Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 90 II 34



90 II 34

5. Extrait de l'arrêt de la Ie Cour civile du 24 mars 1964 dans la cause
Dallèves contre Kamerzm Regeste

    1.  Grundstückkauf. Subjektiv wesentliche Vertragsbestimmung, die zur
Verbindlichkeit der öffentlichen Beurkundung (Art. 657 ZGB, 216 OR) bedarf,
sofern ihr Gegenstand seiner Natur nach in den Rahmen eines Kaufvertrages
fällt (Erw. 2).

    2.  Gänzliche Nichtigkeit eines Vertrages wegen Formmangels (Art. 20
Abs. 2 OR); Feststellung von Amtes wegen; Fehlen eines Rechtsmissbrauches
(Erw. 3 und 4).

    3.  Berufungsverfahren. Zulässigkeit einer Aenderung des Klagegrundes
(Anspruch aus ungerechtfertigter Bereicherung statt Schadenersatz).

    a)  Das Verbot neuer Begehren steht einer solchen Änderung nicht
entgegen (Art. 55 Abs. 1 lit. b i.f. OG);

    b)  Das Bundesgericht wendet das Recht von Amtes wegen an (Art. 43,
63 Abs. 1 und 3 OG) (Erw. 6).

    4.  Das Bundesgericht hat seinem Entscheid die tatsächlichen
Feststellungen der letzten kantonalen Instanz zugrunde zu legen (Art. 63
Abs. 2 OG). Ist ihm dies beim gegebenen Aktenstand nicht möglich, so hat
es die Sache an die Vorinstanz zurückzuweisen (Art. 64 Abs. 1 OG); diese
kann jedoch die Akten nur ergänzen, soweit das kantonale Prozessrecht
dies zulässt (Erw. 7 und 8).

Sachverhalt

    A.- En automne 1961, Marie Adèle Dallèves, autorisée par son époux,
l'avocat Henri Dallèves, s'engagea par écrit à vendre une partie de sa
vigne de Pagane, près de Sion, à des clients de son mari, les entrepreneurs
Pierre et Raymond Kamerzin qui, de leur côté, promirent d'y construire deux
bâtiments dans les plus brefs délais; si la réalisation du projet s'avérait
impossible, chaque partenaire aurait le droit d'exiger la restitution de
l'immeuble. La partie Dallèves entendait ainsi écarter de ses propriétés la
menace d'une route et augmenter la valeur vénale des terrains aux abords
immédiats de la parcelle vendue; si elle évita délibérément la forme
authentique, c'est qu'elle voulait que la convention fût nulle, notamment
pour que les autorités n'en connaissent pas le contenu. Par acte notarié
du 13 janvier 1962, la vente fut conclue au prix de 40 fr. le m2. Le
contrat ne contenait aucune clause visant les constructions projetées. Les
acheteurs obtinrent une autorisation assortie d'une réserve. Mais le 3
avril suivant, ils revendirent le terrain, sans imposer à l'acquéreur
une obligation de bâtir, réalisant ainsi un gain de 40 440 fr.

    B.- Agissant au nom de son épouse, Me H. Dallèves a ouvert une action
en paiement de dommages-intérêts fondée sur le dol (art. 31 al. 3 CO) et
l'inexécution de la convention sous seing privé. Les défendeurs ont conclu
au rejet de la demande, cet acte étant simulé et de pure complaisance. Le
cadre du débat était ainsi délimité, les parties ne se référant aucunement
à la vente, distincte à leur avis.

    Le 18 septembre 1963, le Tribunal cantonal du Valais a rejeté la
demande. La convention de 1961, dit-il en substance, constitue une
promesse de vente assortie d'un pacte de réméré. Elle est nulle en
raison d'un vice de forme (art. 216 al. 2 CO). La nullité s'étend à
l'obligation de construire, subjectivement essentielle à en croire la
demanderesse elle-même. Il suit de là que les défendeurs n'ont pas violé
une obligation valable. Ils n'ont pas agi de mauvaise foi (art. 2 CC),
car ils s'en sont remis à Me Dallèves, leur conseiller juridique. Du reste,
aucun dommage n'est résulté de leur attitude: la route évite les parcelles
de la demanderesse, dont la valeur a augmenté à cause du développement
de la ville de Sion.

