Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 88 II 28



88 II 28

5. Arrêt de la Ie Cour clvile du 13 février 1962 dans la cause Junod et
Au Bûcheron SA contre Graber. Regeste

    1.  Firmabezeichnung. Schutzumfang. Verwechslungsgefahr (Erw. II 1
und III 1).

    2.  Enseignes. Schutzumfang (Erw. II 1).

    3.  Fabrik- und Handelsmarken.

    a)  Die Vermutung des Art. 5 MSchG wirkt nicht zugunsten dessen, der
sich gestützt auf Art. 1 Ziff. 2 und Art. 2 MSchG auf seine Geschäftsfirma
als Marke beruft (Erw. II 3 a).

    b)  Tragweite des Art. 3 Abs. 1 MSchG. Die Bestimmung schliesst die
Anwendbarkeit der in Art. 4-11 MSchG aufgestellten Grundregeln auf die
in einer Geschäftsfirma bestehenden Marken nicht aus (Erw. II 3 a).

    c)  Der Schutz des MSchG kann nur gegenüber dem markenmässigen Gebrauch
eines Zeichens angerufen werden (Erw. II 3 b).

    4.  Prüfungsbefugnis des Bundesgerichts.

    a)  Der innere Wille der Vertragsparteien ist Tatfrage (Erw. II 4).

    b)  Das Bestehen einer Verwechslungsgefahr zwischen zwei
Geschäftsfirmen ist Rechtsfrage (Erw. III 1a).

Sachverhalt

    A.- Depuis 1940, Edmond Junod exploite un commerce de meubles
à Lausanne; il est inscrit au registre du commerce sous la raison
individuelle "Ed. Junod". Il utilise, pour son magasin, l'enseigne "Au
Bûcheron". Junod avait fondé à La Chaux-de-Fonds deux succursales de ce
commerce, pour lesquelles il employait également l'enseigne "Au Bûcheron".

    Enfin, il a créé à Yverdon, en 1948, une société anonyme dont le
but est le commerce de meubles. Cette société, dont il est le seul
administrateur, a pour raison sociale "Au Bûcheron SA".

    Après avoir fait radier l'inscription concernant ses succursales de
La Chaux-de-Fonds, Junod a vendu ces fonds de commerce à André Graber
par contrat du 17 janvier 1955. Cette convention contenait notamment,
sous article I chiffre 4, la clause suivante:

    "Edmond Junod accorde à André Graber le droit d'utiliser, dans le
Canton de Neuchâtel et dans le Jura Bernois, l'enseigne "Au Bûcheron",
et cela pour une durée de trois ans; une fois ce délai écoulé, Edmond
Junod redeviendra sans autre formalité seul titulaire de dite enseigne,
à moins qu'un nouvel accord ne soit intervenu entre les parties avant le
1er janvier 1958. André Graber prend l'engagement de ne pas utiliser à
des fins publicitaires l'enseigne "Au Bûcheron" dans les Cantons de Vaud,
Valais et Genève; en contrepartie, Edmond Junod s'engage à ne faire aucune
publicité dans le Canton de Neuchâtel et dans le Jura bernois pour le
commerce dont il est propriétaire à Lausanne."

    Par la suite, Graber exploita ces entreprises, ainsi qu'une
succursale ouverte au Locle, sous la raison individuelle "Meubles Graber,
Au Bûcheron", qui a été publiée dans la Feuille officielle suisse du
commerce du 6 février 1957. Il utilise notamment cette raison dans ses
papiers d'affaires. Il y met cependant les termes "Meubles Graber" en
évidence par des caractères plus grands et une écriture spéciale, tandis
que les mots "Au Bûcheron", écrits en lettres latines, apparaissent comme
un élément secondaire.

    A l'expiration du délai de trois ans prévu par l'article I chiffre
4 de la convention du 17 janvier 1955, Junod invita en vain Graber à
cesser d'utiliser les mots "Au Bûcheron" comme enseigne et dans sa raison
de commerce.

    Le 5 avril 1958, Junod fit enregistrer une nouvelle marque consistant
dans les mots "Au Bûcheron" écrits en caractères gothiques.

    Junod et Au Bûcheron SA ayant déposé une plainte pénale contre
Graber, le juge d'instruction impartit à celui-ci un délai pour faire
valoir en justice son prétendu droit d'utiliser les mots "Au Bûcheron"
comme enseigne et dans sa raison de commerce.

