Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 98 IB 167



98 Ib 167

23. Arrêt de la Cour de cassation du 10 mars 1972 dans la cause Brique
contre Commission genevoise de libération conditionnelle. Regeste

    Bedingte Entlassung, Art. 38 StGB, 26 ff. VwG.

    1.  Die Einsichtnahme in die Akten über die bedingte Entlassung darf
dem Verurteilten, der darum nachsucht, grundsätzlich nicht verweigert
werden, soweit nicht die Bedingungen des Art. 27 VwG für einzelne
Aktenstücke erfüllt sind (Erw. 1).

    2.  Hat der Verurteilte die Akteneinsicht erst nach Erlass des
Entscheids über die bedingte Entlassung verlangt, so wird bei Verletzung
des rechtlichen Gehörs nicht dieser Entscheid aufgehoben, sondern einzig
derjenige über die Verweigerung der Akteneinsicht (Erw. 2).

    3.  Da das Bundesgericht nicht sein eigenes Ermessen an die Stelle
desjenigen der untern Behörde setzt, ist es nicht Rekursinstanz mit voller
Kognition; Gehörsverweigerung kann daher nicht von ihm wiedergutgemacht
werden (Erw. 3).

Sachverhalt

    A.- Brique a été condamné aux peines suivantes:

    -  le 10 janvier 1953, par la Cour correctionnelle de Genève, à un
an d'emprisonnement et 1000 fr. d'amende pour homicide par négligence et
infraction à la circulation routière;

    - le 7 mai 1955, par la même autorité, à 15 mois d'emprisonnement
pour abus de confiance (peine additionnelle à la précédente);

    - le 29 février 1968, par la Cour d'appel de Chambéry, à un mois de
prison pour infractions douanières;

    - le 7 novembre 1968, par l'officier de police de Genève, à une amende
de 225 fr. pour parcages interdits;

    - le 16 mai 1969, par le même fonctionnaire, à une amende de 100
fr. pour arrêt interdit;

    - le 26 avril 1971, par la Cour de justice de Genève, à 4 ans de
réclusion (sous déduction de 2 ans, 1 mois et 10 jours de détention
préventive) pour infraction à la loi sur les stupéfiants. Brique subit
cette dernière peine aux Etablissements de la plaine de l'Orbe. Le 16
octobre 1971, il sollicita sa libération conditionnelle.

    B.- La Commission de libération conditionnelle du canton de Genève
(ci-après: la commission) rejeta la requête, le 9 novembre. Elle expose
que les renseignements recueillis ne permettent pas de penser qu'il a
réalisé la gravité de ses actes et qu'elle ne peut avoir la conviction,
au vu de l'ensemble du dossier, qu'il se conduira honnêtement en cas
de libération conditionnelle; que, par ailleurs, ses projets sont très
vagues et ne donnent pas de garanties suffisantes pour l'avenir.

    C.- Contre cette décision, Brique a formé un recours de droit
administratif. Il conclut à sa libération conditionnelle, avec effet
immédiat.

    D.- La commission et le Département fédéral de justice et police
proposent de rejeter le recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Le recourant avait demandé à prendre connaissance du dossier
avant d'attaquer la décision du 9 novembre 1971. La commission lui a
répondu négativement, le 22 novembre. Aussi, invoquant l'art. 4 Cst.,
se plaint-il de la violation du droit d'être entendu.

    Depuis que le Tribunal fédéral a rendu, au sujet de ce droit,
son arrêt fondamental dans la cause Chastel (RO 74 I 247 ss.), la
jurisprudence a évolué, pour trouver finalement une consécration légale
dans les art. 26 ss. LPA. Sans doute ces dispositions régissent-elles
uniquement la procédure dans les affaires administratives qui doivent
être réglées par des décisions d'autorités administratives fédérales
(art. 1er LPA). Il n'en demeure pas moins que les principes essentiels
qu'elles expriment ont une portée générale - la Cour de droit public
les avait déjà déduits de l'art. 4 Cst. - et doivent, partant, être
observés dans les autres affaires administratives. Il n'est pas nécessaire
d'examiner ici s'ils pourraient être tenus en échec par une loi cantonale
de procédure qui assurerait aux administrés une protection moins étendue,
car cette hypothèse n'est pas réalisée: ni le recourant ni la commission
ne se réfèrent à des règles cantonales.