    C.- Agissant par la voie du recours en réforme, la demanderesse,
représentée à l'audience par son fils, Me Louis Dallèves, a prié le
Tribunal fédéral de constater aussi la nullité de la vente du 13 janvier
1962 et d'ordonner la restitution réciproque des prestations effectuées,
selon les règles de l'enrichissement illégitime; les intimés ne pouvant
transférer l'immeuble, leur dette représente le prix calculé sans tenir
compte de l'obligation de bâtir, qu'ils n'ont pas respectée; en pratique,
après compensation, ils doivent lui remettre le bénéfice réalisé lors de
la revente de la parcelle.

    Les intimés proposent le rejet du recours.

Auszug aus den Erwägungen:

Considérant en droit:

Erwägung 2

    2.- Vu le double but visé par la recourante, qui traita avec des
entrepreneurs, l'engagement de construire constituait, si ce n'est un
élément objectivement essentiel de la promesse et de la vente immobilière,
du moins une clause si importante que le contrat n'eût pas été conclu
sans elle (RO 68 II 233/234; 78 II 439). Cela est souligné par le pacte de
réméré qui, s'il n'a pas été passé en la forme requise, révèle néanmoins
l'intention des parties: l'impossibilité de bâtir, quel qu'en fût le motif,
fondait le droit de reprendre la parcelle ou d'en exiger le rachat.

    Il ne s'ensuit cependant pas nécessairement que la validité de
l'obligation est subordonnée à l'observation de la forme authentique, à
peine de nullité (art. 216 CO). Il faut encore que la clause objectivement
accessoire soit un élément du contrat, une convention dont l'objet rentre
dans le cadre naturel, sinon essentiel, de la vente (Vertragspunkt;
RO 68 II 233 consid. 1; 78 II 439 consid. 2 b; 86 II 37).

    Deux conditions doivent être réalisées pour qu'une clause accessoire
constitue un élément du contrat. D'une part, l'obligation assumée doit
avoir sa cause dans une créance qui ne soit pas étrangère au contenu
naturel de la convention, ce que l'on promet étant la contre-partie du
prix, respectivement de sa fixation à un chiffre plus ou moins élevé,
ou du transfert de la propriété (RO 86 II 37, litt. a in fine). D'autre
part, l'objet de l'obligation doit se situer dans le cadre d'une vente,
influer sur la situation juridique de la chose vendue et concerner
directement le contenu du contrat (RO 78 II 439, litt. b, premier alinéa
in fine). Enoncés isolément dans les arrêts cités, ces critères doivent
s'appliquer cumulativement et strictement. En écartant la thèse objective
de HAAB (n. 15 à 19 ad art. 657 CC), la jurisprudence et la majorité des
auteurs (OSER/SCHÖNENBERGER, n. 5 et 9 ad art. 216 CO; WIELAND, n. 7 ad
art. 657 CC; MEIER-HAYOZ, n. 87 ibidem) ont augmenté le nombre des clauses
dont la validité est subordonnée au respect de la forme authentique;
on ne saurait renforcer encore leurs exigences en y incluant celles qui
ne visent pas des éléments naturels du contrat de vente.

    En l'espèce, l'obligation de construire a pour cause le transfert de
l'immeuble (à un prix qui en tient compte); elle n'est pas la contre-partie
d'une obligation distincte du vendeur, étrangère à la vente. Son objet
vise la destination de la chose vendue, l'usage que l'acheteur en
fera. Le cas présente quelque analogie avec une espèce dans laquelle la
forme authentique fut jugée nécessaire à la validité d'une limitation
du droit de bâtir sur une parcelle qui n'était pas vendue (RO 68 II 229
sv.). L'obligation assumée ne touchait alors qu'indirectement l'objet de
la vente, auquel elle conférait le caractère de fonds "dominant" d'une
servitude sans effet réel. Aussi bien doit-on à plus forte raison exiger
la forme idoine dans le présent litige, où les deux conditions posées
sont plus manifestement réalisées.

Erwägung 3

    3.- Il suit de là non seulement que la clause litigieuse est nulle,
mais que cette sanction s'attache au contrat de vente en son entier. La
promesse de l'automne et l'acte du 13 janvier 1961 ne peuvent être
dissociés et constituent un accord global, que le vice réduit à néant
(art. 20 al. 2 CO; RO 60 II 98 sv., 63 II 418 consid. 3; MEIER-HAYOZ,
n. 89 ad art. 657 CC). Il est en effet constant que la vente n'aurait pas
été conclue sans l'engagement de bâtir. Le juge doit constater la nullité
d'office dès que les faits de la cause manifestent le vice de forme; cette
décision incombe aussi à la Cour de céans, de par l'art. 63 OJ. La fin du
considérant II de l'arrêt publié au RO 68 II 236 est, dans cette mesure,
erronée. La nullité relative ou absolue n'est d'ailleurs qu'un motif, non
l'objet d'une conclusion, à moins que la loi n'exige, exceptionnellement,
un jugement formateur (Gestaltungsurteil).