    B.- Graber a actionné Junod et Au Bûcheron SA devant le Tribunal
cantonal neuchâtelois, en concluant, en bref, à ce que cette juridiction
prononçât la nullité de l'article I chiffre 4 de la convention du 17
janvier 1955, dans la mesure où il stipulait que Junod serait, après
trois ans, titulaire exclusif de l'enseigne "Au Bûcheron" pour le canton
de Neuchâtel et le Jura bernois.

    Les défenderesses ont proposé le rejet de la demande et ont pris
des conclusions reconventionnelles tendantes, en substance, à ce que
le Tribunal cantonal interdît à Graber d'utiliser la dénomination "Au
Bûcheron" dans sa raison de commerce ou à titre d'enseigne.

    Par jugement du 2 octobre 1961, le Tribunal cantonal neuchâtelois a
déclaré que l'article I chiffre 4 de la convention du 17 janvier 1955
était nul, notamment dans la mesure où Junod s'était réservé le droit
de redevenir titulaire de l'enseigne "Au Bûcheron" dans le canton de
Neuchâtel et le Jura bernois. Il a prononcé en outre que Graber avait le
droit d'utiliser la raison "Meubles Graber, Au Bûcheron" inscrite à La
Chaux-de-Fonds et, pour sa succursale, au Locle et qu'en usant de cette
raison, il n'avait commis à l'égard des défendeurs ni acte illicite ni
acte de concurrence déloyale. Pour le reste, la juridiction cantonale a
débouté les parties de leurs conclusions.

    C.- Junod et Au Bûcheron SA recourent en réforme au Tribunal fédéral,
en reprenant les conclusions qu'ils ont formulées dans l'instance
cantonale.

    L'intimé propose le rejet du recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 2

    I. (Procédure.)

Erwägung 1

    II. Sur le recours de Junod:

    II.1.- Junod se prévaut de l'enseigne "Au Bûcheron" de son magasin
de Lausanne; il voit une atteinte à son nom commercial dans le fait
qu'à partir de janvier 1958, Graber a utilisé sans autorisation cette
dénomination dans sa raison de commerce et comme enseigne.

    Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral (RO 40 II 605, 52 II 398,
64 II 251, 76 II 91/92), celui qui choisit une nouvelle raison de commerce
ou une enseigne doit s'abstenir de créer un risque de confusion avec les
maisons existantes. Il ne peut donc, par exemple, adopter une raison ou
une enseigne propres à faire naître de telles confusions. S'il omet cette
précaution, la personne qui subit de ce fait une atteinte illicite dans
ses intérêts personnels est fondée à demander au juge de la faire cesser
en vertu des art. 28 et 29 CC. Cependant, à la différence du droit à la
marque et à la raison de commerce, le droit au nomenseigne est limité
dans l'espace par la sphère commerciale du titulaire. Comme il naît du
fait de l'usage, sa portée ne peut s'étendre au-delà du champ où il est
effectivement exercé.

    En l'espèce, le Tribunal cantonal a constaté que les parties avaient
leurs commerces en des lieux différents, qu'elles vendaient les mêmes
articles à des prix sensiblement égaux, que, dès lors, les acheteurs
de la région de La Chaux-de-Fonds n'avaient aucune raison de se servir
chez Junod et qu'inversement ceux de Lausanne n'étaient pas clients
de Graber, de sorte que les sphères commerciales des parties étaient
nettement séparées. Ce sont là des constatations de fait définitives,
qui lient le Tribunal fédéral en vertu de l'art. 63 al. 2 OJ. Junod les
critique donc en vain.

    On doit en conclure qu'en utilisant l'expression "Au Bûcheron" dans sa
raison de commerce et comme enseigne, l'intimé n'a pas atteint illicitement
Junod dans ses intérêts personnels protégés par les art. 28 et 29 CC.

Erwägung 2

    II.2.- Junod invoque également la loi sur la concurrence déloyale. La
seule disposition qui puisse entrer en ligne de compte en l'espèce est
l'art. 1er al. 2 litt. d LCD, aux termes duquel une mesure de nature
à faire naître une confusion avec l'entreprise d'autrui constitue un
acte de concurrence déloyale. Pour que ces conditions fussent remplies,
il faudrait notamment que Junod eût établi l'existence d'un risque de
confusion entre son entreprise et celle de Graber. Or la Cour cantonale
ne constate pas qu'il ait apporté cette preuve. Du reste, le fait que les
sphères d'activité de ces deux entreprises sont bien séparées constitue
un indice en sens contraire.

