Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 98 III 74



98 III 74

17. Arrêt du 29 décembre 1972 dans la cause Darier & Cie. Regeste

    Arrestierung eines Checks.

    Die Arrestierung eines Checks beim Bezogenen ist weder hinsichtlich
des Checks selber noch hinsichtlich der damit verbundenen Forderung gültig
(Erw. 2).

    Der Arrest ist sofort zu vollziehen (Bestätigung der Rechtsprechung;
Erw. 3).

Sachverhalt

    A.- Intercambio Internacional Trust SA, à Panama (ci-après:
Intercambio), a chargé la Compagnie financière pour le commerce SA, à
Genève (ci-après: la Compagnie financière), de payer 10 400 dollars US à
un sieur Sol Gold, domicilié en Grande-Bretagne, au nom de qui agissait
fiduciairement la banque Darier & Cie, à Genève. Le 17 avril 1972, la
Compagnie financière a tiré sur le Crédit Suisse à Genève un chèque de ce
montant à barrement général, no 1001424, à l'ordre de Darier & Cie à qui
elle l'a remis. Puis, sur les instructions d'Intercambio, elle a ordonné
au Crédit Suisse de refuser le paiement dudit chèque. Le Crédit Suisse
n'a pas payé le chèque, que Darier & Cie lui a présenté au paiement le
19 avril 1972, par le motif qu'il était "frappé d'opposition".

    Saisi par Intercambio et la Compagnie financière d'une requête de
séquestre contre Sol Gold, le Tribunal de première instance de Genève a
rendu une ordonnance de séquestre le 21 avril 1972, en vertu de l'art. 271
ch. 4 LP. Les objets à séquestrer sont désignés comme il suit:

    "Chèque no 1001424 à l'ordre de MM. Darier & Cie, Genève du 17 avril
1972 tiré sur le Crédit Suisse, Genève.

    Créance contre le Crédit Suisse, Genève, attachée à ce chèque."
Le 24 avril 1972, l'Office des poursuites de Genève a séquestré en mains
du Crédit Suisse à Genève "le chèque no 1001424 ... ainsi que la créance
attachée à ce chèque". Le même jour, il a adressé au Crédit Suisse les
avis prévus par les art. 98 et 99 LP.

    Le 21 avril 1972, la banque Darier & Cie a requis l'ouverture d'une
poursuite pour effets de change fondée sur le chèque no 1001424 contre la
Compagnie financière. En même temps, elle a déposé le chèque à l'office
des poursuites. Le commandement de payer notifié le 26 avril 1972 par
l'Office des poursuites de Genève portait sur les sommes suivantes: 40
118 fr. (équivalent de 10 400 $ US au cours du 21 avril 1972, soit 3'8575)
plus intérêt à 6% dès le 19 avril 1972; 133 fr. 70 (droit de commission,
art. 1130 ch. 4 CO) plus intérêt à 5% dès le 21 avril 1972. La Compagnie
financière a formé opposition le 28 avril 1972. Le 1er mai, l'Office des
poursuites a soumis cette opposition au Tribunal de première instance de
Genève. Le 3 mai, le Crédit Suisse a versé à l'Office des poursuites la
somme de 40 302 fr., apposant au dos de l'avis de virement les mentions
suivantes: "D'ordre de la Cie Financière pour le Commerce SA Concerne
poursuite 227 599. Existe également séquestre 119".

    Le 9 mai 1972, l'Office des poursuites a adressé la lettre suivante
au conseil de la Compagnie financière:

    "Concerne poursuite pour effet de change no 227 599 Darier & Cie
c/Compagnie financière pour le commerce

SA Nous vous confirmons par la présente avoir reçu du Crédit Suisse,
à Genève, un montant de Fr. 40 302.-- le 5 mai 1972, à valoir dans cette
affaire.

    Par suite du dépôt à notre office du séquestre no 119, cette somme
est actuellement en suspens à nos bureaux".

