Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 87 I 376



87 I 376

63. Arrêt du 15 septembre 1961 dans la cause Administration fédérale des
contributions contre Roncagli. Regeste

    Art. 18 bis WStB.

    Jede Erwerbstätigkeit auf dem Gebiete der Schweiz schliesst die
Pauschalbesteuerung aus, selbst wenn sie in keinem Zusammenhang mit
der schweizerischen Wirtschaft steht (Fall des Bediensteten einer
internationalen Organisation).

    Abkommen vom 20. Januar 1930 über die Bank für Internationalen
Zahlungsausgleich (Grundgesetz Art. 6 lit. e).

    Die von der Bank ausgerichteten Ruhegehälter fallen nicht unter das
Steuerprivileg.

Sachverhalt

    A.- Roncagli, ressortissant italien, a été, pendant plus de 25 ans,
au service de la Banque des règlements internationaux (en abrégé: BRI),
à Bâle. Il a pris sa retraite le 1er janvier 1958 et, depuis ce jour,
touche une pension. Il conserva tout d'abord son domicile à Bâle, puis
le transféra dans le canton de Vaud, le 25 février 1959. Il n'exerce
plus d'activité à but lucratif et déclare n'avoir créé son nouveau
domicile qu'après avoir reçu de la Commission d'impôt du district de
Lausanne l'assurance qu'il serait soumis à la taxation forfaitaire
fondée sur la dépense du contribuable selon l'art. 18 bis AIN. Pour
la 10e période de l'impôt pour la défense nationale, il déposa une
déclaration forfaitaire. Il estimait que l'art. 18 bis AIN lui était
applicable. L'administration vaudoise de l'impôt pour la défense nationale
le mit effectivement au bénéfice de cette disposition.

    L'Administration fédérale des contributions (en abrégé:
l'Administration) recourut contre cette taxation, considérant que Roncagli
était soumis aux règles ordinaires de l'imposition et ne remplissait pas
les conditions de l'article 18 bis AIN.

    Le 4 novembre 1960, la Commission vaudoise de recours confirma
l'imposition fondée sur l'art. 18 bis AIN, en bref par les motifs suivants:

    En occupant son poste auprès de la BRI, Roncagli n'exerçait pas
d'activité à but lucratif en Suisse. Car cette notion ne doit pas être
définie du point de vue géographique, comme le fait l'Administration, mais
du point de vue économique. L'art. 18 bis AIN ne vise que l'activité qui
"s'exerce dans le cadre de l'économie helvétique en général". Tel n'est
pas le cas de celle de l'intimé auprès de la BRI; si elle se situait sur le
territoire suisse, elle était indépendante de l'économie helvétique du fait
qu'elle était rémunérée au moyen de fonds fournis principalement, voire
exclusivement par l'étranger; de plus elle n'impliquait aucune concurrence
avec les Suisses qui vivent de l'économie nationale. "L'application du
régime forfaitaire au fonctionnaire international qui reste en Suisse
après sa retraite se justifie donc par le fait qu'il n'a pas pour moyens
d'existence des ressources tirées du pays lors de son activité précédente".

    B.- L'Administration a formé un recours de droit administratif contre
cette décision. Elle demande au Tribunal fédéral de l'annuler et de
renvoyer la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. Elle
estime que, vu l'activité exercée en Suisse, alors qu'il était au
service de la BRI, Roncagli n'a pas droit à l'imposition à forfait.
Subsidiairement, elle demande que la retraite de Roncagli soit comprise
dans le calcul de l'impôt à forfait conformément à l'art. 18 bis litt. e
AIN.