Erwägung 3

    II.3.- En outre, Junod se fonde sur le droit des marques de fabrique
et de commerce et invoque sa marque verbale "Au Bûcheron" déposée le 5
février 1958.

    Selon la Cour cantonale, il ne peut, faute d'antériorité, opposer
cette marque à la raison de commerce de Graber, laquelle vaut marque en
vertu de l'art. 1er ch. 1 LMF; en outre, il n'est pas établi que Junod
utilise l'expression "Au Bûcheron" comme marque.

    a) Aux termes de l'art. 5 LMF, il y a présomption, jusqu'à preuve du
contraire, que le premier déposant d'une marque en est aussi le véritable
ayant droit. Cette présomption vise certainement le dépôt de la marque
en vue de son enregistrement, conformément aux art. 12 et suiv. LMF,
mais on discute en doctrine si elle profite également à celui qui invoque
comme marque sa raison inscrite au registre du commerce, selon l'art.
1er ch. 2 et l'art. 2 LMF (cf., pour l'affirmative, DAVID, Kommentar zum
Schweizerischen Markenschutzgesetz, 2e éd., ad art. 2 rem. 8, et, pour
la négative, MATTER, Kommentar zum Bundesgesetz betreffend den Schutz
der Fabrik- und Handelsmarken, p. 93).

    Selon l'art. 3 al. 1 LMF, les marques définies à l'art. 1er ch. 2
(c'est-à-dire celles qui ne sont pas constituées par une raison de
commerce) sont soumises aux dispositions des art. 4 à 11 LMF. Mais on
n'en saurait déduire a contrario que lesdites dispositions ne soient pas
applicables aux raisons de commerce, lesquelles sont visées par l'art. 1er
ch. 1 LMF. En réalité, le législateur a simplement voulu, par l'art. 3
al. 1 LMF, exclure l'application aux marques constituées par une raison de
commerce ("Firmenmarken") des prescriptions de forme sur l'enregistrement;
il n'a nullement entendu soustraire cette catégorie de marques aux règles
de fond figurant aux art. 4 à 11 LMF (arrêt du Tribunal fédéral du 3
février 1948, dans la cause Indeco c. Equipement industriel SA).

    On doit considérer en revanche que la marque et la raison de commerce
ont deux buts différents. La première vise la marchandise, alors que la
raison de commerce désigne ceux qui produisent cette marchandise ou la
mettent en circulation. Aussi l'art. 2 LMF n'assimile-t-il les raisons
de commerce aux marques enregistrées qu'autant qu'elles sont "employées
comme marques". C'est par là seulement qu'une raison de commerce suisse
devient une marque et qu'elle est protégée comme telle, indépendamment
de l'inscription au registre des marques. Dès lors, la présomption du
droit à la marque ne résulte pas de la seule inscription au registre du
commerce selon l'art. 2 LMF (arrêt Indeco, cité ci-dessus; cf. également
RO 44 II 85).

    En l'espèce, Graber ne peut donc se prévaloir du fait que sa raison
"Meubles Graber, Au Bûcheron" a été inscrite au registre du commerce
avant que Junod déposât sa marque "Au Bûcheron".

    b) Cependant, pour que Junod puisse invoquer contre Graber la
protection de la loi fédérale sur les marques de fabrique et de commerce,
il faut, selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, que Graber
ait utilisé l'expression "Au Bûcheron" à titre de marque, c'est-à-dire
comme signe appliqué sur les marchandises ou leur emballage à l'effet de
les distinguer ou d'en constater la provenance (RO 50 II 201, 51 I 340,
55 II 345, 58 II 170, 60 II 255, 63 II 287, 76 II 93, 86 II 281, 87 II 42
et 111). Or le jugement déféré ne constate nulle part que Graber utilise
sa raison de commerce ou une partie de cette raison comme marque.

    La prétention de Junod doit donc être rejetée en tant qu'elle est
fondée sur le droit des marques.

Erwägung 4

    II.4.- Ainsi, Junod ne saurait invoquer un droit absolu fondé sur
les dispositions qui protègent le nom, les raisons de commerce et les
marques ou sur la loi relative à la concurrence déloyale. En revanche,
il peut avoir acquis par convention la prétention qu'il fait valoir
contre Graber. Il allègue que c'est effectivement le cas et il invoque
à cet égard l'article I chiffre 4 du contrat du 17 janvier 1955.

