Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 93 II 311



93 II 311

43. Arrêt de la Ire Cour civile du 3 octobre 1967 dans la cause Gendre
SA contre Jaeger et Ratzé. Regeste

    Art. 51, 328, 368, 398 OR.

    1.  Konkurrierende Schadenersatzklagen des Bauherrn gegen den
Architekten und den Unternehmer wegen mangelhafter Ausführung des Bauwerkes
(Erw. 1).

    2.  Haftung des mit der Ausarbeitung der Pläne und der Bauleitung
beauftragten Architekten für einen Konstruktionsfehler des Werkes (wegen
ungenügender Schräge undichtes Dach) (Erw. 2).

    3.  Haftung des mit den Dachdeckerarbeiten beauftragten Unternehmers?
Tragweite der Vertragsbestimmung, wonach der Unternehmer die Garantie
"für absolute Undurchlässigkeit des Dachbelages" übernimmt. Anwendung
der kaufrechtlichen Vorschriften über die Haftung für zugesicherte
Eigenschaften auf den Werkvertrag (Erw. 3).

Sachverhalt

    A.- En 1958, l'entreprise Gendre SA, qui exploite un garage à
Fribourg, a chargé l'architecte Jacques Jaeger de construire des bâtiments
industriels à Villars-sur-Glâne.

    Par contrat du 28 juillet 1958, Jaeger, agissant au nom de Gendre SA,
a confié à l'entrepreneur Robert Ratzé l'exécution de la couverture en
éternit des ateliers et des bureaux. Ce contrat a été contresigné par
Gendre SA Il contient une clause aux termes de laquelle "l'entrepreneur
garantit l'absolue étanchéité de la couverture".

    Les travaux de couverture ont été exécutés à la fin de l'année
1958. Dès le début de l'année 1963, l'étanchéité de la couverture s'est
révélée déficiente: l'eau s'est infiltrée dans les bureaux et les ateliers,
provoquant des inondations. Gendre SA a fait procéder par un tiers au
remplacement d'une partie de la toiture et à la réfection des locaux
inondés. Les inondations ont aussi gêné le travail dans l'entreprise.

    B.- Par demande du 2 mai 1964, Gendre SA a introduit devant le
Tribunal civil de l'arrondissement de la Sarine une action tendant à faire
condamner solidairement Jaeger et Ratzé au paiement d'une indemnité de
69 746 fr. avec intérêts à 5% dès le 1er février 1963.

    Ratzé et Jaeger ont conclu chacun à libération des fins de la
demande. Ils contestaient leur responsabilité.

    Confirmant le jugement de première instance rendu le 7 juillet 1966, la
Cour d'appel du Tribunal cantonal fribourgeois, par arrêt du 20 mars 1967,
a rejeté les conclusions prises par Gendre SA contre Ratzé et admis les
conclusions de la demanderesse dirigées contre Jaeger, en les réduisant
toutefois à 41 054 fr. 30 avec intérêts à 5% dès le 14 janvier 1964. Le
capital alloué correspond au dommage causé par les inondations.

    La cour cantonale a considéré que le défaut d'étanchéité provenait
d'une inclinaison insuffisante du toit. Il n'avait pas été causé par
une exécution défectueuse des travaux, mais par une erreur dans la
conception de l'ouvrage. La responsabilité en incombait dès lors à
l'architecte, qui ne saurait exciper de la clause de garantie souscrite
par l'entrepreneur. Il avait en effet imposé à celui-ci un mode de
couverture qu'il ne connaissait pas. Et Ratzé avait exécuté les travaux
avec beaucoup de soin, se conformant exactement aux plans de l'architecte
et aux instructions de la maison Eternit.

