Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 99 II 277



99 II 277

37. Arrêt de la IIe Cour civile du 13 décembre 1973 dans la cause
M.B. contre J.Ch. Regeste

    Art. 43 und 68 OG; Art. 5 des Vertrages zwischen der Schweiz und
Frankreich über den Gerichtsstand und die Vollziehung von Urteilen in
Zivilsachen vom 15. Juni 1869.

    1.  Die Nichtigkeitsbeschwerde ist im Verhältnis zur Berufung
subsidiär. Die Verletzung einer Gerichtsstandsbestimmung kann Gegenstand
einer Berufung bilden (Erw. 1).

    2.  Eine Klage ist erbrechtlicher Natur, wenn die Parteien sich
hauptsächlich auf einen erbrechtlichen Anspruch stützen, um den Bestand
und den Umfang ihrer Rechte an einem Nachlass feststellen zu lassen
(Erw. 2 und 3).

Sachverhalt

    A.- Magda Ansbacher, fille de Théodore Ansbacher, décédé en 1944,
s'est mariée à deux reprises. De sa première union, avec un Français,
Félix Poulin, elle a eu une fille, M.B. De son second mariage, conclu en
1932 avec un ressortissant grec, J.Ch., elle a eu une autre fille, Anne
Houze. Lors de ce second mariage, Magda Ch. a conservé la nationalité
française.

    En 1951, en vue de mettre fin à divers procès nés de la succession de
son père, elle a consenti à la cession de tous ses droits successoraux
mobiliers, moyennant le versement d'une somme de 110 millions de francs
français anciens.

    Magda Ch. est décédée le 30 septembre 1954 à Antibes, en laissant,
selon testament du 25 février 1954, la quotité disponible de sa succession
à son mari et en renvoyant ses filles à leur réserve.

    B.- A la suite du décès de sa mère, M.B. a accusé J.Ch.  d'avoir abusé
de la procuration générale que sa femme lui avait donnée et en vertu
de laquelle il administrait la fortune de celle-ci depuis 1946; elle
a prétendu qu'il aurait encaissé, à l'insu de son épouse, une somme
de 90 000 livres sterling en plus du prix de cession de 110 millions
de francs. Sur la base de ces allégations, elle a obtenu, en 1955, du
Président du Tribunal de 1re instance de Genève, un séquestre portant
sur des fonds de son beau-père auprès de l'Union des banques suisses et
de la Lloyds Bank à Genève et en 1959 un deuxième séquestre touchant des
biens qui n'avaient pas été atteints en 1955. Ces deux séquestres ont été
validés par des poursuites et, le débiteur ayant formé opposition, par
des actions en reconnaissance de dettes introduites au for du séquestre.

    Après avoir obtenu, en 1964, une troisième ordonnance de séquestre,
M.B. a pris des conclusions contre J.Ch. tendant au paiement de 571 875 fr.
suisses.

    Outre cette procédure, elle a saisi, mais sans succès, les
juridictions pénales genevoise et française. Elle a également ouvert,
devant les tribunaux français, une action en partage de la succession et
en annulation du testament de sa mère.

    C.- Par arrêt du 19 novembre 1970, le Tribunal de première instance
de Genève a condamné J.Ch. à payer à M.B. la somme de 571 875 fr. avec
intérêts. Le Tribunal a relevé que le procès se déroulait en Suisse à
cause des séquestres mais que la loi applicable était le droit français
parce que la succession de dame Ch. y était soumise. Il a jugé qu'eu
égard à la notion de saisine du droit français, M.B. pouvait agir seule
contre son beau-père, sans le concours de l'autre héritière. Enfin il a
considéré que l'action était de nature contractuelle et non successorale
et que la preuve du détournement commis par J.Ch. avait été rapportée.

    Le 29 juin 1973, la Cour de justice de Genève a annulé le jugement
de première instance et a déclaré les tribunaux genevois incompétents
pour connaître de la demande. L'autorité cantonale a admis que l'action
intentée par M.B. était de nature successorale et partant qu'elle tombait
sous le coup de l'art. 5 de la Convention franco-suisse du 15 juin 1869;
que dès lors la demanderesse devait être renvoyée à agir devant le juge
français, seul compétent.