    Par cette clause, Junod accordait à Graber le droit d'utiliser
l'enseigne "Au Bûcheron" pendant trois ans. Il était stipulé en outre que,
ce délai écoulé, Junod redeviendrait sans autre formalité seul titulaire de
cette enseigne. D'après la juridiction cantonale, Graber n'entendait pas
renoncer à un droit par cette dernière clause; les deux parties croyaient
que, même après la cession de son commerce de La Chaux-de-Fonds, Junod
conservait un droit exclusif à l'enseigne "Au Bûcheron" pour le canton
de Neuchâtel et que Graber ne pouvait donc utiliser cette dénomination
que s'il y était autorisé par Junod. Ces constatations, qui ont pour
objet la volonté dite interne des parties, relèvent du fait et lient le
Tribunal fédéral en vertu de l'art. 63 al. 2 OJ (RO 72 II 79, 73 II 175,
76 II 144, 81 II 52, 84 II 245).

    Or, contrairement à ce que croyaient les parties, Junod n'avait plus
de droit exclusif sur la dénomination "Au Bûcheron" et Graber était libre
- à l'égard de Junod - de l'utiliser dans le canton de Neuchâtel (voir
ci-dessus consid. II 1 à 3). Pour que Graber perdît ce droit, il eût
fallu qu'il y renonçât. Il ne l'a pas fait. Aussi bien les contractants
entendaient-ils simplement confirmer la situation juridique qui résultait
de la loi, sous réserve de l'autorisation accordée par Junod pour une
période de trois ans.

    Ainsi, Junod ne peut, en se fondant sur la convention du 17 janvier
1955, interdire à Graber d'utiliser la raison de commerce "Meubles Graber,
Au Bûcheron". Son recours n'est donc fondé sur aucun de ses points et
doit être rejeté.

Erwägung 1

    III. Sur le recours de la société Au Bûcheron SA:

    III.1.- Quant à la société Au Bûcheron SA, elle fonde d'abord ses
conclusions sur son droit à sa raison.

    a) En vertu de l'art. 951 al. 2 CO, la société anonyme a, dans
toute la Suisse, un droit exclusif à sa raison de commerce (RO 63 II
25, 74 II 237; HIS, ad art. 951, rem. 13 et suiv.). Si un tiers fait,
sur le territoire de la Confédération, un usage indu d'une telle raison,
la société titulaire peut demander au juge d'y mettre fin et, s'il y a
faute, réclamer des dommages-intérêts (art. 956 al. 2 CO). Le fait pour
le titulaire d'une raison individuelle d'ajouter à son nom de famille
l'élément principal de la raison d'une société anonyme ne constitue pas
nécessairement un usage indu selon l'art. 956 al. 2 CO. Ce n'est le cas
que si cette adjonction risque de tromper le public et de provoquer des
confusions entre les deux raisons. Pour qu'un tel danger existe, il n'est
pas nécessaire que des erreurs se soient effectivement produites. Il suffit
qu'elles soient vraisemblables étant données la composition des raisons
en présence et les circonstances particulières du cas. Il s'agit là d'une
question de droit que le Tribunal fédéral revoit librement (RO 74 II 236,
80 II 145, 82 II 154).

    La protection attachée à la raison d'une société anonyme est en
principe indépendante du siège, du but et de l'activité effective de
cette société et de ceux du tiers recherché. Elle s'étend en effet à toute
la Suisse et n'est pas limitée aux entreprises concurrentes. Toutefois,
comme le risque de confusion doit être apprécié d'après les circonstances
particulières du cas, il faut prendre en considération, à ce titre,
l'éloignement de leurs sièges, le cercle de leurs clientèles et le genre
de leur activité (RO 63 II 25, 76 II 87).

    Enfin, pour juger du danger de confusion, il faut se fonder sur
l'impression laissée par la raison sociale dans la mémoire de celui qui
la lit avec l'attention usuelle en affaires. On ne doit donc pas comparer
seulement les raisons en présence considérées dans leur ensemble: des
éléments particulièrement frappants, identiques dans les deux raisons,
peuvent faire passer à l'arrière-plan, dans l'attention de la clientèle,
les divergences d'éléments accessoires, au point que celles-ci ne restent
pas dans le souvenir (RO 72 II 185, 73 II 112, 74 II 237, 77 II 324,
82 II 154/155).

    b) En l'espèce, il est évident, pour le lecteur averti, que les deux
raisons désignent des entreprises différentes, l'une étant celle d'une
société anonyme et l'autre une raison individuelle dont le titulaire
est nommément indiqué conformément à l'art. 945 al. 1 CO. Mais, ce qui
est décisif, c'est l'attention avec laquelle ces raisons sont lues par
l'ensemble des clients éventuels, c'est-à-dire, s'agissant de commerces
de meubles, le grand public. Or on sait qu'il ne prête pas une attention
particulière à la différenciation des raisons de commerce.

