Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 97 V 167



97 V 167

41. Extrait de l'arrêt du 19 octobre 1971 dans la cause Vuilleumier contre
Caisse cantonale neuchâteloise de compensation Regeste

    Voraussetzungen des Anspruchs auf Leistungen gemäss Art. 19 Abs. 2
lit. c IVG bei Sprachheilbehandlung.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Aux termes de l'art. 19 al. 1er LAI, des subsides sont alloués
pour la formation scolaire spéciale des mineurs éducables mais qui,
par suite d'invalidité, ne peuvent suivre l'école publique ou dont on ne
peut attendre qu'ils la suivent. La formation scolaire spéciale comprend
la scolarisation proprement dite ainsi que, pour les mineurs incapables
ou peu capables d'assimiler les disciplines scolaires élémentaires,
des mesures destinées à développer soit leur habileté manuelle, soit
leur aptitude à accomplir les actes ordinaires de la vie ou à établir
des contacts avec leur entourage.

    Suivant l'art. 19 al. 2 LAI, ces subsides consistent notamment
(lit. c) en des indemnités particulières pour des mesures de nature
pédago-thérapeutique qui sont nécessaires en plus de l'enseignement de
l'école spéciale, telles que des cours d'orthophonie pour mineurs atteints
de graves difficultés d'élocution, l'enseignement de la lecture labiale
et l'entraînement auditif pour mineurs durs d'oreille, la gymnastique
spéciale destinée à développer la motricité des mineurs souffrant de
troubles des organes sensoriels ou d'une grave débilité mentale.

    Conformément à l'art. 19 al. 3 LAI, il incombe au Conseil fédéral
d'édicter certaines règles complémentaires. Ainsi, l'art. 8 al. 1er lit. c
RAI met au rang des mesures de formation scolaire spéciale, entre autres,
les mesures de nature pédagothérapeutique que l'invalidité rend nécessaires
pour compléter la formation scolaire spéciale ou pour permettre aux mineurs
de fréquenter l'école publique, telles que l'orthophonie pour les mineurs
qui ont de graves difficultés d'élocution, etc. Par école publique, on
entend tout enseignement du cycle de la scolarité obligatoire, y compris
l'enseignement dans des classes spéciales ou de développement (art. 8 al. 2
RAI). Les mesures de formation scolaire spéciale peuvent être accordées
au-delà de l'âge scolaire habituel, lorsque cela est nécessaire (art. 8
al. 3 RAI). Les conditions d'octroi des prestations ainsi que l'étendue
de ces dernières sont précisées aux art. 9 à 11 RAI.

    Certaines des dispositions sus-mentionnées sont entrées en vigueur le
1er janvier 1971; d'autres, le 1er janvier 1968. S'agissant des mesures
de nature pédago-thérapeutique sous forme de traitement orthophonique,
les règles valables jusqu'au 31 décembre 1967 prévoyaient l'octroi
d'une contribution aux frais de cet "enseignement complémentaire", s'il
était nécessaire pour permettre à l'assuré atteint de graves difficultés
d'élocution de suivre l'école publique (art. 10 al. 2 ancien RAI).

Erwägung 2

    2.- L'application des règles légales relatives à l'octroi de
traitements d'orthophonie soulève un certain nombre de difficultés qui
n'ont pas échappé à l'Autorité fédérale de surveillance. Aussi cette
dernière a-t-elle organisé en 1968 une conférence pour l'étude des troubles
du langage.

    Dans un document du 8 avril 1969, l'Office fédéral des
assurances sociales a fixé les conclusions auxquelles la conférence
est parvenue. Devraient être, d'après ce document, "reconnus comme
troubles graves de l'élocution (ou du langage parlé et écrit) ceux qui
ont déjà provoqué ou risquent de provoquer incessamment et avec une
grande vraisemblance:
   a) soit une modification de la personnalité de l'enfant,

    b) soit un retard scolaire tel qu'il créera une discordance grave
entre le niveau intellectuel de l'enfant et l'acquisition du langage et
des autres notions scolaires,

    c) soit une discordance grave entre les professions que l'enfant
pourra exercer, si on laisse ces troubles évoluer sans traitement (mesures
pédago-thérapeutiques), et celles qu'il pourrait exercer, vu ses qualités
intellectuelles, affectives, caractérielles, si ces troubles sont traités".

