Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 97 V 20



97 V 20

5. Extrait de l'arrêt du 8 février 1971 dans la cause Société vaudoise
et romande de secours mutuels contre Nicolier et Tribunaldes assurances
du canton de Vaud Regeste

    Art. 25, 30 und 30bis KUVG: Streitigkeit zwischen Kasse und
Versichertem über den anwendbaren Tarifbeim System des "tiers garant".

    Der Versicherte muss entweder das kantonale Versicherungsgericht
anrufen oder die Kasse ersuchen, beim Schiedsgericht Klage gegen den Arzt
einzureichen, dessen Kostennote streitig ist.

Sachverhalt

    A.- John Nicolier est assuré auprès de la Société vaudoise et romande
de secours mutuels (SVRSM), qui est une caissemaladie reconnue, pour
les frais médicaux et pharmaceutiques en cas de maladie. Du 29 janvier
au 10 mars 1969, il a été traité ambulatoirement au cabinet du Dr G.,
chirurgien. Le traitement a consisté en trois consultations auprès
du médecin personnellement et en vingt-cinq extensions de la colonne
cervicale, exécutées par le personnel paramédical au service du Dr G...

    B.- Le Dr G. remit deux notes à John Nicolier. La première, pour les
consultations, s'élevait à 48 fr. La seconde, de 264 fr., concernait les
séances d'extension et portait l'en-tête: "Institut de physiothérapie du
Dr E. G."; elle était fondée sur la convention des physiothérapeutes (25
séances à 9 fr. 60 = 240 fr., plus une majoration de 10%. John Nicolier
paya ces notes et les transmit à sa caisse-maladie.

    La Société vaudoise et romande de secours mutuels constata que la
première note était conforme au tarif médical. Elle admit donc de la
rembourser à son assuré. En revanche, elle estima que, le Dr G. n'étant
pas un physiothérapeute mais un médecin, le tarif médical était aussi
applicable à la seconde note. Elle admit donc de la rembourser jusqu'à
concurrence du dit tarif, soit de 206 fr. 25 seulement (25 séances à 8
fr. 25).

    John Nicolier recourut contre cette décision, en exigeant
le remboursement intégral de la seconde note, selon le tarif des
physiothérapeutes...

    Le 21 mai 1970, le Président du Tribunal cantonal des assurances
admit le recours et annula la décision attaquée. Selon le premier juge, la
caisse-maladie intimée n'était pas habilitée à trancher dans une décision,
adressée à l'assuré, un conflit portant sur l'application d'un tarif par
un médecin, mais elle aurait dû en saisir le tribunal arbitral...

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Aux termes de l'art. 25 al. 1er LAMA, les contestations entre
caisses, d'une part, médecins, pharmaciens, chiropraticiens, sages-femmes,
personnel paramédical, laboratoires ou établissements hospitaliers, d'autre
part, sont jugées par un tribunal arbitral dont la juridiction s'étend
à tout le canton. Aux termes de l'art. 25 al. 3, le tribunal arbitral
est également compétent lorsque les honoraires sont dus par l'assuré;
en pareil cas, la caisse doit, à ses frais, sur requête de l'assuré,
le représenter au procès, à moins que la demande ne paraisse vouée à
l'échec; la caisse est autorisée à intenter elle-même l'action, même si
les honoraires ont déjà été payés par l'assuré, en tant que débiteur.

    Selon les art. 30 et 30bis LAMA, lorsque l'assuré n'accepte pas
une décision de la caisse, celle-ci la lui communique par écrit avec
indication des voies de droit; l'assuré dispose d'un délai de 30 jours
dès cette communication pour recourir auprès du tribunal cantonal des
assurances, qui connaît "des contestations des caisses entre elles ou avec
leurs assurés ou des tiers qui concernent des droits que les parties font
valoir en se fondant sur la présente loi, les dispositions d'exécution
fédérales ou cantonales ou les dispositions établies par les caisses".

    Les cantons règlent la procédure des deux tribunaux. En cela,
ils jouissent d'une plus grande liberté en ce qui concerne le tribunal
arbitral (art. 25 al. 4 et 5 LAMA) qu'en ce qui concerne le tribunal
cantonal des assurances (art. 30bis al. 3). C'est ainsi qu'en vertu du
droit fédéral la procédure devant le tribunal cantonal des assurances
est en principe gratuite; en revanche, le canton de Vaud, par exemple,
a pu instituer pour le tribunal arbitral une procédure onéreuse, et même
fort coûteuse, puisque sont mis à la charge des parties non seulement
les frais de procédure et - règle générale - des dépens, mais encore les
indemnités allouées aux deux arbitres.

