Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 92 I 126



92 I 126

23. Arrêt du 13 mai 1966 dans la cause Touring Club Suisse contre
l'Administration fédérale des contributions. Regeste

    Stempelabgabe auf Quittungen für Versicherungsprämien. Art.  42 StG.

    1.  Begriff der Versicherung im Sinne des StG. Das Rechtsgeschäft
braucht nicht selbständigen Charakter zu haben. Ist Planmässigkeit
des Geschäftsbetriebs, d.h. Prämienberechnung nach dem Gesetz der
grossen Zahl erforderlich? (Erw. 2). Wann kann eine Dienstleistung eine
Versicherungsleistung darstellen? (Erw. 5).

    2.  Das "Livret d'entraide internationale" des Touring Club Suisse gibt
Anspruch auf verschiedene Leistungen, von denen einzelne Geldleistungen,
andere Dienstleistungen sind. Die letzteren haben im Verhältnis zu den
ersteren nebensächlichen Charakter. Die einen wie die anderen stellen daher
Versicherungsleistungen dar, sofern die übrigen Merkmale der Versicherung
vorliegen (Erw. 3, 4 und 5).

Sachverhalt

    A.- Le Touring Club Suisse (TCS) est une association qui a pour but le
développement du tourisme et la sauvegarde des intérêts de la circulation
routière. Dès 1958, il délivre à ses membres, sur demande et moyennant
finance, des "livrets d'entraide internationale" (dits "livrets ETI"). Le
contenu de ce livret a été complété à diverses reprises et, dans une
certaine mesure, son prix augmenté à l'avenant. Il se vend actuellement
10 fr. (livret "standard"). Depuis 1964, un livret d'un type nouveau a
été créé, au prix de 20 fr. (livret "super"). La validité du livret est
d'un an, à courir dès la délivrance du document. D'autre part, il n'est
valable qu'à l'étranger.

    Le livret "standard" délivré en 1965 au prix de 10 fr. donne droit
aux prestations suivantes:

    1. 5 lettres de crédit, dont 2 de 50 fr., 2 de 100 fr. et 1 de
200 fr. La lettre de crédit est valable uniquement pour le paiement
de réparations ou remorquages ensuite d'accident ou de panne, de frais
médicaux ou de frais d'hôpital ensuite d'accident ou de maladie grave
subite, d'honoraires d'avocats à la suite d'un accident, de frais
d'expertise technique.

    2. Un bon de dépannage: lorsque l'aide d'une patrouille routière
n'a pu être obtenue, le TCS prend à sa charge jusqu'à concurrence de 50
fr. les frais de remorquage jusqu'au garage le plus proche ou les frais
de déplacement et d'intervention d'un garagiste au lieu de la panne,
et retour.

    3. Un bon pour l'envoi de pièces de rechange: si par suite de
panne ou d'accident, il n'est pas possible d'obtenir les pièces de
rechange nécessaires à la réparation du véhicule, le TCS les acheminera
le plus rapidement possible contre envoi de ce bon. Le TCS se charge
des frais d'expédition, d'établissement du document douanier et autres
formalités. Par contre, le porteur du livret s'engage à rembourser le
prix desdites pièces au TCS, à son retour en Suisse.

    4. Un bon de rapatriement du véhicule: si, par suite d'accident ou
de panne grave à l'étranger, le véhicule n'est plus en état de circuler
et s'il ne peut être réparé sur place dans un délai raisonnable, le TCS
se charge des frais de transport du véhicule par chemins de fer.

    5. Un bon de rapatriement du véhicule et des occupants: si le
chauffeur n'est plus en état de ramener son véhicule par suite de maladie
ou d'accident, le TCS fera rapatrier celui-ci par un de ses patrouilleurs
et à ses frais.

    6. Un bon pour le paiement des droits de douane en cas de vol ou de
destruction du véhicule à l'étranger, le TCS prenant à sa charge, selon son
règlement, les droits de douane réclamés par une administration étrangère.