    A cet égard, des retards scolaires "se manifestant en partie et
accessoirement seulement par une insuffisance dans l'acquisition du
langage" ne sauraient être "soignés" aux frais de l'assurance-invalidité,
"alors qu'il incombe aux autorités scolaires cantonales et communales de
veiller au rattrapage de ces enfants". En revanche, devraient toujours
être assumés par l'assur ance-invalidité les frais de traitement
des troubles du langage qui résultent principalement d'une insuffisance
de la vue, d'origine centrale ou périphérique; d'une insuffisance de
l'audition, d'origine centrale ou périphérique; d'une atteinte anatomique
des organes de la parole; d'une atteinte neurologique, centrale ou
périphérique, des organes de la parole. Il devrait en aller de même
du bégaiement sous toutes ses formes; de la dyslexie, lorsqu'elle est
accompagnée d'une importante perturbation du schéma corporel et du sens
de l'orientation spatiale. Devraient être exclus de la prise en charge par
l'assurance-invalidité les frais de traitement des retards de langage dus
principalement à une simple débilité mentale; à un simple retard scolaire;
à la paresse, à l'inattention, au manque de concentration des enfants;
au bilinguisme; au mauvais choix des méthodes d'enseignement; au mauvaix
choix de la classe où les enfants sont placés.

    Quant à l'établissement du diagnostic et du plan de traitement des
graves difficultés d'élocution, cela devrait être l'affaire d'une équipe
de spécialistes dirigée si possible par un médecin; à titre transitoire,
force serait bien de se contenter de solutions différentes, à condition
néanmoins qu'elles donnent la garantie que les diagnostics et les plans
de traitement émaneront de personnes compétentes.

    S'agissant de la formation exigée des logopédistes, elle devrait
intervenir sur la base d'un programme minimum et être couronnée par un
examen propédeutique; à titre transitoire, un régime d'autorisations
devrait être institué.

Erwägung 3

    3.- Le rapport général du Prof. L., expert mis en oeuvre par le
Tribunal fédéral des assurances, peut être résumé comme il suit:

    I. - En médico-pédagogie, on appelle dyslexie et dysorthographie
l'incapacité congénitale ou tôt acquise d'apprendre à lire et à écrire
selon la méthode usuelle lorsque cette incapacité affecte un enfant dont
l'intelligence moyenne est normale. Dyslexie et dysorthographie ne sont
pas provoquées par quelque faiblesse de la vue ou de l'ouïe, mais par
une lésion - souvent héréditaire - d'une zone du cerveau, qui empêche
de distinguer et d'interpréter les signes et les sons perçus (agnosie
optique et agnosie acoustique). L'affection s'accompagne d'une certaine
confusion dans l'orientation, entre la droite et la gauche et parfois entre
le haut et le bas. Les lettres sont donc souvent écrites à l'envers. La
faculté de percevoir dans son ensemble le mot écrit manque. En général,
le langage oral spontané n'est apparemment pas touché, mais un examen
approfondi révèle fréquemment des fautes de conjugaison, une construction
primitive de la phrase, une méconnaissance du rythme.

    Dans le cas de troubles du langage proprement dit, il s'agit le plus
souvent, chez l'enfant, de bredouillement et de déplacement ou d'omission
de sons, tantôt héréditaires, tantôt acquis. La cause des défauts de
prononciation réside alors avant tout dans l'insuffisance de l'ouïe ou
dans des affections du nez ou du palais.

    Selon l'expert, on peut admettre l'existence de rapports étroits entre
la difficulté d'élocution et la dysorthographie ainsi que la dyscalculie.

    II. - La difficulté d'élocution peut entraver fortement l'enfant dans
sa carrière scolaire. C'est le cas des troubles de langage proprement dit
(dyslalie, bredouillement). Cela peut être aussi le cas de la dyslexie
et de la dysorthographie.

    III. - L'orthophonie médico-pédagogique consiste à rééduquer dans
l'art du langage l'enfant d'âge pré-scolaire ou d'âge scolaire, selon
des méthodes enseignées par des médecins spécialistes (phoniatres),
des oto-rhino-laryngologues, des neurologues et des psychiatres pour
enfants. Dans les cas graves (lésions cérébrales), le traitement a lieu
dans des homes, par exemple selon la méthode Bobath; de même, avec le
concours du psychiatre, quand l'enfant est un handicapé mental.

    IV. - Les soins s'imposent dès que l'enfant est fortement entravé
dans sa carrière scolaire.

    V. - Dans les cas banals (bredouillement, dyslexie, dysorthographie,
nasillement), le traitement durera jusqu'au jour où l'enfant ne sera
pratiquement plus entravé dans sa scolarité. Ce résultat sera atteint
grâce à un nombre relativement modique de leçons, en cas de défaut
de prononciation n'affectant que deux ou trois sons. Le traitement du
bredouillement général dure d'habitude de 6 à 12 mois et devrait avoir
lieu dans un home spécialisé. Le bégaiement donne le plus de difficulté,
à cause de la multiplicité des causes possibles.

    VI. - Il faudrait créer des centres médicaux équipés spécialement
pour établir des diagnostics précis et décider du traitement des troubles
du langage. Il faut distinguer de la logopédie les mesures médicales
(au sens des art. 12 et 13 LAI) qui peuvent s'imposer, par exemple une
opération lors de troubles de l'ouïe ou d'anomalies dentaires. En outre,
la logopédie s'accompagnera maintes fois, surtout chez le petit enfant,
de psychothérapie, de gymnastique de relaxation, de correction d'une
mauvaise respiration, le tout sous contrôle médical permanent.

