Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2C.1/1998
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2C.1/1998

        IIe   C O U R   D E   D R O I T   P U B L I C
       ***********************************************

                       21 février 2000

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger, pré-
sident, Hungerbühler, R. Müller, Yersin et Zappelli, juge
suppléant. Greffière: Mme Rochat.

           Statuant sur l'action en responsabilité
                        intentée par

C.H.________ et sa fille M.H.________,

tous deux représentés par Me Jean-Pierre Garbade, avocat à
Genève,

dans la cause qui oppose les parties demanderesses à l'Etat
de Genève, représenté par Me Michel Bergmann, avocat à
Genève,

   (action en responsabilité pour acte illicite de l'Etat)

          Vu les pièces du dossier d'où ressortent
                  les  f a i t s  suivants:

   A.- V.________, ressortissante française, née le 26
février 1967, a mis au monde l'enfant M.________, née à
Ambilly (Haute Savoie) le 16 mai 1994. Le 14 février 1995, à
Genève, elle a épousé le père de l'enfant, C.H.________, né
le 19 septembre 1948.

   Dans le cadre d'une enquête pénale pour infractions
à la loi fédérale sur les stupéfiants (Lstup; RS 812.121),
V.H.________ a été appréhendée le 22 février 1995 et conduite
le lendemain à la prison de Champ-Dollon. Le 24 février 1995,
elle a été inculpée d'infraction à l'art. 19 ch. 1 et ch. 2
lettre a Lstup pour avoir participé, de concert avec
C.H.________, à un trafic de cocaïne.

   L'enfant M.________, alors âgée de 9 mois, qui se
trouvait avec sa mère au moment de son interpellation par la
police, a été conduite au foyer "Piccolo", lequel accueille
des enfants dans des situations d'urgence. Elle y resta
jusqu'au 24 février 1995, jour où X.________, frère de
V.H.________, est venu la chercher.

   Le 1er mars 1995, le juge d'instruction a sollicité
de la Chambre d'accusation la prolongation de la détention de
V.H.________. Il a motivé sa requête par le fait que l'enquê-
te dirigée contre l'inculpée n'était pas terminée et que les
conditions de la délivrance du mandat d'arrêt existaient tou-
jours. Il a invoqué le besoin de déterminer le rôle joué par
l'inculpée dans le trafic de stupéfiants, ainsi que les ris-
ques de collusion, de fuite et de réitération. Par arrêt du 3
mars 1995, la Chambre d'accusation, faisant siens les motifs
invoqués par le juge d'instruction, a autorisé la prolonga-
tion de la détention jusqu'au 17 mars 1995.

   V.H.________ est décédée des suites d'une intoxica-
tion à l'héroïne dans la nuit du 4 au 5 mars 1995.

   Le lendemain, le Procureur général du canton de
Genève a ouvert une information pénale du chef des art. 115,
117 et 128 CP aux fins de découvrir les causes du décès de
V.H.________. Cette procédure a cependant été classée par dé-
cision du 12 avril 1996. Le Procureur général a notamment re-
tenu que V.H.________ était décédée d'une intoxication massi-
ve à l'héroïne, sans qu'il ait été possible de déterminer par
quelles sources ce stupéfiant lui était parvenu. Aucune faute
ne pouvait être reprochée à la direction ou au personnel de
la prison, car ceux-ci n'étaient pas en mesure d'éviter que
des stupéfiants pénètrent dans l'établissement, par petites
quantités. Cette décision n'a pas fait l'objet d'un recours.

   B.- La procédure pénale ouverte contre C.H.________
et un coïnculpé a été close le 4 novembre 1996.

   Le 25 novembre 1997, C.H.________ a été condamné à
une peine de 30 mois de réclusion, sous déduction de 8 mois
et 3 jours de détention préventive, pour infraction à l'art.
19 ch. 1 et 2 Lstup, avec la circonstance aggravante de la
quantité, et coupable d'infractions aux art. 24 et 307 CP
avec la circonstance atténuante de la tentative.

   Le 21 septembre 1998, la Chambre pénale de la Cour
de justice du canton de Genève a partiellement admis le re-
cours de C.H.________. Elle l'a libéré d'une partie des in-
fractions à la Lstup qui lui étaient reprochées et l'a con-
damné à la peine de 28 mois de réclusion, sous déduction de
la détention préventive subie.

   Le pourvoi en nullité déposé par C.H.________ a été
rejeté par la Cour de cassation pénale du Tribunal fédéral,

dans la mesure où il était recevable, par arrêt du 16 décem-
bre 1998.

   C.- Les 4 mars 1996 et 17 mars 1997, C.H.________ et
sa fille M.________ ont déposé des réquisitions de poursuite
contre l'Etat de Genève pour un montant de 150'000 fr. à rai-
son de l'arrestation et du décès de V.H.________. Ces pour-
suites ont été frappées d'opposition.