    7. Un bon d'assistance juridique à l'étranger: en vertu d'une entente
entre les clubs membres de l'AIT (association faîtière qui groupe les
Touring Club du monde entier), le club du pays en question accorde
une première assistance juridique gratuite, sous forme de consultation
juridique à propos de toute question litigieuse se rapportant à l'emploi
du véhicule ou au tourisme; de soutien, particulièrement à l'égard des
compagnies d'assurance, des garagistes et des hôteliers en vue d'une
éventuelle entente amiable; exceptionnellement de représentation devant un
tribunal, dans certains cas de contravention à des règlements de police,
auquel cas les frais assumés par le club ne peuvent dépasser 100 fr.;
enfin, dans les cas d'urgence, de garantie des honoraires d'avocat jusqu'à
concurrence de 200 fr.

    8. Un bon pour une consultation technique à l'étranger: si, ayant
fait réparer son véhicule à l'étranger, le porteur du livret a des doutes
sérieux sur la qualité ou la facturation des travaux ou des fournitures,
il peut s'adresser au club du pays visité pour obtenir une expertise
gratuite par son service technique. Selon les cas, le club se bornera à
indiquer l'adresse d'un expert agréé; le porteur du livret demeure alors
chargé des frais d'expertise, mais, à son retour, il peut obtenir du TCS
remboursement à concurrence de 30 fr.

    9. Un bon d'indemnisation pour les dommages causés par le gibier;
l'indemnité est versée par un fonds de solidarité que le TCS a constitué
à cet effet.

    10-13. Bons permettant de conclure une assurance supplémentaire
d'assistance juridique, une assurance supplémentaire casco-vacances, une
assurance contre les accidents de voyage et une assurance pour les bagages;
ces contrats sont passés avec des compagnies d'assurance déterminées,
moyennant paiement d'une prime spéciale fort modique.

    Le livret ETI "super" donne droit à des prestations qui, pour certaines
d'entre elles, ont été substantiellement améliorées. C'est ainsi que,
dans le bon 2, la participation aux frais de remorquage est portée
à 100 fr. et que le bon 4 donne droit au remboursement non seulement
des frais de transport du véhicule par chemins de fer, mais encore des
frais d'intervention des maisons de transit ou de transport et de leurs
correspondants. Mais surtout, le bon 7 ("assistance juridique étendue")
constitue désormais une véritable assurance-frais de procès, jusqu'à
concurrence de 10 000 fr. Enfin, le bon 10 donne droit au remboursement des
billets de chemins de fer, jusqu'à concurrence de 200 fr., éventuellement
de 500 fr. si un ou plusieurs des occupants du véhicule accidenté ont dû
être transportés en ambulance; il est précisé que ces versements ont lieu
"à bien plaire".

    B.- L'Administration fédérale des contributions (AFC) considéra
que la finance exigée pour l'un et l'autre livret constituait une prime
d'assurance, au sens de l'art. 42 LT.

    Le TCS s'insurgea contre cette prétention. Le 30 juin 1965, l'AFC
prit une décision formelle, soumettant au droit de timbre sur les primes
d'assurance (art. 42 LT) la finance perçue par le TCS pour les livrets
ETI et obligeant le TCS à présenter un décompte périodique des droits
de timbre échus (art. 79 OT), ceux-ci étant calculés au taux de 1% des
montants perçus, à compter du 1er janvier 1963; enfin, les droits de timbre
échus en 1963 et 1964 devaient être payés dans le délai de trente jours.

    C.- Contre cette décision, le TCS a formé le présent recours de
droit administratif. Il fait valoir essentiellement, d'une part, que
les prestations qu'il fournit de la sorte ne sont pas des prestations
d'assurance, mais des prestations sociales, qu'il délivre à ses membres
comme tels; et d'autre part que les prestations fournies sont pour
l'essentiel des prestations de services, qu'elles ne sauraient donc
constituer des prestations d'assurance.

