiner dans la procé-
dure du recours de droit administratif, il s'agit bien plutôt
de décisions partielles sur le fond, tranchant de manière dé-
finitive des questions d'application du droit fédéral de la
protection de l'environnement ou de l'aménagement du terri-
toire. Aussi le recours de droit administratif est-il receva-
ble de ce point de vue (cf. ATF 120 Ib 97 consid. 1b p. 99 et
la jurisprudence citée).

   d)  Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le re-
cours de droit administratif, dans la mesure où il est rece-
vable.

   3.-  Le recourant soutient que la procédure d'assai-
nissement engagée par les services cantonaux aurait dû abou-
tir à la fermeture définitive de l'installation de tir, plu-
tôt qu'à la fixation du programme d'exploitation litigieux.
Il se plaint à ce propos d'une violation des prescriptions
fédérales relatives à la protection contre le bruit.

   a)  Un stand de tir est une installation dont l'ex-
ploitation produit du bruit extérieur. Cette installation est
donc soumise aux règles du droit fédéral sur la protection
contre le bruit (cf. art. 2 al. 1 de l'ordonnance sur la pro-
tection contre le bruit [OPB; RS 814.41], en relation avec
l'art. 7 al. 7 LPE). En l'occurrence, le stand était déjà ex-
ploité lors de l'entrée en vigueur de la loi fédérale sur la
protection de l'environnement (LPE), le 1er janvier 1985, de
telle sorte qu'il doit être considéré comme une ancienne ins-

tallation à laquelle peuvent s'appliquer les prescriptions
sur l'assainissement des art. 16 ss LPE et 13 ss OPB (cf. ATF
125 II 643 consid. 16a p. 665).

   Aux termes de l'art. 16 al. 1 LPE, les installations
qui ne satisfont pas aux prescriptions de la loi fédérale sur
la protection de l'environnement seront assainies. Ces pres-
criptions sont celles des art. 11 al. 2 LPE - sur la limita-
tion préventive des émissions - et 11 al. 3 LPE - sur la li-
mitation plus sévère des émissions en cas d'atteintes nuisi-
bles ou incommodantes -, ainsi que celles qui précisent les
exigences en matière de protection contre le bruit (cf. ATF
126 II 366 consid. 2b p. 367). Doit ainsi être assainie, en
particulier, une installation bruyante qui ne respecte pas
les valeurs limites d'immission fixées dans l'ordonnance sur
la protection contre le bruit (cf. art. 13 al. 1 LPE); cette
ordonnance prévoit, précisément, le respect des valeurs li-
mites d'immission comme objectif de l'assainissement (art. 13
al. 2 let. b OPB). Les valeurs limites d'exposition au bruit
des installations de tir - notamment les valeurs limites
d'immission - sont fixées à l'annexe 7 de l'OPB. Dans le
village de Mutrux, où le degré de sensibilité III est appli-
cable (cf. art. 43 al. 1 let. c OPB), la valeur limite d'im-
mission est de 65 dB(A) (ch. 2 de l'annexe 7 OPB).

   Selon l'arrêt attaqué, le programme annuel, avant
les premières mesures ordonnées dans le cadre de la procédure
d'assainissement le 21 décembre 1995, prévoyait 14 demi-jours
de tir et 3'700 coups de feu, le stand ne comportant aucun
dispositif antibruit (écrans latéraux, tunnels, etc.). Le
Tribunal administratif a retenu que ce mode d'exploitation
entraînait "un net dépassement des valeurs limites", sans
donner d'explications plus précises à ce propos. Le rapport
du 30 juillet 1998 du SEVEN évoque également, sur la base des
données d'exploitation pour les années 1991 à 1993, un "im-

portant dépassement des valeurs limites". Le besoin d'assai-
nissement pour cette installation est ainsi suffisamment éta-
bli; il n'est du reste pas contesté.

   b)  L'approbation, par l'autorité cantonale, du plan
d'assainissement comporte en définitive deux obligations pour
la société de tir: l'installation d'un tunnel antibruit par
ligne de tir, d'une part; la fixation d'un programme annuel
d'exploitation de 6 demi-jours de tir au maximum, exclusive-
ment pendant la semaine, avec un nombre total maximum de
coups de feu arrêté à 3'200, d'autre part. Cela n'est pas lié
à des travaux de transformation du stand. La procédure ne
tend donc qu'à l'assainissement du stand, moyennant la pose
de quatre "tunnels", soit des éléments mobiles longs d'envi-
ron 2 m; ainsi équipé, le stand n'est pas destiné à être uti-
lisé plus intensément qu'avant le début de la procédure d'as-
sainissement. Les prescriptions concernant la modification
d'une installation existante, impliquant le cas échéant
l'exécution simultanée d'un assainissement à l'occasion des
travaux de transformation (art. 18 LPE, art. 8 OPB), n'ont
dès lors pas à être appliquées (cf. ATF 119 Ib 463 consid. 5d
p. 471 et 7a p. 476).

   c)  Les conditions d'exploitation imposées permet-
tent, selon l'arrêt attaqué, le respect de la valeur limite
d'immission de 65 dB(A) dans la villa et dans la dépendance
du recourant (niveaux d'évaluation de 64.7, 63.8 et 65.0
dB(A) aux points de mesure choisis par le SEVEN). Le Tribunal
administratif a en outre considéré que, vu les caractéristi-
ques de l'installation de tir, il ne se justifiait pas d'im-
poser d'autres mesures de limitation des émissions dans le
cadre de la procédure d'assainissement.

   Le recourant conteste à plusieurs égards les appré-
ciations de la juridiction cantonale. Il convient de traiter

successivement ses griefs quant à la méthode de détermination
du niveau de bruit (consid. 4), quant aux mesurages du bruit
et aux calculs à effectuer pour obtenir le niveau Lr (consid.
5), puis quant à la portée des résultats de cette détermina-
tion (consid. 6). En outre, indépendamment du respect de la
valeur limite d'immission, le recourant demande des limita-
tions supplémentaires des émissions en application du prin-
cipe de la prévention (consid. 7).

