Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 97 I 564



97 I 564

78. Arrêt de la Ire Cour civile du 29 juin 1971 dans la cause Firmenich
et Cie contre Bureau fédéral de la propriété intellectuelle. Regeste

    Art. 2 Ziff. 1 und 3 PatG.

    1.  Ratio legis und Tragweite von Art. 2 Ziff. 3 PatG (Erw. 1 b und
c). Patentierbarkeit einer Erfindung, die in der Verwendung chemischer
Aromastoffe als Zusätze zu Nahrungsmitteln und Getränken besteht (Erw. 1
a und 3).

    2.  Begriff der Nahrungsmittel und Getränke im Sinne von Art. 2
Ziff. 3 PatG (Erw. 2).

    3.  Der Ausschluss von der Patentierung wegen Widerrechtlichkeit
(Art. 2 Ziff. 1 PatG) ist durch Art. 4 quater der Pariser
Verbandsübereinkunft zum Schutze des gewerblichen Eigentums in der
inLissabon revidierten Fassung, die für die Schweiz am 17. Februar 1963
in Kraft getreten ist, dem Sinne nach aufgehoben worden (Erw. 4).

Sachverhalt

    A.- Firmenich et Cie, à Genève, a requis le 9 novembre 1967 du Bureau
fédéral de la propriété intellectuelle (ci-après désigné: le Bureau)
la délivrance d'un brevet d'invention pour 1,"utilisation de cétones
non saturées comme agents odoriférants et aromatisants". Sa requête no
15667/67 a fait l'objet de six notifications successives du Bureau. Le
30 novembre 1970, la requérante a arrêté la revendication de sa demande à
l'"utilisation d'au moins un des composés de synthèse de formule CO - CH =
CH - CH1 ... comme ingrédients aromatisants pour modifier ou améliorer les
propriétés organoleptiques de produits alimentaires et de boissons". La
revendication était accompagnée de trois sous-revendications.

    Selon la description, ces composés peuvent être utilisés comme
"additifs" à des produits alimentaires et boissons et pour "la préparation
de compositions aromatisantes", le terme d'aliment étant "utilisé dans
son sens le plus large". "Les nouvelles cétones peuvent être utilisées
en proportions variant aussi entre de larges limites."

    B.- Par décision du 2 février 1971, le Bureau a rejeté la demande de
brevet en invoquant l'art. 2 ch. 3 LBI.

    C.- Firmenich et Cie recourt au Tribunal fédéral contre cette
décision. Elle conclut à son annulation et à ce que le Bureau soit invité à
délivrer le brevet sollicité pour l'invention définie par la revendication
et les trois sous-revendications.

    Le Bureau propose le rejet du recours.

    L'argumentation des parties sera reprise ci-dessous dans la mesure
nécessaire.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Dans sa revendication, la requérante présente son invention comme
une invention d'utilisation d'un produit. Le brevet sollicité tend à la
protection de l'addition à un aliment ou à une boisson de certains composés
chimiques de synthèse "comme ingrédients aromatisants pour modifier ou
améliorer (leurs) propriétés organoleptiques", c'est-à-dire leur impression
sur les organes des sens (cf. GARNIER/DELAMARE, Dictionnaire des termes
techniques de médecine, 17e éd.). Il s'agit ici d'additifs excitant les
sens du goût et de l'odorat.

