Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 98 IA 353



98 Ia 353

58. Arrêt du 26 avril 1972 dans la cause Visser contre Delmonico et Cour
des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois. Regeste

    Begehren um definitive Rechtsöffnung. Einrede der Verrechnung.
Art. 81 und 149 Abs. 2 SchKG.Ein vom Betreibungsschuldner vorgelegter,
gegen den Betreibungsgläubiger ausgestellter Verlustschein bildet für sich
allein keinen urkundlichen Beweis für den Bestand der Gegenforderung,
die dem Begehren um definitive Rechtsöffnung gegenüber zur Verrechnung
gestellt wird.

Sachverhalt

    A.- La société en nom collectif en liquidation Delmonico frères a
été condamnée le 29 mars 1971, par la Cour civile du Tribunal cantonal
vaudois, à payer à dame Visser la somme de 12 314 fr. avec intérêts de 5%
dès le 26 octobre 1965. Le jugement a été déclaré définitif et exécutoire
le 1er juin 1971.

    Par commandement de payer no 28 163 du 17 juin 1971, notifié le 18
juin, dame Visser a requis la débitrice de lui payer le montant de 12
314 fr. avec intérêts. Opposition ayant été faite au commandement de
payer, la créancière a requis la mainlevée définitive par acte du 28
juillet 1971. La débitrice a conclu au rejet de la requête, alléguant
que la créance était éteinte soit par paiement, soit par compensation:
elle avait auparavant déclaré vouloir compenser sa dette avec le montant
de trois actes de défaut de biens, établis contre dame Visser le 28
mars 1968 et qu'elle avait elle-même acquis par voie de cession avant
l'ouverture de la poursuite; elle avait d'autre part payé au mandataire
de la créancière, le 14 juin 1971, la différence de 338 fr. 40 entre la
créance en poursuite (12 314 fr.) et le montant total des trois actes
de défaut de biens (11 975 fr. 60), ainsi que les intérêts à 5% sur ce
dernier montant du 26 octobre 1965 au 28 mars 1968.

    Par jugement du 9 août 1971, le président du Tribunal du district
d'Oron a admis le droit de compenser invoqué par Delmonico frères et
débouté dame Visser de sa demande de mainlevée, sauf pour les intérêts à 5%
sur le montant de 11 975 fr. 60 du 28 mars 1968 au 7 juin 1971.

    Dame Visser a recouru le 24 août 1971 à la Cour des poursuites et
faillites du Tribunal cantonal vaudois, qui a rejeté le recours par arrêt
du 4 novembre 1971.

    B.- Agissant par la voie du recours de droit public, dame Visser
requiert le Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt de la Cour des poursuites
et faillites du 4 novembre 1971. Elle allègue la violation de l'art. 4 Cst.

    La société intimée conclut au rejet du recours.

Auszug aus den Erwägungen:

Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Lorsque la poursuite se fonde sur un jugement exécutoire, le
juge ne peut refuser la mainlevée définitive, selon l'art. 81 LP, que si
l'opposant prouve par titre que la dette a été éteinte ou qu'il a obtenu un
sursis postérieurement au jugement, ou s'il se prévaut de la prescription.

    La recourante ne conteste pas qu'une dette puisse s'éteindre par
compensation, ni que la débitrice puisse opposer en compensation des
créances acquises par voie de cession entre le jugement et l'ouverture
de la poursuite. Elle conteste en revanche que la production d'un acte de
défaut de biens constitue à elle seule la preuve par titre de l'existence
de la créance opposée en compensation.

Erwägung 2

    2.- Ainsi que le Tribunal fédéral l'a admis dans sa jurisprudence
constante (RO 26 II 485 ss. consid. 3, 52 III 131, 69 III 91 consid. 1),
l'acte de défaut de biens n'est qu'une déclaration officielle attestant
que la procédure d'exécution forcée engagée contre le débiteur n'a pas
abouti au paiement de la créance ou n'a abouti qu'à un paiement partiel. Il
n'emporte par lui-même ni novation de la dette au sens de l'art. 116 CO,
ni création d'un rapport de droit nouveau qui viendrait doubler l'ancien
et d'où pourrait naître un droit d'action distinct. Il ne constitue
pas une reconnaissance de dette au sens technique de cette expression:
le débiteur en effet n'intervient en rien dans son établissement et ne
fait aucune déclaration de volonté concernant le fond du droit. Un tel
acte ne "vaut reconnaissance de dette" que "dans le sens de l'art. 82"
(art. 149 al. 2 LP). Même s'il a été établi au terme d'une poursuite au
cours de laquelle la mainlevée définitive a été accordée, l'acte de défaut
de biens ne permet, à lui seul, d'obtenir que la mainlevée provisoire et
non la mainlevée définitive. Il ne pourrait avoir d'effets plus étendus
qu'en vertu de dispositions légales expresses. Or, à part les effets du
droit des poursuites (art. 149 al. 2 et 3 LP), la loi prévoit simplement
que la créance est imprescriptible et ne porte pas d'intérêts (alinéas
4 et 5 du même article).

    Si l'acte de défaut de biens ne permet d'obtenir que la mainlevée
provisoire, à plus forte raison ne peut-il pas, à lui seul, faire échec à
l'octroi de la mainlevée définitive requise sur présentation d'un jugement
exécutoire. Il ne constitue en aucune façon la preuve de l'existence de la
créance, mais uniquement, selon l'arrêt Lehle (RO 69 III 91 s.), un indice
de cette existence, indice auquel le juge ne pourrait attribuer une valeur
décisive que si le créancier se trouvait dans l'impossibilité d'invoquer
d'autres moyens de preuve, en raison de circonstances exceptionnelles
(ancienneté des événements ou autres motifs semblables).

    Or rien de tel ne se présentait en l'espèce: délivrés en mars 1968,
les actes de défaut de biens reposaient sur des faits récents; l'intimée
n'a par ailleurs pas allégué qu'en raison d'autres circonstances
exceptionnelles, elle était dans l'impossibilité d'invoquer d'autres
moyens de preuve.

    Les autorités cantonales pouvaient d'autant moins attribuer une valeur
de preuve par titre aux actes de défaut de biens en question que ceux-ci
précisaient, au sujet de la débitrice, qu'elle était actuellement sans
domicile connu, mais probablement domiciliée aux Pays-Bas. Cette indication
était de nature à faire douter de la régularité de la procédure suivie
dans les poursuites qui avaient abouti à ces actes de défaut de biens,
notamment douter que les formes prescrites par l'art. 66 LP et par la
Convention de La Haye relative à la procédure civile, du 1er mars 1954,
aient été respectées pour la notification des actes de poursuite.

Erwägung 3

    3.- En méconnaissant la règle de droit fédéral qui découle du texte
clair de la loi et de la jurisprudence, la décision attaquée a admis comme
prouvés par titres des faits - importants pour la solution du litige -
qui ne l'étaient pas; ce faisant, elle a déplacé le fardeau de la preuve
de façon inadmissible. Incompatible avec l'art. 4 Cst., cette décision
doit être annulée.