Erwägung 4

    4.- Aussi bien l'Office fédéral des assurances sociales que l'expert
commis par la Cour de céans, ce dernier à l'instigation du Tribunal
fédéral des assurances, ont cherché à fixer des critères pour la prise
en charge par l'assurance-invalidité des traitements d'orthophonie. Cela
paraît indispensable pour éviter des abus. Mais on ne saurait régler
aujourd'huil'ensemble de la question, tâche qui incombe avant tout
à l'Autorité fédérale de surveillance. Il est toutefois possible de
formuler d'ores et déjà certaines exigences, qui découlent de la loi ou
de son système, en cette matière.

    Préliminairement, il sied de relever que, selon l'expert judiciaire
fédéral, d'autres facultés que celle de parler, de lire et d'écrire
peuvent, chez certains élèves, être réduites par une infirmité analogue à
la dyslexie et à la dysorthographie et sont susceptibles d'être améliorées
par le moyen d'un traitement médico-pédagogique. Qu'on songe à la faculté
de compter ou à celle de faire de la musique. Pourtant, le législateur
a prévu expressément à l'art. 19 al. 2 lit. c LAI les troubles du
langage et non ceux de la fonction mathématique ni ceux de la fonction
musicale. Cela s'explique sans doute par l'importance capitale du langage
en tant que véhicule de tous les enseignements et, probablement, par les
progrès particulièrement grands réalisés par la pédagogie curative dans
ce domaine-là. Dans ces conditions, seul le traitement des troubles du
langage peut justifier le versement des prestations en cause, en l'état
de la législation. Mais il faut entendre par là aussi bien les troubles
du langage écrit que ceux du langage parlé, comme l'exposent et l'Office
fédéral des assurances sociales et l'expert.

    En premier lieu, pour juger si l'on est en présence d'un cas relevant
de l'art. 9 al. 1er lit. f RAI, on prendra comme critère de base une
intelligence et une application normales. Ainsi, p.ex., on ne saurait
parler de graves difficultés d'élocution, au sens de la disposition
sus-mentionnée, lorsque des retards de langage sont dus principalement à
une débilité mentale ou à de la paresse. Les opinions de l'Office fédéral
des assurances sociales et de l'expert fédéral semblent concorder sur
ce point.

    En outre, quant à l'exigence de troubles graves, il y a lieu de poser
avec l'expert le principe suivant: l'assurance-invalidité ne doit prendre
en charge, règle générale, que les cas dans lesquels l'enfant serait
fortement entravé dans son développement scolaire et sa future capacité de
gain, à défaut de traitement logopédique spécifique. Il importe que toute
décision administrative en la matière procède de cette règle élémentaire.

    Il sied d'autre part de déterminer les conditions qui doivent
être remplies pour qu'on puisse fournir, aux frais de l'assurance, les
traitements de logopédie. Sur ce point encore, l'Autorité de surveillance
relève à juste titre que le diagnostic et le plan de traitement des
graves difficultés d'élocution doivent être l'affaire d'une équipe de
spécialistes dirigée si possible par un médecin. De même, une formation
minimum sera-t-elle exigée des logopédistes habilités à donner des soins
aux assurés; cela aussi dans le régime transitoire nécessaire jusqu'au
moment où il aura été possible de mettre sur pied un système répondant à
toutes les exigences ci-dessus, à mettre en parallèle avec les exigences
relatives à la qualification des thérapeutes dans le cadre de l'art. 14
LAI.

    S'agissant de leur durée, les mesures en cause ne sauraient en tout
cas être accordées plus longtemps que ne peuvent l'être, de manière
générale, les prestations de l'art. 19 LAI. Ainsi que le Tribunal fédéral
des assurances l'a rappelé à plusieurs reprises, la formation scolaire
spéciale prend fin, en principe, à l'âge où les enfants non invalides
quittent l'école publique. Ce qui n'exclut pas, pourtant, qu'elle puisse
se prolonger au-delà de cette limite, dans certaines circonstances
(v. p.ex. RCC 1970 p. 272). Sous cette réserve, le traitement doit être
poursuivi aux frais de l'assurance jusqu'au moment où, l'infirmité n'étant
plus frappante, l'enfant peut s'intégrer dans l'école, comme le relève
l'expert judiciaire fédéral. On tiendra cependant compte, pour l'indication
de la continuation des traitements en particulier, de ce que, selon les
données actuellement connues, un certain nombre de cas résistent à toute
thérapie et d'autres ne sont passibles que d'une certaine amélioration.

    Ces principes ont été approuvés par la Cour plénière...