    Les dispositions sur le tribunal arbitral constituent, par rapport
aux dispositions qui instituent la compétence générale des tribunaux
cantonaux des assurances, une "lex specialis" qui y déroge. Il est
évident que, lorsqu'une caisse a une contestation avec un tiers selon
l'art. 30bis LAMA et que ce tiers est un médecin, c'est l'art. 25 qui
est seul applicable. Mais la question que pose le présent litige est
bien différente: lorsqu'une caisse a une contestation avec un assuré
sur l'application d'un tarif, est-elle obligée d'ouvrir action contre le
médecin qui a présenté la note contestée, même si l'assuré ne lui demande
pas de le faire, ou a-t-elle au contraire la faculté de limiter le procès
aux relations internes entre caisse et assuré? Dans la seconde éventualité,
le jugement - rendu par le tribunal des assurances - ne sera pas opposable
au médecin, de sorte que la caisse ne sera amenée à procéder ainsi que
dans un système où l'assuré est le débiteur du médecin, mais dispose
contre la caisse d'une créance en versement des prestations statutaires
(système du tiers garant), comme c'est le cas en l'espèce. Car il ne
serait pas concevable que le médecin soit lié par une décision judiciaire
rendue dans un procès auquel il n'aurait pas participé, ni même été en
droit de participer.

Erwägung 2

    2.- Or, le système du tiers garant présente la particularité,
considérée par les uns comme un avantage et par les autres comme un
inconvénient, de maintenir malgré l'existence d'une assurance des
liens juridiques étroits, si ce n'est exclusifs, entre l'assuré et son
médecin. Dès lors, quand la caisse-maladie conteste le montant de la
note du médecin, l'assuré doit être libre soit de demander à la caisse
d'ouvrir action devant le tribunal arbitral, conformément à l'art. 25 al. 3
LAMA, soit de plaider lui-même contre la caisse devant le tribunal des
assurances, au risque de payer de sa poche le montant litigieux. L'art. 25
LAMA est clair: en dehors de l'hypothèse d'une requête de l'assuré, prévue
par l'al. 3, la caisse-maladie n'est jamais obligée de saisir le tribunal
arbitral. Une telle obligation irait souvent, d'ailleurs, à l'encontre
des intérêts de l'assuré, qui peut légitimement ne pas vouloir gâter
ses relations avec son médecin en lui suscitant un procès, mais désirer
seulement tenter de recevoir de l'assurance l'indemnité la plus forte.

    Selon le premier juge, on risquerait des jugements contradictoires
si, dans le même procès, l'assuré saisissait d'abord le tribunal des
assurances puis requérait la caisse de saisir le tribunal arbitral. On
peut répondre à cette objection que, si le tribunal arbitral est saisi
avant que le tribunal des assurances ait jugé, ce dernier suspendra sa
décision dans l'attente de celle du tribunal arbitral. Si le tribunal
arbitral est saisi après, son jugement ne produira d'effets que dans
les relations de la caisse avec le médecin; quant aux relations entre
la caisse et l'assuré, l'action se heurtera à l'exception de chose
jugée. Autant dire que le tribunal arbitral refusera d'entrer en matière,
faute d'intérêt litigieux, sauf quand la caisse ou le médecin auront,
eux, un intérêt à obtenir un jugement du tribunal arbitral quoique les
relations caisse-assuré soient définitivement réglées par un jugement
du tribunal des assurances. L'Office fédéral des assurances sociales,
qui se rallie pourtant dans son préavis à la solution du premier juge,
reconnaît que l'existence d'un jugement du tribunal arbitral n'empêche
pas l'assuré de recourir auprès du tribunal cantonal contre la décision
de la caisse fondée sur le jugement arbitral. C'est dire que le risque,
du moins théorique, de jugements contradictoires, existe que l'on adopte
l'une ou l'autre solution. Au vrai, on peut se demander si un jugement
arbitral antérieur ne lie pas le tribunal cantonal quant aux questions
de tarifs et d'honoraires et lorsque l'assuré avait requis la caisse de
procéder en son nom, à lui assuré.

    Rien, dans le message du Conseil fédéral du 5 juin 1961, n'indique que
l'intention des rédacteurs du projet de loi ait été d'empêcher un assuré
de porter devant le tribunal cantonal des assurances une contestation
qui se serait élevée entre lui, assuré, et sa caisse-maladie au sujet
de l'application d'un tarif. Aussi bien que l'art. 25 du projet ne
contenait-il pas encore son actuel alinéa 3 (FF 1961 I p. 1472, 1505 et
1508). En revanche, dans le message complémentaire du 16 novembre 1962,
le Conseil fédéral justifie l'adjonction du dit alinéa 3 en ces termes
(FF 1962 II p. 1269):