    Par jugement du 9 mai 1972, le Tribunal de première instance de
Genève a déclaré irrecevable l'opposition formée par la Compagnie
financière. Saisie d'un appel de cette société, la Cour de justice du
canton de Genève a annulé ce jugement par arrêt du 30 juin 1972. Elle a
déclaré "recevable à concurrence de Fr. 40 302 versés le 5 mai 1972 en
mains de l'Office des poursuites, l'opposition formée par la Compagnie
financière pour le commerce SA à la poursuite pour effets de change
notifiée le 26 avril 1972, selon commandement de payer no 227 599",
et déclaré "cette opposition irrecevable pour le surplus". Elle a
considéré en substance qu'il y avait lieu de tenir compte pour juger de
la recevabilité de l'opposition selon l'art. 182 ch. 1 LP du montant payé
par la Compagnie financière à l'Office des poursuites, alors même que le
créancier ne peut le percevoir, vu le séquestre.

    Pour éteindre la poursuite, la Compagnie financière a encore versé 222
fr. 70 à l'Office des poursuites qui a reçu cette somme le 4 juillet 1972.

    Le 10 juillet 1972, l'Office des poursuites a décidé

    1) de verser aux banquiers Darier & Cie les sommes de 40 302 fr. et
222 fr. 70, sous déduction de 125 fr. 70 correspondant aux émoluments
d'encaissement,

    2) de restituer, dûment acquitté, à la Compagnie financière le chèque
no 1001424 dès qu'il serait parvenu en la possession de l'Office.

    B.- La Compagnie financière a porté plainte à l'autorité de
surveillance contre cette décision. Elle concluait à son annulation,
la somme de 40 302 fr. reçue par l'Office des poursuites le 5 mai 1972
devant rester en ses mains tant que le séquestre 119 serait en vigueur.

    Intercambio a porté plainte dans le même sens contre la décision du
10 juillet 1972.

    Statuant le 18 septembre 1972, l'Autorité de surveillance des Offices
de poursuite pour dettes et de faillite du canton de Genève, après avoir
joint les deux plaintes, a annulé la décision attaquée et dit que la
somme de 40 302 fr. reçue par l'Office des poursuites le 5 mai 1972
devrait rester entre ses mains tant que le séquestre serait en vigueur.

    C.- Les banquiers Darier & Cie recourent au Tribunal fédéral contre
cette décision. Ils concluent à son annulation et à la confirmation de
la décision de l'Office des poursuites du 10 juillet 1972.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Bien qu'émis à l'ordre de "Darier & Cie. Banquiers", le chèque
no 1001424 pouvait faire l'objet d'un séquestre au préjudice de Sol
Gold. La banque Darier & Cie agissait en effet fiduciairement au nom
de celui-ci. Ni Sol Gold ni la banque n'ont d'ailleurs contesté que le
chèque pût être séquestré au préjudice du premier.

Erwägung 2

    2.- Le Tribunal de première instance de Genève a ordonné le séquestre
du "chèque no 1001424 à l'ordre de MM. Darier & Cie, Genève, du 17 avril
1972 tiré sur le Crédit Suisse, Genève" et de la "créance contre le Crédit
Suisse, Genève, attachée à ce chèque".

    a) Le séquestre d'un chèque au préjudice du créancier de celui-ci a
lieu suivant les formes prescrites pour la saisie (art. 275 LP). Il doit
donc être exécuté auprès de ce créancier. Lorsque le séquestre porte sur
des papiers-valeurs au porteur ou à ordre, l'Office des poursuites les
prend sous sa garde (art. 98 al. 1 LP; JÄGGI, n. 324 et 326 ad art. 965
CO).