Erwägung 4

    4.- En invoquant le vice de forme devant le Tribunal fédéral,
la recourante ne commet pas un abus de droit. Elle se borne en effet à
convenir du mérite de l'opinion des premiers juges. Elle-même n'a pas fondé
son action sur l'absence de forme authentique. Bien au contraire, elle a
allégué un dommage en raison de l'inexécution de la clause litigieuse, se
fiant donc à sa validité. Aujourd'hui, elle tire simplement la conséquence
de ce que la Cour cantonale, mieux informée, lui a démontré. Admettre
l'abus de droit, ce serait d'ailleurs, de manière choquante, reconnaître le
droit à l'exécution et partant, en principe, à des dommages-intérêts. En
fait, bien qu'ayant délibérément provoqué la nullité de la convention,
la recourante ne l'invoque pas pour se soustraire à ses engagements.

Erwägung 5

    5.- Le contrat étant nul, les parties doivent se restituer
réciproquement les prestations qui ont été effectuées sans cause et dont
elles se sont enrichies illégitimement (art. 62 sv. CO). A ce titre,
la recourante réclame - le transfert de l'immeuble étant impossible -
le prix qu'elle aurait consenti si elle n'avait pas imposé aux acheteurs
une obligation de bâtir; elle estime qu'il équivaut au prix de revente;
compensant sa propre dette avec sa créance, elle prétend finalement une
somme égale au bénéfice réalisé par les intimés (et au dommage qu'elle
alléguait lorsqu'elle fondait son droit sur l'inexécution d'une obligation
contractuelle).

Erwägung 6

    6.- Le fondement de l'action est ainsi modifié. La Cour cantonale,
ayant constaté la nullité de la seule obligation de bâtir, avait simplement
rejeté la demande d'indemnité (cf. RO 49 II 63, 68 II 236 II), ajoutant
par surabondance de droit que la venderesse n'avait subi aucun dommage. La
procédure civile fédérale permet-elle à la recourante de tirer, à la
place des premiers juges, la conséquence de la nullité et de prétendre
la même indemnité au titre de l'enrichissement illégitime?

    a) L'interdiction de former des conclusions nouvelles (art. 55 al. 1
litt. b in fine OJ) n'y met pas obstacle. Dans une action tendant à
une prestation, la conclusion indique cette prestation et la formule de
façon que le dispositif du jugement puisse consister simplement dans son
adjudication ou son rejet. Elle ne doit pas mentionner la cause juridique
et les motifs sur lesquels on se fonde (LEUCH, Die Zivilprozessordnung
für den Kanton Bern, 3e éd., no 3 ad art. 157; GULDENER, Schweizerisches
Zivilprozessrecht, 2e éd., p. 162).

    La recourante demande dans l'instance de réforme le même objet
que devant la juridiction cantonale: que les défendeurs lui paient
solidairement 40 440 fr. avec intérêts. Elle ne présente donc pas une
conclusion nouvelle à la Cour de céans; elle modifie seulement le fondement
juridique de sa prétention.

    b) Dans les limites de l'art. 43 OJ, le Tribunal fédéral apprécie
librement la portée juridique des faits sans être lié par les motifs que
les parties invoquent (art. 63 al. 1 et 3 OJ). Il est donc sans importance
que la recourante se soit trompée à cet égard. Le juge applique d'office
le droit. D'après la jurisprudence récente (RO 89 II 339/340), ce devoir
incombait également à la Cour cantonale de par la procédure fédérale;
cette juridiction s'est conformée à cette règle, sans tirer toutefois la
conséquence de la nullité. Même si le fondement de la demande n'avait pas
été modifié, la Cour de céans eût dû apprécier, sous tous leurs aspects,
les faits établis, fixer leur sanction juridique et statuer sur le mérite
des conclusions indépendamment de l'argumentation des parties. Saisie
d'une demande en dommages-intérêts pour résolution d'un contrat, elle en
a déjà alloué les conclusions au titre de l'enrichissement illégitime,
quand bien même le demandeur ne s'était pas placé sur ce terrain (RO 64
II 269 consid. 2; sur le principe, voir notamment RO 53 II 236; 66 II
237; 70 II 217; 75 II 309 consid. 4; 85 II 613; 87 II 383; 88 II 305,
444 consid. 2; 89 II 341).