    C.- Contre cet arrêt, deux recours en réforme ont été interjetés par
Jaeger, d'une part, et par Gendre SA, d'autre part. Le premier persiste
à conclure à libération des fins de la demande dirigée contre lui. La
seconde conclut à la réforme en ce sens que Ratzé soit condamné à lui
payer, solidairement avec Jaeger, la somme de 41 054 fr. 30 représentant
le dommage arrêté par la juridiction cantonale, avec intérêt à 5% dès le
14 janvier 1964. Elle expose qu'il lui est indifférent que le préjudice
soit réparé par l'un ou l'autre des défendeurs. Mais elle craint, si Ratzé
est mis hors de cause, de perdre tous ses droits contre lui, au cas où
Jaeger serait libéré de toute responsabilité à la suite de l'admission
de son propre recours.

    D.- Chacun des deux intimés Jaeger et Ratzé conclut au rejet du recours
formé contre lui par Gendre SA Celle-ci conclut au rejet du recours formé
contre elle par Jaeger.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Gendre SA a réuni dans un seul procès deux actions distinctes
contre deux défendeurs - l'architecte Jaeger et l'entrepreneur Ratzé
- qui répondent concurremment du même dommage, en vertu de l'art. 51
CO. Mais la responsabilité de chacun d'eux est indépendante de celle de
l'autre et les conditions d'une solidarité passive au sens des art. 143
ss. CO ne sont pas réunies. Il est vrai que chacun des défendeurs a un
intérêt juridique à la condamnation de son consort. Toutefois, aucun des
deux n'a conclu à ce que l'autre fût condamné à réparer le dommage subi
par la demanderesse, ni pris de conclusions tendant à se faire relever
des suites d'une condamnation éventuelle. La cour de céans n'est donc pas
appelée à statuer sur l'action récursoire que l'un des défendeurs pourrait
exercer, le cas échéant, en invoquant l'art. 51 CO. Elle doit se borner à
examiner successivement la responsabilité de Jaeger, puis celle de Ratzé,
à l'égard de Gendre SA

Erwägung 2

    2.- En sa qualité d'architecte chargé non seulement d'établir les
plans, mais aussi de diriger les travaux, Jaeger était lié à Gendre SA
par un contrat de mandat (RO 63 II 176, 64 II 10, 89 II 406). Il était
tenu d'exécuter avec soin les prestations promises et il répond d'une
bonne et fidèle exécution du mandat (art. 398 et 328 CO).

    a) Pour ce qui a trait aux plans de la construction, Jaeger a
commis une erreur dans la conception de la toiture. La cour cantonale a
constaté souverainement que cette erreur était la cause du dommage. Elle
a relevé également que le recourant devait connaître, par sa profession
d'architecte, les inconvénients des toits à faible pente. Il ne pouvait pas
ignorer non plus les conditions dans lesquelles le matériau choisi devait
être utilisé. L'éternit se trouve en effet depuis de nombreuses années
sur le marché. Dans la mesure où l'appréciation des juges fribourgeois
serait fondée sur l'expérience générale et ne lierait donc pas le Tribunal
fédéral, elle ne peut qu'être confirmée. L'architecte qui propose un
mode de construction déterminé doit en faire un emploi qui soit conforme
aux règles de l'art et garantisse le résultat recherché, en l'espèce
l'étanchéité de la couverture. S'il ne satisfait pas à cette exigence,
il commet une faute et engage sa responsabilité.

    Sans doute la construction d'un bâtiment peut-elle présenter des
difficultés techniques dont la solution requiert des connaissances
spéciales que l'architecte ne possède pas lui-même. Il doit alors se
renseigner auprès de spécialistes et suivre leurs avis. En l'espèce, Jaeger
s'est borné à prendre contact avec la maison Eternit, dont le siège central
est à Niederurnen, par l'intermédiaire d'un tiers, Sonder. S'il estimait
l'avis du fabricant nécessaire, il devait lui exposer personnellement
le problème à résoudre. Peu importe que l'établissement de Payerne de la
maison Eternit ait accepté sa commande sans réserve et n'ait pas formulé
d'objection à ses plans. Le vendeur qui accepte de livrer un matériau
n'assume pas la responsabilité d'un entrepreneur à l'égard de l'auteur
de la commande. Du reste, la cour cantonale relève que Jaeger a reconnu,
lors de son interrogatoire, qu'il n'avait pas reçu de la maison Eternit
d'autre garantie que la lettre adressée à Sonder. Or il n'a tenu aucun
compte de la recommandation instante faite dans cette lettre au sujet
de la pente du toit. Les juges du fait ont constaté que ce manquement
était à l'origine du dommage.

