Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 96 II 378



96 II 378

49. Arrêt de la Ire cour civile du 16 juin 1970 dans la cause Terrier
contre Duboux. Regeste

    Verpfändung eines Wechsels.

    Art. 1007 OR.

    -  Jeder Wechselinhaber kann sich auf diese Bestimmung berufen
(Erw. 2).

    - Der Annehmende kann dem Aussteller die Einreden aus dem Grundgeschäft
entgegenhalten (Erw. 2).

    Art. 884 ZGB.

    -  Verstecktes Pfandindossament (Erw. 3).

    - Untergang des Pfandrechtes wegen Untergangs der gesicherten Forderung
(Erw. 4).

    Art. 8 ZGB.

    Der Wechselschuldner hat zu beweisen, dass der Wechsel für
eine bestimmte Forderung verpfändet worden und dass diese Forderung
untergegangen ist; dagegen obliegt dem Pfandgläubiger der Beweis, dass
die Sicherung durch eine nach der Verpfändung getroffene Abrede auf neue
Forderungen ausgedehnt worden ist (Erw. 5).

Sachverhalt

    A.- Jean Terrier et Marcel Duboux ont été en rapports d'affaires depuis
1958-1959. Le 15 février 1966, ils ont signé une convention destinée à
"procurer des disponibilités à Monsieur Marcel Duboux". A cet effet,
Terrier lui remettait deux lettres de change de 100 000 fr. et 181 000
fr., acceptées par la maison Paul Terrier et fils SA et avalisées par lui.
Ces effets devaient être mis en circulation en vue de l'escompte. Duboux
remettait à Terrier, "en contrepartie,... une lettre de change du montant
de 281 000 fr. tirée par Prêts et Escomptes SA" (société créée par Marcel
Duboux à Lausanne) "sur Mademoiselle Françoise Duboux et Madame Germaine
Duboux" (soeur et mère de Marcel), "qui l'ont acceptée". Cette lettre
de change devait être endossée par Duboux et rester en main de Terrier,
qui ne pouvait la mettre en circulation pour escompte. Sous chiffre 3
de la convention, Duboux s'engageait à rembourser les sommes de 100 000
fr. et 181 000 fr. au plus tard les 13 avril et 12 mai 1966 à Terrier,
qui devait restituer l'effet de change de 281 000 fr. à réception de
ces montants. Il n'était autorisé à "faire procéder à l'encaissement"
dudit effet qu'"au cas où Monsieur Marcel Duboux n'aurait pas rempli,
dans les délais prévus, les obligations prévues au chiffre 3".

    En février 1966, Marcel Duboux a fait signer à sa mère et à sa soeur,
en qualité d'accepteurs, quatre lettres de change en blanc, sans indication
des sommes à payer; il s'engageait cependant à compléter ces effets en
y portant les montants de 35 000 fr., 10 000 fr., 15 000 fr. et 15 000
fr. En fait, il a inscrit sur l'une de ces traites la somme de 281 000 fr.,
l'a signée en qualité de tireur et émise à l'ordre de Jean Terrier, puis
la lui a remise. Cet effet, payable à vue, est daté du 5 octobre 1966.

    B.- Les deux lettres de change de 100 000 fr. et 181 000 fr. n'ont
pas été présentées au paiement à Terrier. Celui-ci a admis au cours de la
procédure cantonale qu'il ne courait aucun risque d'être actionné comme
donneur d'aval en paiement de ces deux traites.

    C.- La lettre de change du 5 octobre 1966 a été présentée au paiement
par Terrier à Germaine Duboux; elle n'a pas été honorée. Terrier a fait
notifier à Germaine et Françoise Duboux des commandements de payer auxquels
elles ont formé opposition. Le 14 mars 1967, le président du Tribunal du
district de Lavaux a prononcé la mainlevée provisoire de ces oppositions,
à concurrence de 281 000 fr. avec intérêts à 6% dès le 13 février 1967
et frais.

    D.- Par demande du 28 mars 1967, Germaine et Françoise Duboux ont
ouvert action en libération de dette.