   4.-  a)  Selon l'ordonnance sur la protection contre
le bruit, le niveau de bruit d'une arme est le niveau de
bruit maximal moyen mesuré à l'aide d'un sonomètre avec le
filtre de pondération A et réglé sur la constante de temps
FAST (niveau L). Pour déterminer les immissions (notamment
pour contrôler le respect des valeurs limites d'immission),
on ne prend pas directement en considération ce niveau L,
mais un niveau d'évaluation Lr, qui est la somme du niveau
de bruit moyen (moyenne énergétique) d'un coup de feu L et
de la correction de niveau K (Lr = L + K; cf. art. 38 OPB et
ch. 3 annexe 7 OPB). La correction de niveau K permet de
tenir compte du genre d'activité de tir dans l'installation
concernée: il est calculé en fonction du nombre annuel de
demi-jours de tir durant la semaine, du nombre annuel de
demi-jours de tir les dimanches et du nombre annuel de coups
de feu (ch. 32 annexe 7 OPB). Selon la formule de détermina-
tion du facteur K, les coups de feu tirés le dimanche ont une
influence sensiblement plus faible sur la correction de ni-
veau (qui est une valeur négative), ce qui devrait favoriser
l'organisation des tirs durant la semaine.

   Le recourant critique sur deux points les formules
pour la détermination du niveau Lr: il fait valoir d'une part
qu'il est contraire à l'art. 8 LPE de se fonder sur le bruit
d'un seul coup de feu (cf. infra, consid. 3c/bb), et d'autre
part que le facteur K favoriserait la multiplication des ins-

tallations de tir, au détriment de la protection de l'envi-
ronnement (cf. infra, consid. 3c/cc). Il met ainsi en cause
la légalité de prescriptions de l'annexe 7 OPB.

   Dans ce domaine, la loi fédérale sur la protection
de l'environnement prévoit une délégation au Conseil fédéral
de la compétence d'édicter des règles de droit (art. 12, 13,
16 al. 2 LPE; cf. art. 164 al. 2 Cst.). Dans la procédure du
recours de droit administratif, le Tribunal fédéral peut, à
titre préjudiciel, contrôler la légalité d'une ordonnance, en
d'autres termes vérifier si le Conseil fédéral s'en est tenu
aux limites que la loi a fixées à son activité réglementaire.
Lorsque la loi laisse au Conseil fédéral une grande marge
d'appréciation quant au contenu de la réglementation, ce
choix lie le Tribunal fédéral (cf. art. 191 Cst.); il ne sau-
rait substituer sa propre appréciation à celle du Conseil
fédéral, mais il doit simplement contrôler que la solution
choisie n'outrepasse pas manifestement les limites de la dé-
légation législative, et qu'elle n'est pas pour d'autres mo-
tifs contraire à la loi ou à la Constitution (ATF 126 II 283
consid. 3b p. 290, 399 consid. 4a; 125 III 295 consid. 2b p.
297; 124 II 241 consid. 3 p. 245; 123 II 472 consid. 4a p.
475; 118 Ib 367 consid. 4 p. 372).

   b)  Le recourant invoque l'art. 8 LPE, aux termes
duquel "les atteintes seront évaluées isolément, collective-
ment et dans leur action conjointe"; il prétend que le niveau
d'évaluation Lr, calculé à partir du bruit d'un seul coup de
feu (L), devrait prendre en compte, pour respecter la norme
précitée, les autres bruits auxquels le voisin d'une instal-
lation de tir est exposé. Il fait aussi valoir que l'annexe 7
OPB ignore l'hypothèse d'une superposition du bruit de plu-
sieurs coups de feu tirés simultanément.

   Dans le cas particulier - celui d'un stand situé en
bordure d'un petit village à vocation agricole, à l'écart des
grandes voies de communication -, on ne voit pas quels autres
bruits s'ajouteraient au bruit du tir durant les quelques pé-
riodes d'exploitation de l'installation. Cela étant, même en
présence de plusieurs sources de bruit, il est nécessaire de
déterminer préalablement le niveau d'évaluation pour chaque
installation, soit pour permettre le calcul de la somme des
immissions de bruit de même genre (art. 40 al. 2 OPB), soit
pour apprécier selon d'autres critères le niveau global
d'exposition au bruit (cf. Christoph Zäch/Robert Wolf, Kom-
mentar zum Umweltschutzgesetz, Zurich 2000, n. 29 ad art.
15). Dans ces conditions, la formule de détermination du
niveau Lr des installations de tir, sur la base du niveau
moyen d'un seul coup de feu (L), n'est pas critiquable.

   Quant à l'hypothèse d'une superposition du bruit de
plusieurs coups de feu simultanés, elle demeure assez théo-
rique dans un petit stand de tir. Quoi qu'il en soit, il
convient de se référer à ce propos aux explications de
l'OFEFP, selon lesquelles cette hypothèse n'a pas à être re-
tenue pour le calcul du niveau moyen L (ce service spécialisé
expose que "cela resterait dans les limites de la dynamique
d'un coup de feu isolé"). L'application de l'art. 8 LPE n'est
donc pas compromise et les griefs du recourant sont à cet
égard mal fondés.

   c)  Le recourant prétend que la définition de la
correction de niveau K aurait pour conséquence de favoriser
les petites installations de tir mal conçues et mal isolées,
en violation des principes de la loi fédérale sur la protec-
tion de l'environnement. Il fournit à ce propos quelques
exemples, démontrant que pour un nombre constant de coups de
feu, les valeurs limites pourraient être respectées quand les
tirs sont répartis dans deux installations, alors qu'elles

seraient dépassées en cas de concentration de tous les tirs
dans une seule installation.