   Par acte du 13 janvier 1998, C.H.________ et
M.H.________ ont ouvert une action en responsabilité contre
l'Etat de Genève et demandent principalement au Tribunal
fédéral de:

   "1. Dire et constater que la remise de V.H.________
             à disposition du Juge d'instruction sous mandat
             d'amener le 23 février 1995, son arrestation le
             lendemain et la prolongation de sa détention par
             la Chambre d'accusation le 3 mars 1995 consa-
             craient une violation du droit de M.H.________
             au respect de sa vie familiale au sens de l'art.
             8 ch. 1 CEDH.

   2.  Condamner la République et canton de Genève à
             payer 146'533.30 fr. à M. C.H.________, en sa
             qualité de représentant légal de M.H.________.

   3.  Condamner la République et canton de Genève à
             payer 500'000 fr. à M. C.H.________ pour le dom-
             mage subi par lui-même (...)".

   La requête d'assistance judiciaire présentée par les
demandeurs a été admise par décision du Tribunal fédéral du
22 avril 1998, Me Jean-Pierre Garbade étant désigné comme
avocat d'office (art. 152 al. 2 OJ).

   Au terme de sa réponse, l'Etat de Genève a conclu au
rejet de la demande en soulevant la prescription de l'action
et en contestant l'illicéité des actes reprochés aux agents
de l'Etat quant au fond.

   A l'issue de la réplique et de la duplique, une au-
dience d'instruction préliminaire s'est tenue le 29 octobre
1998, au cours de laquelle la tentative de conciliation n'a
pas abouti. La séance a ensuite été consacrée à la prépara-
tion de l'administration des moyens de preuve requis par les
parties.

   Le Juge délégué a procédé à l'audition des vingt-
deux témoins des parties lors des audiences des 21 et 27
janvier 1999, ainsi que du 15 avril 1999. Le témoin
S.________ a été entendue plus tard à Genève, par commission
rogatoire du 11 juin 1999.

   Par ordonnance du 28 janvier 1999, le Juge délégué a
admis la requête d'expertise présentée par les demandeurs au
sujet de l'analyse des cheveux prélevés sur le corps de
V.H.________ après son décès. L'expert désigné, le docteur
K.________, toxicologue, maître de conférences de médecine
légale à l'Université Louis Pasteur de Strasbourg, a déposé
un premier rapport le 23 mars 1999, complété à la suite de
questions complémentaires des demandeurs et du Juge délégué
les 17 mai et 3 août 1999.

   La procédure préparatoire a été clôturée par ordon-
nance du Juge délégué du 1er octobre 1999, après rejet de la
requête de contre-expertise des demandeurs.

   Les parties ont renoncé aux plaidoiries et ont pro-
duit un mémoire écrit.

   Au terme de leur mémoire, les demandeurs ont réduit
leurs conclusions à 80'242 fr.40 en faveur de M.H.________
et à 315'000 fr. en faveur de C.H.________. De son côté,
l'Etat de Genève a maintenu ses conclusions.

   C o n s i d é r a n t   e n   d r o i t:

   1.- Le Tribunal fédéral connaît en instance unique
des contestations de droit civil entre un canton d'une part
et un particulier d'autre part, lorsque l'une des parties le
requiert en temps utile et que la valeur litigieuse est d'au
moins 8'000 fr. (art. 42 al. 1 OJ). La recevabilité de l'ac-
tion est examinée d'office (art. 3 al. 1 PCF).

   a) Sont des contestations de droit civil au sens de
l'art. 42 al. 1 OJ en relation avec l'art. 110 al. 1 ch. 4
aCst., non seulement celles qui sont soumises au droit privé
stricto sensu, mais également d'autres prétentions patrimo-
niales contre l'Etat, lorsque sa responsabilité légale, con-
tractuelle ou quasi contractuelle est engagée en vertu du
droit public.

   Fondée sur le droit public, soit sur la loi genevoi-
se sur la responsabilité de l'Etat et des communes du 24 fé-
vrier 1989 (ci-après: LREC), la présente action remplit les
conditions de l'art. 42 al. 1 OJ pour être recevable comme
contestation de droit civil.

   b) A teneur des art. 1er et 2 LREC, l'Etat de Genève
et les communes du canton sont tenus de réparer le dommage
résultant pour des tiers d'actes illicites commis soit inten-
tionnellement, soit par négligence ou imprudence dans l'exer-
cice de leurs fonctions par les magistrats qui les représen-
tent, ou par leurs fonctionnaires et agents dans l'accomplis-
sement de leur travail, les lésés n'ayant aucune action di-
recte envers les magistrats ni contre les fonctionnaires ou
agents. Selon l'art. 6 LREC, les dispositions précédentes de
la LREC sont soumises aux règles générales du code civil ap-
pliqué à titre de droit cantonal supplétif. Aux termes de
l'art. 7 LREC, le tribunal de première instance du canton de

Genève est compétent pour statuer sur les demandes fondées
sur cette loi (al. 1), la loi de procédure civile cantonale
étant applicable (al. 2). Cette voie cantonale s'efface en
l'espèce devant l'action directe au sens de l'art. 42 al. 1
OJ.

