Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 95 I 139



95 I 139

20. Arrêt du 2 juillet 1969 dans la cause Julliard et Bolliger contre
Conseil d'Etat du canton du Valais. Regeste

    Kantonale Stempelabgabe auf der Übertragung der Aktien von
Immobiliengesellschaften. Es ist nicht willkürlich, die Übertragungder
Aktien einer Immobiliengesellschaft der Übertragung der Liegenschaft
der Gesellschaft gleichzustellen, noch, die Abgabe auf dem gesamten,
vom Erwerber bezahlten Preis zu berechnen, wenn dieser Preis den Wert der
Aktien und die Übernahme einer Forderung gegen die Gesellschaft umfasst.

Sachverhalt

    A.- La société anonyme "S.I. Orion" (ci-après: la Société), dont
le siège est à Ayent, a pour but l'achat, la construction, la vente et
l'exploitation de biens-fonds. Son capital est de 94 600 fr. et se divise
en 946 actions nominatives de 100 fr. chacune, entièrement libérées.

    La Société a édifié à Anzère un grand bâtiment d'appartements, qui
fait partie du centre touristique dénommé "Anzère Village". Pour financer
cette construction, elle a eu recours à des prêts de ses promoteurs. Le
montant total de ces prêts, avancés au für et à mesure des nécessités,
n'est pas encore définitivement arrêté: il figurera au bilan de la Société
comme dette chirographaire de celle-ci envers ses actionnaires.

    L'amateur d'un appartement passe avec les promoteurs, représentés
par Julliard et Bolliger, agents immobiliers, à Genève, et avec la
Société un contrat, dit de "cession-vente", qui a un double objet: d'une
part, la vente d'un certain nombre d'actions groupées en un certificat
indivisible, auquel est attaché, conformément aux statuts de la Société,
le droit de louer un appartement déterminé dans l'immeuble de celle-ci,
et d'autre part, la cession d'une fraction (proportionnelle au nombre
d'actions acquises) de la créance chirographaire dont les promoteurs sont
titulaires envers la Société. Selon le contrat, la créance est liée
indivisiblement aux actions auxquelles elle correspond et ne peut être
cédée sans elles. L'opération complète - vente des actions et cession de
créance - a lieu moyennant versement d'un prix global et forfaitaire.

    B.- La loi valaisanne sur le timbre, du 14 novembre 1953 (LT), soumet
notamment à un droit de timbre proportionnel les actes de cession de
créances (art. 11 litt. a LT) et les actes ayant pour effet de transférer
la propriété mobilière ou immobilière, en particulier "les transferts
d'actions ou de parts sociales d'une société immobilière, conférant aux
acquéreurs la libre disposition juridique ou économique d'une part ou
de la totalité d'un immeuble" (art. 12 litt. a LT). L'imposition de ces
actes n'est toutefois pas uniforme, tant en ce qui concerne le taux que
l'assiette de l'impôt.

    Les cessions de créances sont frappées à un taux progressif allant
de 1é, pour les montants inférieurs à 10 000 fr., à 4é pour les montants
supérieurs à 100 000 fr. (art. 13 ch. 1 LT). Pour les actes énumérés
à l'art. 12, soit notamment les transferts d'actions de sociétés
immobilières, la progression va de 4é, pour les montants jusqu'à 10
000 fr., à 12é, au-delà de 100 000 fr. (art. 13 ch. 2 LT). L'assiette
du timbre proportionnel est la valeur indiquée dans l'écrit pour les
cessions de créances (art. 25 litt. a LT) et la quote-part de la valeur
réelle de l'immeuble pour les transferts de parts de sociétés immobilières
(art. 25 litt. n LT).

    C.- Julliard et Bolliger ont soumis à l'enregistrement auprès du
Bureau du registre foncier de Sion vingt-neuf contrats de vente-cession
qu'ils avaient passés, agissant pour le compte d'actionnaires-cédants non
spécifiés, avec plusieurs "acheteurs" d'appartements. Par décision du 3
mai 1968, le Bureau du registre foncier a invité les agents immobiliers
à lui verser 41 914 fr. 30, montant total des droits de timbres dus. Ce
montant résulte de l'application des taux de l'art. 13 ch. 2 LT, au
prix global prévu dans les contrats pour le transfert des actions et la
cession de la créance.

    D.- Julliard et Bolliger ont recouru au Département des finances du
canton du Valais. Ils faisaient valoir qu'il y avait lieu de distinguer
entre les montants payés pour l'achat des actions d'une part, et les
prestations effectuées en contrepartie de la cession de la créance
chirographaire d'autre part, et de les taxer aux taux différents prévus
par l'art. 13 ch. 1 et 2 LT pour chacune de ces opérations. Comme il était
alors impossible de fixer le montant exact des créances chirographaires,
ils proposaient de procéder à une taxation provisoire, sous réserve du
calcul définitif qui devait intervenir à la fin des travaux.

    Le Département des finances a rejeté le recours le 4 juin 1968.

    Saisi par les agents immobiliers, qui persistaient dans leurs
conclusions, le Conseil d'Etat du Valais les a déboutés par décision du
4 décembre 1968.

    E.- Agissant par la voie du recours de droit public pour violation
de l'art. 4 Cst., Julliard et Bolliger demandent au Tribunal fédéral
d'annuler la décision du Conseil d'Etat. Ils soutiennent que celui-ci est
tombé dans l'arbitraire tout d'abord en refusant de faire la distinction,
posée par les art. 11 et 12 et les chiffres 1 et 2 de l'art. 13 LT,
entre la cession de créance, d'une part, et le transfert des actions,
d'autre part, puis en recourant, sans motifs valables, à des critères
économiques, et enfin en les considérant comme responsables de la dette
d'impôt incombant à l'une des parties au contrat.