    C.- La Commission vaudoise de recours, l'administration cantonale
de l'impôt pour la défense nationale et Roncagli lui-même concluent au
rejet du recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Selon l'art. 18 bis AIN, les contribuables visés à l'art. 3 ch. 1,
litt. a ou c, qui ne possèdent pas la nationalité suisse, n'exercent et
n'ont exercé en Suisse aucune activité à but lucratif, peuvent acquitter
un impôt à forfait en lieu et place de l'impôt sur le revenu et la
fortune. Cet impôt est fixé sur la base de la dépense du contribuable,
mais doit au moins être égal à celui qui serait dû sur certains éléments
bruts du revenu dont la source est en Suisse et de la fortune qui se
trouve en Suisse (art. 18 bis al. 2 AIN). Pour la 10e période fiscale,
les autorités vaudoises ont taxé Roncagli en vertu de cette disposition
légale; l'Administration conteste qu'elle lui soit applicable.

    Il est constant que Roncagli a été, pendant de nombreuses années,
fonctionnaire de la BRI au siège dudit institut, à Bâle. L'intimé et les
autorités fiscales vaudoises estiment cependant que cette activité ne
s'est pas exercée "en Suisse" selon l'art. 18 bis AIN, car, disent-ils,
ce terme ne doit pas être pris dans une acception purement territoriale,
mais exige qu'il existe une relation économique avec la Suisse, à savoir
que l'activité lucrative du contribuable soit ou ait été en rapport avec
l'économie suisse et la mette à contribution.

    a) Prise littéralement, l'expression "en Suisse" (texte allemand:
"in der Schweiz") suppose nettement un rapport territorial et signifie:
sur territoire suisse par opposition au territoire des autres Etats.

    b) L'art. 18 bis ne peut s'appliquer qu'aux catégories de contribuables
visées à l'art. 3 ch. 1 litt. a ou c AIN; ce sont les personnes physiques
qui ont leur domicile ou qui séjournent pendant un certain temps "en
Suisse". Il est manifeste que cette expression ne saurait signifier, ici,
autre chose que "sur le territoire suisse". Sous les conditions posées
par les litt. a ou c, les personnes dont il s'agit sont imposables en
Suisse (sous réserve des traités internationaux) du seul fait qu'elles
sont soumises à la souveraineté territoriale suisse, quel que soit le
lieu où se trouve ou dont provient la matière fiscale. Elles peuvent
demander à payer un impôt forfaitaire, conformément à l'art. 18 bis AIN,
lorsqu'elles satisfont aux exigences de cette disposition.

    L'une de ces conditions est précisément qu'elles n'exercent et n'aient
exercé aucune activité lucrative en Suisse. Etant imposables dans ce pays
de par leur assujettissement à la souveraineté territoriale, le genre
de l'activité lucrative qu'elles exercent ou ont exercé en Suisse est
indifférent; peu importe que cette activité ait ou non été dans l'intérêt
de l'économie suisse ou seulement en rapport avec elle. L'art. 3 al. 1
litt. b AIN aussi soumet à l'impôt toutes les personnes qui séjournent
en Suisse et y exercent une activité lucrative. Dans ce cas non plus,
il n'est pas nécessaire d'examiner tout d'abord le genre de cette
activité; serait également imposable, sous réserve de dispositions
exceptionnelles, le revenu provenant du travail exécuté au service d'une
organisation internationale. C'est précisément pour tenir en échec cet
assujettissement que des accords spéciaux sont conclus avec certaines de
ces organisations. Cela montre clairement que la provenance du revenu,
c'est-à-dire le genre de l'activité lucrative, est sans conséquence
lorsqu'il s'agit de fixer la qualité de contribuable. Rentre du reste en
principe dans le revenu, selon l'art. 21 AIN et sous réserve des exceptions
prévues par ailleurs, le produit de toute activité lucrative quelconque.

    c) C'est donc seulement en vertu d'une disposition exceptionnelle,
à savoir l'art. 6 litt. e de la convention du 20 janvier 1930 concernant
la BRI (charte constitutive) que Roncagli bénéficiait d'une immunité
fiscale en Suisse. Mais cette disposition n'accorde le privilège que pour
"les rémunérations et salaires payés par la banque à ses administrateurs
et à son personnel n'ayant pas la nationalité suisse". Selon la lettre du
texte, l'immunité ne s'étend donc pas aux pensions de retraite servies
par la banque et c'est bien ainsi qu'il faut l'interpréter (Message du
Conseil fédéral relatif à la convention précitée: FF 1930 I p. 93 s.).