   2.- Les prétentions des demandeurs reposent sur deux
fondements. Ce sont, d'une part, le tort moral causé à
M.H.________ par l'arrestation prétendument illicite de sa
mère, d'autre part, le tort moral et la perte de soutien
causés aux deux demandeurs par le décès de V.H.________.

   a) A l'égard de toutes ces prétentions, le défendeur
soulève l'exception de la prescription. Il relève que les de-
mandeurs ont eu connaissance du dommage et de son auteur le
22 février 1995 en ce qui concerne la prétendue illicéité de
la détention de V.H.________, et le 18 mai 1995, au moment où
Me Garbade a pu consulter le dossier constitué à la suite du
décès de V.H.________, en ce qui concerne le tort moral et la
perte de soutien engendrés par ce décès. Or, si la première
réquisition de poursuite a interrompu le délai de prescrip-
tion, la seconde n'a été formée qu'au moment où la créance
était déjà prescrite.

   En ce qui concerne le dommage causé par l'incarcéra-
tion, les demandeurs prétendent qu'ils n'en ont eu connais-
sance qu'après la clôture de l'enquête ouverte contre
C.H.________ pour trafic de stupéfiants, soit le 4 novembre
1996, car c'est seulement à ce moment-là que V.H.________ a
été mise hors de cause de manière certaine. Il n'était donc
pas possible de mesurer plus tôt l'impact de la détention
préventive sur le psychisme de la détenue, justifiant une ac-
tion contre l'Etat. Quant au dommage encouru en raison du
décès de V.H.________, les demandeurs soutiennent que la
prescription n'a commencé à courir que le 4 novembre 1996,
jour de la clôture de l'instruction préparatoire dirigée con-

tre les époux H.________, éventuellement le 22 avril 1996,
jour où les demandeurs ont pu prendre connaissance du dossier
instruit à la suite du décès de V.H.________. Quelle que soit
la date où elle a commencé, cette prescription a été inter-
rompue par la réquisition de poursuite du 17 mars 1997, puis
par le dépôt de la demande le 13 janvier 1998.

   b) La loi sur la responsabilité de l'Etat et des
communes étant muette à propos de la prescription, il appar-
tient au droit civil fédéral, appliqué comme droit cantonal
supplétif selon l'art. 6 LREC, de régler la question de la
prescription (Thierry Tanquerel, La responsabilité de l'Etat
sous l'angle de la loi genevoise sur la responsabilité de
l'Etat et des communes du 24 février 1989, in SJ 1997,
p. 365).

   Aux termes de l'art. 60 al. 1 CO, l'action en domma-
ges-intérêts ou en paiement d'une somme d'argent à titre de
réparation morale se prescrit par un an à compter du jour où
la partie lésée a eu connaissance du dommage ainsi que de la
personne qui en est l'auteur, et, dans tous les cas, par dix
ans dès le jour où le fait dommageable s'est produit.

   Selon la jurisprudence relative à l'art. 60 al. 1
CO, le créancier connaît suffisamment le dommage lorsqu'il
apprend, touchant son existence, sa nature et ses éléments,
les circonstances propres à fonder et à motiver une demande
en justice. Le créancier n'est pas admis à différer sa deman-
de jusqu'au moment où il connaît le montant absolument exact
de son préjudice, car le dommage peut devoir être estimé se-
lon l'art. 42 al. 2 CO. Au demeurant, le dommage est suffi-
samment défini lorsque le créancier détient assez d'éléments
pour qu'il soit en mesure de l'apprécier (ATF 111 II 55 con-
sid. 3a p. 57; 109 II 433 consid. 2 p. 434/435; 108 Ib 97
consid. 1c p. 90/100 et les arrêts cités). Eu égard à la
brièveté du délai de prescription d'un an, on ne saurait se

montrer trop exigeant à ce sujet à l'égard du créancier; sui-
vant les circonstances, il doit pouvoir disposer d'un certain
temps pour estimer l'étendue définitive du dommage (ATF 111
II 55 consid. 3a p. 57). Selon le principe de l'unité du dom-
mage, celui-ci doit être considéré comme un tout et non comme
la somme de préjudices distincts. Il en résulte que le délai
de prescription ne court pas, en cas d'évolution de la situa-
tion, avant que le dernier élément du dommage soit survenu.
Cette règle vise toutefois essentiellement les cas de préju-
dices consécutifs à une atteinte à la santé de la victime
dont il n'est pas possible de mesurer d'emblée l'évolution
avec suffisamment de sécurité (ATF 112 II 118 consid. 4
p. 123; 108 Ib 97 consid. 1c, p. 100; 93 II 498 consid. 2
p. 502). Le délai de l'art. 60 al. 1 CO part dès le moment où
le lésé a effectivement connaissance du dommage et non de
celui où il aurait pu découvrir l'importance de sa créance en
faisant preuve de l'attention commandée par les circonstances
(ATF 111 II 55 consid. 3a p. 57/58; 109 II 433 consid. 2
p. 435/436). Ce que sait le mandataire du créancier est impu-
table à celui-ci (ATF 45 II 322 consid. 4 p. 331; voir aussi
arrêt non publié du 25 mars 1999 en la cause D. c. Etat de
Genève).