    Le Conseil d'Etat propose le rejet du recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Les recourants prétendent que le Conseil d'Etat est tombé dans
l'arbitraire en exigeant d'eux le paiement du droit de timbre sur les
contrats en cause, alors qu'ils ne sont ni cédants, ni cessionnaires.

    Le moyen est nouveau et, partant, irrecevable (RO 92 I 346 litt. a). Il
est du reste mal fondé. Selon l'art. 35 LT, l'obligation d'estampiller
les actes ou de les présenter à l'enregistrement incombe solidairement aux
signataires et aux personnes qui les détiennent pour en déduire un droit.
Julliard et Bolliger ont signé les contrats en question au nom et pour le
compte des actionnaires-créanciers anonymes de la S.I. Orion, qui vendaient
leurs actions et cédaient leur créance. Au surplus, selon la procuration
jointe au recours de droit public, ils représentent aussi les acquéreurs
de ces actions et créances, domiciliés pour la plupart à l'étranger. Dès
lors, on voit mal à qui, sinon à eux, l'Etat du Valais aurait dû s'adresser
pour obtenir paiement de l'impôt. L'argument n'est pas de bonne foi.

Erwägung 2

    2.- Les contrats en cause sont mixtes. D'une part, ils concernent la
vente d'un lot d'actions d'une société immobilière, auquel est attaché
le droit de prendre à bail un appartement dans l'immeuble social. D'autre
part, ils ont trait à la cession d'une créance envers la même société. Le
but économique de l'opération dans son ensemble - cela n'est pas contesté -
est de conférer aux acheteurs-cessionnaires la faculté de disposer d'un
appartement déterminé dans l'immeuble que la S.I. Orion a construit à
Anzère Village.

    a) Les recourants ne contestent pas, avec raison, que dans la mesure
où la somme payée par les acheteurs se rapporte à l'achat des actions,
le contrat est soumis au timbre proportionnel au sens de l'art. 12 litt. a
LT, et cela aux taux prévus par l'art. 13 ch. 2 de la même loi. Il est en
effet permis à l'autorité cantonale d'assimiler, à certaines conditions, la
vente d'actions d'une société immobilière au transfert de l'immeuble dont
celle-ci est propriétaire, en faisant abstraction de la forme juridique
pour se fonder sur des considérations économiques. Lorsqu'il statue avec
pleins pouvoirs, le Tribunal fédéral n'admet cette façon de procéder que
si la forme juridique à laquelle a recouru le contribuable est insolite et
n'a été choisie qu'aux fins d'éluder l'impôt. Lorsque, comme en l'espèce,
il ne revoit la décision que sous l'angle restreint de l'arbitraire, il
exige seulement que des raisons objectives et pertinentes justifient le
procédé (RO 93 I 691; 90 I 221; 85 I 279/80 et les arrêts cités). Point
n'est besoin au demeurant que la loi le prévoie expressément, comme le
fait la loi valaisanne sur le droit de timbre (art. 12). Il est manifeste
que ces raisons existent en l'espèce.

    b) Les recourants voudraient toutefois que les taux plus élevés
prévus par l'art. 13 ch. 2 LT ne fussent appliqués qu'à la partie du
prix représentant la contre-valeur des actions, tandis que le solde du
montant figurant dans le contrat, relatif à la cession de la créance
chirographaire, ne serait frappé que des droits moins élevés prévus
par l'art. 13 ch. 1 LT. Ils se trompent et perdent évidemment de vue la
disposition de l'art. 25 litt. n LT, selon laquelle l'assiette de l'impôt
est constituée par la quote-part de la valeur de l'immeuble. Cette
règle, que les recourants ne mentionnent ni ne critiquent, est au
demeurant parfaitement logique. Si l'on assimile, en se fondant sur des
considérations économiques, le transfert des actions au transfert de la
propriété de l'immeuble, l'assiette de l'impôt doit être la valeur de
cet immeuble.

    L'autorité cantonale, il est vrai, n'a pas établi la valeur de
l'immeuble, ni la quote-part afférente à chacun des appartements formant
l'objet des contrats; elle a pris pour assiette de l'impôt le prix global
que les différents acquéreurs ont payé. Mais cette manière de procéder
échappe manifestement au grief d'arbitraire. On ne saurait raisonnablement
contester que, du point de vue économique, la prestation globale des
acquéreurs représente la valeur de l'appartement, objet du contrat,
ou mieux, le prix de cet appartement.

Erwägung 3

    3.- Les recourants ne pourraient se plaindre que si le fisc avait
considéré le transfert des actions comme transfert de l'immeuble, pour
l'imposer selon la valeur de cet immeuble, en vertu des art. 12 litt. a,
13 ch. 2 et 25 litt. n LT, et avait ensuite prétendu imposer au surplus
la cession de créance, en se fondant sur les art. 11 litt. a, 13 ch. 1
et 25 litt. a LT. Alors seulement, l'autorité cantonale aurait commis
l'erreur de se fonder en même temps et de façon contradictoire sur la
réalité économique pour frapper le transfert d'actions à l'égal d'un
transfert immobilier, et sur la forme juridique de l'opération pour
frapper encore la cession de créance (cf. RO 93 I 691; 84 I 138; 80 I
323). Mais le fisc valaisan n'a pas commis cette erreur. Il a considéré
à juste titre que l'opération dans son ensemble (vente des actions et
cession de la créance chirographaire) était assimilable à un transfert
immobilier et s'est borné à l'imposer en conséquence.

Entscheid:

Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Rejette le recours.