    D.- M.B. recourt contre ce prononcé. Elle conclut à sa nullité et à ce
que la Cour de justice de Genève soit déclarée compétente pour connaître
le fond du litige.

    Subsidiairement, elle conclut à ce que J.Ch. soit condamné à lui
payer la somme de 571 875 fr. avec intérêts.

    J.Ch. a conclu au rejet du recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Le prononcé attaqué est une décision préjudicielle prise séparément
du fond par la juridiction suprême du canton de Genève. Il porte sur la
compétence des tribunaux genevois pour connaître de l'action introduite
par la recourante.

    Invoquant l'art. 68 OJ, celle-ci a formé un recours en nullité. La
voie du recours en nullité est subsidiaire à celle du recours en réforme
(RO 82 II 561 consid. 2; BIRCHMEIER, Organisation der Bundesrechtspflege,
p. 252). Or la violation d'une disposition sur le for - que celle-ci soit
contenue dans la législation fédérale ou dans une convention internationale
- peut faire l'objet d'un recours en réforme selon l'art. 43 OJ (RO 98 II
90 consid. 1; 84 II 489 consid. 1; WURZBURGER, Les conditions objectives
du recours en réforme au Tribunal fédéral, p. 217, note 31).

    En l'espèce, le recours en nullité doit donc être traité comme recours
en réforme, dont il remplit les conditions (art. 46 et 49 OJ).

Erwägung 2

    2.- L'intimé ne peut, en tant que Grec, invoquer la garantie du
for du domicile du défendeur, prévue par l'art. 1er de la Convention
franco-suisse sur la compétence judiciaire et l'exécution des jugements
en matière civile, du 15 juin 1869 (ci-après: la Convention); cf. RO 80
III 156 consid. 4a et les arrêts cités.

    De même, la circonstance que l'intimé n'a pas la nationalité française
exclut l'application de l'art. 1er de l'ordonnance du Tribunal fédéral
du 29 juin 1936 concernant l'acte additionnel du 4 octobre 1935 à la
Convention de 1869, selon lequel l'action en validation d'un séquestre
ordonné contre un Français domicilié en France doit être portée devant
le juge naturel du défendeur en France.

    En revanche, l'art. 5 de la Convention paraît applicable. En vertu de
cette disposition, telle qu'elle est interprétée par la jurisprudence, la
succession d'un Français ou d'un Suisse s'ouvre au for du pays d'origine,
quel que soit celui des deux Etats où le défunt a eu son dernier domicile;
c'est à ce même for que doivent être jugées les actions relatives à la
liquidation et au partage d'une succession testamentaire ou ab intestat
et aux comptes à faire entre les héritiers ou légataires (RO 24 I 307;
29 I 335 consid. 2; 62 I 241 consid. 1). Dès lors, la succession de Magda
Ch., qui était ressortissante française, décédée en France où elle était
domiciliée, s'est ouverte en France et le juge français est seul compétent
pour statuer sur l'action introduite par la recourante, pour autant qu'elle
soit de nature successorale. Ce dernier principe est d'ailleurs conforme
au droit international privé suisse (art. 22, 23 et 32 LRDC).

Erwägung 3

    3.- Une action est de nature successorale, au sens de l'art. 5 de la
Convention, lorsque son essence est de nature successorale, sans qu'il
soit d'ailleurs nécessaire que toutes les parties au procès soient des
héritiers ou des personnes qui prétendent à la succession (RO 98 II 94;
62 I 244; 58 I 111 consid. 4).

    Le fond d'une action relève du droit successoral lorsque les parties
invoquent un titre héréditaire pour réclamer une part dans une succession
et faire constater l'existence et l'étendue de leurs droits. Déterminants
sont les motifs sur lesquels est fondée la demande et sur lesquels s'appuie
le défendeur pour résister à la demande, à savoir les titres juridiques
invoqués (ROGUIN, Conflits des lois suisses, p. 289 no 176 et p. 405 no
269; AUJAY, Etudes sur le traité franco-suisse... p. 262 no 204; CHÂTENAY,
p. 49; CURTI, Der Staatsvertrag zwischen der Schweiz und Frankreich,
p. 18-19).