   Dans la présente affaire, il ne s'agit pas d'exami-
ner les exigences applicables à la planification et à la
construction de nouvelles installations de tir, mais unique-
ment de statuer sur l'étendue de l'assainissement d'une an-
cienne installation, indépendamment de tout projet de trans-
formation. Cela étant, il faut relever que le droit fédéral
contient des dispositions qui tendent au regroupement des
installations de tir. L'art. 125 al. 2 de la loi fédérale sur
l'armée et l'administration militaire (LAAM; RS 510.10) dis-
pose que les cantons veillent à la compatibilité des instal-
lations de tir (pour le tir hors du service) avec la protec-
tion de l'environnement et encouragent les installations col-
lectives ou régionales; l'ordonnance sur le tir hors du ser-
vice (RS 512.31) prévoit à son art. 24 certaines modalités de
collaboration intercommunale. Ces règles constituent un des
fondements des mesures d'aménagement du territoire visant à
favoriser la construction de nouvelles installations d'une
certaine importance, plutôt que la multiplication de petites
installations (cf. arrêt non publié du 30 janvier 1996, com-
mune de Nyon, consid. 5). La façon dont le facteur de correc-
tion K est défini ne fait manifestement pas obstacle à l'ap-
plication de ces règles; elle n'est pas non plus en contra-
diction avec ces principes.

   Dans un pur cas d'assainissement (cf. supra, consid.
3b), l'application de la loi fédérale sur la protection de
l'environnement ne saurait avoir pour conséquence nécessaire
la fermeture d'une installation de tir, pour le seul motif
que cette installation n'est utilisée que par les tireurs
d'une ou deux petites communes et qu'elle n'est pas une ins-
tallation collective ou régionale au sens de l'art. 125 al. 2
LAAM. Le but de la procédure d'assainissement doit être,

compte tenu du principe de la proportionnalité et de la ga-
rantie de la situation acquise, la fixation de conditions
d'exploitation conformes à l'art. 11 LPE et aux autres dis-
positions pertinentes (cf. supra, consid. 3a). Le facteur de
correction K, tel qu'il est défini par l'annexe 7 OPB, n'em-
pêche manifestement pas l'application de ces règles et le
Tribunal fédéral n'a aucun motif de revoir, sur ce point, les
critères retenus par le Conseil fédéral. Les griefs du recou-
rant sont donc mal fondés.

   5.-  a)  Le recourant critique les mesures de bruit
qui ont servi de base à l'établissement du rapport technique
du 30 juillet 1998 du SEVEN. Il prétend que les immissions
auraient dû être mesurées à d'autres endroits sur sa proprié-
té (à différents étages de la villa, dans une serre du jar-
din, dans la partie non bâtie de sa parcelle n° 95 en contre-
bas de la villa). Il critique également le sonomètre utilisé
à cette occasion, qui, en raison de sa conception technique,
ne serait plus adapté à ce genre de mesures.

   Au sujet de ce dernier grief, l'OFEFP indique, dans
ses observations sur le présent recours, que les exigences du
droit fédéral relatives aux instruments de mesure (annexe 2
ch. 2 OPB) ont été respectées dans le cas particulier. Aucun
élément concret ne permet d'en douter. Quant au choix des
points de mesure, l'Office fédéral précité en a confirmé le
caractère adéquat lors de l'inspection locale, au cours de
laquelle des tirs ont été effectués, et des mesures de bruit
réalisées. Il aurait certes été possible de mesurer les im-
missions dans d'autres locaux à usage sensible au bruit de la
villa et de la dépendance (au milieu d'une fenêtre ouverte -
cf. art. 39 al. 1 OPB); cela ne signifie cependant pas que
des erreurs ont été commises, sur ce point, par l'auteur du
rapport acoustique. Par ailleurs, il est évident que le ni-

veau de bruit dans une serre d'un jardin d'agrément n'est pas
pertinent pour définir l'ampleur de l'assainissement.

   Les critiques du recourant au sujet de l'absence de
mesures de bruit dans le jardin de sa villa, lequel pourrait
théoriquement accueillir une nouvelle construction - aucun
projet concret n'ayant toutefois été allégué -, sont liées à
ses griefs concernant la planification, soit aux conséquences
du niveau de bruit existant sur la possibilité de classer ce
terrain dans la zone de village; elles seront donc examinées
plus bas (consid. 8).

   b)  Le recourant conteste un élément du calcul du
niveau de bruit moyen L (moyenne énergétique des résultats
des niveaux de plusieurs coups de feu mesurés): selon lui,
l'auteur du rapport acoustique aurait sous-estimé le bruit de
l'installation litigieuse en prenant en compte une proportion
trop faible d'utilisation de l'ancien fusil d'assaut de l'ar-
mée suisse (Fass 57), plus bruyant que le nouveau fusil (Fass
90 - à propos de la différence, de 2 à 3 dB, des niveaux
d'émission [détonation à la bouche et détonation due au pro-
jectile] de ces deux fusils, cf. la publication de l'Office
fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage, Modèle
de calcul du bruit de tir SL-90, Mise à jour 1996, p. 5).

   Dans l'hypothèse déterminante pour la décision d'as-
sainissement, le rapport du SEVEN du 30 juillet 1998 retient
que 25 % des coups seront tirés au moyen du Fass 57 et 75 %
au moyen du Fass 90. Le Tribunal administratif a considéré
que cette proportion était plausible, ou en d'autres termes
que l'auteur du rapport n'avait pas commis d'erreur à ce su-
jet. Sur ce point de nature technique, le Tribunal fédéral
n'a aucun motif de s'écarter de cette appréciation.

   c)  A propos de la détermination du facteur de cor-
rection de niveau K - élément du calcul du niveau Lr pour le
stand litigieux après l'assainissement -, le recourant repro-
che aux autorités cantonales d'avoir assimilé les demi-jours
de tir organisés le 1er août, lorsque la fête nationale ne
tombe pas sur un dimanche, à des demi-jours de tir durant la
semaine, et non pas à des demi-jours de tir le dimanche; on
corrigerait ainsi de façon trop favorable à la société de tir
le niveau L et on obtiendrait ainsi, pour un même nombre an-
nuel de coups de feu, un niveau d'évaluation Lr moins élevé
(cf. supra, consid. 4a). En effet, d'après la formule de
l'annexe 7 OPB, on peut estimer que, dans le calcul des demi-
jours de tir, les dimanches ont trois fois plus de poids que
les jours de semaine. Le Conseil fédéral s'est fondé à ce
propos sur les réactions des voisins des installations de
tir, qui généralement se plaignent davantage du bruit provo-
qué le dimanche; il a donc choisi une solution tendant glo-
balement à la concentration des tirs sur les jours de semaine
(cf. Office fédéral de la protection de l'environnement, Mo-
dèle de calcul du bruit des installations de tir à 300 m,
Berne 1985, p. 43).

