Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 98 IV 184



98 IV 184

35. Arrêt de la Cour de cassation pénale du 7 septembre 1972 dans la
cause X contre Procureur général du canton de Berne. Regeste

    Art. 134 Ziff. 1 StGB.

    1.  Unter Art. 134 StGB fällt die Gefährdung der Gesundheit oder
der geistigen Entwicklung eines Kindes lediglich, wenn sie schwer ist;
zudem muss sie tatsächlich sein (Erw. 1).

    2.  Der Vorsatz muss sich auf die Misshandlung richten; es ist
nicht nötig, dass er sich auch auf das Ergebnis richtet, sofern dieses
voraussehbar ist (Erw. 2).

Sachverhalt

    A.- Le 17 juillet 1971, vers midi, dame X. était à table avec ses trois
enfants. Une querelle éclata entre ces derniers, et l'un d'eux renversa
un verre de limonade. Johanna, âgée de six ans, qui refusait de manger,
se mit à lécher la boisson répandue sur la table. Enervée, sa mère lui
saisit la tête par les cheveux et la tapa sur son assiette. Celle-ci se
brisa et provoqua deux blessures au front.

    Dame X. fit immédiatement conduire sa fille à l'hôpital de P. Les deux
blessures, d'une profondeur de quelques millimètres, avaient une longueur
de trois centimètres environ. Le médecin, qui fit une dizaine de points
de suture pour refermer les plaies, retira de l'une d'elles une esquille
acérée, vraisemblablement de porcelaine. A son avis, les blessures n'ont
pas mis en danger la vie de l'enfant, qui présentait un bon état général,
sans symptômes neurologiques anormaux.

    B.- Statuant en deuxième instance, la 1re chambre pénale de la
Cour suprême du canton de Berne a déclaré dame X. coupable de mauvais
traitements envers les enfants et lui a infligé 5 jours d'emprisonnement
avec sursis pendant 2 ans; elle a admis que la responsabilité de la
prévenue, qui avait agi sous l'empire d'une violente colère, était
restreinte.

    C.- Contre cet arrêt, la condamnée se pourvoit en nullité au Tribunal
fédéral. Elle conclut à libération.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- L'art. 134 ch. 1 CP punit celui qui, ayant la charge ou la garde
d'un enfant de moins de 16 ans, l'aura maltraité, négligé ou traité avec
cruauté, de façon que la santé ou le développement intellectuel de cet
enfant en soit atteint ou gravement compromis.

    a) La recourante, avec raison, ne conteste pas avoir maltraité sa
fille Johanna, le 17 juillet 1971. Il suffit d'ailleurs que les mauvais
traitements aient été infligés une seule fois (arrêt Keller du 20 mars
1956, consid. 1).

    b) Selon l'arrêt attaqué, les mauvais traitements n'ont pas porté
atteinte à la santé de la victime ni à son développement intellectuel;
en revanche, ils ont gravement menacé sa santé et auraient pu compromettre
son développement intellectuel.

    La mise en danger de la santé ou du développement intellectuel
ne tombe sous le coup de l'art. 134 CP que si elle est grave. "Damit
stellt das Gesetz besondere Anforderungen sowohl an den der Gesundheit
oder geistigen Entwicklung drohenden Schaden, als auch an den Grad der
Wahrscheinlichkeit, mit der er bevorgestanden haben muss. Es genügt weder
jede drohende Schädigung der Gesundheit oder geistigen Entwicklung, noch
jede konkrete Gefahr, in die diese Rechtsgüter gebracht werden. Schwer
gefährdet ist die Gesundheit oder geistige Entwicklung nur, wenn die
Misshandlung, Vernachlässigung oder grausame Behandlung einen erheblichen
Schaden an der Gesundheit oder eine erheblich von der Norm abweichende
geistige Entwicklung des Kindes in grosse Nähe rückt" (RO 80 IV 105). Il
n'y a aucune raison de s'écarter de cette définition, que FEHR approuve,
malgré les critiques que, sur d'autres points, il adresse à l'arrêt
Piquerez (RPS 1963 p. 184/185).

    aa) L'art. 134 ch. 1 CP ne se contente pas de la simple possibilité
que le développement intellectuel de l'enfant ait été compromis;
il exige une mise en danger réelle. Aussi est-il indifférent que les
mauvais traitements subis par la petite Johanna aient pu compromettre
son développement intellectuel. La Cour bernoise ne prétend pas qu'ils
l'aient compromis et, moins encore, qu'ils l'aient compromis gravement.

    bb) La santé de la fillette a-t-elle été gravement compromise? Ainsi
que l'écrit FEHR (op. cit., p. 185):

    "Da beim Gefährdungsdelikt der Verletzungserfolg schliesslich nicht
eintritt, wird es stets eine schwierige Beweisfrage sein, ob es sich beim
drohenden Schaden um einen solchen schwerer Natur gehandelt hätte."

    Si l'on compare le cas présent avec l'affaire Annen, où la correction
administrée par le père a été plus sévère et les conséquences aussi
sérieuses et où l'applicabilité de l'art. 134 CP a néanmoins été niée
(RO 85 IV 125 et 126 consid. 1), on pourrait être tenté de conclure
qu'une solution identique s'impose en l'espèce, si ces deux éléments
constituaient les seuls critères d'appréciation.