    Le seul élément caractéristique de la raison de la recourante est la
dénomination "Au Bûcheron". Quant à la raison de Graber, elle comprend
plusieurs éléments. Le premier, le mot "meubles", est une désignation
générique qui n'a rien de frappant et qui, par conséquent, ne se grave
pas dans le souvenir. Les éléments qui suivent, savoir "Graber" et "Au
Bûcheron", sont plus caractéristiques. Mais, entre les deux, le public
prêtera surtout attention au nom de Graber. En effet, comme le Tribunal
fédéral l'a exposé à propos de la raison individuelle "Meyer-Munzinger,
Wollenhof" (RO 74 II 239), le public a tendance, lorsqu'il lit une raison
de commerce de ce genre, à fixer son attention sur le nom de famille,
surtout s'il est mis à la première place; un tel nom lui permet de se
représenter une personne, alors qu'un terme générique ou une dénomination
de fantaisie relègue dans l'anonymat les propriétaires ou les organes de
l'entreprise. Ces considérations ont une valeur particulière lorsque, comme
c'est le cas en l'espèce, le nom de famille que comprend la raison est
bien connu dans la région. Aussi est-ce se fondant sur l'arrêt Wollenhof
que le Tribunal cantonal a déclaré mal fondées les prétentions de la
société Au Bûcheron SA

    Toutefois, les deux cas ne sont pas identiques. Sans être une
pure désignation générique, "Wollenhof" s'en rapproche et donne une
indication générale sur le genre d'activité de l'entreprise. Cela a pour
effet d'affaiblir la portée de cet élément dans une raison de commerce
où il figure avec un nom de famille. En revanche, "Au Bûcheron" est une
dénomination de fantaisie, qui frappe davantage et qui peut atténuer dans
une certaine mesure l'impression laissée par le nom de famille. Aussi les
considérants de l'arrêt Wollenhof ne sont-ils pas entièrement concluants
en l'espèce.

    Cependant, un autre élément est décisif. Comme on l'a vu (ci-dessus,
consid. II 1), le Tribunal cantonal a constaté que Junod et Graber avaient
leurs entreprises en des lieux différents et que leurs sphères commerciales
étaient nettement séparées. Ces considérations s'appliquent également à
la recourante Au Bûcheron SA Aussi bien, les meubles ne sont généralement
vendus qu'en magasin. C'est pourquoi le cercle normal de la clientèle est
limité à une région relativement peu étendue, ce que corrobore le fait que
Junod avait ouvert des succursales à La Chaux-de-Fonds et que Graber en
a créé une au Locle. Cet élément permet de nier tout risque de confusion
entre la raison de commerce "Au Bûcheron SA" et celle de l'intimé.

    Sans doute pourrait-on songer à l'hypothèse que la société Au Bûcheron
SA ouvre une succursale dans le rayon d'activité de Graber. Mais, pour
apprécier le risque de confusion, il faut se fonder sur les circonstances
existant effectivement et non sur des éventualités, d'autant moins
plausibles en l'espèce que Junod a précisément renoncé à son établissement
de La Chaux-de-Fonds.

    Ainsi, les prétentions d'Au Bûcheron SA ne sont pas fondées en tant
que cette société invoque le droit des raisons de commerce.

Erwägung 2

    III.2.- Les conclusions prises par Au Bûcheron SA pourraient être
admises en vertu de la loi sur la concurrence déloyale si Graber faisait
ressortir, dans son enseigne, sa publicité ou ses papiers d'affaires,
l'élément commun aux deux raisons de commerce. Mais ce n'est pas le cas,
puisque, au contraire, il met les termes "Meubles Graber" en évidence
par des caractères plus grands et une écriture spéciale, au point que la
dénomination "Au Bûcheron" apparaît comme un élément secondaire.

    Le recours de la société Au Bûcheron SA doit donc également être
rejeté.