Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 91 I 223



91 I 223

38. Arrêt du 2 avril 1965 dans la cause Compagnie du chemin de fer
Brigue-Viège-Zermatt SA contre Confédération Suisse et Chemins de fer
fédéraux. Regeste

    Klage auf Ersatz des Schadens, den eine private Eisenbahnunternehmung
infolge der Fahrlässigkeit eines auf Grund einer Vereinbarung über die
gemeinsame Benützung eines Bahnhofes mit der Abfertigung ihrer Züge
betrauten Bediensteten der SBB erlitten hat.

    1.  Zuständigkeit des Bundesgerichts (Erw. I, 1).

    2.  Die SBB allein sind passiv legitimiert (Erw. I, 2).

    3.  Ist die Vereinbarung über die gemeinsame Benützung des Bahnhofes
ein verwaltungsrechtlicher oder ein privatrechtlicher Vertrag? Frage
offen gelassen (Erw. II).

    4.  Gültigkeit einer solchen Vereinbarung im allgemeinen; Grundsatz
der Haftung der SBB für ihre Hilfspersonen (Art. 101 Abs. 1 OR) unter dem
Gesichtspunkt des Privatrechts und des öffentlichen Rechts (Erw. III, 1).

    5.  Auslegung einer die Haftung der SBB ausschliessenden Klausel der
Vereinbarung (Erw. III, 2, lit. a und b).

    6.  Gültigkeit dieser Klausel unter dem Gesichtspunkt des öffentlichen
Rechts und des Privatrechts (Erw. III, 2, lit. c), insbesondere im Hinblick
auf das VG und das EHG (Erw. IV).

    7.  Haften die SBB für den Schaden nach dem Privatrecht, gemäss
Art. 41 OR (Erw. V) und Art. 55 OR (Erw. VI)?

Sachverhalt

    A.- Par trois conventions successives, datées des 3 décembre 1904,
22 août/5 septembre 1922 et 13/14 septembre 1932, les Chemins de fer
fédéraux (CFF) ont accordé à la Compagnie du Brigue-Viège-Zermatt (VZ)
le droit de cojouissance de la gare de Brigue et de la station de Viège.
Selon l'art. 9 de la dernière en date de ces conventions (la convention
de 1932) les CFF se chargent, aux frais du compte de l'exploitation
commune, de l'administration, de l'entretien, de la surveillance, de
la police du chemin de fer et de tout le service intérieur et extérieur
de la gare de Brigue et de la station de Viège; ils assurent notamment,
pour le compte du VZ, à la station de Viège, l'expédition et la réception
des trains. L'art. 10 de la même convention prescrit que les employés
attachés au service commun de la gare de Brigue et de la station de Viège
doivent se conformer "pour tout ce qui concerne le service exclusif du
VZ, uniquement aux ordres et instructions qui leur seront donnés par les
organes compétents de cette comparnie, sous réserve d'autres conventions
et prescriptions générales en vigueur". Le ch. 2 de l'art. 16 est libellé
comme il suit:

    "Le VZ supporte seul tout dommage, quelle qu'en soit la cause,
occasionné à ou par ses installations ou par son matériel, qu'il affecte
des personnes, des objets remis au transport ou autres, du matériel
d'exploitation ou des installations fixes de chemin de fer. Il est tenu
d'intervenir pour le compte des CFF vis-à-vis des tiers qui s'en prennent
à ceux-ci dans des cas de ce genre, et de répondre pour eux des dommages
causés.

    Par contre, tout dommage occasionné sur le domaine qui sert à l'usage
commun est à la charge de la communauté, sous réserve des exceptions
désignées ci-après."

    L'art. 17 prévoit que lorsque l'une des entreprises peut, selon ses
usages, mettre tout ou partie du dommage à la charge du personnel fautif,
elle doit fixer la somme ainsi due et la déduire du dommage. Enfin,
l'art. 20 contient certaines règles touchant les redevances dues par le
VZ pour les prestations fournies par les CFF conformément à la convention
de 1932.

    B.- Le 22 juin 1962, deux trains spéciaux devaient transporter,
de Brigue à Zermatt, le personnel de l'entreprise Harnisch et Ronus AG
(Hanro), de Liestal, qui allait en excursion. Ces trains, nos 1533 et
1533 b, devaient croiser à Ackersand le train de marchandises descendant,
no 1274.

    Une fausse manoeuvre en gare de Brigue entraîna des retards. Le train
no 1533 quitta le premier cette gare, s'arrêta à Viège, puis reprit sa
marche pour croiser le train no 1274 à Stalden et non à Ackersand. A
11 h. 37, le train no 1533 b partit à son tour de Brigue, ce dont
Joseph Salzmann, fonctionnaire des CFF chargé alors de la réception
et de l'expédition des trains à la station de Viège, fut immédiatement
informé. Sans délai, Salzmann ouvrit le signal d'entrée de sa station
pour laisser libre accès au convoi qui allait arriver. Peu après, un
inspecteur du VZ téléphona de Brigue à Salzmann pour lui demander s'il
pouvait déplacer d'Ackersand à Viège le croisement des trains nos 1533
b et 1274. Salzmann accepta. Cependant, accaparé par d'autres besognes,
il omit de refermer le signal d'entrée, ce qui eût obligé le train 1533 b
à stopper. Mais il avisa du changement de croisement le chef de gare de
Viège, qui venait de reprendre son service. Ce fonctionnaire se rendit
alors sur le quai et constata que le train no 1533 b avait déjà franchi
la station sans s'y arrêter. Malgré une tentative de faire couper le
courant sur la ligne électrique de contact, les trains nos 1533 b et 1274
entrèrent en collision, à 11 h. 55, entre Viège et Ackersand.