Erwägung 7

    7.- Il s'ensuit que la recourante est recevable à fonder aujourd'hui
sa prétention sur les art. 62 sv. CO.

    Mais de par l'art. 63 al. 2 OJ, le Tribunal fédéral, comme cour de
réforme, fonde son arrêt sur les faits tels qu'ils ont été constatés par
la dernière autorité cantonale, à moins que des dispositions fédérales en
matière de preuve n'aient été violées et sous réserve d'une inadvertance
manifeste, qu'il rectifie d'office. Il ne revoit les moyens de droit
nouveaux que s'ils déduisent des conséquences juridiques de faits
régulièrement soumis à l'appréciation de la juridiction cantonale et
constatés par elle dans la décision attaquée (RO 74 II 151; 82 II 371;
89 II 341, en haut de la page).

    Or bien qu'elle eût pu le faire, subsidiairement tout au moins, la
recourante n'a pas allégué dans l'instance cantonale l'existence et le
montant de l'enrichissement; elle ne s'est pas davantage exprimée sur
d'autres points qui peuvent se révéler pertinents (par exemple, dans
l'application éventuelle de l'art. 63 CO). Par voie de conséquence, les
défendeurs n'ont pas eu l'occasion de faire valoir des moyens appropriés
(cf. art. 64 ou 65 CO). La Cour cantonale de son côté, restant à mi-chemin
sur la voie où elle s'était justement engagée, n'établit pas les faits
qui permettraient de statuer. On ne connaît notamment que le prix de
revente. Or la demanderesse, ne pouvant obtenir la restitution du terrain,
a droit à une indemnité qui n'est pas nécessairement égale à ce prix et,
après compensation des créances réciproques, au bénéfice brut des intimés.

    La Cour de céans ne saurait donc juger, en l'état de la cause, du
mérite de la demande. Il conviendrait d'alléguer et de prouver des faits
nouveaux, de donner aux intimés la faculté de faire valoir les moyens de
défense propres à l'action fondée sur l'enrichissement illégitime et de
compléter l'état de fait.

Erwägung 8

    8.- A cette fin, il y a lieu de renvoyer l'affaire à l'autorité
cantonale, en invitant celle-ci à compléter au besoin le dossier et à
statuer à nouveau (art. 64 al. 1 OJ). Si cette voie, ouverte en principe,
n'a pas été suivie dans l'arrêt publié au RO 64 II 270 consid. 2, dernier
alinéa, c'est qu'une expertise permettait sans autre de déterminer
l'enrichissement (art. 64 al. 2 OJ).

    Il faut toutefois préciser que l'art. 64 OJ n'oblige pas à
compléter d'office le dossier. Le droit de procédure cantonal détermine
souverainement quand et dans quelle mesure il incombe aux parties
d'alléguer les faits pertinents, comment et à quelles conditions le
juge doit administrer des preuves et établir un fait litigieux. La
règle fédérale de l'art. 8 CC ne confère un droit à la preuve des faits
pertinents que si les moyens de la rapporter ont été offerts conformément
au droit cantonal.

    En l'espèce, le jugement déféré ne rejette pas la demande parce que
l'enrichissement, ainsi que l'obligation et l'étendue de la restitution,
n'auraient pas été établis ou que la preuve n'en pourrait plus être
rapportée en vertu des règles de la procédure valaisanne. Le juge
a seulement omis d'examiner la conséquence juridique de la nullité
de la vente. Toutes les questions touchant l'obligation fondée sur
l'enrichissement illégitime restent indécises, hors le devoir de principe
de restituer en tant que sanction abstraite de la nullité du contrat. La
Cour cantonale dira s'il y a lieu en l'espèce à restitution et fixera,
le cas échéant, la dette des intimés. Elle complétera à cet effet
l'instruction, dans la mesure où c'est nécessaire et si la loi cantonale
le lui permet.

    On ne saurait objecter que cette solution compromet l'égalité des
parties. La Cour de céans la fonde sur les faits constants: elle accomplit
son office en appréciant ceux-ci juridiquement. Quant à la Cour cantonale,
à qui la cause est renvoyée, elle respectera ce principe, dans la mesure
où il est inscrit dans la loi cantonale et s'impose de par l'art. 4 Cst.,
surtout si elle décide de compléter l'instruction.