    En l'espèce, la recourante reproche tout d'abord à l'intimé d'avoir
abusé de son pouvoir de disposer des biens de sa femme et d'avoir ainsi
détourné de l'actif successoral un montant de 90 000 livres sterling
pour son profit personnel et celui de dame Houze. Elle prétend ainsi
qu'en vertu des règles du mandat, l'intimé est tenu de restituer cette
somme à sa mandante, respectivement aux héritiers de cette dernière. De
ce point de vue, la recourante ne procède pas contre l'intimé en sa
qualité d'héritier ou de légataire, mais uniquement en tant que gérant
des biens de sa femme. L'objet de l'action, qui aurait pu être introduite
de son vivant par dame Ch. elle-même, a sans conteste un caractère
contractuel. Sous cet angle, l'art. 5 de la Convention est inapplicable
(cf. CHÂTENAY, Les successions en droit franco-suisse, p. 48; BOISSONNAS,
Les successions et les Conventions francosuisses, p. 149-150).

    Le caractère contractuel de l'action ressort aussi du fait que la
recourante vise à faire valider des séquestres exécutés en son nom, dans
son seul intérêt, et à obtenir que l'intimé soit condamné à lui payer à
elle-même et non à la succession les montants réclamés.

    Le fait que la recourante invoque sa qualité d'héritière et que l'on
doive se demander si elle peut agir seule, sans le consentement de sa
demi-soeur, ne modifie pas la nature de l'action, parce que ces questions
portent uniquement sur la qualité pour agir.

    En revanche, lorsque la recourante invoque, à l'appui de ses
prétentions, l'art. 792 du code civil français (CCF), selon lequel
l'héritier ou le légataire qui a recelé, au préjudice de ses cohéritiers,
des biens appartenant à la succession, est déchu de ses droits sur
ces biens, le débat n'a plus lieu sur le terrain contractuel. Il porte
directement sur l'existence et l'étendue des droits à la succession,
soit, selon l'art. 5 de la Convention, sur "les comptes à faire entre
les héritiers ou légataires". Dans cette mesure, l'action doit être
qualifiée de successorale.

    Il en va de même lorsque l'intimé s'oppose à l'action pour le motif
que la recourante serait tenue de rapporter à la succession certains
biens reçus à titre d'avance d'hoirie.

    Or il faut admettre que la solution du litige dépend essentiellement
du problème de nature successorale, soit de déterminer si l'intimé,
bien que légataire universel, doit être considéré comme déchu de tout
droit successoral sur le montant recelé, en vertu de la sanction prévue
à l'art. 792 CCF, ou si, au contraire, les conclusions de la recourante
sont mal fondées dans la mesure où elle est tenue de rapporter certains
biens qu'elle aurait reçus à titre d'avance d'hoirie. La question qui
relève du droit des obligations, le rapport de mandat, n'est examinée
dans ce contexte qu'à titre incident. Le caractère successoral de l'action
apparaît prééminent et s'impose. C'est ainsi à bon droit que la recourante
a été renvoyée à agir devant le juge français, seul compétent en vertu
de l'art. 5 de la Convention.

Erwägung 4

    4.- Il n'y a pas lieu de déclarer les juridictions genevoises
compétentes pour connaître uniquement de la demande tendant à faire
constater que l'intimé est débiteur de la succession du montant qu'il
aurait encaissé à l'insu de sa mandante, parce que l'action tendant
à la validation des séquestres ne vise qu'à un paiement en faveur de
la recourante et non de la succession. Au surplus, les conclusions de
la recourante ne tendent pas à la constatation d'un droit au profit de
la succession. Dans ces conditions, le recours doit être rejeté et il
appartiendra au juge français, saisi de l'action successorale, d'examiner
à titre préjudiciel le litige relevant du rapport de mandat.

Entscheid:

Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Rejette le recours.