Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 98 IB 106



98 Ib 106

16. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation du 10 mars 1972 dans la
cause Vuille contre Commission genevoise de libération conditionnelle.
Regeste

    Bedingte Entlassung. Art. 38 StGB.

    1.  Gewährt eine Behörde die bedingte Entlassung nur, wenn sie
überzeugt ist, dass der Verurteilte sich in der Freiheit wohlverhalten
wird, verlangt sie zuviel. Es genügt, dass vernünftigerweise eine günstige
Prognose gestellt werden kann (Erw. 1 b).

    2.  Der Art der Straftat, die zur Verurteilung führte, kommt bei der
Anwendung des Art. 38 Ziff. 1 Abs. 1 StGB keine Bedeutung zu (Erw. 1c).

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Lorsqu'un condamné à la réclusion a subi les deux tiers de
sa peine, l'autorité compétente peut le libérer conditionnellement si
son comportement pendant l'exécution de la peine ne s'oppose pas à son
élargissement et s'il est à prévoir qu'il se conduira bien en liberté
(art. 38 ch. 1 al. 1 CP). A la différence du texte initial, la disposition
en vigueur n'exige plus qu'il ait, autant qu'on pouvait l'attendre de lui,
réparé le dommage fixé judiciairement ou par accord avec le lésé.

    a) Selon le préavis de la direction des Etablissements de la plaine de
l'Orbe, Vuille donne entière satisfaction par sa conduite et son travail;
son comportement général est excellent. L'expérience enseigne - objecte
la commission - que des criminels endurcis se comportent impeccablement
pendant leur détention, sans que pour autant leur état d'esprit envers
la société ait réellement changé. C'est exact et c'est précisément
pourquoi la loi ne fait pas dépendre la libération conditionnelle du seul
comportement du condamné pendant l'exécution de la peine. Ce facteur ne
doit cependant pas être mésestimé, car il arrive que la bonne conduite
du détenu reflète son amendement; aussi n'est-ce pas sans raison que
le législateur l'a mentionné à l'art. 38 ch. 1 al. 1 CP. En l'espèce,
la première condition posée par cette disposition est remplie.

    b) Prévoir si le condamné se conduira bien en liberté est affaire
d'appréciation. Aussi le Tribunal fédéral ne peut intervenir qu'en
cas d'excès ou d'abus du pouvoir appréciateur (art. 104 litt. a OJ),
par exemple si la décision entreprise repose sur des considérations
étrangères au but de l'institution.

    Par sa nature même, le pronostic à émettre ne saurait être tout
à fait sûr; force est de se contenter d'une certaine probabilité; un
risque de récidive est inhérent à toute libération, conditionnelle ou non
(THORMANN/OVERBECK, n. 7 ad art. 38; LOGOZ, n. 4 a), bb) ad art. 38;
SCHWANDER, no 353; décision du Conseil fédéral du 20 août 1947 citée
par KURT, RP 1948 p. 233). C'est pourquoi l'autorité qui n'accepte de
libérer conditionnellement un détenu que si elle est convaincue qu'il se
conduira bien en liberté exige trop. Il suffit de pouvoir raisonnablement
conjecturer que, compte tenu des règles de conduite qui lui seront
imposées, le libéré se conduira bien (RP 1948 p. 232).

    La commission a méconnu ces principes en refusant de libérer
conditionnellement le recourant pour le motif qu'elle n'avait pas acquis
l'intime conviction qu'il avait rompu définitivement avec la délinquance.

    c) En effet, Vuille subit sa première peine privative de liberté. Aussi
rien dans ses antécédents n'autorise-t-il à admettre que son séjour aux
Etablissements de la plaine de l'Orbe n'a pas atteint le résultat désiré.

    L'imprécision de ses projets d'avenir ne permet pas non plus de poser
un pronostic négatif. Titulaire du certificat de capacité des employés
de commerce, il n'aura vraisemblablement guère de peine à trouver
un emploi. Il prétend être en rapport avec le Service du patronage
neuchâtelois. Il n'y a aucune raison d'en douter.

    Il reste que, selon la décision entreprise, Vuille ne semble pas
avoir réalisé la gravité de ses actes. Cette appréciation repose sur
l'impression ressentie par les autorités et selon laquelle le condamné
n'aurait pas renoncé à renouer des relations avec un certain milieu et
n'éprouverait aucun regret quant à ses actes passés. Il s'agit toutefois
d'une appréciation subjective.

    Selon le recours, Vuille n'a jamais cherché à minimiser la gravité de
ses infractions à la loi sur les stupéfiants; tout au long de l'instruction
et des débats, il a eu une attitude exemplaire et digne, reconnaissant
la gravité de ses actes et plaidant coupable; à la différence d'autres
condamnés, il n'a pas appelé du jugement; durant sa détention, il a eu
le temps d'approfondir le problème de la drogue; placé aujourd'hui dans
les mêmes circonstances, il n'agirait pas comme il l'a fait.

    Dans ses observations, la commission expose que Vuille n'était pas
le simple maillon anonyme d'une chaîne de distribution de la drogue, mais
l'un des organisateurs d'un système d'acheminement de l'héroïne d'Europe
aux Etats-Unis, système qui permit d'obtenir des gains évalués à des
centaines de milliers de francs; tout au long de cette procédure, Vuille
apparaît comme un personnage au caractère exceptionnellement pernicieux,
dont l'activité essentielle tend à la destruction lente et progressive
de la personne humaine.

    Les deux thèses ne se contredisent pas. Le rôle pernicieux qu'a pu
jouer Vuille dans le trafic de l'héroïne n'exclut pas la possibilité
qu'il ait pris conscience de la gravité de ses actes. D'autre part, il
faut éviter de se laisser impressionner par les déclarations lénifiantes
dont il est facile de truffer un mémoire.

    Tout considéré, le recours doit être admis. Certes, le pronostic sur la
conduite du condamné une fois en liberté est une affaire d'appréciation
dans laquelle le Tribunal fédéral ne peut s'ingérer qu'en cas d'abus
ou d'excès. Mais ici, en estimant ne pouvoir libérer conditionnellement
Vuille que si elle avait l'intime conviction qu'il a définitivement rompu
avec la délinquance, la commission a mal posé le problème. De plus, si
l'on considère que sa décision repose, pour l'essentiel, sur le préavis
qui se trouve en tête du dossier cantonal, il semble que la nature des
délits jugés le 3 mars 1971 ne soit pas étrangère à son refus (cf. p. 3
avant-dernier alinéa du préavis). Or cet élément ne saurait intervenir
dans l'application de l'art. 38 ch. 1 al. 1 CP (arrêt Gärtner du 23 avril
1970, consid. 2).

Entscheid:

         Par ces motifs, la Cour de cassation pénale:

    Admet le recours, annule la décision attaquée et renvoie la cause à
l'autorité cantonale pour nouvelle décision.