   c) En ce qui concerne la créance fondée sur l'incar-
cération de V.H.________, les demandeurs soutiennent à tort
que la prescription n'a commencé à courir qu'à la clôture de
l'enquête dirigée contre C.H.________. En effet, dès le décès
de V.H.________, le 5 mars 1995, l'action pénale ouverte con-
tre elle s'est éteinte. Les investigations dirigées contre
l'inculpée ont ipso facto pris fin. Le juge d'instruction, le
Procureur général ou la Chambre d'accusation n'avaient ainsi
plus à se prononcer au sujet des indices de sa culpabilité ni
sur le bien-fondé de sa détention. Cette question ne se po-
sait donc plus dès le décès de l'inculpée.

   A vrai dire, C.H.________, qui était au demeurant
vraisemblablement bien placé pour savoir si la détention de
son épouse était ou non justifiée, connaissait tous les élé-
ments propres à fonder l'action sur ce point au moment où il
a su que V.H.________ était placée en détention. Il a ainsi
pu disposer des éléments propres à fonder l'action dès que Me
Garbade a été autorisé à prendre connaissance du dossier, à
la fin de la suspension de l'instruction contradictoire or-
donnée par le juge d'instruction M.________, soit dès le 15
mars 1995. Dans ces conditions, on peut admettre que la pres-
cription a commencé à courir au plus tard dès la fin mars
1995.

   La réquisition de poursuite formée le 4 mars 1996 a
donc interrompu la prescription de la créance (art. 135 ch. 2
CO). En revanche, contrairement à ce que soutiennent les de-
mandeurs, la remise au créancier de l'exemplaire de l'opposi-
tion formée par le poursuivi n'a pas fait courir un nouveau
délai de prescription, car, selon la jurisprudence, un tel
acte ne fait pas progresser la poursuite; il n'introduit pas
un nouveau stade de la procédure (ATF 81 II 135 consid. 1 p.
136; Engel, Traité des obligations en droit suisse, 2ème édi-
tion, p. 815 et la jurisprudence citée). Ledit acte permet
certes au créancier de connaître la réaction du poursuivi et
de décider des démarches qu'il entend ensuite entreprendre,
mais cet élément subjectif n'est pas déterminant pour la
prescription, laquelle n'est interrompue que par une des ac-
tions décrites par l'art. 135 CO.

   La prescription n'a en outre été interrompue qu'à
concurrence du montant réclamé, soit 150'000 fr. (ATF 119 II
339 consid. 1c et les références citées). Cela est vrai lors
même que ledit montant ne couvrirait pas la totalité du dom-
mage matériel et immatériel que le créancier dit avoir subi
(ATF 119 II 339 consid. 1c aa p. 340).

   Selon l'art. 137 al. 1 CO, un nouveau délai d'un an
commençait à courir dès l'interruption, soit dès le 4 mars
1996, pour prendre fin un an plus tard. Or, la nouvelle ré-
quisition de poursuite n'a été formée que le 17 mars 1997.
Elle est donc tardive. Il en découle que la créance que
M.H.________ fonde sur le tort moral éprouvé ensuite de la
détention prétendument illicite de sa mère est prescrite.

   3.- Si la créance n'était pas prescrite, l'action
devrait de toute manière être rejetée sur ce point, car la
demanderesse n'a démontré, ni l'existence d'un tort moral, ni
l'illicéité de la détention.

   a) Selon la jurisprudence, le comportement d'un ma-
gistrat ou d'un fonctionnaire est illicite lorsqu'il viole
des injonctions ou des interdictions de l'ordre juridique
destinées à protéger le bien lésé. Une telle violation peut
résider dans l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation
laissé par la loi au magistrat ou au fonctionnaire. Est éga-
lement considérée comme illicite la violation de principes
généraux du droit. Cette définition est utilisée par le Tri-
bunal fédéral aussi bien en matière de responsabilité fondée
sur la loi fédérale sur la responsabilité de la Confédération
(LRCF; RS 170.32) qu'en matière de droit cantonal, en l'ab-
sence d'une disposition particulière. Toute illégalité ne
peut cependant pas être qualifiée d'acte illicite lorsqu'on a
affaire non pas à une action matérielle illégale, mais à une
décision administrative. Comme en matière de responsabilité
du juge, on doit considérer que si l'autorité ou le magistrat
qui a interprété la loi fait usage de son pouvoir d'apprécia-
tion, ou de la latitude que lui laisse une notion juridique
imprécise, d'une manière conforme à ses devoirs, son activité
ne peut pas être tenue pour illicite du seul fait que son ap-
préciation ou son interprétation n'est pas retenue par une
autorité supérieure ou de recours saisie du cas par la suite
(ATF 112 II 231 consid. 4 p. 234 et les références citées).