    A l'appui de son refus fondé sur l'art. 2 ch. 3 LBI, le Bureau fait
valoir que la portée de cette disposition doit être dégagée à la lumière
de la genèse de la loi. Celle-ci devait assouplir la réglementation
antérieure, trop rigide. Le législateur de 1907 entendait proscrire, pour
des motifs éthico-sociaux, la brevetabilité de toutes les inventions dans
le domaine des aliments et des boissons. Il s'est révélé par la suite que
certains procédés chimiques aboutissaient non pas à des composés chimiques,
mais directement à des aliments, et partant ne tombaient pas sous le
coup de l'interdiction légale (par exemple des procédés de fabrication de
fromages, de pain, des procédés visant à supprimer l'amertume de certains
aliments ou boissons). Cela a amené le Département fédéral de justice
et police, alors compétent, à admettre la délivrance du brevet. La
revision de 1954 a donné à l'art. 2 ch. 3 sa teneur actuelle. Elle
diffère du texte de 1907 en ce que les brevets de produits alimentaires,
de denrées fourragères et de boissons restent interdits, alors que les
procédés de fabrication de tels produits deviennent brevetables. Mais
si la protection d'un tel procédé de fabrication avait pour effet, par
le biais de l'art. 8 al. 3 LBI, de conférer à l'inventeur un monopole
sur une denrée alimentaire - ce qui serait le cas si le procédé utilisé
était le seul moyen de l'obtenir - le brevet aboutirait à détourner et à
rendre illusoire l'interdiction de breveter le produit en question. Or,
si son invention consistant à ajouter des cétones aromatisantes à des
aliments était protégée, la requérante détiendrait un monopole sur les
nouvelles substances aromatisées, et l'interdiction de l'art. 2 ch. 3
LBI serait vaine. Peu importe que ladite invention soit désignée comme
une invention d'utilisation, dès lors qu'elle est parfaitement identique
à une invention de procédé qui, si elle était brevetée, permettrait de
protéger tous les produits alimentaires et boissons aromatisés à l'aide
des composés chimiques définis dans la revendication. Il est significatif à
cet égard que la mention nouvelle des inventions d'utilisation à l'art. 52
LBI apparaisse dans ce seul article de la loi, celle-ci conservant pour
le surplus - notamment à ses art. 2, 8, 53 et 87 al. 2 litt. a - la
division bipartite des inventions de procédés et de produits.

    La recourante oppose à ce point de vue que les inventions
d'utilisation échappent par principe à l'emprise de l'art. 2 ch. 3
LBI. Seules les inventions de produits seraient exclues du brevet dans
le domaine alimentaire, alors que les autres types d'invention seraient
parfaitement licites. A l'appui de son argumentation, la recourante
invoque l'opinion de Blum/Pedrazzini. Selon ces commentateurs, l'art. 2
LBI est une disposition d'exception par rapport à la règle générale de
la brevetabilité des inventions; comme telle, elle doit être interprétée
restrictivement. Seuls les brevets de produits sont expressément interdits
pour les aliments. A contrario, les inventions d'utilisation de denrées
alimentaires peuvent être protégées, à l'instar des inventions de
procédés de fabrication de telles denrées, dont la brevetabilité est
sans conteste admise. Il n'y aurait aucune place pour une interprétation
judiciaire extensive de l'art. 2 LBI (BLUM/PEDRAZZINI, Das schweizerische
Patentrecht, III p. 265-267). La recourante conteste au Bureau le droit de
donner à son invention d'utilisation le sens d'une invention de procédé;
il appartient à l'inventeur de choisir parmi les catégories instituées
par la loi celle dans laquelle il entend classer son invention et de
déterminer par là l'étendue de la protection conférée par le brevet. Mais
même s'il s'agissait d'une invention de procédé, elle ne tomberait pas
sous le coup de l'art. 2 ch. 3 LBI. La protection, et partant le monopole,
ne s'étendent en effet pas aux produits alimentaires et boissons ayant
le même goût, s'il est obtenu à l'aide d'autres agents aromatisants que
ceux définis dans la revendication.

    a) La requérante n'entend pas faire breveter les cétones aromatisantes
comme produits; bien qu'elle par le de "nouvelles cétones", elle précise
bien que l'invention ne réside pas dans leur combinaison chimique, qui
peut même être connue. Elle ne requiert pas non plus la protection du
procédé qui aboutit à ces nouvelles cétones, sur lequel elle ne fournit
aucune indication. L'objet de l'invention réside dans l'idée nouvelle de
mélanger des cétones de cette espèce à des aliments ou à des boissons dans
un but organoleptique. Une telle idée est brevetable pour autant qu'elle
réponde aux exigences posées par la loi pour n'importe quelle invention. La
doctrine suisse reconnaît la brevetabilité des procédés de simple mélange
aux conditions de l'art. 1er LBI (BLUM/PEDRAZZINI, op.cit., I p. 232;
TROLLER, Immaterialgüterrecht, 2e éd., I p. 248; DE MESTRAL, L'obtention
et le maintien du brevet, thèse Lausanne 1969, p. 219-221). Le Message du
Conseil fédéral du 25 avril 1950 l'admet expressément (FF 1950 I p. 964).
Rien au dossier n'infirme l'affirmation de la requérante selon laquelle
les cétones utilisées n'ont pas de valeur nutritive propre. La description
de l'invention et les exemples d'application cités montrent qu'il s'agit
d'additifs destinés à modifier le goût ou l'arôme des aliments auxquels ils
sont mélangés. Aussi le Bureau n'entend-il pas procéder à une application
directe de l'art. 2 ch. 3 LBI.