    Terrier a conclu au rejet de la demande. Il a requis, par conclusions
reconventionnelles, que Germaine et Françoise Duboux fussent déclarées
solidairement débitrices de 281 000 fr. avec intérêts à 6% dès le 13
février 1967, ainsi que des frais de poursuites par 77 fr. 20 et des dépens
de mainlevée par 0 fr. 50. Le 28 janvier 1970, la Cour civile du Tribunal
cantonal du canton de Vaud a admis les conclusions des demanderesses. Ses
motifs sont en bref les suivants:

    Les moyens tirés par les demanderesses de l'art. 1000 CO doivent
être écartés: la preuve de la mauvaise foi du défendeur au moment de
l'acquisition de l'effet litigieux n'a pas été apportée, puisqu'il n'est
pas établi qu'il ait su alors que ledit effet avait été créé en blanc;
les demanderesses ayant déjà apposé à plusieurs reprises leurs signatures
sur des traites tirées par le défendeur, celui-ci n'a pas commis de faute
lourde en acquérant la lettre de change litigieuse.

    L'art. 1007 CO, invoqué par les demanderesses, n'exclut pas
l'opposabilité des exceptions fondées sur le rapport de droit civil qui a
justifié la création de la lettre de change, pour autant que ces exceptions
soient opposées au porteur avec lequel ont existé les relations de droit
civil alléguées.

    D'après la convention du 15 février 1966, l'effet litigieux a
été constitué en nantissement, afin de garantir le remboursement des
montants que Marcel Duboux comptait se procurer en faisant escompter les
deux traites de 100 000 fr. et 181 000 fr. Le défendeur n'a pas prouvé
que ledit effet lui eût été remis en garantie d'autres engagements,
comme il le prétend. La créance garantie était affectée d'une condition
suspensive, consistant dans la présentation au paiement au défendeur des
deux traites de 100 000 fr. et 181 000 fr. L'événement de cette condition
ne s'étant jamais produit, le droit de gage sur la traite litigieuse
est éteint. Partant le défendeur n'est pas fondé à réaliser le gage,
qu'il devait restituer à Marcel Duboux.

    E.- Terrier recourt en réforme au Tribunal fédéral contre cet arrêt. Il
conclut principalement au rejet de l'action en libération de dette et à
l'admission de sa demande reconventionnelle, subsidiairement au renvoi
de la cause à la juridiction cantonale pour nouvelle instruction et
nouveau jugement.

    Les intimées proposent le rejet du recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- La cour cantonale a écarté à juste titre l'exception tirée
de l'art. 1000 CO. Il n'y a pas lieu de revenir à cette appréciation,
qui n'est pas critiquée par les parties. Les griefs du recourant touchant
le fardeau de la preuve relative à la mauvaise foi ou au dol du porteur,
ainsi qu'au moment où l'on se reporte pour apprécier ces éléments, sont
dès lors dépourvus de pertinence.

Erwägung 2

    2.- Les premiers juges se sont fondés sur l'art. 1007 CO pour admettre
l'action en libération de dette des demanderesses. Cette disposition,
bien que figurant parmi celles qui traitent de l'endossement, ne vaut pas
pour le seul endossataire; elle s'applique au bénéfice de tout porteur,
et notamment à celui du preneur de la lettre de change (ARMINJON ET CARRY,
La lettre de change et le billet à ordre, 1938, no 331 in fine; STRANZ,
Wechselgesetz, 14e éd., 1952, 1. a al. 2 ad art. 17; LESCOT ET ROBLOT,
Les effets de commerce, 1953, vol. 1, no 297).

    En vertu de l'art. 1007 CO, le preneur de bonne foi ne peut se voir
opposer les exceptions fondées sur les rapports personnels de l'accepteur
avec le tireur. Cette disposition ne prescrit pas à l'égard du preneur
l'inopposabilité des exceptions tirées du rapport de droit sur la
base duquel la lettre de change a été émise. Une telle prescription ne
trouverait aucun fondement dans la ratio legis.

