Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 87 I 295



87 I 295

49. Extrait de l'arrêt du 12 mai 1961 dans la cause

    X. SA contre Administration fédérale des contributions.  Regeste

    Art. 5 Abs. 2 CG, Art. 21 Abs. 2 StG.

    Verkauf eines Aktienmantels: Couponabgabe auf dem
Liquidationsüberschuss und Emissionsabgabe auf der Kapitaleinbringung. Ein
solcher Verkauf kann auch dann vorliegen, wenn die Aktiengesellschaft
gewisse Werte auf der Aktivseite der Bilanz behält.

Sachverhalt

                        Résumé des faits:

    A.- La société anonyme X. (en abrégé: la Société) fondée, le 25 mai
1950 avec un capital-actions de 50 000 fr., porté à 100 000 fr. le 16 mai
1953, a pour but l'administration et la gestion de toutes valeurs, de tous
investissements et participations à d'autres entreprises. Depuis le 30
décembre 1952, la société anonyme Y. a détenu la totalité des actions. A
partir de 1951, l'activité de X. SA s'était bornée à la gestion d'un
portefeuille d'actions d'une société française. Le 1er janvier 1953,
elle en possédait 12 000, portées en compte pour 1927 234 fr. 70; elle
en vendit 9000 le 2 mars 1953 et 3000 le 17 octobre suivant.

    Le 19 octobre 1953, Y. SA vendit toutes les actions de X. SA à la
société anonyme Z. pour le prix de 383 498 fr. 50 c. Le 28 octobre suivant,
de nouvelles personnes furent désignées comme organes de X. SA M. devint
administrateur. Si un bilan de la Société avait été alors établi, il se
serait présenté comme il suit:

    Actif:

    Passif:

    Créanciers divers

    Capital-actions 100 000.--

    "A" 350 000.--

    Intérêts dus 1 527.65

    Intérêts échus 4 156.25

    Réserve légale 8 915.--

    Banque L. 61 598.15

    Solde P. P. 305 311.75

    415 754.40

    415 754.40

    Le 20 octobre 1953, soit le lendemain de la vente des actions, le
compte Créanciers divers "A" et les intérêts échus furent intégralement
remboursés à la Société.

    B.- Vu ces faits, l'Administration fédérale des contributions (en
abrégé: l'Administration), considérant que, le 19 octobre 1953, Y. SA
avait vendu à Z. SA le cadre d'actions de la Société qui était alors
effectivement liquidée et abandonnée par son actionnaire, mit à la charge
de celle-ci:

    a)  le droit de timbre sur les coupons de 5% et

    l'impôt anticipé de 25% sur l'excédent de

    liquidation de 314 226 fr. 75.        Fr. 94 268.05

    b)  le droit de timbre d'émission de 2% sur l'ap-

    port de capital de 414 226 fr. 75.    "  8 284.50

    La Société forma une réclamation contre cette décision. Elle demandait
l'annulation totale de la taxation prémentionnée. Elle contestait que
son activité eût cessé avant l'achat de ses actions par Z. SA

    Le 28 mars 1960, l'Administration rejeta la réclamation; elle confirma
la taxation du bénéfice de liquidation au titre du droit de timbre sur
les coupons et de l'impôt anticipé, ainsi que la taxation, au titre du
timbre d'émission, de l'apport de capital.

    C.- Contre cette décision, la Société a formé un recours de droit
administratif. Elle conclut à l'annulation de la décision entreprise
en ce qui concerne le droit de timbre d'émission de 2% sur l'apport en
capital de 414 226 fr. 75. En revanche, elle précise qu'elle n'entend
pas recourir "contre la partie de la décision... qui la condamne à payer
la somme de 94 268 fr. 05 en tant que droit de timbre sur les coupons"
(imposition de l'excédent de liquidation de 314 226 fr. 75).