    En vertu de l'ordonnance de séquestre du 21 avril 1972, l'Office
des poursuites de Genève devait exécuter le séquestre du chèque no
1001424 auprès de la banque Darier & Cie, à l'ordre de laquelle il était
émis et qui en était effectivement le porteur, ladite banque agissant
fiduciairement pour le compte de Sol Gold. C'est à tort qu'il a opéré
le séquestre auprès du Crédit Suisse: le chèque ne pouvait se trouver
en mains du tiré, auquel il n'est remis que contre paiement de son
montant. Certes, dans leur requête de séquestre, les créanciers avaient
demandé sous ch. 1 que fût ordonné le séquestre du "chèque no 1001424
émis par la Cie financière pour le commerce S. A. au nom de la banque
Darier & Cie, à Genève, fonctionnant comme Office d'encaissement aux
mains du Crédit Suisse, 2, place Bel-Air, à Genève, chèque d'un montant
de US $ 10 400.--". Mais le Tribunal de première instance de Genève n'a
précisément pas repris ces termes dans son ordonnance, qui par le du
"chèque no 1001424 ... tiré sur le Crédit Suisse, Genève". L'Office des
poursuites devait se conformer à cette ordonnance. Opéré en mains du
Crédit Suisse, le séquestre du chèque n'a pas été exécuté valablement.

    Cette mesure de l'Office n'a cependant pas fait l'objet d'une plainte
à l'autorité de surveillance.

    b) Le chèque est un papier-valeur, savoir un titre auquel un droit est
incorporé d'une manière telle qu'il soit impossible de le faire valoir
ou de le transférer indépendamment du titre (art. 965 CO). Le droit de
créance incorporé au titre ne peut être saisi ou séquestré qu'avec le titre
lui-même (RO 88 III 142 consid. 2a, 92 III 24 ss. consid. 3). En l'espèce,
l'invalidité du séquestre du chèque entraîne donc celle du séquestre de
la créance attachée à ce titre.

Erwägung 3

    3.- Le 5 mai 1972, l'Office des poursuites de Genève a reçu du Crédit
Suisse à Genève la somme de 40 302 fr. "d'ordre de la Cie Financière
pour le Commerce S. A.". Selon l'avis de virement ce montant concernait
la "poursuite 227 599", l'existence du "séquestre 119" étant en outre
rappelée. La poursuite no 227 599 était la poursuite pour effets de change,
fondée sur le chèque no 1001424, ouverte par la banque Darier & Cie contre
la Compagnie financière à la suite du refus du paiement dudit chèque. En
donnant ordre au Crédit Suisse de verser à l'Office des poursuites la
somme de 40 302 fr., la poursuivie entendait ainsi payer la créancière
et mettre fin à la poursuite.

    a) Le montant de 40 302 fr. versé à l'Office des poursuites n'était
pas frappé par le séquestre ordonné le 21 avril 1972 par le Tribunal de
première instance de Genève, puisque ce séquestre n'avait été valablement
exécuté ni pour le chèque ni pour la créance qui lui était attachée. Après
réception de ce montant, l'Office des poursuites n'a pas procédé à une
nouvelle exécution du séquestre, portant sur la somme de 40 302 fr. Il
s'est borné à écrire le 9 mai à la Compagnie financière que, "par suite
du dépôt à notre office du séquestre no 119, cette somme est actuellement
en suspens à nos bureaux".

    b) Selon la jurisprudence, la nature du séquestre postule son exécution
immédiate; l'inobservation de cette exigence, qui touche à la validité
de la mesure, fait tomber le séquestre; le débiteur peut ainsi demander
l'annulation du séquestre opéré tardivement; la question de savoir si
l'exécution est tardive doit être tranchée dans chaque cas particulier,
d'après les circonstances (RO 54 III 144 s.).

    Le 10 juillet 1972, date de la décision déférée à l'autorité de
surveillance, l'exécution du séquestre ordonné le 21 avril 1972 aurait
dû être considérée comme tardive. A défaut d'une nouvelle ordonnance de
séquestre, l'Office des poursuites n'était pas fondé à retenir la somme de
40 302 fr. versée dans la poursuite no 227 599. La décision de l'autorité
de surveillance doit partant être annulée.

Entscheid:

    Par ces motifs, la Chambre des poursuites et des faillites

    Admet le recours et annule la décison attaquée.