    Le principe de l'inopposabilité des exceptions consacré par l'art. 1007
CO a notamment pour but de protéger le porteur de bonne foi (ARMINJON
ET CARRY, op.cit., no 331; STRANZ, op.cit., n. 1 al. 1 ad art. 17). Or
le preneur connaît les exceptions qui peuvent être tirées du rapport
fondamental, auquel il est partie avec le tireur, et n'a pas à être protégé
contre elles. L'objection soulevée par l'arrêt RO 58 II 159 (consid. 1 in
fine) contre l'opposabilité desdites exceptions à l'endossataire, qui n'est
pas partie au rapport de base, ne vaut pas pour le preneur. En conséquence,
l'accepteur peut opposer au preneur les exceptions qui dérivent du rapport
fondamental, et paralyser de cette façon l'exercice de l'action cambiaire
(ARMINJON ET CARRY, op.cit., no 334, p. 376).

Erwägung 3

    3.- Il faut se reporter à la convention passée le 15 février 1966
entre le recourant et Marcel Duboux pour déterminer la nature et la
portée du rapport sur la base duquel a été émise la lettre de change du 5
octobre 1966. D'après la convention, cet effet était remis au recourant
en garantie d'une créance de 281 000 fr., montant correspondant aux deux
traites de 100 000 fr. et 181 000 fr. qu'il avait avalisées et s'exposait
ainsi à payer au porteur.

    Il s'agissait donc d'un contrat de gage. Le gage a été constitué
conformément aux règles sur le nantissement et l'engagement des titres
à ordre (OFTINGER, n. 84 ad art. 884 CC, 30-40 et 69 ad art. 901 CC). La
remise au recourant de la lettre de change par le tireur équivalait à un
endossement pignoratif occulte (OFTINGER, n. 83 ad art. 901 CC).

Erwägung 4

    4.- Il est constant que les deux lettres de change de 100 000 fr. et
181 000 fr. n'ont pas été présentées au paiement au défendeur et que la
créance en garantie de laquelle a été remis l'effet de change litigieux
est éteinte au sens de l'art. 114 al. 1 CO. Cette extinction entraîne
celle du droit de gage. Le défendeur n'avait dès lors plus de droit sur
l'effet de change. Il devait le restituer à Marcel Duboux, conformément à
l'art. 889 al. 1 CC (ARMINJON ET CARRY, op.cit., no 242, p. 276; STRANZ,
n. 9 al. 1 ad art. 19). Quant aux intimées, elles n'avaient pas qualité
pour demander la remise du titre sur lequel elles ne possédaient aucun
droit. Le recourant se prévaut donc à tort de leur passivité. Il se
méprend sur l'opinion de CARRY (FJS 472) qu'il cite à contresens. Cet
auteur mentionne l'obligation du titulaire de la créance causale - ici, le
recourant - de restituer le titre intact au débiteur - soit Marcel Duboux.

Erwägung 5

    5.- Le recourant soutient qu'en vertu d'un accord verbal conclu en mai
1966 avec Marcel Duboux, l'effet de change litigieux devait garantir de
nouvelles créances, postérieures à la convention du 15 février 1966. Il
fait grief à la cour cantonale d'avoir mis à sa charge la preuve de cet
accord; selon lui, il incombait aux intimées d'en établir l'inexistence.

    Cette argumentation repose sur une violation prétendue de l'art. 8
CC. D'après cette disposition, il appartient au débiteur de change qui
soulève une exception de prouver les faits dont il entend la déduire. Les
intimées ont satisfait à cette exigence: elles ont démontré que l'effet
de change litigieux avait été remis au recourant en garantie d'une créance
déterminée; elles ont établi en outre l'extinction de cette créance. Elles
n'avaient pas d'autre preuve à fournir. Il incombait au recourant de
démontrer l'existence d'une nouvelle convention, postérieure à celle du
15 février 1966, consacrant une extension de la garantie à des créances
nées après la constitution du gage (cf. par analogie STRANZ, n. 40 al. 3
ad art. 17). Or il ne prétend pas avoir apporté cette preuve ou en avoir
été empêché en méconnaissance des dispositions fédérales en la matière.

    Ainsi, le grief tiré de l'absence de constatations, dans l'arrêt
déféré, sur l'existence des créances alléguées dans le cadre de cette
prétendue convention se révèle dépourvu de toute pertinence.

Entscheid:

Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Rejette le recours et confirme le jugement attaqué.