   Le Tribunal administratif, qui a admis que les demi-
jours de tir durant la semaine devaient tous être traités de
la même manière dans la détermination du facteur K, y compris
lorsqu'il s'agit des tirs du 1er août, a évoqué à ce propos
le "contexte historico-culturel particulier" de la célébra-
tion de la fête nationale, favorable aux "tirs patriotiques".
De son côté, le recourant invoque le statut de la fête na-
tionale selon le droit fédéral: l'art. 110 al. 3 Cst. dispose
que "le 1er août est assimilé aux dimanches du point de vue
du droit du travail" (l'art. 116bis aCst., en vigueur jus-
qu'au 1er janvier 2000, avait un contenu analogue).

   L'annexe 7 OPB ne fait pas partie du droit du tra-
vail: on peut donc, dans l'application des formules de déter-
mination du niveau Lr, faire abstraction du statut de la fête
nationale selon l'art. 110 al. 3 Cst. Cela étant, il n'est
pas contraire aux principes de la loi fédérale sur la protec-
tion de l'environnement d'interpréter littéralement les no-
tions de "dimanche" et de "semaine" du ch. 32 de l'annexe 7
OPB, et donc de ne pas assimiler aux dimanches, pour le cal-
cul de la correction de niveau K, les différents jours fériés
en semaine. De ce point de vue, les bases de la décision
d'assainissement litigieuse ne sont pas critiquables.

   On pourrait en revanche tenir compte, dans l'éta-
blissement du programme d'exploitation annuel d'une instal-
lation de tir - et non plus dans le calcul du facteur K -,
des particularités locales (traditions historiques, etc.) ou
du besoin de protéger spécialement la tranquillité publique
certains jours (fêtes religieuses, etc.), et imposer une
limitation préventive des émissions en fonction de ces élé-
ments (cf. art. 11 al. 2 LPE). Cette question, distincte de
celle de la détermination du facteur K pour le calcul du ni-
veau Lr, n'est toutefois pas soulevée dans le recours.

   d)  Le recourant critique le refus du Tribunal admi-
nistratif d'ordonner une expertise au sujet du bruit de
l'installation de tir. Or la juridiction cantonale pouvait
se fonder sur les conclusions du rapport du service cantonal
spécialisé et estimer suffisamment probantes les indications
du dossier (cf. ATF 125 II 591 consid. 7a p. 602). A la suite
de l'inspection locale qu'il a effectuée - au cours de la-
quelle le bruit du tir a été une nouvelle fois mesuré et ap-
précié concrètement, avec des explications complémentaires
par des acousticiens de l'administration -, le Tribunal fédé-
ral peut considérer que les constatations de fait du Tribunal
administratif, au sujet de ces données techniques, ne sont ni

manifestement inexactes, ni manifestement incomplètes (cf.
art. 104 let. b et 105 al. 2 OJ).

   6.-  Le recourant prétend que le programme d'exploi-
tation du stand de tir, après l'assainissement, ne permet-
trait pas le respect de la valeur limite d'immission dans ses
bâtiments, car la détermination des niveaux Lr dans le cas
particulier (soit 64.7, 63.8 et 65.0 dB(A) aux trois points
de mesures) aurait été effectuée avec une marge d'erreur de 3
dB(A); en d'autres termes, le niveau d'évaluation Lr dépasse-
rait 65 dB(A) aux trois points de mesure (après adjonction de
3 dB, il atteindrait 67.7, 65.8 et 68 dB(A), respectivement).

   a)  Les résultats de l'évaluation du bruit du stand
de tir, aux trois endroits où le niveau Lr a été déterminé,
sont proches de la valeur limite à respecter en vertu du
droit fédéral. L'autorité qui apprécie ces données de fait,
issues d'un rapport technique, pour en tirer des conséquences
juridiques doit dans ces conditions être assurée que ces ré-
sultats présentent un degré de précision suffisant.

   b)  L'imprécision d'un résultat peut provenir d'er-
reurs "systématiques" (décalage systématique de la moyenne
par rapport à la valeur "vraie", erreurs quant à l'instrumen-
tation, à la procédure de mesurage, au choix des paramètres
d'un modèle, etc.; cf. Robert Hofmann, Lärm und Lärmbekämp-
fung in der Schweiz, EMPA/Dübendorf 2e éd. 2000, p. 11-3).
Ces sources d'erreurs doivent en principe être éliminées.
Dans le cas particulier, les critiques du recourant au sujet
d'éventuelles erreurs systématiques dans le rapport du ser-
vice cantonal spécialisé ont déjà été écartées (cf. supra,
consid. 5); il n'y a pas lieu d'y revenir.

   Par ailleurs, des erreurs "de type aléatoire" se
produisent, qui sont dues à de nombreux facteurs influençant

les résultats de manière incontrôlable et parfois inévitable
(vent, pression atmosphérique, température, etc.; cf.
Hofmann, op. cit., p. 11-4). Le niveau de bruit Lr est une
valeur moyenne (moyenne énergétique, corrigée selon le fac-
teur K; ch. 31 annexe 7 OPB, cf. supra, consid. 4a), calculée
sur la base d'échantillons de valeurs, obtenues dans des
conditions variables. Les erreurs de type aléatoire se carac-
térisent par la dispersion de ces valeurs mesurées autour de
la valeur moyenne, qui est le résultat du processus de déter-
mination du niveau de bruit.