    L'accident causa deux morts et une dizaine de blessés, ainsi que
d'importants dégâts matériels.

    C.- Le 12 décembre 1963, le Tribunal du district de Viège condamna
Salzmann à 200 fr. d'amende pour entrave au service des chemins de fer,
homicide et lésions corporelles graves, toutes infractions commises
non pas intentionnellement, mais par négligence (art. 238 al. 2, 117 et
125 CP). Sans imputer de faute grave à l'inculpé, le jugement retient
à sa charge la violation de plusieurs articles du règlement de la
circulation des trains sur les chemins de fer à voie étroite, à savoir
les prescriptions suivantes: Lorsqu'un train doit exceptionnellement
s'arrêter dans une gare et que le personnel roulant n'en est pas prévenu,
le signal d'entrée, s'il existe, ne doit être mis à voie libre qu'après
que le mécanicien a annoncé, par un coup de sifflet d'avertissement,
qu'il l'a remarqué en position d'arrêt; en gare, le train est arrêté
par des signaux à main (drapeau ou feu rouge) et par le signal de sortie
(art. 35 al. 1). En cas de changement de croisement, les chefs de gare
renseignent le personnel intéressé de leur gare et, si possible, celui
de la voie (art. 48 al. 27). Le chef de gare doit régler et surveiller
l'entrée des trains dans les gares, leur sortie et leur passage (art. 33
al. 1). Sauf dispositions spéciales de la direction de l'exploitation,
il faut mettre le signal d'entrée à voie libre juste à temps pour que le
train n'ait pas à ralentir sa marche; une fois à voie libre, le signal
d'entrée ne doit plus être remis à l'arrêt avant l'entrée du train,
si ce n'est pour des motifs impérieux (art. 33 al. 4).

    D.- Le 31 octobre 1962, l'Union d'assurance d'entreprises suisses de
transport invita la Direction générale des CFF à renoncer au paiement
des frais de voyage du personnel de la maison de Liestal. Par lettre
du 21 janvier 1963, la Direction générale des CFF se déclara d'accord
en principe. Toutefois, après avoir contesté la responsabilité des CFF
dans la collision du 22 juin, elle ajouta que si elle s'était néanmoins
saisie de la demande, c'était sans vouloir se lier par un précédent,
sans reconnaître en droit aucune obligation et dans l'idée qu'on ne lui
adresserait pas d'autres réclamations en raison de cette affaire. Le 24
janvier 1963, l'Union d'assurance prénommée remercia la Direction générale
des CFF. Le VZ, qui avait reçu copie de la lettre du 21 janvier, fit de
même en précisant que les CFF avaient agi par solidarité à son égard et
par un acte de complaisance exceptionnel.

    E.- Le 10 juin 1963 le VZ a fait notifier à la Direction générale
des CFF un commandement de payer pour une somme de 1 339 253 fr. en
indiquant, comme cause de la créance: "dommage matériel résultant de
la collision du 22 juin 1962 causée par la faute de l'agent CFF Josef
Salzmann à Viège". Opposition fut faite le 11 juin 1963. Par lettre du
17 juin 1963, le VZ réclama au Département fédéral des finances et des
douanes la réparation du dommage résultant des négligences de Salzmann,
soit un montant de 1 106 456 fr. 07. Le 21 août 1963, la Direction du
1er arrondissement des CFF répondit négativement à cette demande qui lui
avait été transmise.

    F.- Le 21 février 1964, le VZ ouvrit action devant le Tribunal fédéral
contre la Confédération suisse et les CFF. Il requérait la condamnation
solidaire des défendeurs au paiement de 1 134 433 fr. 27 avec 5% d'intérêts
à compter du 22 juin 1962. Il réduisit toutefois sa prétention en réplique
à 1 034 177 fr. 37, puis, le 22 septembre 1964, à 989 936 fr. 77.

    G.- La Confédération et les CFF concluent au rejet de la demande.

    H.- Le 3 novembre 1964, une délégation du Tribunal fédéral a procédé
à une inspection des lieux à la station de Viège et, le même jour,
à l'audition de divers témoins.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    I. Recevabilité

    I.1.- Dans la mesure où le demandeur élève, contre la Confédération
et les CFF, des prétentions déduites du droit public, à savoir de la loi
du 14 mars 1958 sur la responsabilité de la Confédération, des membres de
ses autorités et de ses fonctionnaires (LRCF) et d'une convention de droit
administratif, le Tribunal fédéral en connaît de par l'art. 110 al. 1
OJ (RO 66 I 306; 67 I 277; 73 I 171). Selon cet article, les actions
intentées contre les CFF rentrent au nombre de celles que l'on ouvre
contre la Confédération elle-même (RO 29 I 194; 34 II 565; 42 I 367;
51 I 271; 73 I 91).