    D.- L'AFC a conclu au rejet du recours. Tout en admettant que
certaines des prestations fournies ne sauraient être considérées comme
des prestations d'assurance, elle affirme que ce caractère ne saurait
être dénié aux autres prestations. Elle soutient que la finance perçue
pour le livret ETI ne saurait être considérée comme une cotisation,
vu, d'une part, que seuls ceux des membres qui paient cette finance
bénéficient des avantages procurés par ce document et que, d'autre part,
le prix du livret est fixé non pas par l'assemblée des délégués (comme
c'est le cas, en vertu des statuts, pour la cotisation proprement dite),
mais par le conseil d'administration du TCS. L'AFC s'efforce en outre
de démontrer que les autres éléments de l'assurance sont réunis. Enfin,
elle fait valoir qu'il y aurait inégalité de traitement à ne pas percevoir
le droit de timbre d'une entreprise quelle qu'elle soit dès lors que sont
réunies les conditions de son assujettissement.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Le présent recours est dirigé contre une décision de l'AFC
portant sur un impôt fédéral (art. 97 al. 2 OJ). Le recourant était
intéressé comme partie à la décision attaquée (art. 103 al. 1 OJ) et il
soutient que celle-ci a été prise en violation du droit fédéral, dans
le cas particulier l'art. 42 de la loi fédérale sur les droits de timbre
(LT). Il échet donc d'entrer en matière sur ce recours.

Erwägung 2

    2.- Selon l'art. 42 LT, "sont soumises au droit de timbre les
quittances de paiement de primes, de contributions, de versements
supplémentaires et de répartitions pour assurances (quittances de
primes) en tant que le paiement des primes a lieu comme rétribution pour
l'engagement d'assurance soit pris vis-à-vis de personnes qui ont leur
domicile en Suisse, ou y séjournent d'une façon durable, soit concernant
des objets qui se trouvent en Suisse".

    Il n'est pas contesté que les porteurs de livrets ETI sont domiciliés
en Suisse. Par contre, le recourant se défend de pratiquer une activité
d'assurance en délivrant ce document à ceux de ses membres qui désirent
en faire l'acquisition.

    Ni la loi sur les droits de timbre, ni aucune des lois régissant les
assurances privées ne définissent la notion d'assurance. La jurisprudence
(cf. RO 74 I 180, qui renvoie à RO 71 I 279, et par là indirectement
à l'arrêt de principe RO 58 I 259) exige la réunion de cinq éléments:
le risque, la prestation de l'assureur, la prestation de l'assuré,
le caractère autonome de l'opération et la compensation des risques
conformément aux lois de la statistique ("Planmässigkeit").

    Encore la jurisprudence oppose-t-elle à cette notion stricte de
l'assurance une conception plus large (assurance lato sensu), qui ne fait
pas du caractère autonome de l'opération un élément essentiel. C'est
ainsi que l'arrêt RO 80 II 129 a décidé qu'un rapport d'assurance (au
sens large) pouvait ne pas découler d'un contrat distinct; qu'il pouvait
au contraire émaner d'un rapport de droit plus fondamental existant déjà
entre les parties, dont il constituait alors un élément patrimonial:
ainsi notamment le lien unissant une association à l'un de ses membres;
et que, dans ce cas, l'obligation d'assurance de l'association à l'égard
de son membre n'acquérait un caractère autonome (et corrélativement le
droit du membre de toucher les prestations d'assurance ne se constituait
en droit acquis distinct) que dès la réalisation du risque. Or la
LT s'est manifestement inspirée de cette notion large de l'assurance
(et seule importe ici la notion d'assurance au sens de la LT); c'est ce
qui résulte de l'art. 43; s'il en était autrement et que l'on tînt pour
indispensable la création du rapport d'assurance par un acte juridique
autonome, les exemptions statuées par cette disposition en faveur de
caisses d'assurance à structure corporative ou constituées sous forme
d'association seraient incompréhensibles.

    D'autre part, il est vrai que certains auteurs n'exigent pas la
compensation des risques conformément aux lois de la statistique
(cf. KOENIG, Schweizerisches Privatversicherungsrecht, 2. Aufl.,
p. 32). Mais cette question peut demeurer indécise; dans la présente
espèce en effet, comme on le montrera (cf. consid. 3 ci-dessous), cette
condition est en tout cas remplie.

    Il convient de rechercher en outre si l'opération conclue entre
le TCS et l'acquéreur d'un livret ETI présente les autres éléments
caractéristiques de l'assurance (existence d'un risque, prestation
de l'assuré, prestation de l'assureur). Peu importe à cet égard que
l'acquisition d'un livret ETI constitue ou non la conclusion d'un contrat
autonome: voulût-on même admettre avec le TCS que ce document ne confère
que des droits de nature corporative (affirmation qui est du reste
controuvée par de nombreux faits) que, comme on l'a montré, l'existence
d'une assurance au sens de la LT ne serait pas exclue pour autant.

