Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 85 I 253



85 I 253

39. Extrait de l'arrêt du 18 septembre 1959 dans la cause Société
immobilière X. contre Commission cantonale de recours du canton de Genève.
Regeste

    Wehrsteuer.

    Besteuerung des Reingewinns einer Aktiengesellschaft, welche bezweckt,
ein Wohnhaus zu errichten und die Wohnungen an ihre Aktionäre zu vermieten.

Sachverhalt

    A.- La Société X. SA (en abrégé: la Société) a été fondée en 1948. Elle
a pour but l'acquisition d'une parcelle de terrain, l'édification, sur
ce terrain, d'un immeuble locatif, l'administration et l'exploitation
de cet immeuble, sa vente, son échange et en général toutes opérations
immobilières, financières qui s'y rattachent, à l'exclusion du commerce
d'immeubles.

    Le bâtiment a été construit. Les locataires sont liés à la Société
par trois conventions: Premièrement, la Société vend à chaque occupant un
certain nombre de ses actions, qui sont nominatives et incessibles, sauf
consentement de la Société, consentement subordonné à la condition que le
cédant remette toutes ses actions à un seul et même cessionnaire. De plus,
chaque actionnaire doit consentir à la Société un prêt chirographaire
pour une durée indéterminée, productif d'un intérêt de 5% et remboursable
moyennant l'approbation des 9/10 de l'ensemble des actionnaires. A la
qualité de créancier est attaché le droit de prendre à bail un appartement
dans la maison dont la Société est propriétaire. Enfin le locataire signe
un bail à loyer conclu en principe pour une durée indéterminée sous réserve
de résiliation ou de dénonciation dans certains cas, et par lequel le
locataire s'engage non seulement à supporter les charges de l'immeuble
pour une part proportionnelle à sa créance chirographaire mais encore à
verser une provision trimestrielle en garantie de laquelle il remet ses
actions en nantissement à la propriétaire. Les actionnaires-locataires
ne touchent pas de dividende en espèces.

    B.- La déclaration de la Société relative à la 7e période de l'impôt
pour la défense nationale (années fiscales 1953 et 1954, années de calcul
1951 et 1952) ne fait apparaître aucun bénéfice, pas plus du reste que
la comptabilité. Mais l'autorité genevoise de taxation et, après elle,
la Commission cantonale de recours (en abrégé: la Commission), qui s'est
prononcée le 24 juin 1958, ont considéré comme bénéfice imposable,
c'est-à-dire comme une prestation de la Société à ses actionnaires,
prestation non autorisée par l'usage commercial, la différence entre le
montant des loyers qu'un propriétaire pourrait normalement retirer de la
location des appartements et les frais qui lui incomberaient dans ce cas.

    C.- La Société a formé un recours de droit administratif. Ses
conclusions - implicites - tendent à faire constater qu'elle n'a réalisé
aucun bénéfice imposable.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- .....

Erwägung 2

    2.- La recourante allègue tout d'abord, en se fondant sur sa
comptabilité produite, qu'elle ne réalise aucun bénéfice quelconque. Il
est vrai que, selon l'art. 49 al. 1 lit. a AIN, le bénéfice imposable
se calcule à partir du compte de pertes et profits de la personne
morale. Mais ce compte, tel que le contribuable le produit, n'est
pas toujours suffisant et décisif. Selon l'art. 49 al. 1 lit. a AIN,
il faut ajouter au solde qu'il accuse tous les prélèvements opérés
avant le calcul de ce solde et "qui ne servent pas à couvrir des frais
généraux autorisés par l'usage commercial". On y ajoutera notamment
les distributions déguisées de bénéfices aux actionnaires, quelle que
soit la forme sous laquelle elles sont faites, en particulier qu'elles
apparaissent extérieurement ou non comme des dépenses rentrant dans les
frais généraux. Il faut cependant que les prestations ainsi reprises
présentent à la fois les trois caractères suivants: premièrement, que
la Société n'ait pas reçu en retour une prestation équivalente et que le
résultat de l'exploitation en soit affecté; secondement qu'un sociétaire ou
une personne le touchant de près soit favorisé et que la prestation soit
insolite en ce sens qu'elle n'aurait pas été accordée, du moins pas dans
la même mesure, à une personne étrangère à la Société; troisièmement que
la disproportion entre la prestation accordée et celle qui a été faite en
retour ait été reconnaissable pour les organes sociaux (RO 82 I 290 ss.).

