Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 95 IV 92



95 IV 92

23. Arrêt de la Cour de cassation pénale du 25 avril 1969 dans la cause
Ministère public du canton de Neuchâtel contre Brasey. Regeste

    Art. 1 Abs. 1 und 8 VRV, 36 Abs. 2 SVG.

    1.  Die Verkehrsregeln sind auf alle dem öffentlichen Verkehr
offenstehenden Verkehrsflächen anwendbar, insbesondere auf
Strassenverzweigungen, zu denen auch die Plätze gehören.

    2.  Ob ein Fahrer einen Platz auf dem kürzesten Weg zu überqueren
oder sich an den Rand zu halten hat, entscheidet sich nach den örtlichen
Verhältnissen (Erw. 1-3).

    Art. 36 Abs. 2 SVG.

    Der Fahrer, der zur Gewährung des Vortritts verpflichtet ist, begeht
einen Fehler, wenn er auf die vom Vortrittsberechtigten beanspruchte
linke Fahrbahnhälfte einbiegt (Erw. 4).

Sachverhalt

    A.- Le 25 juin 1968, une collision entre les voitures automobiles
légères, conduites, l'une par Jacot et l'autre par Brasey, s'est produite à
Neuchâtel au confluent de cinq rues, lequel forme une place allongée. Sur
cette place débouchent, à l'ouest, formant un angle très aigu, la rue
Matile au nord et la rue de Fontaine-André, au sud. Une quinzaine de
mètres plus loin, la place, large jusque-là de quinze mètres environ,
s'évase du fait que le mur qui bordait la rue Matile, au nord, forme
un angle et s'éloigne progressivement du bord sud de la chaussée. En
face du débouché que l'on vient de décrire, la chaussée se divise en
trois artères: au nord la rue des Petits-Chênes, puis, plus au sud,
la rue de l'Orée, qui forme avec la première un angle aigu et, enfin,
le chemin des Liserons, parallèle à la précédente. Aucune de ces rues ne
porte un signal réglant la priorité; sur l'aire que forme ce confluent,
la trajectoire des voitures n'est fixée par aucun signe, ni par aucun îlot.

    Jacot, qui arrivait par la rue Matile, voulait continuer sa route
par le chemin de l'Orée. Il circulait au milieu de la chaussée à cause
d'une voiture parquée sur sa droite. Il continua sa course en suivant
une ligne qui représente le prolongement des axes de la rue Matile et de
la rue de l'Orée. Sa vitesse était de 40 km/h environ et il portait son
attention vers sa droite, afin de pouvoir, au besoin, céder le passage à un
véhicule qui aurait pu survenir, de ce côté, par la rue de Fontaine-André.

    A ce moment, une autre voiture automobile légère, conduite par Lucien
Brasey, arrivait, en sens inverse, par la rue des Petits-Chênes. Elle
roulait lentement, à 1 m 80 environ du mur qui borde cette artère au
nord. Brasey, qui voulait s'engager dans la rue de Fontaine-André, freina
lorsqu'il aperçut la voiture de Jacot. Celui-ci, au moment où il regarda
de nouveau devant lui et aperçut l'autre véhicule, freina lui aussi, mais
brusquement; sa voiture pivota vers la gauche et heurta celle de Brasey,
qui fut endommagée et dont le conducteur fut légèrement blessé. Le point
de choc se trouve sur la surface que délimitent les lignes tirées entre
les extrémités droites, d'une part, et gauches, d'autre part, des rues
Matile et de l'Orée. Si Brasey avait circulé plus lentement, il aurait pu
apercevoir l'autre véhicule et s'arrêter à temps, avant d'avoir atteint
cette surface.

    B.- Le 15 octobre 1968, le Tribunal de police de Neuchâtel a condamné
Jacot à 90 fr. d'amende pour contravention à l'art. 34 LCR et Brasey à
30 fr. d'amende pour contravention à l'art. 36 LCR.

    Brasey recourut contre ce jugement, et la Cour de cassation pénale du
canton de Neuchâtel le libéra, considérant qu'il avait circulé suffisamment
à droite et n'avait pas à prévoir qu'un autre conducteur n'en ferait
pas autant; qu'il n'était pas tenu de s'avancer "en tâtonnant" jusqu'au
point où il pourrait voir la rue Matile de façon à pouvoir en tout cas
céder le passage à un véhicule venant de cette artère; qu'on ne saurait
lui reprocher de s'être avancé deux mètres au-delà de ce point.

    C.- Le Ministère public du canton de Neuchâtel s'est pourvu en nullité
contre cet arrêt. Il conclut à la condamnation de Brasey pour violation
de la priorité de droite.

    D.- Brasey conclut au rejet du pourvoi.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- L'autorité cantonale a constaté souverainement que la collision
s'était produite sur une aire ouverte à la circulation et longue de
40 m, environ, large de 15 m à l'une de ses extrémités et de 25 m à
l'autre. Elle a désigné cette aire comme une place. Mais contrairement
à ce qu'allègue l'intimé, il n'y a là aucune constatation de fait, qui
exclurait l'application des règles touchant la priorité. Peu importe
la désignation employée par l'autorité cantonale, c'est une question de
droit que de décider quelles règles s'appliquent à l'endroit considéré,
étant donné la position des véhicules.

Erwägung 2

    2.- Les règles de la circulation s'appliquent non seulement sur
les routes au sens étroit du terme, mais encore sur toutes les voies
de communication (Verkehrsflächen) ouvertes à la circulation publique,
c'est-à-dire qui ne servent pas uniquement à l'usage privé (art. 1er al. 1
OCR; RO 92 IV 11).

