Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 95 I 57



95 I 57

9. Extrait de l'arrêt du 28 février 1969 en la cause Administration
neuchâteloise de la taxe militaire contre Rausis. Regeste

    Militärpflichtersatz, Art. 4 Abs. 1 lit. b MPG.

    Kausalzusammenhang, Beweislast (Klarstellung der Rechtsprechung; Erw.
2).

    Angeborene Veränderung der Wirbelsäule, Verschlimmerung infolge des
Dienstes (Erw. 3).

Auszug aus den Erwägungen:

Erwägung 1

    1.- L'art. 4 al. 1 litt. b LTM exonère notamment de la taxe
militaire celui qui, en raison d'une atteinte portée à sa santé par
le service militaire, n'est plus apte à l'accomplir. L'aggravation
sensible et durable d'une maladie antérieure au service constitue une
telle atteinte. Si l'aggravation n'est que temporaire, l'exonération
l'est aussi. Celle-ci prend fin dès que celle-là n'est plus imputable au
service. Plus précisément, l'exonération cesse soit au moment où l'état
antérieur au service est rétabli, soit au moment où, sans le service,
l'état du malade eût été le même (RO 85 I 61 s.; 90 I 50).

Erwägung 2

    2.- Appelé à statuer sur ces questions, le juge élucide d'office les
circonstances de fait et en déduit d'office les conséquences juridiques.
Cette conception du rôle du juge n'élimine pourtant pas la question du
fardeau de la preuve. Lorsqu'après une instruction aussi complète que
possible, le juge n'est pas parvenu à élucider complètement les faits, il
doit faire supporter à l'une des parties les conséquences de l'incertitude
qu'il ne peut dissiper. L'objet des règles sur la répartition du fardeau
de la preuve est précisément de désigner cette partie (RO 92 I 255/256
et les références). Faute de disposition légale directement applicable,
le juge recourra, en matière de taxe militaire, au principe général du
droit, qui trouve notamment son expression à l'art. 8 CC et selon lequel
l'échec de la preuve d'un fait tourne au détriment de la partie qui aurait
pu déduire de ce fait un droit (RO 92 I 257 consid. 3 et la référence).

    a) S'agissant de la naissance du rapport de causalité, le Tribunal
fédéral a nié que le malade fût "à proprement parler" chargé du fardeau de
la preuve (RO 85 I 61). En réalité, il le lui fait supporter. Il ne retient
l'existence d'un rapport de causalité entre le service et l'état du malade
qu'en cas de certitude, de vraisemblance suffisante ou, exceptionnellement,
s'il y a eu accident grave au service, de simple possibilité (RO 81 I 67,
85 I 60 ss., 90 I 51; arrêts non publiés Le Blanc, du 22 décembre 1953,
consid. 1; Renevier, du 13 mars 1959, consid. 1; Kohler, du 1er juin 1962,
consid. 2; Administration fédérale des contributions, du 1er février 1963,
consid. 3 et Altorfer, du 15 juillet 1966, consid. 1). En règle générale,
il tranche donc tous les cas douteux en faveur de l'administration et
contre le malade. Cette jurisprudence est conforme au principe rappelé.
Celui qui prétend un droit supporte les conséquences de l'échec de la
preuve des faits dont il voulait le déduire.

    b) Appliqué à la rupture du lien de causalité entre le service
et l'état du malade, le même principe conduit à imposer le fardeau de
la preuve à l'administration. Celui qui allègue des faits de nature à
supprimer un droit doit démontrer leur existence (KUMMER, Berner Kommentar
zum schweiz. Zivilrecht, 1962, n. 160 ss. ad art. 8 CC). Certes, là
encore, le juge n'exigera pas une certitude absolue et se contentera d'une
vraisemblance suffisante. S'il paraît probable que les effets du service
n'influent plus sur l'état du malade, la taxe sera due. En revanche, dans
les cas douteux, qui ne peuvent être suffisamment élucidés ni à l'aide
des éléments d'appréciation recueillis, ni au moyen d'une instruction
complémentaire, le malade continuera d'être exonéré du paiement de la taxe.
Si les faits qui justifieraient le retrait de l'exonération ne sont pas
établis, il reste au bénéfice de la situation acquise.

Erwägung 3

    3.- Atteint d'une déviation lombaire qu'il ne soupçonnait pas jusqu'en
1963, l'intimé a fourni cette année-là, pendant un cours de complément,
des efforts qui ont déclenché des lombalgies. Ce service a donc aggravé
une maladie préexistante. Aussi, tant que dure l'aggravation imputable au
service, l'intimé est-il dispensé de payer la taxe militaire. Pour qu'il
y soit astreint, il faut ou bien qu'il ait retrouvé son état antérieur
au service, ou bien que, sans le service, il eût été dans le même état
que maintenant.

    La première condition n'est pas remplie. Rien ne laisse supposer
qu'avant le cours de 1963, l'intimé ait souffert de lombalgies. Il le
conteste, sans être contredit par la recourante. Il prétend n'avoir
jamais été tout à fait exempt de douleurs depuis le service où elles se
sont déclarées. S'il n'a pas consulté de médecin de 1964 à 1966, cela ne
signifie pas que, durant cette période, il n'ait pas subi de troubles. En
tout cas, les trois experts qui l'ont examiné rapportent ses doléances
et aucun ne les suspecte d'être infondées. Dans ces circonstances, il
n'est nullement certain, ni même vraisemblable que l'état de l'intimé
soit actuellement le même qu'avant le service. Même s'il subsistait un
doute à cet égard, il n'y aurait pas lieu de priver l'intimé du bénéfice
de l'exonération. Ainsi qu'il résulte des principes développés, le doute
profite au malade.

    La seconde condition n'est pas réalisée non plus. En 1964, le Dr
Borel avait émis un pronostic qui s'est révélé trop optimiste et sur
lequel le juge ne saurait se fonder. En 1967, le Dr Wyss écrivait: "Der
Verschlimmerungsfaktor ist nicht von der Hand zu weisen"; il n'excluait
donc pas que le service jouât encore un rôle aggravant. En 1968, le Dr
de Montmollin jugeait "extrêmement difficile" de se prononcer sur la
persistance de troubles imputables au service. Vu la perplexité de ces
médecins, tous spécialistes en orthopédie, il est impossible d'affirmer
que, sans le service, l'intimé souffrirait autant qu'aujourd'hui. Pour les
motifs exposés, le doute qui subsiste sur ce point justifie le maintien
de l'exonération.

    La nouvelle expertise requise par la recourante et l'Administration
fédérale des contributions ne s'impose pas. Même si un autre médecin
se prononçait plus catégoriquement que ceux qui ont été déjà consultés,
il n'y aurait pas de raison de retenir son opinion plutôt que la leur.

Entscheid:

              Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Rejette le recours.