   Dans la technique de mesurage du bruit, pour indi-
quer le degré de précision de la valeur moyenne en fonction
de cette dispersion, la notion statistique d'écart-type est
couramment employée. Cette notion est définie par une formule
mathématique (écart quadratique moyen, racine carrée de la
variance - "Standardabweichung"). On indique donc un inter-
valle symétrique, de part et d'autre de la valeur moyenne,
correspondant à l'écart-type (par exemple: 60 +/- 3 dB). Cela
signifie que la vraisemblance que le résultat de la mesure de
bruit se situe à l'intérieur de cet intervalle - en d'autres
termes, le niveau de confiance - est de 68 % (à propos de ces
notions, cf. Hofmann, op. cit., p. 11-4 ss; André Vessereau,
La statistique, 20e éd. Paris 1999, p. 39). Selon les exi-
gences techniques actuelles, une présentation complète des
résultats de mesures de bruit comprend nécessairement, outre
la valeur moyenne, des indications sur le degré d'imprécision
ou d'incertitude (par conséquent sur le niveau de confiance).
Chaque fois qu'une autorité est appelée à évaluer le bruit
d'une installation sur la base d'un rapport technique, il
faut en principe que les résultats lui soient présentés de
façon complète, et donc que ces indications quant à l'incer-
titude lui soient fournies.

   c)  Conformément à la pratique constante du Tribunal
fédéral relative à l'application des prescriptions de l'or-
donnance sur la protection contre le bruit, la valeur moyenne
(niveau Lr) est déterminante pour apprécier le respect des
valeurs limites (valeurs limites d'immission, valeurs de pla-
nification, valeurs d'alarme - cf. par exemple ATF 125 II 129
consid. 6 p. 137, 643 consid. 18b p. 676 ss; 122 II 33).
Ainsi, lorsque le niveau Lr est égal ou inférieur à la valeur
limite, celle-ci est considérée comme respectée. La marge
d'incertitude (écart-type) ne doit donc pas être interprétée
comme une marge d'erreur, qui impliquerait une correction de
la valeur moyenne (en d'autres termes, si le niveau Lr est,
selon le rapport technique, de 64 +/-3 dB, et la valeur li-
mite de 65 dB, celle-ci est respectée car l'autorité n'a pas
à ajouter 3 dB à la valeur moyenne pour la "corriger" à 67
dB).

   La mention de l'incertitude, dans un rapport acous-
tique à l'intention de l'autorité chargée d'appliquer le
droit de l'environnement, permet cependant une meilleure ap-
préciation de la signification de la valeur moyenne. Un
écart-type important peut signaler une grande hétérogénéité
de l'échantillon. L'autorité compétente devra, le cas
échéant, examiner s'il convient de limiter l'influence des
facteurs aléatoires par des mesurages supplémentaires, dans
de meilleures conditions, afin d'augmenter le nombre de va-
leurs de l'échantillon et le caractère probant du résultat.

   Le degré d'imprécision, exprimé sous forme
d'écart-type, donne aussi des indications sur le risque de
dépassement de la valeur limite (ou, en d'autres termes, sur
l'intervalle de confiance unilatéral). Même dans un cas où le
niveau moyen Lr est égal ou inférieur à la valeur limite,
cette valeur peut être occasionnellement dépassée (selon les
conditions météorologiques ou d'autres facteurs aléatoires).
Ce risque de dépassement est, d'un point de vue statistique,
de 50 % quand le niveau moyen Lr correspond exactement à la
valeur limite et il diminue en fonction de l'écart (négatif)
entre le niveau Lr et la valeur limite. On estime alors ce
risque en fonction de l'écart-type, ou de l'indice de disper-
sion des valeurs mesurées par rapport à la moyenne. Sous cet
angle également, on peut déterminer un niveau de confiance à
accorder à l'évaluation du bruit dans un cas particulier.

   Cette indication quant au risque de dépassement
d'une valeur limite n'est pas décisive pour apprécier le res-
pect de cette valeur limite - car, comme on vient de l'expo-
ser, c'est dans ce cas la comparaison entre le niveau moyen
Lr et la valeur limite qui est déterminante -, mais elle peut
néanmoins avoir une certaine portée. Indépendamment du res-
pect des valeurs limites, l'art. 11 al. 2 LPE, qui consacre
le principe de la prévention, prescrit des limitations des
émissions "dans la mesure que permettent l'état de la techni-
que et les conditions d'exploitation et pour autant que cela
soit économiquement supportable". Il faut, dans ce cadre,
examiner les limitations possibles au regard du principe de
la proportionnalité, donc en fonction de leur utilité pour la
protection contre les atteintes dans un cas concret (cf.
André Schrade/Theo Loretan, Kommentar zum Umweltschutzgesetz,
Zurich 1998, n. 35 ad art. 11). Lorsque la probabilité d'un
dépassement de la valeur limite est statistiquement impor-
tante (parce que le niveau Lr est proche de la valeur li-
mite), il appartient à l'autorité compétente d'apprécier la
justification et la proportionnalité de mesures préventives
fondées sur l'art. 11 al. 2 LPE afin d'obtenir une réduction
des immissions et, par conséquent, une diminution du risque
de dépassement. Cela étant, l'application de l'art. 11 al. 2
LPE suppose une appréciation globale de la conception ainsi
que des conditions d'exploitation de l'installation (cf. in-
fra, consid. 7). C'est pourquoi il n'y a pas lieu d'examiner

plus avant cette question ici; il suffit de relever que seule
une présentation complète des résultats, avec mention de
l'incertitude, permet en principe aux autorités d'exercer sur
des bases sûres leur pouvoir d'appréciation.

   d)  Une autre source d'incertitude provient de l'ar-
rondissement des résultats de la procédure de détermination
du niveau de bruit, car chaque fois qu'un chiffre est arron-
di, on s'éloigne de la valeur exacte. Il y a pourtant lieu
d'arrondir les chiffres d'un résultat qui ont un caractère
aléatoire ou incertain. En d'autres termes, si la détermina-
tion du niveau Lr donne par exemple un résultat de 63.4 +/- 3
dB, la valeur de 63.4 peut être arrondie à 63, compte tenu de
l'ampleur de l'écart-type (de même, un résultat de 62.7
devrait être arrondi à 63). En pareil cas, les chiffres après
la virgule (décimales) ne sont en principe pas significatifs
et il n'y a aucune justification à les mentionner dans la
présentation des résultats (cf. Hofmann, op. cit., p. 11-5).
Pour ne pas augmenter l'imprécision, cette opération
d'arrondissement doit s'effectuer à la fin du calcul, et non
pas à chaque étape de celui-ci.