    b) Dans son recours, Jaeger prétend que la clause de garantie
souscrite par Ratzé le dégage de toute responsabilité. Il perd de vue que
cette clause concerne les rapports juridiques entre l'entrepreneur et le
maître de l'ouvrage, mais ne saurait produire aucun effet à l'égard de
l'architecte, qui n'est pas partie au contrat passé avec l'entrepreneur.
Assurément, il incombe à l'architecte qui établit les contrats avec les
maîtres d'état de rédiger ces actes de telle façon que les engagements des
entrepreneurs garantissent au maître de l'ouvrage une exécution convenable
des travaux et, à ce défaut, sauvegardent efficacement ses intérêts. Mais
cela n'épuise pas les obligations de l'architecte envers son mandant. Il
est tenu, au premier chef, d'établir des plans qui procèdent d'une
conception de l'ouvrage conforme aux règles de l'art. Si les plans sont
défectueux, l'architecte encourt une responsabilité dont il ne saurait
se libérer par une garantie que l'entrepreneur aurait assumée. Si elle
est valide, une pareille garantie s'ajoute à celle que l'architecte doit
fournir en vertu du mandat qu'il accepte.

    Jaeger devait procurer à Gendre SA une couverture étanche. Il n'a
pas exécuté cette obligation. Il répond dès lors du dommage résultant de
l'inexécution, sans qu'il puisse se disculper en invoquant la prétendue
responsabilité de l'entrepreneur Ratzé ou du fournisseur de matériau,
la maison Eternit. Le recours en réforme de Jaeger est dès lors mal fondé.

Erwägung 3

    3.- Gendre SA critique l'arrêt cantonal dans la mesure où il libère de
toute responsabilité l'entrepreneur Ratzé. Elle explique dans ses motifs
qu'elle recourt afin de parer à l'éventualité où, le recours de Jaeger
étant admis, celui-ci serait libéré de toute responsabilité. Néanmoins,
elle a pris des conclusions qui ne sont assorties d'aucune réserve ni
condition. Aussi faut-il entrer en matière, quoique le recours de Jaeger
soit rejeté.

    a) Selon l'art. 368 CO, l'entrepreneur répond, même en l'absence de
faute, de la bienfacture de l'ouvrage. Sa responsabilité est sanctionnée
par le droit du maître de refuser l'ouvrage défectueux, ou de réduire
le prix, ou encore d'exiger la réfection par l'entrepreneur. S'il a
commis une faute, l'entrepreneur peut être astreint à payer de pleins
dommages-intérêts. Conformément à la règle de l'art. 97 CO, il doit prouver
qu'aucune faute ne lui est imputable (RO 70 II 219; OSER/SCHÖNENBERGER,
n. 11 ss. ad art. 368 CO). Assigné en paiement de dommages-intérêts,
Ratzé pouvait se libérer en rapportant cette preuve.

    Selon les constatations de l'arrêt attaqué, l'entrepreneur Ratzé a
exécuté les travaux avec beaucoup de soin; il s'est conformé exactement
aux plans dressés par l'architecte et aux instructions de la maison
Eternit. La cour cantonale en déduit avec raison qu'on ne saurait dès
lors retenir aucune faute à sa charge dans l'exécution de la couverture
du bâtiment. Quant à la matière fournie, l'une des expertises a certes
révélé que le mastic n'était pas un matériau approprié, en raison de sa
tendance à la dessication. Mais les juges du fait ont constaté que cet
inconvénient n'était pas en relation de cause à effet avec le dommage.