Erwägung 3

    3.- Il n'est pas contesté que les livrets ETI sont délivrés moyennant
finance. Mais le recourant se refuse à voir une "prime" d'assurance
dans le prix payé par l'acquéreur de ce document. D'autre part, le
recourant conteste qu'il y ait compensation des risques selon les lois
de la statistique. Il convient d'examiner ces deux questions ensemble,
car elles sont étroitement liées.

    Contrairement à l'opinion du recourant, si l'assurance (au sens
de la LT) suppose la compensation des risques selon les lois de la
statistique, cela ne signifie pas que, pour satisfaire à cette condition,
son exploitation doit être régie par les principes des mathématiques
actuarielles. Il faut et il suffit que les recettes totales soient adaptées
aux dépenses totales, de telle manière que celles-là couvrent celles-ci,
en laissant une marge suffisante de sécurité. Or le mouvement des recettes
et des dépenses, tel qu'il résulte du tableau ci-après, montre que cette
condition est largement remplie dans le cas particulier:

    Année          Recettes       Dépenses

    1959           189 532>       334 935

    1960           306 971        136 603

    1961           545 290        196 833

    1962           642 508        642 508

    1963           659 181        247 642

    En délivrant les livrets ETI, le TCS prenait des engagements,
conditionnels il est vrai, pour plusieurs millions de francs. Il est
dès lors tout à fait invraisemblable qu'il ait procédé sans aucune
méthode et, en particulier, qu'il n'ait pas tiré profit des résultats
accumulés d'année en année. On doit admettre au contraire que les
adaptations successives du prix du livret, si elles correspondaient
à une amélioration des prestations, traduisaient précisément ce souci
d'adapter les recettes aux dépenses. Comme l'AFC le note avec raison,
le procès-verbal de la séance du bureau du conseil d'administration du
22 novembre 1963 contient à ce propos une phrase significative: "... Le
prix de Fr. 7.- laisse une marge si modeste qu'en cas de mauvaise année,
des pertes pourraient être subies". Dans ces conditions, l'exigence de
compensation des risques selon les lois de la statistique, telle que
définie ci-dessus, est manifestement remplie.

    Sans doute, le TCS objecte-t-il que les prestations de services
fournies au titre des livrets ETI (à ses propres membres mais surtout aux
membres de clubs étrangers, en contrepartie des prestations fournies par
ces derniers à ses membres porteurs de livrets) sont quasiment impossibles
à chiffrer. On peut penser cependant que la surcharge qui en résulte
pour les divers services du TCS et, partant, le surcroît de frais ne
sont pas extrêmement considérables. En tout cas, il eût appartenu au TCS
d'établir le contraire. Si les insuffisances de sa comptabilité et de son
matériel statistique tournent à son détriment, il ne doit s'en prendre
qu'à lui-même.

Erwägung 4

    4.- L'existence d'un risque ne saurait être contestée, contrairement à
l'opinion du recourant, qui assimile à tort risque et accident. Il faut
entendre par là un événement dont la réalisation est à la fois possible
et incertaine (incertus an ou incertus quando) (cf. KISCH in MANES,
Versicherungslexikon, Berlin 1930, Vo Gefahr). Toutes les prestations
auxquelles le recourant s'engage en délivrant un livret ETI (même celles
qui ne présentent pas les autres caractères de l'assurance: par exemple les
lettres de crédit, cf. ci-dessous, consid. 5) dépendent manifestement de
la réalisation d'un tel événement: accident, panne, maladie grave. Qu'il
soit possible, voilà qui ne demande aucune explication. Mais qu'il soit
également incertain, c'est ce qui résulte à l'évidence des rapports publiés
par le conseil d'administration du TCS où l'on peut lire (cf. par exemple
Rapport sur l'exercice 1962, p. 16) que le TCS refuse les demandes de
rapatriement du véhicule même si elles émanent de sociétaires, lorsque
ceux-ci n'ont "pas jugé utile d'acquérir un livret ETI" avant leur
départ. Autrement dit, le TCS refuse de vendre un livret ETI à l'un de
ses membres lorsque celui-ci en était dépourvu au moment où il subit
l'un des événements qui lui donnerait droit aux prestations (ou à l'une
des prestations) fournies par ce document; du même coup, il reconnaît
l'importance essentielle qu'il attache au caractère incertain de ces
événements. On doit en conclure que la fourniture de ces prestations
dépend bien de la réalisation d'un risque, au sens ci-dessus défini.