   On ne saurait exclure que, dans certains cas, grâce
à un modèle de calcul particulièrement précis ou à une grande
homogénéité de l'échantillon de valeurs mesurées (ce qui ré-
duirait l'écart-type), on puisse présenter des résultats en
renonçant à arrondir un niveau moyen (en conservant donc un
chiffre significatif après la virgule), lorsqu'il est très
proche de la valeur limite déterminante. Cependant, dans la
plupart des cas, c'est un résultat arrondi qui doit servir de
base aux décisions des autorités chargées d'apprécier le res-
pect des valeurs limites fixées par le droit fédéral.

   e)  Dans le cas particulier, le Tribunal administra-
tif a pris en considération les niveaux Lr, dans les bâti-

ments du recourant, tels qu'ils avaient été déterminés dans
la décision d'assainissement après mesurage (64.7, 63.8 et
65.0 dB(A), sans tenir compte des données moins détaillées
d'un "cadastre informatisé", mis au point par le service can-
tonal spécialisé et joint au rapport technique. Il a évalué
l'incertitude à +/- 3 dB, en employant improprement à ce su-
jet les notions de "marge d'erreur" (dans l'arrêt attaqué) et
de "marge de tolérance" (dans sa réponse au recours). Cette
évaluation de l'incertitude n'a pas été contestée par le re-
courant et elle a été jugée adéquate par un assesseur spécia-
lisé du Tribunal administratif; il n'a donc pas été demandé
au service cantonal spécialisé de compléter l'échantillon des
valeurs. D'autres mesures ont du reste été faites lors de
l'inspection locale (sans nouveau calcul des niveaux Lr) et
les acousticiens des services spécialisés du canton et de la
Confédération n'ont trouvé aucune raison de remettre en cause
les résultats des calculs effectués précédemment. Dans ces
conditions, le caractère probant des valeurs moyennes rete-
nues dans la décision d'assainissement est suffisamment éta-
bli. Arrondis, les niveaux Lr dans les bâtiments du recourant
sont respectivement de 65, 64 et 65 dB(A); la valeur limite
d'immission n'est donc pas dépassée.

   Le programme d'exploitation de l'installation de
tir, après l'assainissement, ne viole pas la règle de l'art.
13 al. 2 let. b OPB; le recours est, dans cette mesure, mal
fondé. Dans cette situation, la question d'un allégement au
sens des art. 17 LPE ou 14 OPB ne se pose pas.

   7.-  Le recourant soutient que le programme d'ex-
ploitation du stand devrait encore être réduit, en vertu du
principe de la prévention (cf. art. 11 al. 2 LPE, en relation
avec l'art. 13 al. 2 let. a OPB).

   Le Tribunal administratif a considéré à ce propos
qu'il ne serait pas économiquement supportable pour la so-
ciété de tir, tenue d'acquérir des tunnels antibruit, de re-
noncer à une partie de son programme annuel de six demi-jours
et 3'200 coups. Cet argument est pertinent dans le cas parti-
culier. Il s'agit en effet d'un petit stand de tir, avec un
programme d'utilisation en définitive très modeste après
l'assainissement. En outre, ce programme annuel est publié à
l'avance, ce qui peut permettre aux personnes incommodées de
prendre des dispositions pour échapper au bruit, le cas
échéant en s'absentant quelques heures du village six fois
par année. Dans ces conditions, il ne se justifie pas d'envi-
sager en l'état des mesures supplémentaires de limitation des
émissions. Les griefs du recourant à l'encontre de la déci-
sion d'assainissement sont donc mal fondés.

   8.-  Le recourant reproche au Tribunal administratif
d'avoir mal appliqué l'art. 24 al. 1 LPE lorsqu'il a considé-
ré que la portion de la parcelle n° 95 incluse dans la zone
du village (environ un quart de la surface totale de cette
parcelle), selon le nouveau plan général d'affectation, ne
pouvait pas être classée en zone à bâtir, et qu'il a renvoyé
l'affaire aux autorités communales afin qu'elles examinent et
adoptent un autre régime d'affectation pour ce terrain. Selon
le recourant, cette partie de sa propriété - où se trouve sa
villa, son garage et un jardin d'agrément en contrebas - est
comprise dans l'ensemble de terrains déjà largement bâtis du
village, au sens de l'art. 15 let. a LAT, ce qui justifierait
son maintien dans la zone à bâtir.

   a)  L'art. 24 al. 1, 1e phrase LPE dispose que "les
nouvelles zones à bâtir destinées à la construction de loge-
ments ou d'autres immeubles destinés au séjour prolongé de
personnes ne peuvent être prévues qu'en des endroits où les
immissions causées par le bruit ne dépassent pas les valeurs

de planification, ou en des endroits dans lesquels des mesu-
res de planification, d'aménagement ou de construction per-
mettent de respecter ces valeurs". La valeur de planification
est de 60 dB(A) lorsque, comme dans le cas particulier, le
degré de sensibilité III est applicable (ch. 2 annexe 7 OPB).