    L'intimé lui-même ne prétend pas qu'il en aille autrement. Aussi bien,
s'il demande à être mis au bénéfice de l'art. 18 bis AIN, c'est qu'il
reconnaît en principe être soumis à la souveraineté fiscale suisse. Or,
si l'on admettait que cette disposition lui est applicable, il pourrait
se trouver, du point de vue de l'imposition, dans une situation plus
favorable qu'avant d'avoir pris sa retraite. Lorsqu'il était en fonctions,
il devait en principe l'impôt sur la part de son revenu qui excédait
son traitement et sur sa fortune dans les limites généralement fixées
à la souveraineté fiscale fédérale et cantonale. Au-delà de certaines
sommes, l'impôt dû pour ces éléments imposables pouvait dépasser le
montant forfaitaire calculé conformément à l'art. 18 bis AIN. Ainsi,
dans certains cas tout au moins, la convention du 20 janvier 1930, qui
limite expressément l'immunité fiscale au traitement versé par la BRI,
aurait fait au personnel en activité une situation moins favorable que
celle dont le personnel en retraite jouirait de par la loi suisse, touchant
l'impôt pour la défense nationale tout au moins. Cela serait inadmissible.

    d) L'interprétation du terme "en Suisse" comme visant une relation
purement territoriale est confirmée par la genèse de l'art. 18 bis AIN;
la recourante le relève à juste titre.

    C'est l'art. 18 al. 3 ACC qui a institué, pour la première fois en
matière d'impôt fédéral direct, la taxation à forfait; il accordait ce
privilège aux personnes qui séjournaient en Suisse pour des raisons de
santé. Plus tard, l'art. 18 al. 3 AIN l'a accordé aux personnes qui ne
séjournaient en Suisse que "pour s'y délasser ou s'y reposer". Mais,
sous l'empire de l'une et l'autre de ces deux dispositions légales,
on exigeait seulement de l'étranger, pour reconnaître à son séjour un
but justifiant l'imposition à forfait, la preuve qu'il n'exerçait point
et n'avait jamais exercé d'activité lucrative en Suisse. Cette pratique
était fondée, pour la contribution fédérale de crise, sur l'art. 1er
al. 2 de l'ordonnance du 11 avril 1934 et, pour l'impôt pour la défense
nationale, sur les art. 1er al. 2 des ordonnances successives des
17 avril 1941 et 4 janvier 1943. Le Tribunal fédéral l'a expressément
sanctionnée (Archives de droit fiscal suisse, t. 14, p. 64 et t. 17,
p. 221). L'absence de toute activité lucrative en Suisse était donc
considérée comme une preuve suffisante que l'étranger séjournait sur le
territoire national aux fins soit de se soigner, soit de se reposer ou
de se délasser; jamais on n'a distingué entre les activités lucratives
selon qu'elles mettaient à contribution l'économie suisse ou lui restaient
étrangères. Toute espèce d'activité lucrative exercée sur le territoire
national excluait l'imposition forfaitaire.

    L'art. 18 bis AIN, actuellement en vigueur, a modifié sur plusieurs
points le régime de cette imposition et il a fait passer, des règles
d'exécution à l'arrêté lui-même, la condition de l'absence d'activité
lucrative en Suisse. Cependant, rien ne permet de croire que, par cette
modification, le législateur ait voulu non pas consacrer purement et
simplement la pratique antérieure, mais étendre le privilège fiscal
en y admettant les étrangers qui exercent ou ont exercé une activité
lucrative sur le territoire national lorsque cette activité ne concerne
pas l'économie suisse (PERRET, Kommentar zur eidgenössischen Wehrsteur
1951-1954, p. 32 ss.).