    En tant qu'elle se fonde sur le droit privé, la demande est recevable
selon l'art. 41 lit. c, 2e phrase, OJ, les défendeurs ayant admis
tacitement la compétence du Tribunal fédéral et la valeur litigieuse
exigée par la loi étant donnée.

Erwägung 2

    I.2.- A la différence de la Confédération, les CFF ne sont pas une
personne morale (RO 29 I 194; 34 II 565 etc.). Mais s'ils sont propriété
de la Confédération (sauf les lignes prises à bail), ils sont cependant
autonomes dans les limites que fixe la loi (art. 1er de la loi du 23 juin
1944 sur les chemins de fer fédéraux) et sont capables d'ester en justice
(art. 5 al. 2 de la loi précitée; RO 31 II 541). Il s'ensuit, en l'espèce,
qu'ils peuvent seuls agir comme défendeurs et que, dans la mesure où elles
sont aussi prises contre la Confédération, les conclusions du demandeur
sont superfétatoires. Les CFF assument en particulier la responsabilité
qui découle, pour la Confédération, de la loi du 14 mars 1958.

Erwägung 2

    II. Nature juridique de la convention de 1932

    Selon que cette convention apparaîtrait comme un contrat de droit
administratif ou comme un contrat de droit privé, elle relèverait soit
du droit public et en particulier de la loi du 14 mars 1958 sur la
responsabilité de la Confédération, des membres de ses autorités et des
fonctionnaires (LRCF), soit du droit privé, notamment des art. 41, 51,
55 et 101 CO. Dans un arrêt du 10 juillet 1945 (RO 71 II 238), la Ire Cour
civile du Tribunal fédéral a jugé qu'une convention passée entre les CFF
et une compagnie privée de chemin de fer, touchant l'utilisation commune
d'une gare, était régie par des règles impératives de droit public, qui
lui conféraient un caractère particulier, mais n'excluaient cependant pas
le caractère privé des rapports de droit, dans la mesure où il n'existait
pas de règles de droit public applicables.

    Point n'est besoin de juger, en l'espèce, si la convention de 1932
relève du droit public ou du droit privé, car le présent litige appelle
la même solution, que l'on s'en tienne à l'hypothèse du contrat de droit
administratif ou à celle du contrat de droit privé.

Erwägung 1

    III. La responsabilité contractuelle d'après la convention de 1932

    III.1.- Qu'on la considère comme un contrat de droit administratif ou
comme un contrat de droit privé, la convention de 1932 est en principe
valable en ce sens que les CFF et le VZ avaient pouvoir de régler leur
communauté de gare par un tel accord.

    Cela est manifeste du point de vue du droit privé. Du point de vue
du droit public aussi, une réponse affirmative s'impose. Dans la mesure
où le contrat de droit administratif devrait, en principe, reposer sur
une base légale, cette condition serait réalisée, en l'espèce. Les art. 8
de la loi du 21 décembre 1899 sur l'établissement et l'exploitation des
chemins de fer secondaires, 30 de la loi du 23 décembre 1872 concernant
l'établissement et l'exploitation des chemins de fer sur le territoire
de la Confédération suisse (abrogés le 1er juillet 1958) et les art. 33
à 35 de la loi du 20 décembre 1957 sur les chemins de fer prévoient,
implicitement tout au moins, l'existence de telles conventions.

    De plus, les CFF n'ont pas exécuté correctement leurs obligations
contractuelles, car leur fonctionnaire Salzmann, qu'ils avaient chargé,
le 22 juin 1962, de la réception et de l'expédition des trains, à Viège,
n'a pas arrêté, comme il l'aurait dû, le train no 1533 b. Selon le droit
privé, par conséquent, ils répondaient en principe, de par l'art. 101
al. 1 CO, du dommage ainsi causé par leur agent.

    La même solution se justifie en droit public. Sans doute le droit
privé ne s'applique-t-il, ici, que subsidiairement et dans la mesure où ses
règles sont "conçues pour les situations analogues et comparables dans tous
leurs éléments essentiels" (ZWAHLEN, Le contrat de droit administratif,
RDS, t. 77 II, p. 616 a; IMBODEN, Der verwaltungsrechtliche Vertrag, RDS,
t. 77 II, p. 94 a ss., 105 s.). Cependant, si la personne privée répond
des actes de ses auxiliaires, c'est parce qu'en recourant à leurs services,
elle accroît ses possibilités d'action. Cette consédération s'applique
aussi au service public, qui répond dès lors dans la même mesure du dommage
causé par ses agents, sous réserve de principes impératifs contraires
qui pourraient découler du droit public.

Erwägung 2

    III.2.- Il faut donc examiner tout d'abord si l'art. 16 ch. 2 de
la convention de 1932 exclut, en l'espèce, la responsabilité des CFF et
secondement, dans l'affirmative, si cette clause est valable.

    a) Le VZ estime que le premier alinéa de cette disposition vise
uniquement le dommage causé à ou par des tiers. Car, dit-il, en étendre
la portée au préjudice imputable aux agents des CFF, ce serait libérer
ces derniers de toute responsabilité, même en cas de sabotage. Les CFF
contestent cette interprétation.