   D'après les calculs du niveau d'évaluation Lr, l'ex-
ploitation de l'installation de tir, telle qu'elle a été dé-
finie à l'issue de la procédure d'assainissement, provoque un
dépassement clair de la valeur de planification à l'emplace-
ment de la villa du recourant (64 à 65 dB). Le Tribunal admi-
nistratif a déduit de ces résultats qu'il en irait de même
dans le jardin en contrebas; il n'y a aucun motif de mettre
en doute cette appréciation.

   Il en résulte que si la zone de village doit, à cet
endroit, être assimilée à une "nouvelle zone à bâtir" au sens
de l'art. 24 al. 1 LPE, un déclassement s'impose ou, à tout
le moins, le plan d'affectation communal doit être complété
par des "mesures de planification, d'aménagement ou de
construction" qui permettent de respecter les valeurs de pla-
nification.

   b)  Un déclassement - en zone agricole, par exemple
- de cette partie de la propriété du recourant aurait pour
effet direct de compromettre des projets d'agrandissement de
la villa ou du garage. Il empêcherait également la construc-
tion, dans le jardin, d'un nouveau bâtiment d'habitation ou
de nouveaux locaux commerciaux et artisanaux, admis en zone
du village (cf. art. 5 du règlement sur le plan général d'af-
fectation et la police des constructions), quand bien même la
valeur de planification pourrait éventuellement être consi-
dérée comme respectée pour des locaux d'exploitation, puis-
qu'elle doit alors être augmentée à 65 dB(A) en vertu de
l'art. 42 al. 1 OPB. Sortir ce terrain de la zone à bâtir re-

présenterait donc une atteinte relativement grave aux inté-
rêts du recourant, sous l'angle de la garantie de la proprié-
té (art. 26 al. 1 Cst.).

   En annulant le classement de ce terrain en zone du
village, le Tribunal administratif n'a pas donné d'injonc-
tions précises aux autorités communales. Il n'a donc pas
exclu que cette affectation soit en principe confirmée, mais
avec des prescriptions complémentaires correspondant aux "me-
sures de planification, d'aménagement ou de construction" de
l'art. 24 al. 1 LPE, permettant le respect des valeurs de
planification. On pourrait envisager, à ce propos, de n'auto-
riser les nouvelles constructions sur ce terrain que si elles
sont réservées à des locaux d'exploitation, ou éventuellement
d'imposer une orientation des locaux d'habitation dans une
direction opposée à celle du stand. De telles prescriptions
n'auraient cependant qu'un champ d'application réduit: en
raison de la surface de la zone constructible sur la proprié-
té du recourant et de la configuration des lieux, il semble
que seul un bâtiment nouveau pourrait y être érigé.

   Ces conséquences possibles d'une application de
l'art. 24 al. 1 LPE ayant été exposées, il convient d'exa-
miner si l'on est en présence d'une "nouvelle zone à bâtir"
ou si, au contraire, il s'agit d'une zone à bâtir existante,
non visée par l'art. 24 al. 1 LPE.

   c)  Le plan général d'affectation adopté le 23 avril
1997 par le conseil général de Mutrux et approuvé par le Dé-
partement cantonal des infrastructures le 23 juillet 1998,
est le premier plan d'affectation de la commune au sens des
art. 14 ss LAT. De ce point de vue, la zone du village est
une nouvelle zone à bâtir. Cela n'entraîne toutefois pas né-
cessairement l'application de l'art. 24 al. 1 LPE car il faut
déterminer si le terrain concerné appartenait auparavant à la

zone à bâtir provisoire au sens de l'art. 36 al. 3 LAT, soit
à la "partie de l'agglomération qui est déjà largement bâ-
tie"; en pareil cas, le premier classement formel en zone à
bâtir n'est pas assimilé à la création d'une nouvelle zone à
bâtir car il s'agit d'une confirmation de l'affectation ac-
tuelle (cf. Robert Wolf, Kommentar zum Umweltschutzgesetz,
Zurich 2000, n. 15 ad art. 24 LPE).

   Le Tribunal administratif a considéré, après une
inspection locale, que la parcelle n° 95 du recourant ne fai-
sait plus partie du "village proprement dit" puisqu'elle est
située au nord du chemin public conduisant au Mont-Aubert,
qui en constitue la limite; il a donc appliqué l'art. 24 al.
1 LPE. Le recourant prétend au contraire que son terrain,
étroitement lié au village, faisait partie de la zone à bâtir
provisoire selon l'art. 36 al. 3 LAT. Il s'agit là d'une
question d'appréciation.

   Le Tribunal fédéral n'a pas à substituer sans motifs
objectifs sa propre appréciation à celle du Tribunal adminis-
tratif. Dans le cas particulier, il peut cependant se fonder
également sur des constatations faites directement lors d'une
inspection locale, dont il découle que le chemin du Mont-
Aubert ne doit pas impérativement être traité comme une li-
mite claire entre la zone à bâtir provisoire et le territoire
non constructible. On peut au contraire estimer que cette
route a une fonction de rue villageoise, desservant des ter-
rains construits situés de part et d'autre. En d'autres ter-
mes, on aurait pu, sous l'empire de l'art. 36 al. 3 LAT, ap-
pliquer un régime identique au terrain du recourant (villa et
espace de dégagement), d'une part, et aux terrains bâtis di-
rectement voisins mais situés au-delà de la route, d'autre
part. Du reste, la délimitation de la zone du village dans
cette partie de la localité - délimitation qui semble cohé-
rente et qui n'a jamais été remise en cause sous l'angle de

la législation sur l'aménagement du territoire avant que le
Tribunal administratif ne se prononce, d'office, sur la por-
tée de l'art. 24 al. 1 LPE - pourrait être interprétée comme
une simple confirmation du régime précédemment applicable,
celui de la zone à bâtir provisoire.

