Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 97 IV 73



97 IV 73

19. Arrêt de la Cour de cassation pénale du 5 mars 1971 dans la cause
Mottier contre Ministère public du Canton de Vaud. Regeste

    Notwehr, Art. 33 StGB.

    Der Angriff eines Tieres begründet keinen Notwehrzustand, ausser wenn
es von einem Menschen als Werkzeug benutzt wird (Erw. 2).

    Notstand, Art. 34 Ziff. 2 StGB.

    Wer einen andern aus einer unmittelbaren Gefahr erretten will,
ist nicht verpflichtet, sich dieser Gefahr auszusetzen, sofern die von
ihm ergriffene Massnahme der dem andern drohenden Gefahr angemessen ist
(Erw. 3 und 4).

Sachverhalt

    A.- H. Stalder, hôtelier à Château-d'OEx, possédait deux chiens
saint-Bernard pesant 80 et 90 kilos. Ils ont plus d'une fois attaqué des
passants sans provocation.

    Le 2 avril 1970, ils réussirent à s'échapper dans la rue et s'en
prirent à deux employés qui livraient du mazout chez Mottier. L'un d'eux
se réfugia dans la cabine du camionciterne, tandis que l'autre, acculé
contre une haie, fut mordu à l'avant-bras et au pied. Ayant finalement
saisi une pelle à neige, il frappa les chiens et les mit en fuite.

    P. Morard, né en 1904, qui passait là, ne fut pas effrayé lorsqu'il
les vit courir dans sa direction. L'un d'eux le saisit néanmoins à
la cuisse et le renversa. L'épaisseur de ses vêtements et les outils
qu'il portait sur lui le protégèrent d'une blessure. Assis par terre,
il se défendit à coups de canne durant près d'une minute, mais les deux
bêtes déchaînées revenaient sans cesse à la charge. Mottier, qui, de sa
fenêtre, au premier étage, avait assisté aux deux attaques, jugea que la
vie ou l'intégrité corporelle de Morard étaient menacées; il prit son
mousqueton, le chargea d'une cartouche, revint à la fenêtre et épaula.
Craignant d'atteindre Morard, il n'osa viser le chien qui le menaçait à
1 m 50; il tira sur le second, qui était plus éloigné et s'apprêtait à
revenir à la charge; il le blessa mortellement.

    B.- Poursuivi pour atteinte à la propriété, Mottier a été libéré, le
2 septembre 1970, par le Tribunal de police du district du Pays-d'Enhaut.

    Sur recours du plaignant Stadler, la Cour vaudoise de cassation pénale
a annulé ce jugement et renvoyé la cause devant le Tribunal de police
du district d'Oron pour nouvelle instruction et nouveau jugement. Elle
estime que l'attaque émanant d'un animal ne saurait donner lieu à légitime
défense; seul l'état de nécessité entre en considération; mais il suppose
un danger "impossible à détourner autrement"; cette condition n'est pas
remplie en l'espèce; le prévenu aurait eu largement le temps de descendre
dans la rue et d'intervenir pour éloigner les bêtes, au besoin à coups de
crosse; son acte est d'autant moins excusable qu'il a tiré sur le chien
qui s'était déjà éloigné du tiers.

    C.- Contre cet arrêt, Mottier se pourvoit en nullité au Tribunal
fédéral. Il conclut à libération.

    D.- Tandis que le Ministère public conclut à l'admission du pourvoi,
Stalder propose de le rejeter, en tant qu'il est recevable.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considération en droit:

Erwägung 1

    1.- ...

Erwägung 2

    2.- Le droit ne régit que des actions humaines. Le comportement des
animaux lui échappe, à moins qu'ils ne servent d'instruments. L'art. 33
CP supposant qu'une personne a été attaquée ou menacée sans droit, la
menace ou l'attaque qui émane d'un animal ne saurait - sauf si ce dernier
est l'instrument d'un homme - créer l'état de légitime défense. Telle est,
en Suisse, l'opinion de la doctrine unanime (HAFTER, Lehrbuch des schweiz.
Strafrechts, Allg. Teil, 2e éd., § 29 II, 2; THORMANN/OVERBECK, n. 4 ad
art. 33; LOGOZ, n. 2 b ad art. 33; STRECKEISEN, Die Notwehr speziell nach
thurgauischem Recht und schweizerischem Strafgesetz, p. 68; K. MÜLLER,
Notwehr und Notwehrexzess, p. 23). SCHWANDER, que le recourant invoque à
tort en faveur de l'opinion contraire, par le assurément de l'attaque par
un chien, mais le contexte, "Tötung eines angereizten Hundes", montre qu'il
vise le cas où cet animal est utilisé comme un instrument (p. 83 i.f.). En
Allemagne, la doctrine dominante et le Reichsgericht se sont prononcés dans
le même sens (SCHÖNKE-SCHRÖDER, 14e éd., n. 6 ad § 53 et les références).

Erwägung 3

    3.- Assailli par deux chiens particulièrement puissants, dont l'un
l'avait renversé, et qui, selon des constatations souveraines, déchaînés
revenaient sans cesse à la charge, Morard a été exposé à un péril imminent
sinon dans sa vie, du moins dans son intégrité corporelle.

    La cour vaudoise a néanmoins refusé d'appliquer l'art. 34 ch. 2
CP, car le prévenu aurait pu détourner autrement le danger couru
par la victime, notamment en mettant les chiens en fuite à coups de
crosse. Cette appréciation est précédée de la remarque que Mottier, "qui
a observé toute la scène et a vu les chiens s'en prendre successivement
à plusieurs personnes, aurait eu largement le temps de descendre dans la
rue et d'intervenir pour éloigner les bêtes".

    Selon la méthode préconisée par la cour cantonale, le recourant
aurait dû affronter lui-même les deux chiens. Mais l'art. 34 ch. 2 CP
n'oblige pas celui qui veut préserver un tiers d'un danger imminent à s'y
exposer lui-même. Au regard de la loi, la vie et l'intégrité corporelle
du tiers intervenant ne sont pas moins dignes de protection que celles
de la personne qu'il veut secourir. De plus, Mottier n'aurait pas pu
frapper les deux chiens en même temps. Pendant qu'il aurait levé la
crosse de son mousqueton contre l'un d'eux, le second aurait pu sauter
sur lui et le jeter à terre, où son arme ne lui aurait plus guère été
utile. Enfin la cour vaudoise relève qu'il aurait eu largement le temps
de descendre dans la rue; elle tient manifestement compte du fait qu'il
a observé toute la scène et elle suppose qu'il avait décidé dès le début
d'intervenir. Tel n'est pas le cas. Le jugement de première instance, dont
les constatations ne sont pas infirmées par l'arrêt entrepris, précise que
Mottier n'a sauté sur son mousqueton que lorsque, les deux bêtes revenant
sans cesse à la charge, la vie ou l'intégrité corporelle de Morard lui ont
paru menacées. La situation était critique. Morard risquait à tout instant
d'être mordu grièvement. Pour être efficace, une intervention devait être
immédiate. On ne saurait reprocher au recourant, qui était au premier
étage, de n'avoir pas perdu le temps nécessaire pour descendre dans la rue.

    Le reproche d'avoir tiré sur le chien le moins proche de Morard n'est
pas plus fondé. Sans doute l'autre, qui se trouvait à 1 m 50 de la victime,
la menaçait-il davantage. Mais tirer sur lui eût comporté, pour Morard,
des risques que le recourant n'a pas voulu assumer. Cette circonstance
à elle seule n'eût assurément pas justifié un coup de feu sur le chien
le plus éloigné s'il n'avait eu de son côté une attitude agressive. Or
le jugement du 2 septembre 1970 constate, à ce sujet, qu'il s'apprêtait
à revenir à la charge.

Erwägung 4

    4.- La mesure prise par le recourant n'est pas disproportionnée au
danger couru par Morard: on ne pouvait raisonnable ment exiger de ce
dernier le sacrifice de son intégrité corporelle.

    Il s'ensuit que les conditions de l'art. 34 ch. 2 CP étaient toutes
réalisées en l'espèce.

Entscheid:

Par ces motifs, la cour de cassation pénale:

    Admet le pourvoi; annule l'arrêt attaqué; renvoie la cause à l'autorité
cantonale pour nouvelle décision.