    Les expressions "tout dommage", "quelle qu'en soit la cause",
ne se concilient pas avec le sens que le VZ attribue à l'art. 16 ch. 2
al. 1. Si les parties n'avaient eu en vue que le préjudice causé à ou par
des tiers, on se demande pourquoi elles eussent utilisé des termes aussi
généraux, alors qu'il eût été facile de préciser leurs intentions. En
outre, l'exploitation de la station commune de Viège étant principalement
confiée aux CFF, c'est avant tout l'activité de leurs agents qui pouvait
causer un dommage; les parties s'en rendaient certainement compte. Dès
lors, si elles avaient voulu, dans une clause excluant la responsabilité,
réserver une source de préjudice aussi importante, il est vraisemblable
qu'elles l'auraient dit. De surcroît, la seconde phrase de ladite
clause contredit la manière de voir du VZ. Obligeant cette entreprise
à intervenir pour les CFF à l'égard des tiers qui s'en prennent à eux,
elle ne peut raisonnablement avoir trait qu'au dommage causé par leur
personnel. Bien plus, elle s'applique expressément "dans des cas de ce
genre", soit dans l'hypothèse prévue à la phrase précédente. C'est dire
que celle-ci concerne également le préjudice imputable aux agents des CFF.

    b) L'art. 16 ch. 2 al. 1 de la convention de 1932 excluant la
responsabilité des CFF, il faut rechercher encore si l'on ne se trouve
pas dans le cas exceptionnel où l'art. 16 ch. 2 al. 2 maintient cette
responsabilité. Cette clause met à la charge de la communauté, sous
réserve de certaines exceptions, "tout dommage occasionné sur le domaine
qui sert à l'usage commun". Sur l'interprétation de ces termes aussi,
les parties sont en désaccord. Le VZ estime qu'il s'agit du dommage
causé sur le domaine commun et, du fait que la collision du 22 juin
1962 a pour origine une faute commise à la station de Viège, il conclut
que le préjudice doit être supporté par la communauté. Pour les CFF,
"occasionné" signifie "qui s'est produit"; ils refusent dès lors de
charger la communauté d'un dommage survenu hors de la station de Viège.

    Le terme "occasionner", dont l'interprétation est litigieuse, signifie,
selon le bon usage, donner lieu à une chose, en être l'occasion. Mais il
arrive qu'on l'emploie pour désigner la survenance d'un événement. Par
conséquent, la lettre du texte est plutôt favorable à la thèse du VZ,
mais n'exclut pas celle des CFF. D'autre part, l'art. 16 ch. 2 de la
convention de 1932 reproduit presque textuellement l'art. 15 al. 2 de la
convention précédente, celle de 1922, qui, à la différence de l'autre,
a été rédigée en allemand aussi bien qu'en français. Or le texte allemand
de l'art. 15 ch. 2 al. 2, que les parties avaient sans doute encore à
l'esprit en 1932, emploie à la place du "dommage occasionné" les termes
"Schaden der sich ereignet", ce qui signifie en français: "le dommage
qui se produit" ou "survient". En conséquence, le texte de 1932 pourrait
aussi bien viser le dommage qui s'est produit que le dommage qui a été
causé sur le domaine commun.

    Cependant, on s'expliquerait mal que les parties aient voulu
mettre à la charge de la communauté le dommage causé sur l'aire d'une
gare commune. Ainsi compris, l'art. 16 ch. 2 al. 2 ne s'appliquerait pas
lorsque l'origine du préjudice demeurerait indéterminée. Son interprétation
soulèverait également des difficultés au cas où le dommage procéderait
à la fois d'acte commis sur le territoire commun et en dehors de ce
territoire. Que cette hypothèse n'ait rien d'invraisemblable, la présente
cause le démontre; si le VZ impute principalement à Salzmann le préjudice
allégué, il en voit aussi la cause dans une omission des organes des
CFF (instruction insuffisante de leur personnel), qui, de leur côté,
reprochent un excès de vitesse aux conducteurs des locomotives des trains
1274 et 1533 b. En outre, on se demande pourquoi le dommage causé dans
une gare devrait toujours être supporté par la communauté. En tout cas,
s'il a un tiers pour auteur, cette solution ne se justifie nullement.

    Il est plausible, au contraire, que les parties ont eu l'intention
de faire réparer par la communauté le seul dommage qui se produit sur
le territoire commun. L'endroit où se produit un dommage est en général
facile à déterminer. De plus, comme le préjudice survenu sur le domaine
commun atteint fréquemment des installations et du matériel dont les
deux entreprises jouissent ensemble, il est raisonnable de le mettre à
la charge de l'une et de l'autre.