    b) L'interprétation des divers cas d'interdiction consacrés par
l'art. 2 LBI est commandée par le but que le législateur leur assigne. La
défence de breveter les aliments, les denrées fourragères et les boissons
(ch. 3) tend, dans une certaine mesure comme celle qui concerne les
médicaments (ch. 2), à empêcher la formation de monopoles sur des
produits de nécessité, ce qui aurait pour conséquence leur renchérissement
(Message du Conseil fédéral du 17 juillet 1906, FF 1906 IV p. 326 et 329
in fine). Elle ne vise donc pas la protection de la santé publique, qui
fait l'objet de la législation sur le commerce des denrées alimentaires
et, le cas échéant, de l'interdiction des inventions dont l'exploitation
serait contraire aux lois ou aux bonnes moeurs (art. 2 ch. 1 LBI).

    c) Il est constant qu'une même invention pourrait souvent, suivant sa
formulation, être classée dans plusieurs catégories différentes d'après
l'élément mis en évidence (cf. à ce sujet Message du Conseil fédéral du
25 avril 1950, FF 1950 I p. 1000; BLUM/PEDRAZZINI, op.cit., III p. 225
ss.). Le droit de l'inventeur de choisir l'étendue de la protection
légale dont il bénéficiera ne saurait avoir pour conséquence de lui
permettre d'éluder les cas d'interdiction stipulés par l'art. 2 LBI.
L'application de cette disposition d'intérêt public implique que le
Bureau recherche la portée objective de l'invention et qu'il refuse
de la breveter si, formulée comme une invention d'utilisation, elle
aboutissait à tourner l'art. 2 ch. 3 LBI et à conférer au requérant, par
le biais de l'art. 8 al. 3, un "Stoffpatent" prohibé. Le Message du 25
avril 1950 s'exprime dans ce sens: réfutant l'objection selon laquelle
la protection accordée à des procédés de simple mélange reviendrait en
fait à protéger le mélange lui-même, le Conseil fédéral relève que "cette
objection n'a d'importance que dans les cas où le mélange ne peut être
obtenu autrement que par le procédé breveté" et qu'"en pareille occurrence"
le brevet pourrait "être refusé pour la raison qu'une telle revendication
tendrait à éluder l'interdiction de protéger la substance" (FF 1950 I p.
964). L'argumentation de la recourante sur ce point est ainsi mal fondée.

Erwägung 2

    2.- La requérante considère que l'art. 2 ch. 3 LBI est inapplicable
à son invention, qui ne porte pas sur un aliment ou une boisson
puisque les cétones utilisées n'ont pas de valeur nutritive propre
et que leur adjonction à un aliment ne modifie en rien ses propriétés
fondamentales. Invoquant le Message du Conseil fédéral, le Bureau lui
objecte que le législateur entendait "refuser la protection à toute
substance, sans exception". Ni la notion du produit alimentaire défini
par ses propriétés nutritives, ni la distinction entre "aliments"
et "Genussmittel" ne trouveraient appui dans le texte ou les travaux
préparatoires de la loi. Ces critères seraient d'ailleurs d'une utilisation
pratiquement impossible: à défaut d'examen préalable dans ce domaine,
le Bureau ne serait pas en mesure de juger de la valeur alimentaire d'une
invention portant sur un produit ou un procédé de fabrication. De surcroît,
le critère de la valeur alimentaire serait inapplicable aux boissons,
puisque la loi exclut leur brevetabilité, qu'elles soient nutritives
ou non.