    Pour instituer l'imposition à forfait, le législateur fédéral s'est
sans doute inspiré de la loi vaudoise (art. 12 de la loi vaudoise d'impôt
du 24 janvier 1923). Mais il n'en reste pas moins que si cette loi, sur
le point litigieux, prévoyait une autre solution que l'arrêté fédéral,
on n'en saurait tenir compte dans l'interprétation de celui-ci.

Erwägung 2

    2.- Il est vrai qu'en introduisant le système de l'imposition
à forfait, le législateur fédéral a aussi pris en considération les
intérêts de l'hôtellerie et du tourisme. Mais cette intention ne permet
pas d'admettre l'interprétation adoptée par la Commission vaudoise de
recours, qui ne trouve d'appui ni dans le texte, ni dans sa genèse,
bien au contraire.

    Ainsi que le conseil de l'intimé l'a constaté, selon l'art. 18 bis
AIN, le système de l'imposition à forfait tend à procurer aux étrangers un
allégement fiscal à condition que le revenu dont ils vivent en Suisse n'ait
pas été acquis en Suisse et que leur fortune ne soit pas placée dans ce
pays. Toutefois, même si ces conditions mettent en jeu un rattachement non
seulement territorial, mais aussi économique à la Suisse, il ne s'ensuit
pas encore, comme l'admet l'intimé, que ce rattachement économique doive
aussi exister dans le cas de l'activité lucrative. Le législateur pouvait,
sans se mettre en contradiction avec lui-même, en décider autrement, ce
qu'il a fait, comme on l'a montré plus haut. Cela était d'autant plus
légitime que si l'étranger était fondé à se réclamer de l'art. 18 bis
AIN dès lors que son activité lucrative, même exercée sur territoire
suisse, n'était pas liée à l'économie du pays, de nombreuses personnes
bénéficieraient du privilège, auxquelles le législateur n'a certainement
pas voulu l'étendre. L'Administration cite justement, à cet égard, par
exemple le personnel des sociétés dont le siège ou un établissement se
trouve en Suisse et qui ont pour but exclusif de contrôler l'activité
industrielle ou commerciale des entreprises du groupe ou des agents à
l'étranger, le personnel de toutes les organisations internationales,
même privées. L'imposition à forfait devrait du reste être accordée au
personnel en activité aussi bien que mis au bénéfice d'une retraite.

Erwägung 3

    3.- On ne saurait rien conclure non plus de la situation spéciale,
ni des privilèges dont jouit la BRI de par la convention du 20 janvier
1930. Selon le message du Conseil fédéral (précité), ladite convention,
qui énumère limitativement les avantages concédés par la Suisse, ne prévoit
aucune exonération des pensions de retraite du personnel de la banque.

    Au surplus, on ne saurait admettre avec l'intimé que l'activité de
la BRI soit sans liens avec l'économie suisse et ne s'exerce que dans le
domaine international. Selon les art. 22 et 23 de ses statuts et pour le
genre d'affaires qu'elle est autorisée à conclure, la BRI a le droit de
traiter non seulement avec des banques centrales, mais encore avec toutes
autres banques, banquiers, sociétés et avec des personnes privées. Elle
use effectivement de cette faculté.

Erwägung 4

    4.- Enfin, Roncagli ne saurait faire état des assurances que lui
aurait données l'autorité cantonale, dans la mesure où elles n'étaient pas
conformes à la loi. L'autorité fiscale n'a pas le pouvoir de consentir à
des contribuables des avantages que le droit applicable ne leur accorde
pas.

Erwägung 5

    5.- Roncagli n'ayant pas droit au privilège accordé par l'art. 18
bis AIN, il est nécessaire de renvoyer la cause à l'autorité cantonale,
afin qu'elle procède à la taxation ordinaire.

Entscheid:

Par ces motifs, le Tribunal fédéral

    Admet le recours, annule la décision attaquée, renvoie la cause à la
Commission vaudoise de recours en matière d'impôt pour nouvelle décision.