Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 90 II 154



90 II 154

19. Arrêt de la Ie Cour civile du 19 mai 1964 dans la cause Roh contre
Blanchard. Regeste

    Grundstückkauf; Art. 216 OR, 657 ZGB; Art. 2 ZGB.

    Der Vertrag ist nichtig, wenn in der öffentlichen Urkunde nicht der
wirkliche Kaufpreis angegeben wird (Bestätigung der Rechtsprechung; Erw.
1).

    Rechtsmissbräuchliche Berufung auf den Formmangel? Zur Beantwortung
dieser Frage hat der Richter alle Umstände des konkreten Falles zu
berücksichtigen. Bejahung der Frage für den vorliegenden Fall (Erw. 2
und 3).

Sachverhalt

    A.- Par acte authentique du 28 février 1959, Victor Roh a vendu à
Louis Blanchard une villa pour le prix de 190 000 fr. payé à la signature
du contrat. Sur cette somme, 5000 fr. sont restés bloqués chez le notaire,
d'entente entre les parties, pour garantir les travaux de finition.

    En réalité, le prix convenu était 220 000 fr. Roh a reçu de Blanchard
un "dessous de table" de 30 000 fr.

    Après que l'acheteur fut entré en possession de la villa, il se
produisit une inondation due à la défectuosité d'un raccord d'amenée
d'eau dans la salle de bains. En outre, la poutraison soutenant la dalle
bétonnée du premier étage provenait de matériaux de démolition. Blanchard
formula une prétention de ces deux chefs. Les parties envisagèrent un
arrangement selon lequel Roh rachèterait la villa pour 250 000 fr., moins
les 5000 fr. bloqués en main du notaire. Leurs conseils se mirent ensuite
d'accord pour requérir un jugement prononçant la nullité de la vente.

    Mais Blanchard changea d'avis et consulta un autre avocat. Le 8
janvier 1960, il revendit la villa à un tiers pour le prix de 265 000 fr.

    B.- Par exploit du 3 mai 1960, Blanchard assigna Roh en paiement de
dommages-intérêts pour dégâts d'eau, malfaçons, retard de l'entrée en
jouissance et moins-value de la poutraison.

    Roh contesta les défectuosités alléguées par le demandeur. Il invoqua
la nullité du contrat de vente et réclama, reconventionnellement, la somme
de 50 000 fr. représentant la différence entre le prix de revente au tiers,
265 000 fr. et la somme qu'il avait reçue, 215 000 fr.; il précisait que
Blanchard pourrait reprendre les 5000 fr. bloqués chez le notaire.

    Statuant en seconde instance le 28 janvier 1964, la Deuxième Chambre
de la Cour de justice du canton de Genève condamna Roh à payer à Blanchard
1663 fr. 85 à titre de dommages-intérêts pour malfaçons; elle confirma
pour le surplus le jugement du Tribunal de première instance qui avait
alloué à Roh la somme de 5000 fr. bloquée chez le notaire et rejeté toutes
les autres conclusions des parties.

    Dans les motifs de son arrêt, la Cour cantonale admet que la vente
était nulle, vu l'inexactitude du prix indiqué dans l'acte authentique;
toutefois, Roh abuse de son droit en se prévalant de la nullité uniquement
pour résister à une réclamation fondée sur les malfaçons et les défauts des
matériaux de construction de la villa, après l'échec de l'accord envisagé
pour vider le litige à l'amiable; la vente ayant été exécutée, Roh ne
saurait se prévaloir de sa propre faute, qui lui a permis de recevoir un
"dessous de table" illégal, pour en faire constater la nullité.

    C.- Contre cet arrêt, Roh recourt en réforme en concluant au paiement
de 50 000 fr. sous déduction des 5000 fr. bloqués chez le notaire. Il
réclame ainsi la différence entre le prix d'achat réel et le prix de
la revente par Blanchard. Il ne conteste plus l'indemnité de 1663 fr.
85 mise à sa charge.