Erwägung 5

    5.- Il faut déterminer en outre si les prestations fournies par
le livret ETI constituent des prestations d'assurance. Le recourant le
conteste également: à son avis, il s'agit principalement de prestations
de services et, tout à fait exceptionnellement, d'indemnisation. L'AFC
objecte que des prestations d'assurance peuvent également prendre la
forme de prestations de services. Cette question est controversée, mais,
dans le cas particulier, elle peut demeurer indécise; car même si l'on
n'admet pas la thèse de l'AFC sur ce point, il reste que, pour une part
prépondérante, les prestations fournies par le livret ETI constituent
des prestations d'assurance. C'est ce qu'il convient de démontrer, en
analysant d'abord chaque prestation pour elle-même, puis en considérant
ensuite l'ensemble des prestations fournies d'un point de vue global.

    a) Il est manifeste, tout d'abord, que certaines prestations procurées
par le livret ETI ne sont pas des prestations d'assurance. Tel est
le cas pour les lettres de crédit (bon no 1). Il en va de même pour
les bons nos 10-13 (livret "standard") ou 11-13 (livret "super"),
qui permettent simplement de conclure des contrats d'assurance à
des conditions particulièrement avantageuses. En outre, le bon no 9
(indemnisation pour les dommages causés par le gibier) ne procure pas non
plus une prestation d'assurance, les sommes versées de ce chef provenant
d'un fonds de solidarité et les porteurs de livrets n'ayant aucun droit
d'exiger cette indemnisation.

    D'autre part, certaines prestations sont manifestement des prestations
de services: ainsi l'envoi de pièces de rechange (bon no 3) et l'assistance
juridique simple (bon no 7 du livret "standard" et premier élément de la
prestation offerte par le bon no 7 du livret "super"). En ce qui concerne
tout d'abord l'envoi de pièces de rechange, il est essentiel de noter
que le porteur du livret s'engage à en rembourser le prix au TCS à son
retour en Suisse; la prestation du TCS consiste donc à titre principal
dans l'envoi de ces pièces, à titre secondaire dans l'avance du prix de
ce matériel; sans doute le TCS se charge-t-il définitivement des frais
d'expédition et fait-il, dans cette mesure, une prestation pécuniaire
au porteur du livret; mais ce qui compte pour celui-ci, c'est de pouvoir
se procurer des pièces de rechange qu'il ne pourrait trouver sur place;
tel est l'élément caractéristique de la prestation fournie en vertu du
bon no 3, qui doit dès lors s'analyser comme une prestation de services,
l'avance du prix et le paiement des frais d'expédition passant au second
plan. Pour ce qui est de l'assistance juridique simple, il est également
manifeste que l'essentiel, pour le porteur du livret, est de pouvoir
disposer des services d'un conseiller familiarisé avec les lois et les
usages du pays. La gratuité de ces services est secondaire. Il s'agit donc,
là encore, et sans conteste, d'une prestation de services.

    b) Dans d'autres cas, au contraire, la prestation fournie est
manifestement de nature pécuniaire et peut, en conséquence, être analysée
sans difficulté comme une prestation d'assurance.