    La commission tient le dossier de la libération conditionnelle
pour absolument confidentiel; les rapports qui y figurent contiennent
des appréciations sur la personnalité du détenu qui, connues de lui,
risqueraient de perturber l'ordre et la sécurité dans l'établissement;
de plus, les services consultés à l'occasion d'une demande de libération
conditionnelle doivent pouvoir émettre des avis fondés sur leur intime
conviction, sans avoir à redouter des réactions violentes de la part
du condamné. Certes, les risques allégués ne sont pas imaginaires. Les
intérêts menacés ne sont toutefois pas assez importants pour légitimer le
refus de consulter l'ensemble du dossier (cf. art. 27 LPA). Lorsque les
conditions de l'art. 38 ch. 1 al. 1 CP ne sont pas remplies, l'autorité
compétente n'hésite pas à rendre une décision négative, malgré le
mécontentement qu'éprouvera probablement l'intéressé et les difficultés
qui en résulteront peutêtre pour la direction du pénitencier. Il n'y a pas
lieu de craindre que la connaissance des préavis qui se trouvent au dossier
n'aggrave sensiblement la situation. Quant aux réactions violentes, le
juge qui inflige une peine, qui ordonne une mesure portant atteinte à des
droits éminemment personnels (mise sous tutelle, internement, déchéance
de la puissance paternelle) ou qui, dans les motifs de sa décision,
émet une appréciation sévère sur la personne d'une des parties (dans un
jugement de divorce, par exemple) n'en est pas à l'abri non plus. Rien
ne permet de supposer qu'elles retiendront les services appelés à donner
leur avis au sujet d'un détenu réclamant sa libération conditionnelle de
s'exprimer selon leur intime conviction.

    Il s'ensuit que la consultation du dossier ne doit pas être refusée,
du moins en principe, au condamné qui en fait la demande, pour autant que
les conditions de l'art. 27 LPA ne soient pas réunies à l'égard de l'une
ou l'autre pièce. La commission cependant n'invoque en l'espèce aucune
circonstance spéciale qui justifierait une dérogation.

Erwägung 2

    2.- Selon l'art. 28 LPA, une pièce dont la consultation a été refusée
à la partie ne sera utilisée à son détriment que si l'autorité lui
en a communiqué le contenu, du moins pour l'essentiel, en lui donnant
l'occasion de s'expliquer et de fournir des preuves à ce sujet. Cette
règle est conforme à la doctrine (ZWAHLEN, ZSR 1947 p. 156 a; IMBODEN,
Schweizerische Verwaltungsrechtsprechung, 3e éd., T 2, p. 623; FAVRE,
Droit constitutionnel suisse, p. 253; GRISEL, Droit administratif suisse,
p. 182). En tant qu'elle relève que les renseignements recueillis ne
permettent pas de penser que Brique a réalisé la gravité de ses actes -
et c'est là le motif principal du refus - la commission se fonde sur un
document dont le contenu essentiel n'a pas été communiqué au recourant:
la question se pose dès lors de savoir si elle a violé le droit qu'il
avait d'être entendu en le privant de la faculté de s'exprimer sur les
griefs formulés contre lui.

    D'après l'art. 38 ch. 1 al. 3 CP, l'autorité compétente entendra le
détenu lorsqu'il n'aura pas présenté de requête ou lorsqu'il n'est pas
sans plus possible d'accorder la libération conditionnelle sur le vu de
la requête. Cette disposition ne prescrit pas la communication d'office
du dossier. Une telle communication ne résulte pas davantage des règles
de la procédure administrative (cf. RO 96 I 610).