    L'art. 365 al. 3 CO oblige assurément l'entrepreneur à signaler au
maître les faits de nature à compromettre l'exécution de l'ouvrage. On
ne peut toutefois reprocher à Ratzé de n'avoir pas attiré l'attention de
Gendre SA ou de son mandataire, l'architecte Jaeger, sur l'insuffisance de
la pente donnée à la toiture. L'arrêt déféré constate en effet que le mode
de couverture, imposé par l'architecte, était inconnu de l'entrepreneur,
auquel un monteur de la maison Eternit a indiqué la manière de poser
les plaques. Or un artisan local ne manque pas à la diligence que l'on
peut attendre de lui s'il ne perçoit pas un défaut dont il pouvait
raisonnablement penser que soit l'architecte, soit le spécialiste de la
maison Eternit étaient mieux à même de le déceler que lui.

    b) Ratzé a librement souscrit une clause qui garantit formellement
"l'absolue étanchéité de la couverture". Cette clause figure dans les
"conditions spéciales" de la formule d'adjudication et n'a donc pas pu
échapper au signataire. La portée d'une disposition conventionnelle par
laquelle un entrepreneur garantit que l'ouvrage présentera des qualités
déterminées est semblable à celle d'un vendeur qui attribuerait à la
chose vendue des "qualités promises" au sens de l'art. 197 CO (cf. RO
42 II 632, où le Tribunal fédéral examine une clause de garantie en
laissant indécise la qualification du contrat comme vente ou contrat
d'entreprise). Les règles sur la garantie pour les défauts en matière de
contrat d'entreprise présentent en effet une grande analogie avec celles
de la vente (OSER/SCHÖNENBERGER, n. 1 ad art. 368 CO).

    La souscription d'une pareille clause améliore la position
juridique de l'acheteur, respectivement du maître, par rapport à la
réglementation légale, en ce sens que le vendeur s'oblige à exécuter
en nature l'obligation dérivant de la qualité promise (RO 91 II 348,
consid. 2). En matière de vente, la loi ne confère pas à l'acheteur un
droit à l'exécution en nature (cf. art. 205 et 208 CO). Pour le contrat
d'entreprise, l'art. 368 CO subordonne la réfection par l'entrepreneur
à la condition qu'elle soit possible sans frais excessifs. En assumant
la garantie contractuelle de "l'absolue étanchéité de la couverture",
Ratzé s'est obligé à exécuter les travaux de réfection qu'impliquerait
un défaut d'étanchéité.

    Mais l'obligation de réparer ne vaut que dans les conditions fixées par
la réglementation légale (art. 368 et 97 CO). Pour la vente, l'art. 197 CO
met en effet sur le même pied les qualités promises et la garantie légale
en raison des défauts. Cette solution doit être adoptée pour le contrat
d'entreprise. Tel est d'ailleurs le sens qu'un profane donnerait à la
clause en question, qui institue une responsabilité fondée en dernier
ressort sur les règles de la bonne foi et doit s'interpréter selon ces
mêmes règles (RO 73 II 220 s., consid. 1 et 1a).

    L'obligation fondée sur la clause de garantie est donc limitée à
l'exécution en nature de l'ouvrage présentant la qualité promise. Point
n'est besoin de décider si la garantie donnée en l'espèce, qui visait
essentiellement la couverture en éternit, c'est-à-dire le matériau
couvrant la surface du toit, s'étendait à l'ensemble de la toiture,
en particulier aux défauts résultant non de l'exécution des travaux
de couverture proprements dits, mais de l'inclinaison du toit. De
toute manière, Ratzé n'a jamais été mis en demeure par Gendre SA de
réparer l'ouvrage défectueux. La réfection de la toiture a été confiée
à un autre entrepreneur. Le maître ne saurait dès lors lui réclamer
des dommages-intérêts compensatoires pour inexécution d'une pareille
obligation de faire (cf. RO 91 II 350, consid. 3). Il a introduit une
action en dommages-intérêts fondée sur les défauts du toit qui n'était
pas étanche. Or, comme on l'a relevé plus haut, Ratzé n'a pas commis de
faute et partant ne répond pas du dommage consécutif à l'absence de la
qualité promise.

Entscheid:

Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Rejette les deux recours et confirme l'arrêt rendu le 20 mars 1967
par la Cour d'appel du Tribunal cantonal fribourgeois.