L'illicéité du comportement du juge, dans l'exercice du pou-
voir juridictionnel, suppose un manquement caractérisé qui
n'est pas réalisé du seul fait déjà qu'une décision se révèle
après coup dénuée de fondement, contraire à la loi, voire ar-
bitraire au sens de l'art. 4 Cst. (ATF 120 Ib 248 consid. 2b
p. 249). Pour qu'une décision puisse être qualifiée d'illici-
te, il faut une violation grave du droit, réalisée par exem-
ple lorsque le magistrat ou l'autorité abuse de son pouvoir
d'appréciation ou l'excède, lorsqu'il viole un texte clair,
méconnaît un principe général du droit, n'instruit pas un
dossier correctement ou agit par malveillance. Lorsque la
responsabilité de l'Etat n'est engagée qu'en cas de faute,
comme en l'espèce, on peut admettre qu'un magistrat n'en com-
met pas s'il ne viole pas un devoir primordial de sa fonction
(ATF 112 II 231 consid. 4 p. 235).

   b) Pour les demandeurs, l'arrestation, puis la pro-
longation de la détention de V.H.________ étaient illicites,
car contraires à la définition et aux conditions du mandat
d'arrêt, soit aux art. 17 al. 2 Cst. gen., 33 du code de pro-
cédure pénale du canton de Genève du 29 septembre 1977 (CPP
gen.) et 5 par. 1 CEDH.

   Selon cette dernière disposition conventionnelle,
nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas men-
tionnés expressément et selon les voies légales, notamment
"s'il a été arrêté et détenu en vue d'être conduit devant
l'autorité judiciaire compétente, lorsqu'il y a des raisons
plausibles de soupçonner qu'il a commis une infraction ou
qu'il y a des motifs raisonnables de croire à la nécessité de
l'empêcher de commettre une infraction ou de s'enfuir après
l'accomplissement de celle-ci (art. 5 par. 1 lettre c CEDH)".

   Il y a soupçon plausible au sens de cette disposi-
tion s'il existe des faits ou des renseignements propres à
persuader un observateur objectif que l'individu en cause

peut avoir accompli l'infraction. Ce qui peut passer pour
plausible dépend de l'ensemble des circonstances (CourEDH,
arrêt Fox c. Royaume-Uni du 30 août 1990, série A no 182,
p. 16 par. 31).

   Les articles 34 (dont la teneur est identique à
l'art. 17 al. 2 Cst. gen.) et 145 CPP gen. décrivent les
conditions auxquelles un mandat d'arrêt peut être décerné,
puis prolongé; ils s'expriment dans des termes analogues à
l'art. 5 par. 1 CEDH précité et n'y ajoutent rien d'essentiel
pour la présente cause.

   Souvent, au début d'une enquête, le juge d'instruc-
tion ne peut se fonder que sur des indices pour décider de la
nécessité d'une incarcération. Cela est particulièrement vrai
en cas de trafic de stupéfiants qui implique en général plu-
sieurs participants, trafiquants et consommateurs, où les
risques de collusion sont particulièrement grands et où les
preuves sont difficiles à réunir.

   c) En l'espèce, les demandeurs soutiennent que les
seules charges pouvant être retenues contre V.H.________
étaient la détention de cocaïne et la consommation occasion-
nelle de cette drogue. Or, l'instruction a démontré que l'in-
téressée pouvait objectivement apparaître comme ayant fait
davantage que simplement consommé de la cocaïne. Outre ses
dénégations initiales qu'elle a ensuite contredites peu à
peu, la présence de ses empreintes sur un emballage ayant
contenu de la cocaïne et son activité d'intermédiaire dans
les contacts entre son mari et d'autres personnes impliquées
dans le trafic de stupéfiants constituaient de sérieux indi-
ces. La déclaration qu'elle a signée devant le juge d'ins-
truction établissait aussi une certaine collaboration à l'ac-
tivité délictueuse de son mari qu'il se justifiait au moins
d'éclaircir.

   Ainsi, son arrestation, même appréciée après coup,
n'apparaît nullement arbitraire et encore moins illicite.

   Quant à la prolongation de la détention, elle serait
sans doute discutable si le trafic reproché à son mari
n'avait pas revêtu l'ampleur que révèle le dossier (voir ci-
dessus lettre B des constatations de fait). Selon la juris-
prudence, la durée de la détention doit en effet être propor-
tionnée à la gravité des faits qui paraissent avoir été com-
mis (ATF 123 I 268 consid. 3a p. 273).

