Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 95 IV 101



95 IV 101

26. Arrêt de la Cour de cassation pénale du 25 avril 1969 dans la cause
Arts ménagers SA et Ministère public du canton de Vaud contre Rediffusion
SA et Télévision

SA Regeste

    Art. 273 Abs. 1 lit. b BStP.

    Wenn die Frage im kantonalen Verfahren nicht aufgeworfen worden ist,
kann der Kassationshof nicht prüfen, ob eine bestimmte Gesetzesvorschrift
anwendbar sei (Erw. 2).

    Mietkaufvertrag; Art. 226 m Abs. 1 OR.

    Wann verfolgt ein Mietkaufvertrag die gleichen wirtschaftlichen Zwecke
wie ein Kauf auf Abzahlung (Erw. 4)?

Sachverhalt

    A.- A partir du 3 septembre 1968, Rediffusion SA, à Lausanne, a
fait paraître, dans la Feuille d'avis de Lausanne, une série d'annonces
relatives au téléviseur "Philips automatic 23 T 650". Après avoir décrit
l'appareil, elles donnent les indications suivantes:

    "Son prix Fr. 1148.-- (escompte pour paiement au comptant). Location:
Fr. 32.80 par mois + Fr. 3.- pour service.

    Notre surprise

    A l'achat de cet appareil, vous bénéficiez de l'abonnement gratuit
d'une année au journal Radio TV Je vois tout (d'une valeur de Fr. 35.-)."

    Tenant ces annonces pour contraires à l'art. 13 litt. h LCD, Arts
Ménagers SA, à Genève, a porté plainte.

    B.- Estimant l'art. 13 LCD inapplicable, le juge informateur de
l'arrondissement de Lausanne a refusé, le 1er novembre 1968, de donner
suite à la plainte.

    Le Tribunal d'accusation du canton de Vaud a rejeté, le 11 décembre,
un recours de la plaignante.

    C.- Contre cet arrêt, le Procureur général et Arts Ménagers SA
se pourvoient en nullité au Tribunal fédéral. Ils soutiennent que les
annonces incriminées tombent sous le coup de l'art. 13 LCD.

    D.- Rediffusion Lausanne SA et Télévision SA pour installations de
réception, à Lausanne, concluent au rejet du pourvoi.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Ayant constaté que Rediffusion SA et Télévision SA avaient la même
adresse, le même numéro de téléphone et que les contrats dits d'abonnement
portant sur les téléviseurs Philips 23 T 650 étaient conclus entre le
client, d'une part, et Télévision SA, d'autre part, Arts Ménagers SA a
précisé que sa plainte visait ces deux entreprises, à moins qu'elles ne
forment une seule et même maison.

    Bien que les pourvois aient été communiqués uniquement à Rediffusion
SA, seule mentionnée dans l'arrêt attaqué, la réponse émane à la fois
de Rediffusion Lausanne SA et de Télévision SA pour installations de
réception. Elle ne donne aucun renseignement sur les liens existant entre
les deux entreprises. Comme la plainte mentionnait également Télévision
SA, il n'y a aucune raison de ne pas tenir cette dernière pour cointimée.

Erwägung 2

    2.- Dans son pourvoi en nullité, la recourante allègue que les intimées
auraient transgressé non seulement la lettre h, mais aussi la lettre b de
l'art. 13 LCD. La cour de céans ne peut se saisir de cette question, que
ne mentionnaient ni la plainte, ni le recours déposé devant le Tribunal
d'accusation vaudois et que l'arrêt entrepris ne traite pas non plus.

Erwägung 3

    3.- La plaignante a produit un "contrat d'abonnement" conclu le
5 septembre 1968 entre Télévision SA et Claude Golay. Il a trait à un
téléviseur Philips 23 T 650. Il est libellé sur une formule imprimée. Les
intimées ne contestent pas que les amateurs de l'appareil décrit dans les
annonces incriminées sont invités à signer des contrats identiques. Ils
contiennent notamment les clauses suivantes:

    "1o La maison remet à l'abonné le téléviseur précité en location
(évent. avec pieds). Les objets loués restent propriété intégrale de la
maison. L'abonné s'engage à les manipuler avec soin...

    2o L'abonné s'engage à payer le 1er mois de son abonnement avec
taxe de service à la conclusion du contrat. En outre, toutes les taxes
convenues d'avance, jusqu'au 5 du mois au plus tard...