    Enfin - cela est concluant - c'est en général dans les gares communes
que les agents des CFF collaborent à l'exploitation du VZ et, sous
réserve d'éventualités tout à fait exceptionnelles, c'est là seulement
qu'ils peuvent causer un préjudice. Par conséquent, si la thèse du VZ
devait prévaloir, le dommage imputable aux agents des CFF serait supporté
presque entièrement par la communauté; il ne tomberait presque jamais sous
le coup du premier alinéa de l'art. 16 ch. 2. Or, comme on l'a montré,
cette clause exonère les CFF de la réparation du dommage qui leur est
imputable. Il s'ensuit que, dans l'acception que lui attribue le VZ,
le second alinéa de l'art. 16 ch. 2 réduirait pratiquement à rien les
effets du premier, et, en définitive, le contredirait.

    c) La clause exclusive de l'art. 16 ch. 2 al. 1 étant applicable
en l'espèce, il reste à statuer sur sa validité. Le VZ soutient que les
CFF ne pouvaient s'exonérer que de la responsabilité issue d'une faute
légère et que, vu la gravité de la négligence imputable à Salzmann, ils ne
sauraient invoquer en leur faveur la disposition libératoire. Au contraire,
les CFF allèguent que l'art. 16 ch. 2 al. 1 s'applique même en cas de
faute grave et qu'au surplus, la négligence de Salzmann n'est que légère.

    Il s'agit d'abord de trancher la question selon le droit privé. En
principe et de par l'art. 101 al. 2 CO, celui qui confie l'exécution
d'un contrat à des auxiliaires peut toujours, par une convention
préalable, exclure sa responsabilité, que la faute des auxiliaires soit
légère ou grave, intentionnelle ou non (BECKER, note 24 ad art. 101 CO;
OSER/SCHÖNENBERGER, note 14 ad art. 101 CO). Le troisième alinéa déroge
toutefois à cette règle; l'exemption ne peut porter que sur la faute légère
premièrement si le créancier est au service du débiteur ou secondement
si la responsabilité résulte de l'exercice d'une industrie concédée par
l'autorité. Seule la seconde de ces hypothèses entre en ligne de compte
dans la présente espèce.

    L'art. 101 al. 3 CO tend à protéger le particulier obligé de
contracter avec un concessionnaire au bénéfice d'un monopole; partant,
il ne s'applique pas lorsque deux concessionnaires traitent ensemble,
en particulier lorsque deux entreprises de chemin de fer concluent un
contrat de jonction (RO 71 II 239). Effectivement, l'exception faite par
l'art. 101 al. 3 CO ne se justifie que par l'existence d'un rapport de
dépendance entre le particulier et son cocontractant, au monopole duquel
il ne peut échapper en s'adressant ailleurs. Mais ce rapport n'existe pas
dans le cas du contrat de jonction conclu entre les CFF et une compagnie
privée de chemin de fer. Car, au contraire du particulier, celle-ci, au
bénéfice d'une concession délivrée par l'autorité, traite d'égal à égal
avec ceux-là; elle a le droit d'exiger la jonction moyennant certaines
prestations en retour, dont la loi fixe le maximum (art. 8 de la loi du 21
décembre 1899 concernant l'établissement et l'exploitation des chemins de
fer secondaires, remplacé par les art. 33 et 34 de la loi du 20 décembre
1957 sur les chemins de fer). Dès lors, si l'on en juge au point de vue
du droit privé, la clause de l'art. 16 ch. 2 al. l'qui figure dans une
convention passée entre deux entreprises de chemin de fer, doit être
tenue pour valable, quelle que soit la faute commise par les agents des
CFF. Point n'est donc besoin de rechercher s'il y a eu négligence grave
ou légère de la part de Salzmann ou d'autres agents. Peu importe aussi
que les faits à la base de l'arrêt cité s'éloignent plus ou moins des
circonstances de la présente espèce; le principe posé par le Tribunal
fédéral, énoncé en termes généraux, s'applique dans les deux cas.

    Du point de vue du droit public, il n'y a aucune raison d'adopter
une solution différente. Dans ce domaine également la règle de l'art. 101
se justifie et il faut exclure l'application du troisième alinéa de cet
article toutes les fois que, comme en l'espèce, les parties contractantes
ne sont pas unies par un lien de subordination. (LRCF)

Erwägung 1

    IV. Application de la loi du 14 mars 1958 sur la responsabilité de
la Confédération, des membres de ses autorités et de ses fonctionnaires

    IV.1.- Il faut encore rechercher si, nonobstant la clause exclusive
de la responsabilité tout au moins contractuelle des CFF (art. 16 ch. 2
de la convention de 1932), la réclamation du VZ pourrait être fondée
sur la loi du 14 mars 1958. Aux termes de l'art. 3 al. 1 de cette loi,
"la Confédération répond du dommage causé sans droit à un tiers par un
fonctionnaire dans l'exercice de ses fonctions, sans égard à la faute
du fonctionnaire". Encore faut-il que, par l'organe du fonctionnaire,
la Confédération ait agi comme sujet de droit public; les actes qu'elle
accomplit comme sujet de droit privé relèvent exclusivement de ce droit
(art. 11 al. 1 LRCF).

    Dans l'hypothèse où la convention de 1932 serait un contrat de
droit administratif, les actes des agents des CFF accomplis à Viège
pour le service du VZ, en particulier la réception et l'expédition des
trains, relèveraient du droit public. Le dommage dont la réparation est
litigieuse en l'espèce a été subi par un tiers et causé par un agent
des CFF, Salzmann, qui a agi sans droit, contrevenant à la fois à ses
devoirs de service et au Code pénal. Dès lors, la responsabilité de la
Confédération et, partant, celle des CFF, qui sont partie au litige à sa
place, serait en principe engagée.