   Dans le cas de V.H.________ qui, après quelques
jours d'enquête, ne pouvait en l'état se voir reprocher
qu'une participation assez secondaire au trafic de stupé-
fiants commis par son mari, ainsi qu'une consommation modérée
de drogue (on ignorait alors qu'elle était également consom-
matrice d'héroïne), une prolongation de la détention au-delà
de la durée autorisée par la chambre d'accusation, soit jus-
qu'au 17 mars 1995, n'eût probablement pas été admissible,
sous réserve de la découverte de faits nouveaux. L'action pé-
nale dirigée contre V.H.________ s'étant éteinte avec son dé-
cès, la nature et l'importance de son activité délictueuse
n'ont toutefois pas à être élucidées.

   En tout état de cause, et même si l'action n'était
pas prescrite sur ce point, il n'apparaît pas que l'arresta-
tion et la prolongation de la détention de V.H.________ aient
été arbitraires au sens de l'art. 4 aCst., ni a fortiori que
les décisions prises à cet égard par les magistrats concernés
aient été illicites.

   4.- a) La situation se présente différemment en ce
qui concerne la créance fondée sur le décès de V.H.________.
Le délai de prescription ne pouvait en effet pas courir avant
que l'enquête n'établisse les circonstances de la mort de
V.H.________. Cette enquête a été close le 12 avril 1996 et

les demandeurs en ont eu connaissance le 22 avril 1996. En
mai 1995, les demandeurs savaient seulement que V.H.________
était décédée des suites d'une intoxication par l'héroïne. A
ce stade du dossier, le décès pouvait avoir été causé par un
suicide, l'acte criminel d'un tiers ou la négligence de ma-
gistrats, fonctionnaires ou autres agents de l'Etat. Il
n'était donc pas possible d'exiger des demandeurs qu'ils ou-
vrent action avant de connaître tous les éléments essentiels
permettant de se faire une idée plus précise des circonstan-
ces de ce décès et de l'auteur du dommage.

   La seconde réquisition de poursuite formée le 17
mars 1997 a ainsi interrompu la prescription à concurrence du
montant réclamé, soit 150'000 fr. Le dépôt de la présente ac-
tion le 13 janvier 1998 a derechef interrompu la poursuite,
mais à concurrence de 150'000 fr. seulement. Des prétentions
plus élevées concernant le décès de V.H.________ sont dès
lors prescrites (voir supra consid. 2).

   A l'égard de la perte de soutien, les demandeurs ob-
jectent qu'ils n'en ont connu la quotité exacte que le 26
septembre 1997, date à laquelle la Commission de recours en
matière AVS/AI a rejeté définitivement la requête de
C.H.________ tendant à l'obtention d'une rente de veuf. Ce
dernier aurait toutefois été en mesure de motiver sa demande
en justice concernant la perte de soutien, au plus tard dès
qu'il a connu les circonstances du décès de son épouse, en
avril 1996. Seule aurait pu varier la quotité de cette perte,
laquelle dépendait de la décision définitive concernant
l'AVS. Le principe de la réparation n'était pas touché par
cette décision et rien n'empêchait le demandeur de prendre
des conclusions concernant la perte de soutien, quitte à les
modifier par la suite.

   Les prétentions maximales des demandeurs pour tort
moral et perte de soutien ne peuvent donc s'élever qu'à
150'000 fr. et non à 395'242 fr.40 comme ils le réclament
dans leurs conclusions. Il y a donc lieu d'entrer en matière
sur ces prétentions dans cette limite.

   Quant à la question de l'éventuelle prescription
plus longue que justifieraient des actes punissables pénale-
ment commis par des magistrats ou fonctionnaires de l'Etat,
elle sera examinée en relation avec l'analyse des actes pré-
tendument illicites qui, selon les demandeurs, auraient favo-
risé le décès de V.H.________.

   b) Selon les demandeurs, même en l'absence de mesu-
res adéquates de surveillance, le seul fait d'avoir placé
V.H.________ en détention préventive, alors qu'il n'existait
pas de charges suffisantes contre elle, était de nature à
créer un lien de causalité adéquate avec son décès, car la
détention préventive constituait "une situation de danger
particulière qui, dans les circonstances de ce cas, pouvaient
conduire à une consommation excessive de stupéfiants pouvant
entraîner la mort".

   Or, comme on l'a vu, l'arrestation et le maintien en
détention de V.H.________ étaient fondés sur des motifs com-
patibles avec les l'art. 5 par. 1 CEDH et les dispositions du
code genevois de procédure pénale. Ces mesures étaient donc
licites et elles ne pouvaient justifier en elles-mêmes que
l'Etat soit rendu responsable du décès de l'inculpée, sous
réserve de sa responsabilité pour actes licites, question qui
sera examinée plus loin (infra consid. 5).

   c) Les demandeurs reprochent aussi aux autorités pé-
nitentiaires d'avoir placé dans la cellule de V.H.________ la
détenue P.________, toxicomane, laquelle aurait été porteuse
de doses d'héroïne qu'elle aurait remises à V.H.________; ils

prétendent que cela aurait pu être évité, si une fouille cor-
porelle intime de cette détenue avait été pratiquée à son en-
trée en prison.