    3o La durée minimum de ce contrat est de 12 mois, à partir du mois qui
suit la conclusion du contrat. En cas de cassation avant ce délai, l'abonné
devra payer, en plus du reste des taxes d'abonnement pour la durée minimum,
les frais d'installation et de démontage s'élevant à 50 francs. A la fin
de la durée prescrite et à la fin de chaque mois suivant, le contrat peut
être résilié moyennant un mois d'avertissement par écrit. Les déménagements
hors du rayon de service, les décès, les longues maladies font exception.

    4o L'entretien du téléviseur incombe exclusivement à l'entreprise. Le
gros entretien (remplacement de pièces défectueuses, de lampes - y compris
les tubes coûteux) est couvert par la taxe d'abonnement. La taxe de
service couvre les frais de main-d'oeuvre, de transport du service des
dérangements pour la localisation des défectuosités, de travaux effectués
chez le client, dans le rayon urbain..."

    Au verso, sous la rubrique possibilités d'achat, les contrats
stipulent:

    "La résiliation du contrat d'abonnement en vue de l'achat au comptant
du téléviseur loué est possible à n'importe quel moment. En cas d'achat
au cours des 6 premiers mois d'abonnement, les taxes d'abonnement et de
service déjà payées seront déduites sur le prix de l'appareil. A partir
du 7e mois, avec imputation de 70% des taxes d'abonnement déjà payées."

    Le contrat ainsi résumé, qui assure à l'abonné l'usage d'un téléviseur
moyennant paiement d'une redevance mensuelle et lui confère un droit
d'emption qu'il peut exercer en tout temps, se caractérise comme un
contrat de location-vente (RO 86 IV 162).

Erwägung 4

    4.- Tout contrat de ce genre n'est pas régi par les art. 226 litt. a
à 1 CO. Ces dispositions s'appliquent seulement s'il vise les mêmes buts
économiques que la vente par acomptes (art. 226 m al. 1). Le message du
Conseil fédéral expose à ce sujet (FF 1960 I 583):

    "Si les intérêts des parties sont les mêmes qu'en matière de vente
à tempérament, les dispositions relatives à la vente par acomptes sont
applicables, qu'on ait voulu ou non éluder la loi. Il y a vente par
acomptes dans tous les cas où, d'après la volonté des parties, une chose
mobilière est remise, contre versement d'un prix payable par acomptes
à l'acheteur pour qu'il en dispose librement. Il en est ainsi surtout
pour le contrat de location-vente, où, généralement, ni le vendeur ni
l'acheteur n'ont un intérêt économique à la remise de la chose pour le
simple usage. Il serait en effet désavantageux pour l'acheteur de devoir
rendre la chose après avoir payé un loyer élevé, et le vendeur a pour sa
part intérêt à ce que l'acheteur exécute le contrat et conserve la chose."

    Certains auteurs distinguent selon que les parties ont d'emblée la
volonté de vendre et d'acheter ou qu'un achat futur n'apparaît d'abord
que comme une simple possibilité; l'assimilation à une vente par acomptes
se justifierait seulement dans la première éventualité (SCHMUCKI, Der
Mietkaufvertrag, p. 79; GIGER, SJZ 1963 p. 197). D'après STOFER, lorsque
la durée de l'usage est fonction des besoins de l'acquéreur, le contrat
ne saurait être traité comme une vente à tempérament, même si un achat
ultérieur est envisagé. En revanche, dit le même auteur, lorsqu'il s'agit
de contrats caractérisés par un usage de longue durée, sans que l'acheteur
ait un intérêt particulier à cette durée, le contrat de location-vente tend
à devenir une vente à tempérament (Kommentar zum schweiz. Bundesgesetz über
den Abzahlungs- und Vorauszahlungsvertrag, p. 123). Le critère principal
réside toutefois dans le versement des mensualités combiné avec le temps
pendant lequel le bail ne peut être résilié (SCHMUCKI, p. 78, 79; STOFER,
p. 127). Selon ce dernier auteur (p. 124), lorsque le locataire est tenu
de prendre à bail une chose pour une période correspondant à un tiers,
à la moitié ou aux deux tiers du laps de temps nécessaire pour acquérir
la chose, le vendeur compte que l'acheteur, très vraisemblablement,
ne rendra plus la chose. Dans le supplément au même ouvrage, il relève
que les tribunaux tiennent actuellement presque toujours pour une vente
par acomptes un contrat que le locataire ne peut dénoncer qu'après avoir
payé deux tiers du prix total, soit une somme qui atteint ou approche le
prix de l'achat au comptant. Dans ces conditions, dit-il, les contrats
proposés fixent fréquemment à la moitié ou au tiers du prix le total des
acomptes qui devront être payés en tout cas; on s'accommode alors d'un
nombre accru de dénonciations, qui, dans la plupart des cas, proviennent
de ce que les gens sont à court.