    D.- L'Administration conclut au rejet du recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                       Extrait des motifs:

Erwägung 1

    1.- Jusqu'à la vente de ses actions par Y. SA à Z. SA le 19 octobre
1953, la Société, du point de vue de la forme juridique, n'a pas été
dissoute (art. 736 CO); elle n'est pas non plus entrée en liquidation
(art. 738 CO); enfin son inscription au registre du commerce a subsisté
(art. 746 CO). Néanmoins, considérant que, dans la réalité économique, la
liquidation avait eu lieu, que la raison sociale aurait dû s'éteindre par
radiation au registre du commerce, qu'ainsi la vente des actions à Z. SA
n'avait réalisé que le transfert du seul cadre juridique de la Société,
vidé de sa substance économique, l'Administration a, d'une part, frappé
du droit de timbre sur les coupons le bénéfice de liquidation réalisé
par les actionnaires selon le bilan du 18/19 octobre 1953, établi par
elle (solde du compte de pertes et profits, plus réserve légale); elle a,
d'autre part, prélevé le droit de timbre d'émission sur le capital apporté
par les nouveaux actionnaires.

    a) La recourante reconnaît expressément que la première de ces
impositions est justifiée; les anciens actionnaires (Y. SA), dit-elle,
sont d'accord de payer le montant réclamé à ce titre. Ainsi, elle admet
que, du point de vue économique, elle avait été liquidée, que seul son
cadre juridique subsistait, lequel avait été monnayé par la vente des
actions et que, du point de vue du timbre sur les coupons tout au moins,
cette réalité économique devait l'emporter sur l'aspect juridique de
l'opération. C'est à juste titre.

    Les dispositions qui régissent le droit de timbre sur les coupons
ne prévoient pas expressément ce cas. Mais le Tribunal fédéral a jugé
(RO 80 I 34, consid. 3) que, lorsque les actions d'une société anonyme
non encore dissoute, mais économiquement liquidée et abandonnée par les
participants, sont vendues, l'art. 5 al. 2 LC s'applique s'il apparaît
d'une part que la forme juridique (vente des titres) est insolite et,
d'autre part, qu'elle a été choisie abusivement et exclusivement aux fins
d'éluder une imposition qui aurait eu lieu dans le cas où l'on aurait
adopté la forme juridique adéquate.

    Ces conditions sont réalisées en l'espèce. Selon le bilan au 18/19
octobre 1953, établi par l'Administration, la Société était entièrement
liquidée. Sans doute restait-il encore trois articles à l'actif, qui
correspondaient, selon le passif, au capital social, aux intérêts dus,
à la réserve légale et au solde du compte des pertes et profits. Mais
le Tribunal fédéral a jugé que, même s'il subsiste certains articles
à l'actif, une société peut néanmoins être économiquement vidée de sa
substance lorsqu'il s'agit de créan ces liquides, telles que des avoirs
en banque, ou d'argent comptant (RO 80 I 32). La créance sur la Banque
L. était liquide. Quant à l'article "Créanciers divers A", il a été payé,
le lendemain de la vente des titres déjà, par la banque prénommée, ce
qui avait manifestement été convenu lors de ladite vente. La Société
n'avait du reste plus d'activité économique, elle était abandonnée par
ses actionnaires, qui voulaient s'en défaire, ce que prouve la vente des
actions, immédiatement suivie du remplacement des personnes désignées
comme organes. Dans de telles circonstances, la vente apparaît insolite;
elle ne pouvait tendre qu'à éluder les impôts nécessairement prélevés en
cas de dissolution d'une société anonyme et de fondation d'une société
nouvelle. La forme juridique normale eût été la dissolution de la Société,
suivie de sa radiation au registre du commerce.

    b) La vente d'un cadre d'actions entraîne non seulement
l'assujettissement au droit de timbre sur les coupons du bénéfice de
liquidation, mais encore, de par l'art. 21 al. 2 LT, la perception du
droit de timbre d'émission "sur l'apport de capital". La recourante le
conteste, en l'espèce, par l'argumentation suivante: Le fisc a imposé,
au titre du bénéfice de liquidation, et a frappé à la fois du droit
de timbre sur les coupons et de l'impôt anticipé 314 226 fr. 75 c.,
c'est-à-dire la somme de la réserve légale et des soldes reportés du
compte de pertes et profits, considérant qu'il y avait eu, dans cette
mesure, distribution aux actionnaires. Il a, de plus, imposé la même somme,
augmentée du montant du capital social (100 000 fr.) au titre de l'apport
de capital, la frappant une seconde fois, non plus du droit de timbre sur
les coupons et de l'impôt anticipé, mais du droit de timbre d'émission. Or,
si les 314 226 fr. 75 ont été distribués aux actionnaires, ils ne peuvent
plus se trouver dans la fortune de la Société et y être soumis au droit
de timbre d'émission comme apport en capital. L'Administration s'est
ainsi contredite: ou bien elle aurait dû prélever uniquement le timbre
sur les coupons avec l'impôt anticipé et s'arrêter là, ou bien frapper
du droit de timbre d'émission l'apport en capital, considérant que la
Société continuait et que les autres prestations n'étaient soumises,
du point de vue du droit fédéral, qu'à l'impôt pour la défense nationale.