    D'après la Cour cantonale, les conséquences du comportement de la
recourante auraient pu être beaucoup plus graves qu'elles ne l'ont été;
sous la violence du choc, l'assiette en se brisant aurait pu causer des
dommages irréparables aux organes de la vue. Le pourvoi objecte qu'il
s'agit d'une supposition. Il est certain que les yeux de la fillette
n'ont pas été touchés par des éclats de porcelaine. S'ils l'avaient été,
sa santé aurait été non pas compromise, mais sérieusement atteinte; il
y aurait eu non Gefährdung, mais Schädigung der Gesundheit. Comme elle
a été blessée au front, à quelques centimètres des yeux, et qu'un éclat
acéré - vraisemblablement de porcelaine - a été extrait d'une des plaies,
l'enfant a échappé de peu au risque que cet éclat ne se loge dans un
oeil. Il s'ensuit que sa santé a été gravement compromise.

Erwägung 2

    2.- Les mauvais traitements envers les enfants sont un délit
intentionnel. L'intention (qui peut se présenter sous la forme du dol
éventuel) doit évidemment porter sur les mauvais traitements. Est-il
nécessaire qu'elle ait trait, de plus, au résultat, lésion ou mise en
danger? La question est controversée. La plupart des auteurs répondent
affirmativement (GERMANN, Das Verbrechen im neuen Strafrecht, p. 31;
HAFTER, Bes. T. p. 65 ch. 3; THORMANN/OVERBECK, art. 134, n. 9; LOGOZ,
art. 134 n. 7; PETRZILKA, Zürcher Erläuterungen zum Schweizerischen
Strafgesetzbuch, p. 159). La Cour de céans l'a laissée ouverte dans les
arrêts Sträuli du 21 juin 1948, consid. 3; Odermatt du 23 septembre 1952,
consid. 1 i.f.; Keller du 20 mars 1956, consid. 3, après l'avoir résolue
négativement dans l'arrêt Brunner du 24 août 1946, par les motifs suivants:

    "... die schwere Schädigung oder Gefährdung der Gesundheit braucht
vom Misshandelnden nicht gewollt zu sein, es genügt, dass sie für
ihn voraussehbar war. Das findet sich ausdrücklich gesagt für den
qualifizierten Fall des Abs. 2, folgerichtig muss es auch für den
einfachen des Abs. 1 gelten. Es wäre auch unverständlich, wenn zur
gewollten Misshandlung noch der besondere Vorsatz der schweren Schädigung
oder Gefährdung hinzukommen müsste, um sie strafbar zu machen, die blosse
Voraussehbarkeit dieser Folge hiefür nicht genügen sollte."

    Cette opinion doit être confirmée. Comme le montre FEHR (op.  cit.,
p. 189), elle s'appuie sur le texte même de l'art. 134 CP. Si cette
disposition avait été calquée sur le modèle des art. 122 ss.. CP et
rédigée en ces termes:

    "Celui qui, par des mauvais traitements, etc., aura lésé ou gravement
compromis la santé ou le développement intellectuel d'un enfant de moins
de 16 ans dont il avait la charge ou la garde, sera puni...",

    l'intention devrait porter sur la lésion ou la mise en danger. Selon
le texte en vigueur, l'acte incriminé consiste non dans la lésion ou
la mise en danger, mais dans les mauvais traitements. La lésion ou la
mise en danger n'est qu'une condition, indispensable il est vrai, de la
répression, mais que l'auteur n'a pas nécessairement voulue. Il suffit
qu'il ait pu la prévoir. En effet, l'art. 134 ch. 1 al. 2 ou 3 se contente
de la prévisibilité du résultat, lésion corporelle grave ou décès. En
revanche, lorsque l'intention porte sur celui-ci, les art. 122 ou 111
ss. sont seuls applicables. Cette éventualité est rarement réalisée. Les
éducateurs et les parents inculpés de mauvais traitements ont cru agir,
le plus souvent, pour le bien de l'enfant ou, s'ils ont perdu de vue
son intérêt, ils ont cédé à un mouvement d'impatience ou de colère,
mais sans penser aux risques que le châtiment faisait courir à la santé
ou au développement intellectuel de l'enfant ni les accepter. En exigeant
que l'intention s'étende au résultat dans l'hypothèse de l'art. 134 ch. 1
al. 1, on restreindrait par trop l'efficacité de cette disposition (FEHR,
op. cit., pp. 189/190) et on renoncerait, sans que rien le justifie,
à l'interprétation systématique de l'art. 134 ch. 1 dans son ensemble.

    Déterminer si une personne pouvait prévoir telle conséquence, c'est
trancher une question de droit qui ressortit à la Cour de céans (RO 83
IV 189, no 54). En tapant volontairement la tête de Johanna contre son
assiette avec assez de force pour que celle-ci se brise, la recourante
pouvait prévoir qu'elle compromettrait gravement la santé de la fillette.

Entscheid:

Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Rejette le pourvoi.