    Il en est ainsi tout d'abord du bon dit (improprement) de dépannage
(n o 2). Sans doute le TCS a-t-il prétendu à maintes reprises que le
livret ETI donnait droit au premier chef à être dépanné par ses propres
patrouilleurs, et que le remboursement des frais de dépannage n'intervenait
qu'à titre subsidiaire. Mais cette thèse est juridiquement indéfendable. Il
est vrai que l'intitulé du bon no 2 prête à équivoque (bon de dépannage -
Gutschein für Pannenhilfe - Buono soccorso in caso di guasto meccanico);
mais son libellé ne peut laisser aucun doute. "Lorsque l'aide d'une
patrouille routière n'a pu être obtenue, le TCS prend à sa charge jusqu'à
concurrence de Fr. 50.- (Fr. 100.--) ..."; le TCS ne prend aucun engagement
juridique de faire intervenir ses patrouilleurs en pareil cas; à cet égard,
la comparaison entre le bon no 2 et le bon no 5 (rapatriement du véhicule
et de ses occupants) est éloquente: dans ce dernier cas et dans ce cas
seulement, le TCS prend l'obligation d'envoyer un patrouilleur; aussi bien
le porteur doit-il, s'il veut faire valoir le bon no 5, envoyer par exprès
au TCS la demande de rapatriement, et attendre le patrouilleur à l'adresse
indiquée; on ne trouve pas d'instructions semblables dans le bon no 2:
tout au contraire, le porteur doit se faire dépanner par un garagiste,
lui faire signer le bon et à son retour seulement le remettre au TCS. Sans
doute les frais de dépannage ne sont-ils remboursés que si "l'aide d'une
patrouille routière n'a pu être obtenue": mais ce n'est pas à dire que ce
bon donne droit à cette aide; cela signifie simplement que l'impossibilité
de l'obtenir est une condition du droit au remboursement. Or si le bon no 2
ne permet pas d'exiger l'intervention des patrouilleurs du TCS, on ne voit
pas par rapport à quoi le droit au remboursement des frais de dépannage,
conféré par ce même bon, serait juridiquement subsidiaire. A supposer même
- ce qui, du reste, est peu vraisemblable: cf. les chiffres cités lit. d
ci-dessous - que nombreux soient les cas où des porteurs de livrets ont
été dépannés à l'étranger par les patrouilleurs du TCS (hors le cas de
défaillance du conducteur), cette circonstance ne saurait influer sur
l'analyse juridique de la prestation fournie en vertu de ce bon.

    Il en va de même pour le bon de rapatriement du véhicule (no 4). Là
aussi, le TCS se borne, en principe, à rembourser au porteur du livret
les frais de transport par chemins de fer de son véhicule dès la mise
en wagon jusqu'à la gare du lieu de domicile (selon le livret "super",
en outre: les frais d'intervention des maisons de transit ou de transport,
et de leurs correspondants). En règle générale, toutes les démarches en vue
du rapatriement du véhicule incombent au porteur du livret lui-même, selon
les instructions formulées au verso dudit bon. Le TCS ne se charge de faire
rapatrier le véhicule que si le porteur est hors d'état d'entreprendre ces
démarches; cette prestation de services apparaît donc purement subsidiaire
et accessoire; le caractère pécuniaire de la prestation à quoi ce bon
donne droit est nettement prépondérant.

    Il n'est pas à démontrer que le bon pour le paiement des droits
de douane en cas de vol ou de destruction est une prestation de nature
purement pécuniaire. Il en va de même, dans le livret "super", pour le
bon donnant droit au remboursement de billets de chemins de fer. Enfin,
s'agissant toujours du livret "super", le bon pour une assistance juridique
étendue donne droit à une véritable prestation d'assurance contre les
frais de procès, puisque le TCS prend à sa charge, jusqu'à concurrence
de 10 000 fr., "les frais indispensables, tels qu'honoraires d'avocats,
coûts d'expertise, émoluments de justice, etc.: (l) pour faire aboutir
des réclamations de droit civil... le cas échéant en introduisant une
action (2) pour assurer la défense du bénéficiaire devant les tribunaux
pénaux ou les instances administratives...". Le recourant le reconnaît
d'ailleurs luimême: dans le second cas, et selon le texte exprès dudit bon,
il n'assume les frais de cette défense que si elle n'est pas "couverte
par une assurance ou prise en charge par l'assurance r.c. du véhicule".

    c) Enfin, dans les autres cas, la nature exacte de la prestation et,
partant, son aptitude à constituer une prestation d'assurance, apparaissent
plus délicates à déterminer.