Erwägung 3

    3.- On recherchera donc en premier lieu, dans la présente espèce, si
la Société, qui accorde à ses actionnaires la jouissance d'appartements
dans l'immeuble dont elle est propriétaire, reçoit d'eux, en retour,
des prestations équivalentes. Pour ce faire, on estimera, d'une part, le
loyer des appartements au prix que la Société pourrait en retirer si elle
les louait à des tiers sans rapports particuliers avec elle, ni avec ses
actionnaires. D'autre part, on comptera, dans les prestations fournies en
retour par les actionnaires, tous les frais dont ils assument la charge
et qui incomberaient à la Société si elle avait traité avec des tiers;
peu importe que, d'après les conventions passées en l'espèce, la Société
se fasse rembourser lesdits frais par les actionnaires ou que ceux-ci
les assument pour leur propre compte.

    4, 5, 6 et 7. - .....

Erwägung 8

    8.- Dans le calcul des prestations mises, du fait de leur situation
spéciale, à la charge des actionnaires-locataires, la recourante
demande aussi que l'on ajoute une somme forfaitaire moyenne pour les
grosses réparations et réfections, ainsi que pour le remplacement de
l'appareillage, qui deviendront nécessaires après un usage plus ou moins
prolongé. Cette prétention est justifiée en principe, parce qu'il s'agit
là de frais qui incombent normalement au bailleur et dont les locataires
assument la charge en l'espèce. Ce sont donc bien des prestations fournies
par les actionnaires à la Société (v. ci-dessus, consid. 3).

    On ne saurait objecter, comme le fait l'Administration, que la
périodicité de l'impôt s'oppose à la constitution de réserves pour des
frais généraux futurs. Car il ne s'agit pas, en l'espèce, de reprendre,
au titre du bénéfice net, tel versement aux réserves, opéré "avant le
calcul du solde du compte de profits et pertes" (art. 49 al. 1 lit. a
AIN), mais de savoir quelles prestations les actionnaires fournissent à la
Société en retour du droit d'usage (art. 253 CO) qu'elle leur confère sur
ses locaux. On n'en peut tenir compte que par une répartition annuelle
qui n'a rien de commun avec la constitution successive de réserves. On ne
peut pas non plus tirer argument du fait que, selon la jurisprudence du
Tribunal fédéral lui-même, la "valeur locative" d'un immeuble (art. 21
al. 1 lit. b AIN) est égale à la somme que le contribuable devrait
verser comme loyer d'un objet identique et n'est pas diminuée par les
frais d'entretien, même considérables, qui incombent au propriétaire. En
effet, il n'est pas question, en l'occurrence, de faire aucun abattement
sur la valeur locative, mais de comparer cette valeur aux prestations
que les locataires fournissent, comme tels, à la Société. Enfin, les
avantages particuliers que l'actionnaire-locataire retire de sa situation
juridique par rapport à la Société ne justifient pas que l'on néglige,
dans le compte de ses prestations, les frais qui lui incomberont à
longue échéance. Ces avantages consistent dans la stabilité du bail, le
rendement de la créance chirographaire, et la liberté dans les aménagements
intérieurs. Mais il faut leur opposer des inconvénients de même origine:
immobilisation de capital, les titres étant remis en garantie à la Société,
quasi impossibilité d'obtenir le remboursement et surtout de céder ses
droits à des tiers. On ne saurait affirmer que, dans cette situation,
le côté positif l'emporte sur le côté négatif.

    On a montré plus haut que, parmi les prestations des locataires, on
ne peut tenir compte des grosses réparations et réfections, ainsi que du
remplacement de l'appareillage que par une répartition annuelle. Cette
répartition nécessite une estimation de la fréquence des travaux visés
et de leur coût. Ces points ont été soumis à l'expert.

    Il est certain que le vieillissement de l'immeuble rend nécessaires
après un certain temps les réparations et remplacements énumérés
plus haut. Le coût en sera d'autant plus considérable qu'il s'agit,
en l'espèce, d'un bâtiment pourvu d'une machinerie et d'installations
dont la valeur est importante par rapport à la valeur totale de
l'immeuble. Cette particularité augmente les frais d'entretien et accélère
le vieillissement. Le Tribunal fédéral n'a aucune raison de révoquer en
doute les chiffres donnés par l'expert, que ni l'Administration, ni la
Commission ne contestent.

Erwägung 9

    9.- ..... (La valeur locative des appartements donnés à bail aux
locataires créanciers est supérieure à celle des prestations qu'ils
fournissent à la Société.)

    L'excédent représente une prestation gratuite que la Société a faite
à ses actionnaires et qu'elle n'aurait manifestement pas consentie à
n'importe quels tiers. Rien ne permet, enfin, de croire qu'elle n'ait
pas été reconnaissable pour les locataires comme un avantage que leur
valait leur participation. C'est pourquoi elle constitue une distribution
déguisée de bénéfices et elle est imposable de par l'art. 49 al. 1 lit. b
AIN selon la jurisprudence rappelée plus haut. Point n'est besoin que
cette distribution ait eu lieu en vue d'éluder l'impôt.