    En l'espèce, l'abonné ne peut résilier le contrat avant douze
mois. A cette échéance, il aura payé douze mensualités, c'est-à-dire -
non compris la taxe de service - 393 fr. 60 (12 x 32.80), soit plus du
tiers de la valeur de l'appareil. Le tiers de 1148 fr. représente en
effet 382 fr. 66. Certes, s'il décide alors d'acheter le téléviseur, ce
ne sont pas 393 fr. 60 qui seront imputés sur le prix, mais seulement 70%
de cette somme, soit 275 fr. 40. Cependant l'abonné est surtout sensible
au sacrifice pécuniaire déjà consenti; il trouvera peu avantageux de rendre
l'appareil après avoir dépensé près de 400 fr. Les sommes déjà déboursées
le pousseront, sinon à acheter l'appareil durant le treizième mois, du
moins à prolonger le bail. Plus nombreuses seront les mensualités qu'il
continuera de verser, plus augmentera la proportion entre les sommes payées
et le prix du téléviseur et plus s'affermira sa décision de l'acheter.

    C'est d'ailleurs précisément sur quoi comptent les intimées. La
fixation d'un bail aussi long (sauf le cas de décès, de longues maladies et
de déménagement hors du rayon de service) ne s'explique guère autrement.
Manifestement, on a fixé la durée de l'engagement à douze mois pour
exclure la résiliation du contrat pendant la période où elle pourrait
présenter de l'intérêt pour l'abonné (SCHMUCKI, p. 78 n. 3).

    Les intimées allèguent qu'avant d'acheter un téléviseur, bien des gens
désirent moins expérimenter la qualité technique d'une marque déterminée
qu'apprécier l'intérêt des programmes et les incidences de la présence
d'un appareil sur leur vie sociale et familiale. Une telle appréciation
exige assurément un certain temps. Mais la vente à l'essai s'y prête
parfaitement (SCHMUCKI, p. 35-37; STOFER, supplément, p. 62). L'examen
de l'acheteur peut en effet porter aussi bien sur les éléments indiqués
dans la réponse au pourvoi que sur la qualité du téléviseur. Cette espèce
de vente n'expose pas le vendeur àplus de risques que la location vente
puisque, tant que la chose n'est pas agréée, il en reste propriétaire,
même si elle est passée en la possession de l'acheteur (art. 223 al. 2 CO).

    De ce qui précède, il suit que le contrat d'abonnement élaboré et
utilisé par les intimées vise les mêmes buts économiques qu'une vente
par acomptes et qu'il tend à éluder les dispositions protectrices des
art. 226 a à 1 CO.

    En ne considérant un contrat de location comme vente par acomptes
que lorsque le locataire a déjà versé, au moment où la résiliation est
possible, l'entier ou la majeure partie du prix de vente, le Tribunal
d'accusation restreint à l'excès la portée de l'art. 226 m al. 1 CO. A
son avis, quand un locataire peut se départir du contrat, après un usage
d'une année, en ayant payé une somme inférieure au tiers du prix de vente
de l'objet loué, son droit de résiliation n'est pas purement théorique
et dénué d'intérêt. Il n'est pas nécessaire d'examiner cette hypothèse,
puisque, en l'occurrence, les douze premières mensualités dépassent le
tiers du prix de vente.

Erwägung 5

    5.- Il s'ensuit que, contrairement à l'opinion des premiers juges,
on est en présence d'annonces en matière de ventes par acomptes. Les
juridictions vaudoises n'ont pas recherché si les autres éléments
de l'infraction définie à l'art. 13 litt. h LCD étaient réunis. Il
n'appartient pas à la cour de céans d'anticiper cet examen. Il lui suffit
de constater que, tel qu'il est motivé, l'arrêt entrepris viole le droit
fédéral.

Entscheid:

Par ces motifs, la Cour de cassation pénale:

    Admet les pourvois, annule l'arrêt attaqué et renvoie la cause à
l'autorité cantonale pour nouvelle décision.