    Il s'agit au premier chef du rapatriement du véhicule et de ses
occupants (bon no 5). Ce bon ne peut être utilisé que si un certain nombre
de conditions sont remplies; en particulier, il faut que le porteur
du livret, par suite de maladie ou d'accident, ne soit plus en état de
ramener son véhicule et ses passagers, qu'il n'y ait pas d'autre conducteur
muni d'un permis de conduire et que le véhicule soit en état de marche;
il faut en outre que le véhicule soit libre de tout séquestre ou droit
de rétention. Si toutes ces conditions sont remplies, le TCS délègue un
patrouilleur à l'adresse indiquée, qui rapatrie véhicule, occupants,
bagages et, le cas échéant, le chauffeur défaillant. Le TCS prend en
charge tous les frais du patrouilleur. Le porteur du livret garde à sa
charge tous les autres frais, notamment ceux du véhicule (essence).

    A n'en pas douter, l'élément caractéristique de cette prestation,
c'est la fourniture d'un chauffeur ("patrouilleur"). En cas de rapatriement
du véhicule et de ses occupants, le TCS ne se borne pas à rembourser au
porteur du livret tout ou partie des frais qu'il aurait dû engager pour
s'assurer les services d'une tierce personne; sa prestation ne consiste
pas non plus à passer contrat avec un tiers et à le rémunérer aux lieu
et place du porteur du livret: en pareil cas, on pourrait peut-être
encore admettre que la prestation pécuniaire (rémunération du chauffeur)
l'emporte sur la prestation en services (recherche d'un cocontractant,
conclusion du contrat). Mais il n'en est pas ainsi: bien au contraire,
le TCS fait intervenir ses propres services. On doit admettre dès lors que
la prestation fournie par le TCS en vertu du bon no 5 est une prestation
de services.

    Pour ce qui est ensuite du bon donnant droit à une consultation
technique (no 8), des hésitations sont également justifiées. Ce bon permet
au chauffeur qui, par suite d'accident ou de panne, a fait réparer son
véhicule à l'étranger et qui éprouve des doutes sérieux sur la qualité
ou la facturation des travaux ou des fournitures, d'obtenir une expertise
technique gratuite. Il doit s'adresser à cet effet au club correspondant
du TCS dans le pays visité, qui fera procéder à cette expertise par son
service technique. Si le porteur est trop éloigné de ce service ou si le
club en question n'en a pas, il se fera indiquer l'adresse d'un expert
agréé et lui fera faire le travail à ses frais; à son retour, le TCS le
remboursera jusqu'à concurrence de 30 fr. Dans ce dernier cas, certes,
on peut parler de prestation pécuniaire fournie par le TCS; mais celle-ci
n'est prévue qu'à titre purement secondaire et subsidiaire; l'élément
caractéristique de la prestation fournie par le bon no 8, c'est le droit
d'obtenir une expertise technique. Sans doute, l'expertise n'est-elle pas
fournie par les propres services du TCS, mais elle l'est néanmoins à titre
gratuit. On ne peut pas dire, cependant, que le TCS contracte avec un tiers
aux lieu et place du porteur. Le TCS et son correspondant à l'étranger
font partie de la même organisation faîtière internationale, l'AIT. En
vertu de cette commune appartenance et des accords entre clubs conclus
dans ce cadre, le TCS et son correspondant sont liés par des obligations de
réciprocité en ce qui concerne les prestations de services. On doit donc
admettre là encore qu'il s'agit essentiellement de prestations de services
que le TCS obtient pour ses membres à l'étranger de son correspondant,
sous réserve de réciprocité.

    d) Ainsi l'examen analytique du livret ETI fait apparaître que
ce document donne droit à des prestations de nature fort diverse. Si
l'on fait abstraction des bons nos 1 (lettres de crédit) et 10-13 (ou
11-13 dans le livret "super"; bons donnant droit à la conclusion de
contrats d'assurance avec des compagnies déterminées et à des conditions
spécialement avantageuses), il reste que le livret ETI procure à la fois
des prestations pécuniaires et des prestations en services. Il convient
maintenant de le considérer d'un point du vue global et de rechercher
lesquelles l'emportent des premières ou des secondes.