    L'intimé Blanchard conclut au rejet du recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Selon la jurisprudence, le contrat de vente immobilière conclu
en la forme authentique doit mentionner, en particulier, le prix exact
que l'acheteur s'engage à payer; si l'indication figurant dans l'acte
ne correspond pas à la réalité, le contrat est nul (RO 86 II 36, 231,
260, 400; 87 II 30). Il est vrai que la solution jurisprudentielle a
été critiquée récemment par KARL SPIRO (Die unrichtige Beurkundung des
Preises bei Grundstückskauf, Basler Studien zur Rechtswissenschaft, Heft
70, 1964). Mais cet auteur part d'une prémisse erronée. Il affirme en
effet que la loi n'exige la forme authentique que pour l'aliénation des
immeubles, soit l'obligation du vendeur (op. cit., p. 16). Or son assertion
est contraire au texte légal (art. 216 CO et 657 CC), à la jurisprudence
constante et à la doctrine, qui soumet à la forme authentique tous les
éléments essentiels du contrat (OSER/SCHÖNENBERGGER, n. 5 ad art. 216
CO; BECKER, n. 4 ibidem; HAAB, n. 15 ad art. 657 CC; MEIER-HAYOZ, n. 84
ss. ibidem). La critique développée sur cette base ne justifie donc pas
un nouvel examen de la question.

Erwägung 2

    2.- Le Tribunal fédéral a jugé à plusieurs reprises que le fait
d'invoquer la nullité du contrat constitue un abus de droit s'il apparaît
manifestement contraire aux règles de la bonne foi; pour dire s'il en est
ainsi, le juge apprécie librement toutes les circonstances particulières
de chaque espèce, sans être lié à des principes rigides (RO 78 II 227;
84 II 375; 86 II 232, 262, 400/401; 87 II 31).

    a) Si l'exécution volontaire du contrat par les deux parties
n'empêche pas nécessairement d'en constater la nullité, elle représente
néanmoins un élément très important à prendre en considération (RO 87
II 34 et références citées). En l'espèce, la vente a été complètement
exécutée. L'acquéreur a été inscrit comme propriétaire au registre foncier.
Il a payé le prix intégral en main du notaire. Peu importe que l'officier
public ait conservé un montant de 5000 fr., conformément à la convention
des parties, en garantie des défauts éventuels. Il a reçu cette somme
pour le compte du vendeur.

    b) Les parties ont discuté d'un accord selon lequel Roh aurait
racheté la villa à Blanchard pour le prix de 245 000 fr. Elles n'ont
pas envisagé de la sorte une annulation de la vente, qui eût entraîné
la restitution de l'immeuble, d'une part, et du prix payé, 220 000 fr.,
d'autre part. Le recourant avait proposé, au contraire, un rachat à un
prix plus élevé. Il est indifférent que les avocats des parties aient
prévu de donner à ce rachat la forme d'un jugement prononçant la nullité
de la vente. Ce qui est décisif, c'est que le recourant a consenti à ce
que l'acquéreur disposât de l'immeuble en sa faveur, moyennant un prix
supérieur à celui de la vente. Lors de ces tractations, les deux parties
étaient conscientes, selon l'arrêt déféré, de l'invalidité du contrat
qu'elles avaient conclu. Or le fait que le vendeur a racheté l'immeuble
ne lui permet pas, en vertu des règles de la bonne foi, de se prévaloir
de la nullité de la vente (RO 86 II 233).

    c) Le recourant a bénéficié d'un "dessous de table" illégal. Une
telle fraude procure des avantages aux deux parties qui y consentent. Non
seulement elle permet d'éluder les droits de mutation, mais encore elle
donne au vendeur la possibilité de dissimuler au fisc un gain en capital.

    d) La juridiction cantonale constate en fait que le recourant a proposé
le rachat de l'immeuble, puis, sa proposition rejetée, invoqué la nullité
de la vente dans le seul dessein de se soustraire aux conséquences d'une
réclamation de l'intimé fondée sur la moins-value et les malfaçons. Une
pareille attitude est propre à constituer un élément de l'abus de droit
(RO 78 II 229; 86 II 403).

Erwägung 3

    3.- Ayant exécuté délibérément la vente, proposé de racheter l'immeuble
alors qu'il connaissait la nullité du contrat, profité de la fraude à
laquelle il avait consenti et invoqué le vice à la seule fin de parer à
une réclamation tirée de la garantie à raison des défauts de la chose
vendue, le recourant a manifestement abusé de son droit (art. 2 al. 2
CC). En effet, il a cherché à détourner les art. 657 CC et 216 CO de
leur but essentiel, qui est de protéger les parties contre une décision
irréfléchie et de procurer l'assurance que leur volonté s'est exprimée
clairement, correctement et complètement. C'est donc avec raison que la
Cour cantonale a opposé l'abus de droit à la prétention du recourant.

Entscheid:

Par ces motifs, le Tribunal fédéral

    Rejette le recours et confirme l'arrêt rendu le 28 janvier 1964 par
la Deuxième Chambre de la Cour de justice du canton de Genève.