Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 87 I 191



87 I 191

31. Extrait de l'arrêt du 12 juillet 1961 dans la cause X. contre Genève,
Cour de justice. Regeste

    Vollstreckung ausländischer Urteile.

    Weder Art. 144 ZGB, der keine zur öffentlichen Ordnung im Sinne von
Art. 17 Ziff. 3 des schweizerisch-französischen Gerichtsstandsvertrages
von 1869 gehörende Vorschrift enthält, noch das schweizerische-italienische
Abkommen vom 3. Januar 1933 über die Anerkennung und Vollstreckung
gerichtlicher Entscheidungen noch der schweizerisch-italienische
Niederlassungs- und Konsularvertrag vom 22. Juli 1868 stehen der
Vollstreckung eines Urteils in der Schweiz entgegen, das in Frankreich
im Rahmen eines Ehescheidungsprozesses ergangen ist und einen in
Genf wohnhaften italienischen Staatsangehörigen zur Leistung eines
Unterhaltsbeitrages an seine die französische Staatsangehörigkeit
besitzende Ehefrau verpflichtet.

Sachverhalt

    A.- Les époux X., qui sont en instance de divorce, sont domiciliés
à Genève. Ils ont deux enfants, encore mineurs. Le mari est italien,
la femme est française. Leur procédure de divorce, introduite par
l'épouse, se déroule en France, devant le Tribunal de grande instance
de Thonon-les-Bains. Le 11 mars 1960, ce tribunal rendit un jugement
préparatoire, confirmant une ordonnance de non-conciliation de son
président, du 15 janvier 1960, et par lequel il autorisa les conjoints
à vivre séparés, confia la garde des enfants à la mère et astreignit le
père au paiement d'une pension mensuelle.

    B.- Le 18 novembre 1960, dame X. fit notifier à son mari un
commandement de payer pour la pension arriérée au 30 novembre 1960
et pour les allocations familiales de septembre et octobre 1960. Sieur
X. fit opposition à cette poursuite. Le 23 janvier 1961, le Tribunal de
première instance du canton de Genève prononça la mainlevée définitive
pour la totalité de la somme réclamée. Le 21 février 1961, la Cour de
justice de Genève, statuant sur appel de sieur X., réforma ce prononcé
en ce sens qu'elle n'accorda la mainlevée définitive qu'à concurrence
d'une partie du montant en poursuite.

    C.- Agissant par la voie du recours de droit public, sieur X. requiert
le Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt de la Cour de justice. Invoquant
sa qualité de ressortissant italien, il conteste à la Cour cantonale
le pouvoir d'ordonner l'exécution en Suisse d'un jugement français
le concernant; il lui reproche d'avoir violé les art. 4, 58, 59 Cst.,
la convention d'établissement et consulaire du 22 juillet 1868 entre
la Suisse et l'Italie, la convention du 3 janvier 1933 entre les mêmes
pays sur la reconnaissance et l'exécution de décisions judiciaires et
l'art. 144 CC qu'il considère comme une règle d'ordre public.

    La Cour de justice et dame X. concluent au rejet du recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- En vertu de l'art. 144 CC, le juge compétent pour statuer sur une
action en divorce est celui du domicile de la partie demanderesse. Le
recourant soutient que cette disposition est une règle d'ordre public,
applicable aux étrangers domiciliés en Suisse. Il en déduit que, si,
en sa qualité de ressortissante française, l'intimée pouvait obtenir un
jugement en France, ce jugement n'est cependant pas exécutoire en Suisse.