    En conséquence, il appartenait au recourant de demander communication
du dossier avant que ne soit prise la décision attaquée, faute de quoi il
ne peut arguer du refus qui lui a été opposé postérieurement à celle-ci
pour la remettre en cause (RO 96 I 610 précité). En revanche le grief
du recourant doit être compris en ce sens que, n'ayant pas disposé du
dossier quand il l'a demandé, il n'a pu motiver son recours en pleine
connaissance de cause. C'est alors la décision du 22 novembre 1971,
par laquelle la communication du dossier lui a été refusée, qui viole
son droit d'être entendu.

Erwägung 3

    3.- Ce droit étant de nature essentiellement formelle, sa violation
entraîne en principe l'annulation de la décision attaquée, sans que le
recourant ait à justifier d'un intérêt (RO 92 I 188, 264 no 45; 96 I
22, 188). La jurisprudence admet cependant que la violation peut être
réparée lorsque le recourant a eu la possibilité de s'exprimer devant une
autorité de recours jouissant d'une pleine cognition (RO 96 I 188). On
pourrait penser que tel est le cas du Tribunal fédéral, en tant que
juridiction administrative (art. 105 al. 1 OJ), lorsque le recours,
comme en l'espèce, n'est pas dirigé contre la décision d'un tribunal
cantonal ou d'une commission de recours (art. 105 al. 2). Il n'en est
toutefois rien, tout au moins lorsque le Tribunal fédéral, bien qu'ayant
latitude de revoir non seulement l'application du droit mais encore les
constatations de fait, s'interdit de substituer son appréciation à celle de
l'autorité inférieure mais se borne à vérifier que celle-ci n'a pas abusé
de son pouvoir appréciateur (RO 81 I 384 consid. 5; 86 I 248 consid. 4;
87 I 348 consid. 6; 89 I 340 consid. 11; 91 I 147 consid. 1b; 92 I 493
consid. 1b; 93 I 564 consid. 2; 941 560 consid. 1; Arrêt non publié Wirz
du 30 décembre 1971).

    Dans cette éventualité en effet, la violation du droit d'être entendu
peut avoir une incidence précisément sur une question d'appréciation que
le Tribunal fédéral ne revoit pas librement.

Erwägung 4

    4.- La décision du 22 novembre 1971 doit donc être annulée.  Bien que
le Tribunal fédéral puisse statuer lui-même en pareil cas (art. 114
al. 2 OJ) il est préférable de renvoyer la cause à la commission qui
est mieux à même de tenir compte des circonstances d'espèce. En effet,
il n'est pas nécessaire que l'intégralité du dossier soit communiquée
au recourant. Si l'on n'imagine pas de prime abord pourquoi, de manière
générale, un détenu devrait ignorer les appréciations objectives portées
sur lui par les autorités, rien n'empêche en principe que certaines parties
du dossier lui restent cachées, à condition qu'elles ne fondent pas une
décision prise à son détriment, et pour autant que cela soit justifié au
regard de l'art. 27 al. 1 LPA (cf. IMBODEN, op.cit., ibid.).

    In casu, il conviendra que la commission, si elle persiste à refuser
la communication complète du dossier, résume pour l'essentiel le contenu
des pièces qu'elle entend en retirer et cite notamment à cette occasion
une phrase du rapport (pièce 3, p. 3 du dossier cantonal) selon laquelle
le recourant "n'exprime aucun regret, disant que ce n'est pas lui qui
oblige les gens à se droguer". Cet extrait formule en effet la principale
critique émise à l'endroit du recourant.

    Une fois en possession de ces pièces, le recourant disposera du délai
de l'art. 106 OJ pour déposer un mémoire complémentaire, après quoi le
Tribunal fédéral statuera sur le fond du recours.

Entscheid:

Par ces motifs, la Cour de cassation pénale: Admet partiellement le
recours, en ce sens que la décision du 22 novembre 1971 est annulée.

    Renvoie la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision.