Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 96 IV 56



96 IV 56

14. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 3 juillet 1970
dans la cause D. contre dame E. et Ministère public du canton de Vaud.
Regeste

    Art. 173 Ziff. 2 StGB. Guter Glaube einer Ehefrau, die zur Stützung
eines Scheidungsbegehrens gemäss Art. 137 ZGB behauptet, ihr Mann habe
Geschlechtsverkehr mit einem jungen Mädchen gehabt.

Auszug aus den Erwägungen:

Erwägung 3

    3.- En alléguant, à l'appui de sa demande en divorce, que son mari
avait entretenu des rapports sexuels avec D., dame E. a certes accusé la
jeune fille de tenir une conduite contraire à l'honneur (art. 173 ch. 1
CP), à savoir d'être la complice d'un adultère. Les éléments constitutifs
du délit de diffamation sont ainsi réunis. Cependant, l'inculpée n'a
pas agi sans motif suffisant (art. 173 ch. 3 CP), mais pour défendre
ses intérêts dans un procès en divorce. Dès lors, elle n'encourt aucune
peine, en vertu de l'art. 173 ch. 2 CP, si elle prouve qu'elle avait des
raisons sérieuses de tenir de bonne foi ses allégations pour vraies. La
jurisprudence est moins stricte, dans les exigences touchant à la preuve
de la bonne foi, lorsque les assertions qui portent atteinte à l'honneur
ont été faites dans un procès, en vue de sauvegarder des intérêts légitimes
(RO 86 IV 175).

    L'époux qui ouvre une action en divorce et qui entend se prévaloir de
la cause déterminée prévue à l'art. 137 CC doit nécessairement alléguer
des faits dont il résulte que son conjoint a commis adultère. Seule
l'administration des preuves permettra de juger si les allégations sont
fondées ou non. Aussi bien, l'époux demandeur - ou son avocat - sera-t-il
parfois placé devant l'alternative de renoncer à défendre ses intérêts
ou d'alléguer des faits attentatoires à l'honneur de la partie adverse
ou d'un tiers et qui pourraient se révéler inexacts. Du point de vue
de l'art. 173 CP, il faut tenir compte de ces difficultés pour examiner
les motifs qu'avait le plaideur de se convaincre de la véracité de ses
allégations ou de s'abstenir de les vérifier (RO 86 IV 176).

    Entendue par le Juge informateur, dame E. a déclaré:

    "Au mois d'août 1968, j'ai appris par la mère de la jeune fille
(c'est-à-dire D.) que durant le séjour de cette dernière à B., mon mari
n'avait pas cessé de lui courir après. D'autre part, il m'est revenu que
la jeune fille avait lavé le dos de mon mari alors qu'il était dans sa
baignoire. J'ai rapporté ces faits à mon avocat. Je n'ai rien affirmé
d'autre, bien que j'aie pensé que la jeune fille pouvait avoir entretenu
des relations sexuelles avec mon mari."

    Dans la mesure où la demande en divorce énoncerait d'autres faits
que les renseignements donnés par l'inculpée à son avocat, celui-ci en
serait seul responsable. Toutefois, l'autorité cantonale a manifestement
considéré que dame E. avait admis le contenu de la demande. Et elle a
jugé avec raison que l'inculpée pouvait de bonne foi tenir pour vraie
la déduction tirée des renseignements dont elle disposait. En effet,
elle avait appris d'une source apparemment digne de foi que son mari
avait emmené la jeune fille à B., qu'il l'avait logée dans une chambre
communiquant avec son studio, qu'il avait obtenu d'elle qu'elle lui lave
le dos alors qu'il était dans sa baignoire et qu'il l'avait poursuivie de
ses assiduités. Elle ne pouvait pas procéder à une enquête pour vérifier le
bien-fondé de ces renseignements. Elle se fût alors exposée au reproche de
circonvenir des témoins avant leur audition dans le procès en divorce. De
ces faits, qui sont aussi allégués dans la demande en divorce, mais qui
ne sont pas visés par la plainte, dame E. avait des raisons sérieuses de
conclure que son mari avait entretenu des rapports sexuels avec D. Dès
lors, elle pouvait invoquer l'adultère à l'appui de sa demande en divorce,
sans être punissable en vertu de l'art. 173 CP.