    Elles s'appliquent en particulier sur les intersections (art. 36 al. 2
LCR, art. 1er al. 8 OCR) où, sauf réglementation différente imposée par des
signaux ou par la police, la priorité de passage appartient au véhicule
qui vient de droite. Cette priorité s'impose dans tous les cas où des
voies ouvertes à la circulation se coupent et notamment sur les places,
fussent-elles grandes.

    La Cour de cassation neuchâteloise a jugé que Jacot ne bénéficiait pas
de la priorité par rapport à Brasey parce que, dit-elle, il circulait
sur une place. Elle n'a sans doute pas entendu que la priorité de
droite ne s'appliquait jamais sur les places; elle semble avoir voulu
l'exclure seulement pour les véhicules qui traversent une place en droite
ligne, mais, au contraire, la maintenir aux embouchures des rues sur la
place. Rien ne permet, cependant, de faire une telle distinction entre
les intersections ordinaires de voies larges et les places qui comportent
généralement plusieurs embouchures et où la priorité de droite serait
tout au moins partiellement abolie. Une telle règle créerait du reste un
état de confusion dangereux.

    C'est selon les circonstances locales que l'on décidera s'il faut
traverser une place par le chemin le plus court ou en suivant le bord. La
première de ces solutions s'imposera fréquemment, ainsi lorsqu'une rue
débouche au milieu de chacun des côtés d'une place quadrangulaire dont
le milieu permet le passage. Aucune signalisation n'est nécessaire pour
autoriser la traversée directe dans un tel cas. Le conducteur jugera
sur place du chemin qu'il doit suivre toutes les fois que des signaux,
des marques sur la chaussée et des installations telles que des bornes
ou des îlots ne lui imposent pas une direction.

    Sur l'aire de l'intersection où l'accident s'est produit, aucun signal,
signe, ni installation, ne prescrit aux conducteurs un cheminement
déterminé. Le juge de première instance a constaté - et la Cour de
cassation neuchâteloise ne l'a pas contredit - que d'assez nombreux
conducteurs passent de la rue Matile à la rue de l'Orée en suivant une
trajectoire rectiligne. Il ne saurait en aller autrement, car il n'y a
aucune raison d'exiger d'eux qu'ils gagnent premièrement le bord droit
de la place, suivant une trajectoire qui couperait celle de tous les
véhicules qui débouchent de la rue de Fontaine-André, même de ceux qui
se dirigent vers le chemin des Liserons.

    Il est, de plus, constant que Brasey connaissait les lieux. Il
débouchait de la rue des Petits-Chênes, qui n'est qu'un cul-de sac et
n'est que peu fréquentée. Il savait qu'il devait couper la trajectoire des
véhicules qui, venant de la rue Matile, se dirigeaient en droite ligne
vers la rue de l'Orée. Du fait même de l'intersection des trajectoires,
ces véhicules bénéficiaient de la priorité par rapport à lui.

Erwägung 4

    4.- Il reste à savoir si Brasey a violé la priorité de Jacot
en s'avançant de presque deux mètres sur la voie large de six mètres
environ, qui, par prolongement de leurs bords, relie la rue Matile à la
rue de l'Orée.

    Selon la jurisprudence constamment suivie, déjà sous l'empire de la
loi sur la circulation routière, cette question appelle l'affirmative
(RO 84 IV 112; 85 IV 91, no 23; 93 IV 106). Le juge de première instance,
tout en la suivant, l'a critiquée, mais il faut la maintenir. Sans doute,
d'une façon générale, tout conducteur doit pouvoir compter que les autres
se conformeront aux règles de la circulation, aussi longtemps tout au
moins que l'attention commandée par les circonstances ne l'oblige pas
à s'attendre à une violation de ces règles par autrui. Mais, en matière
de priorité, c'est le conducteur prioritaire que la cour de céans a mis
au bénéfice de cette présomption et non celui qui doit céder le passage
(RO 92 IV 139). Cela se justifie. On ne saurait, sans vider de son contenu
la priorité, permettre à ce dernier de s'avancer sur la moitié gauche de
la voie qu'emprunte le conducteur prioritaire. Car ce conducteur peut
circuler sur ce côté non seulement par une faute, mais aussi pour des
raisons légitimes, par exemple pour contourner un obstacle qui se trouve
sur sa droite ou pour dépasser un autre véhicule, ce qui, suivant les cas,
est licite, même sur les intersections (art. 35 al. 4 LCR).

    D'après les constatations souveraines de l'autorité cantonale, au
moment de la collision, Brasey avait déjà pénétré de presque deux mètres
dans la voie qui constitue la prolongation de la rue Matile vers la rue
de l'Orée. S'il avait usé d'une prudence et d'une attention suffisantes,
il aurait pu s'arrêter avant la collision. Sa trajectoire coupait
celle de Jacot et l'aurait fait même si ce dernier avait strictement
suivi le bord droit de la place, comme l'eût voulu la Cour de cassation
neuchâteloise, car il aurait ainsi passé devant l'embouchure de la rue
de Fontaine-André, où Brasey voulait précicément s'engager. Il a donc
violé la priorité de droite. Sans doute circulait-il très lentement et
Jacot a-t-il violé les règles de la circulation. Mais cela ne saurait
le disculper entièrement. L'autorité cantonale devra donc le condamner
pour violation de l'art. 36 al. 2 LCR. Elle fixera la peine librement,
sans être liée par celle qu'avait prononcée le juge de première instance.

Entscheid:

Par ces motifs, la Cour de cassation pénale:

    Admet le pourvoi, annule l'arrêt attaqué et renvoie la cause à
l'autorité cantonale pour nouvelle décision.