   D'autres éléments concrets doivent être pris en
considération à ce propos: la nature du bruit auquel est
exposé le terrain litigieux (bruit qui n'est pas constant,
comme le bruit routier ou celui d'une installation indus-
trielle par exemple, mais qui se produit quelques heures par
année, selon un programme annoncé à l'avance - cf. supra,
consid. 7), et la surface réduite de ce terrain, où la proba-
bilité de construction de nouveaux locaux d'habitation est
faible. Dans ces conditions, une interprétation restrictive
de la notion de "zone à bâtir provisoire", ayant pour effet
d'imposer au recourant les conséquences rigoureuses d'un dé-
classement ou d'exiger des autorités communales des prescrip-
tions d'urbanisme détaillées qui limiteraient les possibili-
tés de construire (cf. supra, consid. 8b), apparaît dispro-
portionnée. Vu l'ensemble des circonstances, il se justifie
au contraire de considérer que la portion de la parcelle n°
95 classée dans la zone du village fait partie d'une zone à
bâtir existante, ce qui exclut l'application de l'art. 24 al.
1 LPE. En choisissant une autre solution, le Tribunal admi-
nistratif a abusé de son pouvoir d'appréciation et il a, par-
tant, violé la disposition précitée (cf. art. 104 let. a OJ).

   Le recours de droit administratif doit être admis
dans cette mesure. Le Tribunal fédéral peut réformer lui-même
la décision cantonale (art. 114 al. 2 OJ). Il y a lieu en
conséquence de modifier le ch. III let. a du dispositif de
l'arrêt attaqué, en ajoutant à la fin de ce paragraphe la
phrase suivante: "Cette annulation ne concerne pas la partie

de la parcelle n° 95 du recourant affectée en zone du vil-
lage".

   9.-  Le recourant critique encore le nouveau plan
d'affectation communal à cause du classement de l'installa-
tion de tir dans une zone d'utilité publique. Il fait valoir
que cette solution reviendrait à éluder l'application de
l'art. 24 LAT ("exceptions prévues hors des zones à bâtir"),
l'emplacement de cette installation n'étant pas imposé par sa
destination; en outre, les nuisances liées à son exploitation
compromettraient le développement du village.

   Ces critiques concernent une installation existante,
et non pas un projet d'installation pour lequel l'octroi
d'une autorisation de construire serait litigieux. Son clas-
sement en zone d'utilité publique, à l'occasion de l'établis-
sement du premier plan d'affectation de la commune, ne modi-
fie donc en rien l'utilisation effective, actuelle ou future,
des deux terrains qu'elle occupe (stand et ciblerie). Pour la
parcelle où se trouve le stand, dans le prolongement direct
de la zone du village, un classement en zone agricole ou dans
une autre zone non constructible ne s'impose manifestement
pas. Quant au secteur de la zone d'utilité publique réservé
aux cibles, il est très restreint (500 m2 environ). Peut-être
un maintien de ce dernier secteur dans la zone agricole
aurait-il été concevable (l'obligation d'insérer un stand de
tir dans une zone constructible concerne en principe des ins-
tallations plus importantes - cf. ATF 119 Ib 439 consid. 4b
p. 440; arrêt non publié du 30 janvier 1996, commune de Nyon,
consid. 2a); quoi qu'il en soit, dans cette situation
concrète d'un stand déjà construit et exploité, on ne voit
pas en quoi la mesure de planification critiquée porterait
atteinte aux principes de l'aménagement du territoire. Aussi
la solution du plan d'affectation communal ne viole-t-elle
pas l'art. 24 LAT (cf. ATF 124 II 391 consid. 2c p. 394). Le

classement en zone d'utilité publique ne fait, pour le reste,
manifestement pas obstacle aux mesures de limitation des nui-
sances fondées sur la législation fédérale sur la protection
de l'environnement. Les griefs du recourant sont donc, à cet
égard, mal fondés.

   10.-  Il s'ensuit que le recours de droit adminis-
tratif est partiellement admis, au sens du considérant 8,
dans la mesure où il est recevable.

   11.-  Le recourant doit supporter une partie des
frais de justice. La commune de Mutrux et les autorités can-
tonales ne peuvent en revanche pas être condamnées au paie-
ment des frais. Comme la cause de l'admission partielle du
recours de droit administratif n'est pas liée aux conditions
d'exploitation du stand de tir, la société de tir n'a pas à
payer de frais de justice (art. 153, 153a et 156 al. 1 à 3
OJ).

   Vu l'issue de la cause, le recourant a droit à des
dépens réduits, mis à la charge de la commune. Quant aux au-
torités cantonales et communales, elles n'ont pas droit à des
dépens (art. 159 al. 1 et 2 OJ). Le recourant a en outre
droit, en principe, à des dépens dus par la société de tir;
cette société a également, de son côté, droit à des dépens
dus par le recourant; il se justifie toutefois de prononcer
la compensation de ces créances (art. 159 al. 3 OJ).

                       Par ces motifs,

           l e   T r i b u n a l   f é d é r a l :

   1. Déclare le recours de droit public irrecevable;

   2. Admet partiellement le recours de droit admi-
nistratif, dans la mesure où il est recevable, et complète le
ch. III let. a du dispositif de l'arrêt attaqué par l'adjonc-
tion de la phrase suivante: "Cette annulation ne concerne pas
la partie de la parcelle n° 95 du recourant affectée en zone
du village";

   Rejette pour le surplus le recours de droit adminis-
tratif;

   3. Met un émolument judiciaire réduit, de 3'000 fr.,
à la charge du recourant;

   4. Met une indemnité de 1'000 fr., à payer au recou-
rant à titre de dépens, à la charge de la commune de Mutrux;

   5. Dit que les dépens dus au recourant par la Socié-
té de tir Union Jurassienne, d'une part, et à la Société de
tir Union Jurassienne par le recourant, d'autre part, sont
compensés;

   6. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires du recourant et des intimées, au Tribunal administra-
tif, au Département des infrastructures et au Département de

la sécurité et de l'environnement du canton de Vaud, ainsi
qu'à l'Office fédéral de l'environnement, des forêts et du
paysage et à l'Office fédéral du développement territorial.

Lausanne, le 30 novembre 2000
JIA/col

            Au nom de la Ie Cour de droit public
                 du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
                        Le Président,

                        Le Greffier,