Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 99 V 165



99 V 165

52. Arrêt du 16 novembre 1973 dans la cause Caisse cantonale neuchâteloise
de compensation contre Reymond et Commission cantonale neuchâteloise de
recours pour l'AVS Regeste

    Art. 46 IVG.

    Zur Geltendmachung des Anspruchs auf Invalidenrente sind nach dem
Tode des Versicherten dessen Erben berechtigt sowie jede andere Person,
die daran ein schutzwürdiges Interesse hat.

Sachverhalt

    A.- Lorette Reymond, née en 1927, mère de quatre enfants, est décédée
le 26 décembre 1971. Aucune demande de prestations ne fut déposée de
son vivant. Le 31 janvier 1972 toutefois, Jacques Reymond, son époux,
requit le versement d'une rente. La Commission cantonale vaudoise de
l'assurance-invalidité statua négativement. Son prononcé du 10 mai 1972
fut notifié à la succession de la prénommée le 18 août 1972 par les soins
de la Caisse cantonale neuchâteloise de compensation.

    B.- Jacques Reymond recourut. Par jugement du 9 avril 1973, la
Commission cantonale neuchâteloise de recours pour l'AVS/AI annula la
décision attaquée et renvoya le dossier à l'administration pour examen
des conditions de fond du droit à la rente.

    C.- La caisse susmentionnée interjette recours de droit administratif.
Considérant d'une part les difficultés accrues de la détermination de
l'invalidité après le décès et, d'autre part, le caractère personnel du
droit aux prestations, la caisse conclut au rétablissement de sa décision.

    L'intimé n'a pas fait usage de son droit de répondre au recours, dont
l'Office fédéral des assurances sociales propose le rejet, au regard de la
plus récente jurisprudence du Tribunal fédéral des assurances sur le sujet.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Selon l'art. 46 LAI, l'assuré doit, pour faire valoir son droit
aux prestations, présenter d'abord une demande. La qualité pour agir est
définie à l'art. 66 RAI. Aux termes de cette disposition, l'exercice du
droit aux prestations appartient à l'assuré invalide ou à son représentant
légal, ainsi que, pourlui, à son conjoint, à ses parents en ligne directe
ascendante ou descendante, à ses frères et soeurs et aux autorités ou
autres personnes qui l'assistent régulièrement ou prennent soin de lui
d'une manière permanente. N'ont ainsi un droit propre à présenter une
demande que l'assuré ou son représentant légal; les autres personnes
ayant qualité pour agir, au sens de cet article du RAI, ne l'ont que pour
l'assuré et ne peuvent donc le faire qu'à sa place. Aussi le Tribunal
fédéral des assurances a-t-il commencé par juger que le mari, en tant
que représentant de l'épouse, ne pouvait exercer les droits matériels de
celle-ci et agir en justice à leur propos que dans la mesure où elle-même
n'en avait pas déjà disposé (RCC 1962 p. 485; cf. aussi ATFA 1956 p. 192 et
RCC 1964 p. 122). La cour plénière, à laquelle cette question a été soumise
ultérieurement, a toutefois estimé que cette interprétation ne pouvait plus
être maintenue sans restrictions. En effet, selon l'art. 103 lit. a OJ,
en corrélation avec l'art. 132 OJ, la qualité pour interjeter un recours
de droit administratif appartient notamment à celui qui est touché par la
décision attaquée et qui a un intérêt digne d'être protégé à son annulation
ou à sa modification. Or, celui qui, en vertu d'un droit originaire,
peut interjeter un tel recours doit en bonne logique avoir eu qualité
pour agir en invoquant ce même droit également en procédure cantonale de
recours, et l'avoir eue déjà au stade de la présentation de la demande
initiale. En ce qui concerne la procédure de demande, cela signifie que
les personnes ou autorités qui sont touchées par le refus de prestations
d'assurances sociales et ont un intérêt digne d'être protégé à l'octroi de
ces prestations ont nécessairement un droit originaire à la présentation
d'une demande. C'est le cas des personnes et autorités qui remplissent
une obligation d'entretien concrète ou la rempliront dans un proche avenir
(RO 98 V 54). Il résulte de cette jurisprudence que Jacques Reymond aurait
eu qualité pour déposer une demande de prestations du vivant de son épouse.