    Les parties soulèvent ici la question de la définition de la notion
d'aliments et de boissons au sens de l'art. 2 ch. 3 LBI. Aux termes
de l'art. 2 al. 1 ch. 1 ODA, disposition à laquelle la doctrine suisse
se réfère généralement, il faut entendre par denrées alimentaires en
général "les substances ou produits solides ou liquides d'origine animale,
végétale ou minérale, bruts ou soumis à certaines manipulations, qui se
distinguent par leur teneur en substances nécessaires à la constitution
et à l'entretien du corps humain" (BLUM/PEDRAZZINI, op.cit., I p. 228;
TROLLER, op.cit., I p. 248; DE MESTRAL, op.cit., p. 265; cf. aussi,
pour le droit allemand, REIMER, Patentgesetz und Gebrauchsmustergesetz,
3e éd., 1968, p. 115). A l'encontre du Bureau, la doctrine, se fondant
notamment sur les débats parlementaires de 1906, exclut des aliments les
substances désignées en allemand par le terme de "Genussmittel", soit les
épices, condiments et substances analogues de l'art. 2 ch. 3 ODA et les
matières colorantes, agents conservateurs et autres substances de l'art. 2
ch. 4 ODA (BLUM/PEDRAZZINI, op.cit., I p. 229; TROLLER, op.cit., I p. 248).

    a) Eu égard à la ratio legis, qui est d'empêcher le renchérissement
des produits alimentaires de première nécessité et non de protéger la
santé publique, il est sans importance qu'une substance organoleptique
soit ajoutée ou non à des aliments ou à des boissons. La protection de
l'utilisation de telles substances n'est pas de nature à entraîner un
tel inconvénient, même si l'inventeur possède un monopole sur le mélange
obtenu. Tout au plus peut-on réserver l'hypothèse, avancée par le Bureau,
d'une substance destinée à supprimer le goût désagréable dont serait
affecté un produit naturel. Mais cette seule hypothèse, dont rien au
dossier n'indique qu'elle soit réalisée en l'espèce, ne saurait justifier
le refus du brevet. L'adjonction des cétones aromatisantes est parfaitement
comparable aux épices ou aux colorants, qui ne constituent pas des aliments
au sens de l'art. 2 ch. 3 LBI.

    b) L'interprétation littérale donnée par le Bureau au terme de
"boissons" de l'art. 2 ch. 3 LBI, selon laquelle ce terme désignerait
n'importe quelle boisson, nutritive ou non, doit également être rejetée. Il
faut admettre, avec BLUM/PEDRAZZINI (op. cit., I p. 230; cf. aussi DE
MESTRAL, op.cit., p. 267 s.), et conformément à l'opinion clairement
exprimée lors des débats parlementaires de 1906 (Bull. stén. du Conseil des
Etats 1906 p. 1462), que l'utilisation par la loi du terme de boissons tend
seulement à placer sur pied d'égalité les aliments solides et liquides,
comme le fait l'ODA.

Erwägung 3

    3.- Le Bureau fait valoir qu'il doit écarter la demande de brevet
lorsqu'il n'est pas convaincu que l'inventeur "ne revendique qu'une des
manières (possibles ou imaginables)" d'obtenir un produit répondant
à une composition donnée. Or l'adjonction à un aliment déterminé des
cétones aromatisantes est le seul moyen possible de parvenir à un produit
résultant de leur mélange avec cet aliment: l'obtention du même produit
par un autre procédé est exclue, puisque la revendication ne fournit aucune
indication de nature à caractériser le procédé utilisé. L'octroi du brevet
d'utilisation sollicité aboutirait ainsi à conférer à la requérante un
monopole sur le mélange même, c'est-à-dire sur un aliment ou une boisson.

    Cette argumentation méconnaît que le mélange des cétones, substances
chimiques sans valeur nutritive, avec des aliments dont elles modifient
les seules propriétés organoleptiques, n'a pas pour effet de constituer
des produits alimentaires nouveaux, de même que le fait de colorer ou
de saler un aliment ne constitue pas un produit nouveau. La protection
de l'utilisation de ces composés chimiques ne saurait donc conférer à
l'inventeur un monopole sur les aliments préexistants auxquels ils sont
mélangés. Au surplus, selon une allégation de la recourante qui n'a pas
été démentie par le Bureau, les résultats atteints par l'adjonction des
cétones aromatisantes peuvent être obtenus d'une autre façon, soit à
l'aide d'autres produits, naturels ou chimiques.