    L'exception d'ordre public ainsi soulevée par le recourant doit
être examinée dans le cadre de la convention franco-suisse de 1869
puisque le jugement, à l'exécution duquel elle est opposée devant les
tribunaux suisses, a été rendu en France. L'art. 17 al. 1 ch. 3 de cette
convention permet à l'autorité saisie de la demande d'exécution de rejeter
celle-ci lorsque "les intérêts de l'ordre public du pays où l'exécution
est demandée s'opposent à ce que la décision de la juridiction étrangère
y reçoive son exécution". Comme l'a jugé le Tribunal fédéral à propos
précisément de cette disposition (RO 81 I 143; cf. aussi 84 I 121 ss.),
la notion d'incompatibilité avec l'ordre public suisse doit recevoir,
en matière d'exécution de jugements étrangers, une interprétation plus
étroite que lorsqu'il s'agit de l'application directe de la loi étrangère
par le juge suisse. L'ordre public suisse s'oppose à l'exécution d'un
jugement étranger lorsque ce jugement va, d'une manière intolérable,
à l'encontre du sentiment du droit, tel qu'il existe généralement en
Suisse, et viole les règles fondamentales de l'ordre juridique suisse.

    L'art. 144 CC ne relève pas de l'ordre public suissc, au sens qui
vient d'être précisé. Le fait qu'en droit interne il a la portée d'une
règle impérative n'est pas déterminant (RO 84 I 124). Ce qui est décisif,
c'est qu'il ne constitue pas une de ces règles fondamentales de l'ordre
juridique suisse à l'encontre de laquelle il serait impossible d'aller
sans heurter le sentiment du droit en Suisse. En effet, il nc s'oppose
ni à ce que l'action en divorce d'un Suisse domicilié à l'étranger
soit plaidée en Suisse (art. 7 g LRDC; RO 84 II 469), ni à ce qu'un
époux français domicilié en Suisse décline la compétence des tribunaux
suisses pour connaître de son divorce (art. 7 h LRDC; RO 79 II 7; note
FLATTET/SECRÉTAN, JdT 1954 I 333), ni surtout à ce qu'un jugement rendu à
l'étranger et prononçant 1c divorce d'étrangers domiciliés en Suisse soit
exécuté en Suisse (RO 62 II 265; SCHNITZER, Internationales Privatrecht,
4e éd., vol. II, p. 906). L'exception d'ordre public tirée de l'art. 144
CC ne saurait dès lors être retenue.

Erwägung 2

    2.- Se fondant sur sa nationalité italienne, le recourant voudrait
appliquer en l'espèce la convention du 3 janvier 1933 entre la Suisse et
l'Italie sur la reconnaissance et l'exécution de décisions judiciaires.
Toutefois, ce traité - cela ressort de son article premier - ne vise que
les jugements rendus en Suisse et en Italie. Il ne peut donc être invoqué
lors de l'exécution d'un jugement prononcé en France. D'ailleurs, il ne
fixe pas de règles de compétence judiciairc (RO 84 II 63).

    Le recourant entend aussi tirer argument de la convention
d'établissement et consulaire du 22 juillet 1868 entre la Suisse et
l'Italie, dont l'art. 1er al. 1 dispose notamment que "les Italiens
seront reçus et traités dans chaque canton de la Confédération suisse,
relativement à leurs personnes et à leurs propriétés, sur le même pied et
de la même manière ... que les ressortissants des autres cantons". Il
en déduit qu'en sa qualité d'Italien, il peut, comme un Suisse, opposer
à l'exécution du jugement en cause la règle d'ordre public prévue par
l'art. 144 CC. Cette argumentation ne résiste pas à l'examen. D'une part,
elle est basé sur l'idée erronée que l'art. 144 CC est une règle d'ordre
public (cf. consid. 1 ci-dessus). Elle suppose d'autre part que l'égalité
de traitement consacrée par la convention a pour conséquence de soumettre
le citoyen italien domicilié en Suisse au même droit international privé
que le ressortissant suisse. Or, tant en Suisse qu'en Italie, le droit
international privé, spécialement en matière de divorce, est fondé sur
la discrimination des nationalités (cf. RO 69 II 342).

Entscheid:

Par ces motifs, le Tribunal fédéral

    rejette le recours.