Erwägung 2

    IV.2.- Sans doute l'art. 3 LRCF réserve-t-il l'application des actes
législatifs spéciaux qui règlent la responsabilité de la Confédération
pour des faits déterminés. Mais, au nombre de ces actes, seule la loi
du 28 mars 1905 sur la responsabilité civile des chemins de fer et des
bateaux à vapeur et des postes entre en ligne de compte. Or les parties
ont renoncé à l'invoquer et c'est avec raison.

    L'art. 1er de cette loi rend toute entreprise de chemin de fer
causalement responsable du dommage résultant du fait qu'une personne a
été tuée ou blessée au cours de la construction, de l'exploitation ou des
travaux accessoires impliquant les dangers inhérents à celle-ci. Le dommage
litigieux étant survenu au cours de l'exploitation d'une entreprise de
chemin de fer, le VZ ne pourrait invoquer cette règle que s'il s'agissait
de l'exploitation des CFF. Tel n'est pas le cas.

    Lorsque plusieurs entreprises utilisent en commun un tronçon de
ligne ou une gare, c'est l'entreprise dans l'exploitation de laquelle se
produit l'accident qui répond du dommage, soit celle pour le compte et aux
risques de laquelle l'acte d'exploitation préjudiciable a été accompli,
même si elle n'était pas propriétaire de la ligne et que l'exécution ait
été confiée à d'autres agents que les siens. Car, dans ces cas aussi,
c'est au cours de son exploitation de la ligne d'autrui par l'organe
des agents commis par elle que le dommage est survenu (OFTINGER,
Schweizerisches Haftpflichtrecht, 2e éd., II/1, p. 306; cf. GUYER,
Kommentar zum schweizerischen Bundesgesetz betreffend die Haftpflicht der
Eisenbahn- und Dampfschiffahrts-Unternehmungen und der Post, vom 28. März
1905, p. 62; SCHÄRER, Das Haftpflichtrecht der Automobile, Eisenbahnen,
Elektrizitätsanlagen und Luftfahrzeuge, p. 51; du même auteur, Recht und
Gerichtspraxis über Haftpflicht und Schadenersatz, p. 175).

    A l'égard des voyageurs et des agents qui ont été victimes de
l'accident, le VZ apparaissait sans conteste comme exploitant et ses
assureurs, aussi bien, sont intervenus pour lui. Il ne saurait attribuer
cette qualité aux CFF dans la présente procédure, du simple fait que la
réparation de son propre dommage est en cause. Il s'en est d'ailleurs
abstenu.

Erwägung 3

    IV.3.- Il reste à examiner si l'art. 16 ch. 2 al. 1 de la convention
de 1932 exclut l'application de la loi du 14 mars 1958 ou si, au contraire,
cette loi prime la clause conventionnelle.

    La loi du 14 mars 1958, qui relève du droit public, met à la charge
de la Confédération, par ses art. 3 ss. et dans les limites qu'elle fixe,
la réparation du dommage causé sans droit à un tiers par un fonctionnaire
dans l'exercice de ses fonctions. Elle accorde au tiers une action réglée
par les art. 110 ss. OJ, qui lui permet de faire constater son droit et
fixer la réparation due.

    Le lésé est ainsi titulaire d'un droit public subjectif. Dans la
plupart des cas, la renonciation générale à un tel droit, fût-ce au moyen
d'un contrat, est exclue, à moins que la loi ne la prévoie ou qu'elle ne
découle de la nature particulière du droit considéré (RO 49 I 180). Car
chacune des prestations fournies par l'Etat en vertu d'un droit public
subjectif l'est sans doute dans l'intérêt du bénéficiaire, mais elle tend
aussi à un résultat d'ensemble, qui relève de l'intérêt général et que
le législateur a voulu atteindre par des règles impératives (FLEINER,
Institutionen des deutschen Verwaltungsrechtes, 8e éd., impression
nouvelle pour la Suisse, p. 181 s. et n. 4). Ce résultat consiste
notamment dans la protection de l'ensemble des titulaires contre les
décisions hâtives et contre les pressions auxquelles ils pourraient être
soumis, vu l'état d'inégalité dans lequel ils se trouvent vis-à-vis de
la puissance publique. Par conséquent, les droits que la loi du 14 mars
1958 confère aux particuliers ne peuvent en principe faire l'objet d'une
renonciation générale.