Erwägung 4

    4.- Selon la description de l'invention, les nouvelles cétones peuvent
être utilisées pour améliorer le goût et l'arome de divers aliments,
dont le miel et le vin rouge, expressément cités comme exemples. En
Suisse, l'ODA réglemente strictement l'adjonction de toute substance
chimique au vin, comme au miel. Il y a dès lors lieu d'examiner si le
brevet sollicité ne devrait pas être refusé en vertu de l'art. 2 ch. 1
LBI, aux termes duquel ne peuvent être brevetées les inventions dont
l'exploitation serait contraire aux lois ou aux bonnes moeurs.

    a) Est contraire à la loi l'invention qui, directement et exclusivement
(ou essentiellement), tend à un but ou produit un effet illégal. Il ne
suffit pas qu'elle puisse être utilisée dans un tel but, comme par exemple
une arme, pour un meurtre, ou un appareil à reproduire des documents,
pour un faux (BLUM/PEDRAZZINI, op.cit., I p. 189; TROLLER, op.cit., I
p. 241). Par "loi" il faut entendre ici non pas la loi au sens formel,
mais au sens matériel, c'est-à-dire toute règle de comportement établie
par l'autorité compétente. Cette règle peut trouver sa source dans
la constitution, la loi au sens formel ou une ordonnance législative
fédérale, ou même un traité international. Il n'est donc pas douteux que
l'ODA et notamment les dispositions qui tendent à assurer l'intégrité
de l'alimentation ont souvent ce caractère (BLUM/PEDRAZZINI, op.cit.,
I p. 201).

    N'étant pas uniquement destinée à modifier le goût et l'arôme des
produits naturels visés par l'ODA, l'invention litigieuse paraît échapper
à cette interdiction. Mais surtout, l'exclusion du brevet pour cause
d'illégalité a été implicitement abrogée en Suisse. En effet, l'arrêté
fédéral du 7 décembre 1961 (ROLF 1963 p. 117) a approuvé la Convention
de Paris pour la protection de la propriété industrielle dans sa teneur
de Lisbonne du 31 octobre 1958, entrée en vigueur le 17 février 1963
(ROLF 1963 p. 119). Or, aux termes de l'art. 4 quater de cette convention,
"la délivrance d'un brevet ne pourra être refusée... pour le motif que la
vente du produit breveté ou obtenu par un procédé breveté est soumise à des
restrictions ou limitations résultant de la législation nationale". Cette
disposition vise incontestablement les dispositions suisses sur le commerce
des denrées alimentaires. Par sa ratification, ce traité international
prime la loi suisse et rend pratiquement caduque la cause d'interdiction
de l'invention contraire à la loi (cf. Message du Conseil fédéral du 5
juin 1961 concernant les actes convenus par la conférence de Lisbonne de
l'Union internationale pour la protection de la propriété industrielle,
FF 1961 I p. 1284). A condition de créer des règles de droit directement
applicables, les traités internationaux conclus par la Confédération sont
en effet des sources du droit fédéral; point n'est besoin que leur texte
soit repris par une loi ou un arrêté de portée générale (RO 87 I 80,
88 I 91, 94 I 672; GRISEL, Droit administratif suisse, p. 35 f).

    b) La convention d'Union de Paris laisse subsister la cause
d'interdiction de l'invention contraire aux bonnes moeurs. Mais
aucun élément dans l'invention litigieuse ne permet d'admettre qu'elle
contreviendrait à cette notion, c'est-à-dire qu'elle heurterait gravement
le sentiment moral de la communauté. Rien n'indique que l'utilisation des
cétones aromatisantes soit nuisible à la santé, hypothèse dans laquelle
la question de l'application de l'art. 2 ch. 1 LBI pourrait se poser.

    En conséquence, la décision attaquée doit être annulée et la cause
renvoyée au Bureau pour qu'il recherche si la demande de brevet satisfait,
pour le surplus, aux conditions légales.

Entscheid:

Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Admet le recours, annule la décision attaquée et renvoie la cause au
Bureau fédéral de la propriété intellectuelle pour qu'il procède selon
la loi.