   Or, il n'a pas été établi en fait, que ce soit par
l'enquête ordonnée par le Procureur général ou par la présen-
te procédure, que P.________ ait possédé de l'héroïne à son
entrée en prison, ni qu'elle ait fourni de la drogue à
V.H.________ durant la soirée du 4 mars 1995. Au vu des nom-
breux témoins entendus, il apparaît bien plus vraisemblable
que cette drogue ait été transmise à V.H.________ par d'au-
tres détenues, au moyen du système dit du "yo-yo".

   Il reste que de la drogue circule en prison, malgré
toutes les précautions et les mesures de fouille des détenus
prises par le personnel lors des entrées en prison et après
chaque visite au parloir, de même qu'en fouillant systémati-
quement les colis. Certes, les fouilles des parties intimes -
qui ne peuvent être pratiquées que de façon restrictive, par
un médecin et sur demande de la police - pourraient sans dou-
te réduire sensiblement le risque de circulation de drogue en
prison. Mais de telles mesures sont graves et ne sauraient
être appliquées sans réserve, sous peine de tomber sous le
coup des art. 3 CEDH (interdiction de traitements dégradants)
ou 8 CEDH (non respect de la vie privée), cette dernière dis-
position étant au demeurant applicable au prélèvement des
urines ordonné en milieu carcéral (voir décision CommEDH du
22 février 1995 dans la cause Baragiola c. Suisse, D.R. 80/66
par. 1b). Pratiquer de tels examens de façon systématique sur
toutes les détenues, même toxicomanes, se révélerait en outre
sans proportion avec l'objectif à atteindre. On ne peut donc
reprocher à l'Etat de ne pas y procéder pour toutes les déte-
nues toxicomanes avant de les admettre en prison. En ce qui
concerne P.________, au demeurant, la police n'avait pas es-
timé vraisemblable qu'elle ait caché des stupéfiants dans son
corps.

   Certes, idéalement, la compagnie d'une codétenue non
toxicomane eût peut-être été préférable pour V.H.________ qui
supportait mal son incarcération et était dépressive, mais il
n'y avait pas grand choix, presque toutes les détenues étant
toxicomanes. Dans ces circonstances, la décision de placer
P.________ avec V.H.________ en cellule ne saurait davantage
être reproché au personnel de la prison. Cette décision appa-
raît même après coup comme opportune, car V.H.________, qui
se plaignait de solitude, avait paru contente d'avoir de la
compagnie et rien ne permet de retenir que cette codétenue
lui ait fourni de la drogue.

   d) Il reste à examiner si l'état de santé de
V.H.________ a fait, autant qu'on pouvait l'attendre, l'objet
d'une surveillance adéquate de la part du personnel de la
prison.

   A cet égard non plus, l'Etat ne peut se voir repro-
cher de ne pas avoir surveillé l'état de santé de l'intéres-
sée de manière adéquate. V.H.________ présentait certes des
symptômes d'anxiété et des troubles du sommeil, mais son état
de santé n'avait pas particulièrement alarmé le personnel mé-
dical ou les gardiens, notamment en raison du fait qu'elle
n'avait pas manifesté des intentions suicidaires.

   Les demandeurs prétendent que le règlement sur le
régime intérieur de la prison a été violé, car le service mé-
dical n'était pas permanent. Ils ne démontrent toutefois pas
en quoi la présence d'un médecin dans l'établissement le soir
du 4 mars 1995 eût empêché le drame. Il est vrai que le soir
en question, sur le conseil du personnel infirmier,
V.H.________ avait écrit au médecin, qui ne se trouvait pas
dans l'établissement, pour lui demander de lui prescrire un
calmant journalier. Un comprimé d'anxiolytique lui a été ad-
ministré et rien ne permet de dire qu'un autre traitement eût
été indiqué ce soir-là ou qu'il l'eût dissuadée de consommer

de l'héroïne. Au demeurant, le responsable du service médical
de la prison a confirmé qu'un médecin peut être atteint en
permanence durant le week-end.

   En définitive, il apparaît qu'aucune négligence ne
peut être reprochée aux agents de l'Etat dans la façon dont
V.H.________ a été surveillée et soignée durant son séjour en
prison. Son décès, entraîné par l'ingestion, de son propre
chef, d'une dose mortelle d'héroïne, ne peut pas être mis à
la charge du défendeur. Les agents de l'Etat n'ont donc com-
mis, en l'occurrence, aucun acte illicite au sens où l'entend
la jurisprudence rappelée ci-dessus (supra consid. 3a).

   Aucun acte illicite et, a fortiori, aucune infrac-
tion pénalement punissable n'étant établis, la question de la
prescription plus longue de l'action pénale (art. 60 al. 2
CO) ne se pose pas.