    On n'en saurait cependant conclure que l'entrée en vigueur de
cette loi ait rendu inopérante la clause insérée à l'art. 16 ch. 2
de la convention de 1932 et par laquelle le VZ a délié les CFF de la
responsabilité "pour tout dommage causé à ou par ses installations ou
par son matériel" etc. En effet, bien qu'il soit une compagnie privée,
le premier ne s'est pas trouvé en état d'inégalité à l'égard des seconds,
entreprise publique, dans les pourparlers qui ont abouti à la convention
de 1932. Comme les CFF, le VZ est soumis, en raison des intérêts généraux
qu'engage le service des chemins de fer, à un statut qui comporte
une réglementation étendue touchant la construction, l'exploitation,
le régime des transports, la responsabilité et certains contrôles. Les
intérêts ainsi mis en jeu lui donnaient déjà, dans les pourparlers, une
situation qui n'est pas comparable à celle qu'aurait eue une autre personne
privée. Cette situation était encore renforcée du fait qu'il pouvait,
d'une part, exiger des CFF qu'ils se prêtassent à la communauté de gare
et, d'autre part, recourir à l'autorité en cas d'exigences excessives
de son partenaire (art. 30 de la loi du 23 décembre 1872, 33 s. et
40 al. 1 lit. d de la loi du 20 décembre 1957). Il était donc garanti
contre des abus éventuels. De plus, pour le règlement des communautés de
gare, la loi a laissé aux parties la plus grande latitude de régler leurs
rapports suivant les circonstances. La loi de 1872 se bornait à prévoir
le paiement d'une juste indemnité, qu'elle chargeait le Tribunal fédéral
de fixer en cas de désaccord entre les parties (art. 30 al. 3). La loi de
1957 se contente de définir les éléments qui entrent en ligne de compte
pour fixer le maximum de l'indemnité, l'autorité de surveillance étant
compétente pour trancher les litiges (art. 34 al. 2 et 40 al. 1 lit. d);
encore les parties peuvent-elles déroger à ces règles sous réserve de
l'approbation du Département des postes et des chemins de fer (art. 34
al. 4). Aucune exception à la liberté des parties n'est faite, touchant la
responsabilité. Enfin, c'est moins de trois mois après le vote de la loi
sur les chemins de fer du 20 décembre 1957 que le législateur a adopté
la nouvelle loi sur la responsabilité de la Confédération, des membres
de ses autorités et de ses fonctionnaires. Il est dès lors vraisemblable
que s'il avait, par cette nouvelle loi, entendu annuler les contrats de
communauté de gare conclus par les CFF, dans la mesure où ils y dérogeaient
en excluant la responsabilité de cette entreprise, l'on en trouverait au
moins la mention dans les débats parlementaires. Or il n'en est rien;
le message du 29 juin 1956, ni le Bulletin sténographique ne touchent
à cette question (FF 1956 I 1420; Bull. stén. CN 1957, p. 804; 1958,
p. 13 et 214; CE 1956, p. 318; 1958, p. 27 et 137).

    On ne peut admettre, dans de telles conditions, que l'intérêt public
exclue toute dérogation à la loi du 14 mars 1958. Le VZ ne s'est pas
trouvé, vis-à-vis des CFF, lors des pourparlers relatifs à la convention
de 1932, essentiellement dans la même situation qu'une personne privée
vis-à-vis de l'Etat. Les parties ont bien plutôt traité sur un pied
d'égalité. Il suit de là que la clause litigieuse n'est pas nulle.

Erwägung 4

    IV.4.- Cette clause exclut en tout cas la responsabilité des CFF
en tant qu'elle résulte de la convention elle-même, c'est-à-dire leur
responsabilité contractuelle. Point n'est besoin d'examiner si elle
exclut en outre la responsabilité qui pourrait leur incomber à d'autres
titres, comme auteurs d'actes illicites (art. 41 CO) ou comme employeurs
(art. 55 CO). Car le VZ ne saurait fonder sa prétention sur aucune de
ces règles légales.

Erwägung 1

    V. Responsabilité en raison d'actes illicites

    V.1.- Cette responsabilité résulte du droit privé et les CFF ne
pourraient l'assumer que dans l'hypothèse où leurs rapports avec le
VZ relevaient de ce droit. Elle serait exclue si la convention de 1932
constituait un contrat de droit administratif.

Erwägung 2

    V.2.- Le VZ soutient que les CFF répondent des actes illicites de
leur agent Salzmann comme des leurs propres et, sur ce point, il argumente
comme il suit:
      En vertu de l'art. 11 de la loi du 14 mars 1958, la Confédération
      répond

    suivant le droit privé de l'activité qu'elle exerce comme sujet
de droit

    privé; dans ce cas, l'art. 11 al. 2 exclut toute action du lésé
contre le

    fonctionnaire fautif. Dès lors, selon la lettre stricte de la loi, la

    Confédération ne pourrait être attaquée, en raison des actes
illicites de

    ses fonctionnaires, qu'en vertu de l'art. 55 CO. La situation du
lésé serait

    ainsi moins favorable que sous l'empire de la loi antérieure, ce
qui serait

    contraire aux intentions du

    législateur. Il faut admettre, par conséquent, que lorsqu'elle agit
sur le

    terrain du droit privé, la Confédération est responsable de par
l'art. 41 CO

    - et non seulement de par l'art. 55 CO - de tous les actes illicites
commis

    par ses agents, comme si elle-même en était l'auteur.