Erwägung 2

    2.- Mais qu'en est-ildu droit aux prestations lorsque l'assuré est
décédé sans l'avoir fait valoir? Vu son importance, cette question a
aussi été soumise à la Cour plénière, qui l'a résolue comme il suit:

    a) Le droit à la rente d'invalidité n'est pas strictement personnel;
il est donc transmissible par succession (cf. ATFA 1958 p. 35, qui a laissé
le débat ouvert sur ce point). Suivant l'art. 560 al. 2 CC en effet, les
héritiers sont saisis des créances et actions, des droits de propriété
et autres droits réels, ainsi que des biens qui se trouvaient en la
possession du défunt, et ils sont personnellement tenus de ses dettes; le
tout sous réserve des exceptions prévues par la loi. Or, parmi les droits
intransmissibles par succession (cf. ESCHER, Das Erbrecht, vol. III 1,
1959, pp. 6 ss; vol. III 2, 1960, pp. 118 ss; TUOR/PICENONI, Das Erbrecht,
1. Abt., 1952, pp. 3 ss; 2. Abt., 1964, pp. 594 ss), on n'en voit aucun que
l'on puisse comparer à celui qui se trouve au centre de la discussion, soit
au droit à une rente d'invalidité de l'assuranceinvalidité. Au contraire,
le Tribunal fédéral a même jugé - dans le domaine des assurances privées
- que le droit aux prestations d'assurance fait partie du patrimoine du
défunt et tombe dans la masse successorale - sauf s'il existe un droit
indépendant du droit successoral en faveur d'un tiers (RO 50 II 216;
ESCHER, op.cit., III 1, p. 7, ch. 5a; pp. 203 ss, plus spécialement p. 206,
ch. 6 ss; TUOR/PICENONI, op.cit., 1. Abt., p. 3, ch. 5; pp. 164 ss, plus
spécialement p. 167, ch. 9 ss) - aussi lorsque lesdites prestations ne sont
pas exigibles avant la mort de l'assuré (RO 43 II 257; ESCHER, op.cit.,
III 1, pp. 203 ss, plus spécialement p. 206, ch. 6 ss; III 2, p. 119,
ch. 2 in fine; TUOR/PICENONI, op.cit., 2. Abt., p. 595, ch. II/2). Il en va
donc de même lorsque ce droit est exercé ou pourrait être exercé avant le
décès. Du reste, en matière de prestations complémentaires, il est admis
que le droit au remboursement de frais de guérison tombe dans la masse
et peut être invoqué après la mort de l'assuré (art. 3 OMPC; RO 99 V 58).

    Comme on ne saurait admettre que l'intimé - qui remplit manifestement
les conditions de l'art. 103 lit. a OJ - jouissait d'un droit propre,
indépendant du droit successoral, à une rente du fait de l'invalidité
de son épouse, le droit litigieux est bien tombé dans la masse. Peut
rester indécise en revanche la question de savoir ce qui se passe, dans
l'assurance sociale, lorsqu'un tiers (héritier ou non, personne physique ou
autorité d'assistance par ex.) aurait eu un droit propre aux prestations
à côté du défunt. Quant au règlement des dettes successorales - notamment
de celles résultant de prestations faites à l'assuré de son vivant -,
c'est en principe dans le cadre de la liquidation de la succession qu'il
interviendra, sous réserve des cas où le créancier jouirait d'un droit
direct contre l'assurance.

    b) Reste à examiner dès lors qui avait qualité pour demander
le versement de la rente, après le décès de Lorette Reymond. Dans un
récent arrêt (RO 99 V 58), la Cour de céans a jugé que les membres d'une
hoirie ont qualité pour interjeter individuellement recours de droit
administratif dans l'intérêt de la communauté héréditaire, pour autant
qu'ils remplissent les conditions de l'art. 103 lit. a OJ. Rapprochée de
l'arrêt RO 98 V 54 déjà cité, cette jurisprudence signifie qu'un héritier
fondé à interjeter recours de droit administratifa également qualité pour
présenter une demande de prestations, mais dans l'intérêt de la communauté
héréditaire seulement, et qu'il n'aura pas besoin de procuration pour ce
faire. Ce droit compète même à toute autre personne visée à l'art. 103
lit. a OJ. Reste réservé, comme mentionné ci-dessus, le cas des personnes
jouissant d'un droit propre aux prestations d'assurance en cause.

    Vu ce qui précède, Jacques Reymond était autorisé à déposer une demande
de prestations tendant à l'octroi d'une rente du fait de l'invalidité de
son épouse défunte. Les difficultés d'instruction que semble craindre la
caisse de compensation ne sauraient conduire à une autre solution. Rapport
soit sur ce point aux arguments développés par l'Office fédéral des
assurances sociales, qui relève notamment que des problèmes semblables
se posent lorsqu'un requérant décède après le dépôt de la demande mais
avant que l'administration ait rendu sa décision.

    Il y avait par conséquent bien lieu de susciter une instruction portant
sur les conditions de fond du droit à la rente, comme en ont décidé les
premiers juges.

Entscheid:

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: Le recours
est rejeté.