   5.- Au vu de ce qui précède, il y a lieu encore
d'examiner si le défendeur peut être appelé, en équité, à ré-
parer le dommage entraîné par l'incarcération suivie du décès
de V.H.________, au sens de l'art. 4 LREC. Cette disposition
stipule que l'Etat de Genève et les communes du canton ne
sont tenus de réparer le dommage résultant pour des tiers
d'actes licites commis par leurs magistrats, fonctionnaires
ou agents dans l'exercice de leur fonction ou dans l'accom-
plissement de leur travail "que si l'équité l'exige".

   Selon les demandeurs, une telle réparation serait
justifiée par les circonstances particulièrement choquantes
du décès de V.H.________. Cette prétention, en tant qu'elle a
sa cause dans le décès de cette dernière, n'est pas prescri-
te, à l'instar de celle basée sur des actes prétendument il-
licites de l'Etat (voir arrêt précité du 25 mars 1999 en la
cause D., consid. 3a).

   Les conditions de l'indemnisation sont un dommage
spécial, grave et causé par un acte qui n'avait pas pour but
de protéger spécialement le lésé. Tanquerel (op. cit. p.
362/363) cite comme exemple typique de circonstances qui
pourraient le plus vraisemblablement donner lieu à l'appli-
cation de cette disposition le sursis à l'évacuation de lo-
cataires pour motifs humanitaires, ce qui permettrait d'in-
demniser les propriétaires. D'autres dispositions légales,
qui ne s'appliquent pas en l'occurrence, les art. 379 et 380
CPP gen. permettent aussi d'indemniser une personne incarcé-
rée de façon licite, mais qui est ensuite mise au bénéfice
d'un non-lieu ou acquittée. Pour qu'une responsabilité de
l'Etat en raison d'actes licites soit engagée, il faut en
tout cas qu'il existe une relation de causalité entre l'in-
carcération, licite en l'occurrence, et le décès. Or, il n'y
a pas en soi de lien de causalité adéquate (ATF 123 III 110
consid. 3a p. 112) entre l'incarcération d'un détenu et son
décès par intoxication à l'héroïne. Selon la jurisprudence,
il peut certes se produire qu'un événement, par exemple un
accident, produise des conséquences inhabituelles, telles
qu'une névrose (ATF 96 II 392 consid. 2 p. 396), sans que le
lien de causalité cesse d'être adéquat.

   S'il est fréquent que l'incarcération puisse provo-
quer un état d'abattement chez le détenu, elle n'est cepen-
dant pas propre, d'après le cours ordinaire des choses et
l'expérience de la vie, à entraîner la mort par l'absorption
massive de stupéfiants. Dans la mesure où le défendeur n'a
rien à se reprocher quant à la façon dont s'est déroulée
l'incarcération de V.H.________, il apparaît que ce décès est
dû de façon prépondérante, sinon exclusive, à la faute de
l'intéressée. Retenir une responsabilité dans un tel cas
reviendrait à exposer l'Etat à répondre de tous les agis-
sements des prisonniers, même les plus imprévisibles. Cela
serait pour le moins contraire à la notion d'équité, telle
que l'exige l'art. 4 LREC comme condition de la réparation.

   6.- a) Il s'ensuit que l'Etat ne peut pas être tenu
pour responsable du décès de V.H.________, ni en vertu d'un
acte illicite, ni en raison de son activité licite.

   L'action des demandeurs doit dès lors être rejetée
sans qu'il soit nécessaire d'examiner si C.H.________ et
M.H.________ ont subi un dommage du fait du décès de
V.H.________.

   b) Compte tenu de l'assistance judiciaire accordée
aux demandeurs par décision du 22 avril 1998, il y a lieu de
statuer sans frais. En revanche, l'indemnité à allouer au dé-
fendeur à titre de dépens doit être mise à la charge solidai-
re des demandeurs (art. 159 al. 1 et 5 et 156 al. 7 OJ) et
fixée selon l'art. 5 ch. 1 du Tarif pour les dépens alloués à
la partie adverse dans les causes portées devant le Tribunal
fédéral du 9 novembre 1978 (RS 173.119.1; ci-après: le Ta-
rif). Quant aux honoraires de l'avocat d'office des deman-
deurs, ils doivent être mis à la charge de la caisse du Tri-
bunal fédéral, conformément aux art. 152 al. 2 OJ et 9 du
Tarif.

                       Par ces motifs,

           l e   T r i b u n a l   f é d é r a l,

   1.- Dit que l'action de C.H.________ et de
M.H.________ est rejetée.

   2.- Dit qu'il n'est pas prélevé d'émolument judi-
ciaire.

   3.- Dit qu'il est alloué au Canton de Genève une in-
demnité de 30'000 fr. à titre de dépens, à charge de
C.H.________ et de M.H.________, solidairement entre eux.

   4.- Dit qu'il est alloué à Me Jean-Pierre Garbade
une indemnité d'avocat d'office de 20'000 fr. sur la caisse
du Tribunal fédéral.

   5.- Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties.

                      ________________

Lausanne, le 21 février 2000
ROC/elo

            Au nom de la IIe Cour de droit public
                 du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
                         Le Président,

                         La Greffière,