    La recourante se trompe; la solution adoptée par l'Administration
n'est nullement contradictoire. Lors de la vente d'un cadre d'actions,
si, du point de vue comptable aussi, la société est entièrement liquidée,
c'est-à-dire s'il ne lui reste plus aucun actif, elle a, après paiement des
dettes, fait bénéficier ses anciens actionnaires de tout le solde de son
actif et il ne lui reste plus rien; les nouveaux actionnaires sont alors
forcés de faire eux-mêmes des versements pour reconstituer la fortune
sociale et remplir la pure forme juridique acquise par eux. C'est le cas
le plus typique. Mais lorsque, en général pour masquer sa liquidation, la
société conserve quelque actif liquide, les nouveaux actionnaires en paient
la valeur aux anciens pour autant que le prix de vente des titres tient
compte de cette valeur. Par ce détour, le bénéfice de liquidation peut
parvenir partiellement ou totalement aux ayants droit sans que la société
en soit grevée. Ainsi l'actif social liquide, acquis à prix d'argent par
les nouveaux actionnaires, leur permet de diminuer d'autant l'apport
de capital qu'ils doivent faire pour remplir la forme sociale. Dans
cette mesure, leur versement aux anciens actionnaires tient donc lieu
d'apport social. La fortune sociale qu'ils acquièrent doit dès lors leur
être comptée à titre d'apport de capital. Comme dans le cas typique de la
société sans aucun actif, il existera donc deux objets fiscaux distincts:
d'une part le bénéfice de liquidation qui, s'il n'a pas été déboursé
par la société, l'a été par les acquéreurs du cadre d'actions et paie,
on l'a montré, le droit de timbre sur les coupons avec l'impôt anticipé;
d'autre part, l'apport de capital qui peut être, en tout ou en partie,
constitué par l'actif cédé aux nouveaux actionnaires et paie le droit de
timbre d'émission de par l'art. 21 al. 1 LT.

    Tel est le cas en l'espèce. Le bénéfice de liquidation, soit
314 226 fr. 75, somme constituée par la réserve légale et le report
du compte de pertes et profits, n'a pas été déboursé par la Société,
mais lui est resté sous forme de comptes liquides, d'un montant du reste
supérieur. C'est l'acquéreur du cadre juridique qui l'a versé à l'ancienne
actionnaire. Il a donc été payé et est soumis au droit de timbre sur les
coupons, ainsi qu'à l'impôt anticipé, comme s'il avait été prélevé sur
l'actif social. De plus, la nouvelle actionnaire a reçu, en échange du
prix payé à l'ancienne, non seulement le cadre d'actions, mais encore un
certain actif social liquide, à savoir 414 226 fr. 75, qui sont frappés
du droit de timbre d'émission conformément à l'art. 21 al. 1 LT, parce
qu'il s'agit d'un apport de capital fait à la Société, réputée nouvelle;
peu importe que la nouvelle actionnaire ait versé l'argent directement à
la Société ou ait payé l'ancienne pour qu'elle abandonne un actif social
correspondant. Il est vrai que, dans l'opération considérée, le montant
du bénéfice en capital est frappé une fois du droit de timbre sur les
coupons et de l'impôt anticipé en tant que l'ancienne actionnaire l'a
touché de la nouvelle et une autre fois du timbre d'émission en tant
que les parties à la vente du cadre d'actions ont laissé à la Société un
actif correspondant. Mais, contrairement à ce que pense la recourante,
il n'y a rien là de contradictoire: Dès lors qu'Y. SA, venderesse, avait
reçu le bénéfice de liquidation, fût-ce par un versement de Z. SA, ce
bénéfice était imposable comme tel. Il l'était en même temps comme apport
de capital dans la mesure où les parties avaient abandonné à la Société,
réputée nouvelle, un actif social qui aurait permis de le payer à Y.
SA C'est seulement si elles avaient prélevé sur l'actif social la somme
correspondant au bénéfice de liquidation que cette seconde imposition
n'aurait pas eu lieu. Mais il n'en a pas été ainsi; Y. SA a touché
le bénéfice de liquidation et la Société a été enrichie d'un apport en
capital correspondant. L'imposition cumulée dont se plaint la recourante
n'existe donc pas.