    Cette argumentation n'est pas concluante. Le juge ne saurait s'écarter
d'un texte clair, sauf si des raisons pressantes font douter de sa
conformité au véritable sens de la loi (RO 87 I 16; 90 I 215 s.). Or
l'art. 11 al. 1 de la loi de 1958 n'est nullement équivoque. Selon
le droit privé, auquel il renvoie expressément, la Confédération ne
répond des actes illicites de son personnel qu'en vertu de l'art. 55 CO
(cf. OFTINGER, Schweizerisches Haftpflichtrecht, t. II/1, p. 116). Sans
doute, en déclarant le droit privé applicable à la Confédération sans
maintenir la possibilité de s'en prendre au fonctionnaire, la loi de 1958
restreint-elle les droits du lésé. Mais, pour autant, rien ne permet
d'affirmer que l'art. 11 al. 1 ne réponde pas au sens véritable de la
loi, c'est-à-dire celui qui est, seul, conforme à la logique interne et
au but de la disposition considérée (RO 90 IV 187, consid. 6). Dès lors,
si la réglementation actuelle apparaît discutable, il n'appartient pas au
juge de la corriger. D'ailleurs, la limitation des droits de la victime
ne joue pratiquement guère de rôle, les fonctionnaires fautifs n'ayant
été sans doute que rarement mis en cause sous la législation antérieure,
en particulier pour un préjudice considérable.

Erwägung 3

    V.3.- Le VZ prétend de plus que les CFF eux-mêmes - et non seulement
leur agent Salzmann - ont commis un acte illicite au sens de l'art. 41
CO. Tel n'est pas le cas. La loi du 28 mars 1905 ne s'appliquant pas
(v. ci-dessus, ch. IV 2), un acte illicite ne pourrait être imputé aux
CFF que s'il émanait de leurs organes (RO 45 II 646; 47 II 413; 49 II
94; 76 II 390). Or, selon les art. 9 et 11 de la loi du 23 juin 1944 sur
les chemins de fer fédéraux, les organes de cette entreprise comprennent
exclusivement le conseil d'administration, les directeurs généraux et les
directeurs d'arrondissement. Manifestement, ces derniers sont à l'abri
de tout reproche en l'occurrence.

    En outre, selon la jurisprudence, l'employeur qui n'instruit pas
convenablement son personnel ne répond pas, de ce fait, dans les rapports
extracontractuels, en vertu de l'art. 41 CO, mais uniquement de par
l'art. 55 CO (RO 77 II 248; 80 II 250 s.).

Erwägung 1

    IV. Responsabilité en vertu de l'art. 55 CO

    IV.1.- En négligeant de faire arrêter le train no 1533 b à la station
de Viège, Salzmann, agissant comme employé des CFF, a causé le dommage,
objet de la responsabilité litigieuse. Il faut donc examiner si, par son
comportement, la responsabilité des CFF serait engagée en vertu de l'art.
55 CO, alors même qu'elle aurait pu l'être en principe selon l'art. 101 CO.
Comme celle de l'art. 41 CO, l'application de l'art. 55 CO ne peut être
envisagée que du point de vue du droit privé.

Erwägung 2

    VI.2.- En principe, le Tribunal fédéral a admis le cumul des moyens
pris de la faute contractuelle et des actes illicites lorsque la violation
d'un contrat implique celle d'un devoir général de l'ordre juridique
(RO 64 II 259 s.; 71 II 113). Il a en outre jugé implicitement que le
lésé pouvait invoquer ensemble l'art. 55 et l'art. 101 CO (RO 64 II
261). Point n'est besoin de soumettre à un nouvel examen cette solution,
contestée par certains auteurs (OSER/SCHÖNENBERGER, n. 12 ad art. 55 CO;
v. TUHR-SIEGWART, Allgemeiner Teil des schweizerischen Obligationenrechts,
p. 347, note 5, 379 et 548 ss.), car, en tout cas, le VZ ne saurait fonder
sa prétention sur l'art. 55 CO.

Erwägung 3

    VI.3.- Selon l'art. 55 CO, l'employeur peut se soustraire à sa
responsabilité causale s'il prouve qu'il a pris tous les soins commandés
par les circonstances pour détourner un dommage ou que sa diligence n'eût
pas empêché le dommage de se produire. Or, en l'espèce, il est établi
que les CFF ont pris tous les soins voulus. Leur cura in eligendo ou in
custodiendo n'étant pas douteuse, seule leur cura in instruendo peut
être mise en cause. Effectivement, le seul grief que leur fait le VZ
est de n'avoir pas suffisamment renseigné Salzmann sur les différences
entre les règlements applicables aux chemins de fer à voie normale,
d'une part, et à voie étroite, d'autre part. Mais ce reproche n'est pas
fondé. L'art. 10 de la convention de 1932 prévoit que, pour tout ce qui
concerne le service exclusif du VZ à la gare de Brigue et à la station de
Viège, les employés sont soumis uniquement "aux ordres et instructions
qui leur seront donnés par les organes compétents de cette compagnie
(c'est-à-dire du VZ), sous réserve d'autres conventions et prescriptions
générales en vigueur". L'existence de dispositions contraires n'ayant
même pas été alléguée, il n'est pas douteux que, de par la convention, il
incombait au VZ lui-même d'instruire les fonctionnaires des CFF chargés
de son service, à Brigue et à Viège, touchant les particularités des
règlements applicables à son exploitation. C'est donc le VZ qui a failli,
dans le cas particulier, au devoir d'instruire Salzmann. Aussi, les CFF
n'ayant pas omis les soins imposés par les circonstances, la prétention
du VZ doit être rejetée dans la mesure où elle se fonde sur l'art. 55 CO.

Entscheid:

              Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Déboute la demanderesse de ses conclusions.