    A cet égard, les chiffres cités tant par le recourant lui-même
(dans les rapports annuels de son conseil d'administration et dans sa
lettre du 14 mars 1963) que par son conseil (en date du 14 janvier 1965)
sont éloquents. Les dépenses engagées par le TCS au titre des livrets
ETI pour les divers postes s'établissent comme il suit (selon les deux
lettres précitées; entre parenthèses, les chiffres tels qu'ils résultent
des rapports, dans la mesure où ils ne sont pas conformes aux indications
données par ailleurs soit par le recourant lui-même, soit par son conseil):
          1960    1961    1962    1963 Dépannage  33 800  30 603  50
          879,45       58 970,15
                          (34 320)

    Rapatriement du
   véhicule       73 500  141 337 152 627,09      188 845,76
                          (155 908)       (193 167)

    Rapatriement du
   véhicule et des occupants      2 529   4 238   280     négligeable
                  (4 283) (?)     (4 312,55)

    Droits de douane       -       -       négligeable     négligeable

    Assistance technique   -       -       négligeable     négligeable

    Assistance juridique   -       -               uniquement frais
                                  administratifs

    Il n'est pas sans intérêt non plus de comparer la fréquence respective
de mise à contribution des divers services du TCS. Selon les rapports
annuels du conseil d'administration, le TCS a reçu:
          1960    1961    1962    1963

    Demandes de remboursement de
   frais de dépannage     805     927     965     1063

    Demandes de remboursement de
   frais de rapatriement du véhicule      532     525     580     654

    Demandes de rapatriement du
   véhicule et des usagers        ?       21      18      19

    Il ressort à l'évidence de ce double tableau que les deux prestations
essentielles procurées par le livret ETI sont, d'une part, le remboursement
des frais de dépannage et, d'autre part, le remboursement des frais
de rapatriement du véhicule seul. Or il s'agit dans les deux cas de
prestations de nature pécuniaire, susceptibles, en conséquence, d'être
analysées sans difficulté comme des prestations d'assurance.

    Au contraire, le nombre des demandes de rapatriement du véhicule
avec ses occupants est si faible, tant en chiffres relatifs qu'en
chiffres absolus, qu'il ne peut s'agir manifestement que d'une prestation
accessoire. Quant aux autres prestations de services (envoi de pièces de
rechange, expertise technique, assistance juridique simple), si elles
ne sont pas négligeables, on ne saurait néanmoins leur reconnaître un
caractère prépondérant.

    Il en irait certes tout autrement si les droits conférés par le livret
ETI avaient pour effet principal de délivrer le conducteur d'automobile
de tous les désagréments que peuvent lui causer un accident, une panne,
ou une maladie survenus à l'étranger. Dans ce cas, sans doute, on pourrait
se demander si les prestations de services ne l'emportent pas largement
sur les prestations pécuniaires et si, bien plutôt que celles-ci, ce ne
sont pas celles-là qui déterminent le conducteur à faire l'acquisition
de ce document. Mais l'analyse des prestations procurées par ce document
montre qu'il n'en est rien. Le livret ETI ne confère à son porteur aucun
droit d'exiger le dépannage ou la réparation de son véhicule; si celui-ci
ne peut être remis en état sur place, c'est le porteur lui-même qui
doit accomplir toutes les démarches en vue du rapatriement. Sans doute
le livret donne-til droit à certaines prestations de services, mais dans
des hypothèses bien déterminées; comparées à ces prestations de services
fondamentales que seraient le dépannage ou le rapatriement du véhicule,
elles revêtent un caractère secondaire. Or le porteur n'a justement pas
droit à ces prestations fondamentales: le livret ne lui garantit que
le remboursement des frais de dépannage ou de rapatriement. Il faut en
conclure - et les chiffres le confirment - que ce sont ces prestations
pécuniaires qui constituent l'élément essentiel et caractéristique du
livret ETI, et que les prestations de services n'en sont que l'accessoire.

    Or la jurisprudence du Tribunal fédéral (RO 74 I 180 ss.) admet
parfaitement que des prestations de services puissent constituer
l'accessoire d'une prestation d'assurance. Dès lors, l'ensemble des
prestations procurées par le livret ETI (mis à part les lettres de
crédit, l'indemnisation pour dommages causés par le gibier et les bons
pour la conclusion d'autres assurances) doivent être considérées comme
des prestations d'assurance.

    Du même coup, il s'avère que sont réunis tous les éléments de
l'assurance au sens de la LT.

Entscheid:

             Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Rejette le recours.