    "2. Les caisses-maladie n'ont admis l'institution du tiers garant
légal pour les personnes assurées facultativement qu'à la condition que le
tribunal arbitral cantonal prévu à l'article 25 du projet de loi du 5 juin
1961 soit déclaré aussi compétent pour juger des contestations dans ces
cas-là, de façon qu'il n'y ait pas divers tribunaux appelés à appliquer
les mêmes dispositions, ce qui peut entraîner des interprétations
divergentes. En outre, il faut que les caisses puissent intenter
d'elles-mêmes action même si l'assuré a déjà payé, en tant que débiteur,
les honoraires du médecin, sinon leur droit serait illusoire. Ces
demandes des caisses sont justifiées. Il est, en effet, nécessaire,
dans l'intérêt de l'uniformité du contentieux dans l'assurancemaladie,
que toutes les contestations d'honoraires soient du ressort du tribunal
arbitral cantonal. Quant au droit de la caisse d'intenter d'elle-même
l'action même lorsque l'assuré a déjà payé les honoraires du médecin,
il faut relever que l'assuré n'est souvent pas en mesure de juger si
un traitement est économique et si, par conséquent, il se justifie d'en
payer les frais. Selon les circonstances, seul un examen ultérieur fait,
en toute compétence, par la caisse, d'après les pièces qui lui ont été
adressées pour la fixation de ses prestations, permet d'établir qu'il y
a eu traitement non économique ou que des tarifs liant le médecin n'ont
pas été respectés. La caisse pourrait alors réduire ses prestations en
conséquence, ce qui aurait pour résultat que l'assuré devrait supporter
la différence entre ce qu'il a payé et ce qui lui est versé par la
caisse. C'est précisément pour protéger l'assuré contre des désagréments
de ce genre qu'il faut prévoir que la caisse peut intenter action devant
le tribunal arbitral même lorsque l'assuré a déjà payé les honoraires du
médecin. L'article 25 doit donc être complété en conséquence."

    Il est donc indéniable que le Conseil fédéral désirait unifier la
compétence des tribunaux en matière de contestations d'honoraires. Mais,
pour réaliser entièrement ce dessein, il eût fallu dire à l'article
25 al. 1er LAMA que les contestations entre caisses ou assurés,
d'une part, et médecins, etc., d'autre part, ressortissent au tribunal
arbitral. En refusant aux assurés l'accès direct au tribunal arbitral,
en leur permettant uniquement - à l'alinéa 3 - de mettre en oeuvre une
représentante qui ne jouit pas forcément de leur confiance, l'art. 25 ne
garantit pas suffisamment le droit des assurés de contester l'application
des tarifs. Le moyen normal d'y remédier, sans que le juge ait à faire
oeuvre de législateur, est d'autoriser l'action directe de l'assuré contre
la caisse, conformément aux articles 30 et 30bis. Il faut bien avouer
que cela ne règle ni le cas de l'assuré qui voudrait agir directement
contre le médecin, ni celui du médecin qui voudrait agir directement
contre l'assuré; mais la loi exclut la possibilité de telles actions,
qui ne seraient recevables ni selon l'art. 25 ni selon les art. 30 et
30bis. De même, ainsi qu'on l'a vu plus haut, la loi n'a pas réalisé le
voeu du Conseil fédéral d'épargner à l'assuré, dans le régime du tiers
garant, tout risque de devoir supporter la différence entre ce qu'il
a payé et ce qui lui est versé par la caisse. Il eût fallu pour cela
contraindre la caisse à saisir le tribunal arbitral chaque fois qu'elle
réduit ses prestations par rapport à la note qu'a payée l'assuré, et non
pas seulement sur requête de l'assuré.

Erwägung 3

    3.- La recourante obtient donc gain de cause et il faut renvoyer le
dossier au Tribunal des assurances du canton de Vaud, afin qu'il statue
sur le fond. Mais il reste loisible à l'intimé de requérir la caisse de
saisir le tribunal arbitral d'une action dirigée contre le Dr G. La loi
fédérale ne soumet cette démarche à aucun délai, non plus que l'ouverture
de l'action elle-même. Il en va de même de la loi vaudoise (LV du 2
décembre 1959 sur le tribunal des assurances, art. 56-64, ROLV p. 396,
revisée le 22 février 1965, ROLV p. 23; cf. arrêté du Conseil d'Etat du 13
août 1968, réglant l'application de la LF du 13 mars 1964, modifiant le
premier titre de la LAMA, art. 6, ROLV p. 201). Cela ne signifie pas que
la démarche soit possible et que l'action soit recevable en tout temps:
il appartiendra à la jurisprudence d'en fixer les limites. Une requête
de l'assuré ou une action de la caisse survenant au début du procès au
fond devant le Tribunal des assurances du canton de Vaud ne seraient
probablement pas tardives.

Erwägung 4

    4.- Vu leur importance, les questions de droit à trancher en l'espèce
ont été soumises à la Cour plénière.